Délégué départemental PDCI de Divo 1 et Coordonnateur du RHDP du même département, le ministre Zakpa Komenan bat la campagne du Président Henri Konan Bédié sans tambour ni trompette. Pour lui, la victoire de son candidat passe par la maîtrise du terrain et le corps à corps. Mais il ne manque pas de dévoiler les grandes faiblesses de ses adversaires du FPI et du candidat Laurent Gbagbo. Interview.
Professeur, comment se porte le Pdci à Divo ?
Vous savez, la politique c’est le terrain. C’est l’occupation du terrain dans ses coins et recoins. C’est donc la maîtrise du terrain qui fait la politique. De ce point de vue, le Pdci se porte bien. Nos sections sont au travail dans la rigueur mais aussi dans la vérité. Nos comités de base que nous avons renouvellés travaillent effectivement sur le terrain. Et je voudrais rendre hommage à mon secrétaire permanent, Félix qui gère la délégation au quotidien. Pour l’heure nous tournons sans camera puisque nous privilégions le corps à corps.
Vous avez reçu la feuille de route pour la campagne du président Bédié et la date de la présidentielle est fixée au 31 octobre prochain. Quelle analyse en faites vous ?
Bien sûr, c’est la feuille de route telle qu’elle a été élaborée par les Instances du parti sous la supervision du Secrétaire général, le professeur Alphonse Djédjé Mady et sous l’autorité du président du parti qui est donc notre candidat. C’est cette feuille de route que nous appliquons sur le terrain. Mais je voudrais dire ici qu’un accent particulier est mis sur la formation. Et c’est ce que nous faisons en passant dans les campements et dans les endroits les plus réculés pour permettre à nos militants de bien voter. Parce qu’un parti politique peut faire une très bonne campagne et une bonne représentativité sur le terrain, mais si les militants ne savent pas voter c’est peine perdue. L’exemple qu’on cite, c’est celui du LPP du Ghana qui vient de perdre les élections avec 10000 voix. Alors que le même LPP est créditée de 100 000 bulletins nuls. Autrement dit, si les militants avaient su voter, le LPP serait passé. Alors, c’est ce travail que nous avons entrepris et que nous allons approfondir à la faveur de la formation que nous venons de recevoir à Gagnoa (le 14 août). Nous allons appliquer toutes les stratégies qui ont été définies. Mais nous allons privilégier le corps à corps, en travaillant en relation très étroite avec les présidents des comités de base. Parce que si chaque comité de base fonctionne correctement sous l’autorité de son président et si le président gère bien les membres de son comité, nous avons 22.500 comités de base, alors il n’y aura pas de problème. Nous ne devons pas seulement travailler à Abidjan.
Les élections c’est avant tout une bonne liste életorale. Que sa passe-t-il à Divo en ce qui concerne les radiations ?
En ce qui concerne Divo, il semble que les cas litigieux portent sur 125 dossiers. Ce qui veut dire que 125 personnes sont concernées. Mais là, il y a du flou. On ne dit pas que ces 125 personnes ne sont pas des Ivoiriens. Ce sont des questions de registre ou de date de naissance incorrecte. Donc ces cas-là, on les met de côté, pour l’instant. Cependant, le problème récent soulevé par nos adversaires, le Fpi, ils auraient déposé une liste de 8.000 noms de personnes à éjecter de la liste. Il est évident que le mode opératoire n’a pas été respecté.
Mais plus de 1300 personnes viennent d’être radiées par le tribunal de Divo. Quel est votre sentiment?
Effectivement. Mais le mode opératoire n’ayant pas été respecté, à savoir qu’il faut d’abord venir à la CEI locale pour remplir une fiche individuelle. C’est cette fiche-là qui est transmise au juge qui prend la décision avec les anotations de la CEI. Or, ces fiches n’ont pas été remplies. Ils ont commis un huissier pour aller déposer ces liste-là directement chez le juge. Et sur la base des éléments qu’on a mis à sa possession, il a donc décidé de radier près de 1300 personnes. Mais le mode opératoire n’ayant pas été respecté, à savoir que la CEI doit d’abord recevoir ces listes avec ses anotations. Cela n’a pas été fait. Les radiations n’ont donc aucun sens. Elles vont être rejetées par la CEI. Parce que le Secrétaire général de la CEI a été très clair sur ce point. Donc juridiquement, elles doivent être rejetées parce que le mode opératoire n’a pas été respecté.
Qu’en pensent vos militants?
Nous avons demandé à nos militants de rester calmes. Parce que la décision du juge ne sera pas immédiatement exécutoire. Aujourd’hui (Ndlr: hier au téléphone) personne ne s’est rendu au tribunal. Donc les choses se sont passées normalement. Les jeunes gens réunis au sein du RHDP se sont retrouvés. Ils ont simplement relevé les contradictions et ont remis leur motion de protestation au préfet.
Avec toutes ses manoeuvres, pensez-vous que la date du 31 octobre sera tenue ?
Je voudrais passer un peu sur les détails. Mais rappeller le détail qui peut être important. La Commission électorale indépendante nationale nous a dit que les élections auront lieu en octobre. Sans fixer de date précise. Le Conseil des ministres a été beaucoup plus précis en nous disant que les élections auront lieu le 31 octobre 2010. Mais, le président de la République, Laurent Gbagbo, lui-même, a déclaré que les élections auront lieu avant la fin de l’année. Et là, nous sommes un peu perplexes. Ceci dit, nous maintenons donc la date du 31 octobre. En ce qui nous concerne, nous mettrons tout en œuvre pour que cette date soit respectée. Nous serons sur le terrain, et nous ferons en sorte que ces élections se tiennent dans l’apaisement gnéral, dans la transparence, pour que la Côte d’Ivoire sorte de cette situation difficile pour tout le monde.
Cependant, on parle d’une certaine crise entre les délégués à Divo. Qu’ en est-il exactement ?
Vous savez, le président Félix Houphouët-Boigny nous l’a enseigné, les problèmes les plus difficiles, ce sont les problèmes de personnes. Mais, je pense que par rapport au parti, nous devons tout mettre en œuvre pour rechercher autant que faire se peut, l’entente. C’est ce que nous, nous faisons. Nous essayons de calmer la situation en allant vers les uns et les autres en leur disant qu’il faut aller à l’essentiel. On ne se bat pas au chevet d’une mère malade. Ce qui se passe à Divo se retrouve un peu partout dans les délégations des différents partis politiques. Alors, que chacun fasse un effort de dépassement sur lui-même. En ce qui me concerne, c’est ce que j’applique et je demande à mes militants d’en faire autant. Evitons de nous disperser.
En tant que citoyen et ancien ministre, comment jugez-vous la gestion du Fpi ?
C’est une question d’approche et d’école. Il est évident que nous autres, nous avons été initié un peu tôt. Nous avons eu la chance d’avoir autour de nous des responsables politiques et nous nous sommes mis à l’école de ceux-là. C’est depuis 1965 que je milite au Pdci aux côtés de mon oncle Assamoi. Nous avons donc appris le métier sur le tas. Nous avons été 2e rapporteur puis 1er rapporteur des réunions politiques que mon oncle organisait. Et nous sommes devenus 3e, 2e et 1er secrétaire etc. c’est ainsi que nous sommes rentrés dans la politique. Ce que je déplore aujourd’hui, c’est que parmi ceux qui sont arrivés, c’est vrai que les diplômes universitaires sont une chose, mais la politique en est une autre. Certains le disent : la politique est un métier. D’une certaine façon, c’est vrai. Parce qu’un métier s’apprend. Donc la politique s’apprend. Cependant, je dirais que la politique est plus qu’un métier. Parce que la politique, c’est une conviction. Et la politique, c’est une vision. Et faire la politique, c’est se mettre au service des autres. C’est servir les autres. Ce n’est pas asservir les autres. Et pour moi faire la politique, c’est donner, se donner.
Donner et se donner, c’est-à-dire ?
Là, il faut éviter de faire de petits calculs. Et quand on donne, il ne faut rien attendre en retour. Si certains reconnaissent vos bienfaits dites allélua. Mais n’attendez pas qu’on vous caresse toujours dans le sens du poil.
Vous avez dit que la politique s’apprend. Est-ce que la politique et la gestion d’un Etat s’apparentent ?
Comme je l’ai dit, c’est non seulement un métier, mais aussi une vision. Le métier s’apprend techniquement. Donc un homme politique, en plus d’apprendre le métier doit avoir une vision. Et c’est cette vision qui manque, malheureusement, le plus souvent. En plus, politique et morale doivent aller ensemble. Pour revenir à votre question, ce que je peux reprocher à ceux qui sont au pouvoir, c’est un peu le manque de vision. C’est aussi ce manque d’humilité. C’est vrai qu’on est nanti de diplômes. Mais un non-certifié peut souvent hélas, désagréger un agrégé. Car je dis encore que la politique, c’est la maîtrise du terrain dans ses coins et recoins. Parce que ce non-certifié connaît le terrain. Alors, la connaissance du terrain est fordamentale en politique, la maîtrise de l’environnement et des dossiers des problèmes doivent nous permettre d’avoir une vision dont je parle. Si l’on n’a pas la vision, on fait du pilotage à vue. Et les résultats sont ceux que nous voyons aujourd’hui. On devrait s’y attendre.
Voulez-vous faire un parallèle entre l’apprentissage politique et la gestion des affaires de l’Etat de l’actuel président de la République ?
Sur le plan théorique, le président actuel dit (et ce n’est pas moi qui l’invente), qu’il se bat depuis 30 ans. S’il se bat depuis 30 ans, cela veut dire qu’il sait un certain nombre de choses. Il est là, aujourd’hui, au pouvoir. Il ne se bat plus pour avoir le pouvoir. Ce qu’il lui faut à présent, c’est de le gérer. Une chose est de maîtriser les techniques mais une autre chose est de gérer un Etat. Et gérer un Etat demande un autre apprentissage. Et là, Gbagbo et son équipe ont manqué de formation pratique pour la gestion des affaires de l’Etat.
Comment n’ont-ils pas appris à gérer un Etat ?
C’est ici que le problème se pose. Parce que, effectivement, le Président Laurent Gbagbo n’a pas appris à gérer l’Etat. Pour reprendre une certaine terminologie, il faut être chef de bureau, chef de service, sous-directeur, directeur, directeur central, directeur général, président de Conseil d’administration, ministre ainsi de suite pour arriver au sommet. Alors lorsqu’on admire ce parcours, on se rend compte que le président Laurent Gabgbo n’a pas franchi les étapes comme citées. Il est effectivement devenu président sans avoir été ministre par exemple. Et cela se ressent dans la façon de gérer l’Etat, dans la façon même d’appréhender l’Etat et d’appréhender les problèmes globaux de l’Etat. Ceci dit, il a les connaissances théoriques et il a une vision. Mais une fois à ce niveau, vous avez des collaborateurs pour vous aider dans le travail. Sinon Gbagbo sait, selon sa vision, où il va. Il faut aussi des femmes et des hommes qui soient comme vous. Lorsque vous n’avez pas ces hommes, vous avez des difficultés. Parce qu’à vous seul vous ne pouvez pas tout faire. Mais si les collaborateurs n’ont pas eux aussi appris à gérer les affaires de l’Etat, il est évident que ce sera difficile. Il va saisir les problèmes dans leur globalité, mais le ‘’comment les résoudre’’ va manquer. Je prends un exemple précis. Le chef de l’Etat a dit pendant sa campagne aux paysans « donnez moi le pouvoir, je vais vous le rendre ». C’est un slogan intéressant. Et qui procède d’une vision qu’il a du monde agricole. Mais lorsque nous observons ce qui se passe sur le terrain, en ce qui concerne la filière café-cacao par exemple, il y a problème. De la même manière, lorsqu’il y avait la crise à l’université, il nous a dit qu’avec ‘’10 milliards je règle tous les problèmes de l’université’’. Aujourd’hui, il est président de la République. Est-ce qu’on peut dire qu’il n’a pas eu 10 milliards ? Il a vu les problèmes de l’université, mais techniquement, il ne peut pas les résoudre. Parce que, il n’y a pas seulement que l’université. Car l’université, ce n’est pas seulement ce que nous voyons. Donc voilà les difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Un autre exemple, si vous observez depuis 10 ans, vous remarquerez qu’il y a une forte proportion d’enseignants. On peut penser que les enseignants étant au pouvoir, à commencer par le président lui-même, tous les problèmes de l’Ecole vont devenir des problèmes faciles à résoudre. Or ce n’est pas le cas. C’est pourquoi je dis qu’il faut avoir une vision et avoir, par la même occasion, les compétences techniques et pratiques pour réaliser la vision.
Est-ce à dire que les hommes du présidnet Gbagbo sont incompétents ?
Incompétents ? On peut le dire. Mais je veux dire qu’ils ne sont pas suffisamment armés puisque, eux-mêmes sont restés à l’extérieur. Ils ont critiqué. Et comme on le dit : « La critique est aisée, mais l’art est difficile ». Ils sont restés dans l’opposition. Ils ont critiqué. Aujourd’hui, il ne s’agit plus de critiquer, mais de mettre en mouvement ce que vous pensez être juste. Or là, cela dépend du terrain et des hommes. Ils ont pensé que tout était facile. Si le président Laurent Gbagbo avait été ministre de la République par exemple, je ne dis pas que tout aurait été rose, mais je veux dire qu’il y a des erreurs qu’il aurait pu éviter.
Voulez-vous dire que si le président Gbagbo avait participé aux différents gouvernements comme son homologue sénégalais Wade, cela lui aurait servi ?
Effectivement, le président Wade a été plusieurs fois ministre d’Etat, chargé de la planification écologique. Donc, cela veut dire que ça lui donne une vision globale sur les problèmes du pays. Il l’a fait deux fois. Devenu président, je ne dis pas que tous les problèmes sénégalais sont réglés, mais il les appréhende mieux et il sait comment aborder les choses. Et on sent même qu’il sait comment aborder les choses. Et on le sent même dans sa façon de conduire les affaires de lEtat, de conduire les débats, d’échanger avec ses homologues etc. On sent qu’il y a beaucoup de mesures. Parce qu’il connaît un peu le terrain, de l’intérieur. Or de notre côté, on connaît les problèmes, mais de l’extérieur. Je dis donc qu’il faut éviter la démagogie en politique. On ne peut pas résoudre les problèmes avec des ‘’y’a qu’à’’.
Alors comment allez-vous procéder pendant la campagne ?
Je voudrais féliciter le DNC du candidat Bédié, le professeur Alphonse Djédjé Mady, Secrétaire général du Pdci. Il a mis à notre disposition des documents. Et ces documents font effectivement le point de tout. Nous avons donc des arguments basés sur du réel. En plus de cela, le Secrétaire général du Fpi, le professeur Miaka Ouréto, a été très clair. Il a dit que la prochaine campagne électorale sera facile à faire. Ce sera le bilan du Pdci contre le bilan du Fpi. Donc poiur moi, je suis heureux. Par exemple, je prendrai le bilan du Pdci en matière d’éducation et celui du Fpi et je comparerai les réalisations et les perspectives de chaque parti, en matière d’infrastructures, en matière agricole etc. On n’a pas besoin de ‘’digba’’ (Ndlr : force physique), pour battre le Fpi aux élections.
Monsieur le ministre, nous aimerions avoir votre avis, en tant qu’homme de droit, sur l’affaire Koulibaly-Tagro, dans laquelle le président de l’Assemblée nationale qui a porté des accusations graves et qui finalement a été débouté par la justice ivoirienne ?
C’est vrai que c’est une affaire interne au Fpi. Mais je voudrais quand même faire une observation. Je pense qu’à travers ce cas précis que vous évoquez, le Fpi nous donne là une leçon. Une leçon de démocratie à l’intérieur du parti. Je voudrais le relever parce que ce n’est pas facile. Ce n’est pas facile pour le président Mamadou Koulibaly, le N°3 du Fpi, de dire un certain nombre de choses qu’il a dites et qu’il croit justes. Ceci dit, il faut connaître le président Mamadou Koulibaly lui-même. J’ai dit tout à l’heure que de mon point de vue, morale et politique doivent aller ensemble. Et je pense que le président Mamadou Koulibaly est un peu de cette école. Ce qui ne doit pas être moralement acceptable ne doit pas être politiquement acceptable. Ceci dit, qu’est-ce qu’il a noté en ce qui concerne le concours d’entrée à l’école de police ? Il a dit que le ministre Tagro fait entrer les jeunes de sa tribu à l’école de police. Le président de la République a diligenté une enquête pour savoir ce qui se passe. D’après ce que nous avons lu dans les journaux, il y a effectivement 67 jeunes de la tribu du ministre Tagro qui sont entrés à l’école de police. Je ne sais pas s’ils ont passé le concours ou pas. Mais les statistiques nous disent qu’il y a 67 jeunes de sa tribu à l’école de police. Cependant, la question est de savoir combien de tribus existent en Côte d’Ivoire. Si on devait multiplier 67 par le nombre de tribus qu’il y a en Côte d’Ivoire, est-ce qu’ils pourraient tous entrer à l’école de police ? En nombre de personnes, le chiffre 67 n’est-il pas excessif pour sa seule tribu ? Donc, est-ce qu’on peut dire que le président Mamadou Koulibaly a raconté des histores ? Au fond, quand il l’a dit, on a pensé qu’il exagérait un peu. Donc la position de Koulibaly est beacuoup plus morale. En plus, lorsqu’il a appris qu’il y avait des quotataires, il se serait sans doute senti frustré de ne pas avoir de quota parce qu’il serait dioula. Cependant il a été débouté. Mais est-ce que ce qu’il a dit est entièrement faux ? Là se trouve la question.
M. le ministre, en tant que délégué Pdci de Divo, quel message avez-vous pour les militants en cette période de précampagne ?
Merci. Pour moi, il n’y a pas un jour de campagne. C’est à tout moment qu’on fait la campagne. Tous mes déplacements à Divo, presque tous les week-ends, sont des moments de campagne. Je suis sur le terrain. Chez moi dans ma délégation, j’ai décentralisé le travail. Je suis en contact quotidien, je dis bien quotidien, avec le secrétaire permanent et les secrétaires de section. Et je suis facilement accessible aux présidents des comités de base. Donc tout le monde est au travail chaque jour. Mais nous ne faisons pas la campagne par des injures parce que nous avons des arguments. On n’a pas besoin d’injures pour faire partir le Fpi du pouvoir.
Interview réalisée par Ange Nicaelle Lyrane
Professeur, comment se porte le Pdci à Divo ?
Vous savez, la politique c’est le terrain. C’est l’occupation du terrain dans ses coins et recoins. C’est donc la maîtrise du terrain qui fait la politique. De ce point de vue, le Pdci se porte bien. Nos sections sont au travail dans la rigueur mais aussi dans la vérité. Nos comités de base que nous avons renouvellés travaillent effectivement sur le terrain. Et je voudrais rendre hommage à mon secrétaire permanent, Félix qui gère la délégation au quotidien. Pour l’heure nous tournons sans camera puisque nous privilégions le corps à corps.
Vous avez reçu la feuille de route pour la campagne du président Bédié et la date de la présidentielle est fixée au 31 octobre prochain. Quelle analyse en faites vous ?
Bien sûr, c’est la feuille de route telle qu’elle a été élaborée par les Instances du parti sous la supervision du Secrétaire général, le professeur Alphonse Djédjé Mady et sous l’autorité du président du parti qui est donc notre candidat. C’est cette feuille de route que nous appliquons sur le terrain. Mais je voudrais dire ici qu’un accent particulier est mis sur la formation. Et c’est ce que nous faisons en passant dans les campements et dans les endroits les plus réculés pour permettre à nos militants de bien voter. Parce qu’un parti politique peut faire une très bonne campagne et une bonne représentativité sur le terrain, mais si les militants ne savent pas voter c’est peine perdue. L’exemple qu’on cite, c’est celui du LPP du Ghana qui vient de perdre les élections avec 10000 voix. Alors que le même LPP est créditée de 100 000 bulletins nuls. Autrement dit, si les militants avaient su voter, le LPP serait passé. Alors, c’est ce travail que nous avons entrepris et que nous allons approfondir à la faveur de la formation que nous venons de recevoir à Gagnoa (le 14 août). Nous allons appliquer toutes les stratégies qui ont été définies. Mais nous allons privilégier le corps à corps, en travaillant en relation très étroite avec les présidents des comités de base. Parce que si chaque comité de base fonctionne correctement sous l’autorité de son président et si le président gère bien les membres de son comité, nous avons 22.500 comités de base, alors il n’y aura pas de problème. Nous ne devons pas seulement travailler à Abidjan.
Les élections c’est avant tout une bonne liste életorale. Que sa passe-t-il à Divo en ce qui concerne les radiations ?
En ce qui concerne Divo, il semble que les cas litigieux portent sur 125 dossiers. Ce qui veut dire que 125 personnes sont concernées. Mais là, il y a du flou. On ne dit pas que ces 125 personnes ne sont pas des Ivoiriens. Ce sont des questions de registre ou de date de naissance incorrecte. Donc ces cas-là, on les met de côté, pour l’instant. Cependant, le problème récent soulevé par nos adversaires, le Fpi, ils auraient déposé une liste de 8.000 noms de personnes à éjecter de la liste. Il est évident que le mode opératoire n’a pas été respecté.
Mais plus de 1300 personnes viennent d’être radiées par le tribunal de Divo. Quel est votre sentiment?
Effectivement. Mais le mode opératoire n’ayant pas été respecté, à savoir qu’il faut d’abord venir à la CEI locale pour remplir une fiche individuelle. C’est cette fiche-là qui est transmise au juge qui prend la décision avec les anotations de la CEI. Or, ces fiches n’ont pas été remplies. Ils ont commis un huissier pour aller déposer ces liste-là directement chez le juge. Et sur la base des éléments qu’on a mis à sa possession, il a donc décidé de radier près de 1300 personnes. Mais le mode opératoire n’ayant pas été respecté, à savoir que la CEI doit d’abord recevoir ces listes avec ses anotations. Cela n’a pas été fait. Les radiations n’ont donc aucun sens. Elles vont être rejetées par la CEI. Parce que le Secrétaire général de la CEI a été très clair sur ce point. Donc juridiquement, elles doivent être rejetées parce que le mode opératoire n’a pas été respecté.
Qu’en pensent vos militants?
Nous avons demandé à nos militants de rester calmes. Parce que la décision du juge ne sera pas immédiatement exécutoire. Aujourd’hui (Ndlr: hier au téléphone) personne ne s’est rendu au tribunal. Donc les choses se sont passées normalement. Les jeunes gens réunis au sein du RHDP se sont retrouvés. Ils ont simplement relevé les contradictions et ont remis leur motion de protestation au préfet.
Avec toutes ses manoeuvres, pensez-vous que la date du 31 octobre sera tenue ?
Je voudrais passer un peu sur les détails. Mais rappeller le détail qui peut être important. La Commission électorale indépendante nationale nous a dit que les élections auront lieu en octobre. Sans fixer de date précise. Le Conseil des ministres a été beaucoup plus précis en nous disant que les élections auront lieu le 31 octobre 2010. Mais, le président de la République, Laurent Gbagbo, lui-même, a déclaré que les élections auront lieu avant la fin de l’année. Et là, nous sommes un peu perplexes. Ceci dit, nous maintenons donc la date du 31 octobre. En ce qui nous concerne, nous mettrons tout en œuvre pour que cette date soit respectée. Nous serons sur le terrain, et nous ferons en sorte que ces élections se tiennent dans l’apaisement gnéral, dans la transparence, pour que la Côte d’Ivoire sorte de cette situation difficile pour tout le monde.
Cependant, on parle d’une certaine crise entre les délégués à Divo. Qu’ en est-il exactement ?
Vous savez, le président Félix Houphouët-Boigny nous l’a enseigné, les problèmes les plus difficiles, ce sont les problèmes de personnes. Mais, je pense que par rapport au parti, nous devons tout mettre en œuvre pour rechercher autant que faire se peut, l’entente. C’est ce que nous, nous faisons. Nous essayons de calmer la situation en allant vers les uns et les autres en leur disant qu’il faut aller à l’essentiel. On ne se bat pas au chevet d’une mère malade. Ce qui se passe à Divo se retrouve un peu partout dans les délégations des différents partis politiques. Alors, que chacun fasse un effort de dépassement sur lui-même. En ce qui me concerne, c’est ce que j’applique et je demande à mes militants d’en faire autant. Evitons de nous disperser.
En tant que citoyen et ancien ministre, comment jugez-vous la gestion du Fpi ?
C’est une question d’approche et d’école. Il est évident que nous autres, nous avons été initié un peu tôt. Nous avons eu la chance d’avoir autour de nous des responsables politiques et nous nous sommes mis à l’école de ceux-là. C’est depuis 1965 que je milite au Pdci aux côtés de mon oncle Assamoi. Nous avons donc appris le métier sur le tas. Nous avons été 2e rapporteur puis 1er rapporteur des réunions politiques que mon oncle organisait. Et nous sommes devenus 3e, 2e et 1er secrétaire etc. c’est ainsi que nous sommes rentrés dans la politique. Ce que je déplore aujourd’hui, c’est que parmi ceux qui sont arrivés, c’est vrai que les diplômes universitaires sont une chose, mais la politique en est une autre. Certains le disent : la politique est un métier. D’une certaine façon, c’est vrai. Parce qu’un métier s’apprend. Donc la politique s’apprend. Cependant, je dirais que la politique est plus qu’un métier. Parce que la politique, c’est une conviction. Et la politique, c’est une vision. Et faire la politique, c’est se mettre au service des autres. C’est servir les autres. Ce n’est pas asservir les autres. Et pour moi faire la politique, c’est donner, se donner.
Donner et se donner, c’est-à-dire ?
Là, il faut éviter de faire de petits calculs. Et quand on donne, il ne faut rien attendre en retour. Si certains reconnaissent vos bienfaits dites allélua. Mais n’attendez pas qu’on vous caresse toujours dans le sens du poil.
Vous avez dit que la politique s’apprend. Est-ce que la politique et la gestion d’un Etat s’apparentent ?
Comme je l’ai dit, c’est non seulement un métier, mais aussi une vision. Le métier s’apprend techniquement. Donc un homme politique, en plus d’apprendre le métier doit avoir une vision. Et c’est cette vision qui manque, malheureusement, le plus souvent. En plus, politique et morale doivent aller ensemble. Pour revenir à votre question, ce que je peux reprocher à ceux qui sont au pouvoir, c’est un peu le manque de vision. C’est aussi ce manque d’humilité. C’est vrai qu’on est nanti de diplômes. Mais un non-certifié peut souvent hélas, désagréger un agrégé. Car je dis encore que la politique, c’est la maîtrise du terrain dans ses coins et recoins. Parce que ce non-certifié connaît le terrain. Alors, la connaissance du terrain est fordamentale en politique, la maîtrise de l’environnement et des dossiers des problèmes doivent nous permettre d’avoir une vision dont je parle. Si l’on n’a pas la vision, on fait du pilotage à vue. Et les résultats sont ceux que nous voyons aujourd’hui. On devrait s’y attendre.
Voulez-vous faire un parallèle entre l’apprentissage politique et la gestion des affaires de l’Etat de l’actuel président de la République ?
Sur le plan théorique, le président actuel dit (et ce n’est pas moi qui l’invente), qu’il se bat depuis 30 ans. S’il se bat depuis 30 ans, cela veut dire qu’il sait un certain nombre de choses. Il est là, aujourd’hui, au pouvoir. Il ne se bat plus pour avoir le pouvoir. Ce qu’il lui faut à présent, c’est de le gérer. Une chose est de maîtriser les techniques mais une autre chose est de gérer un Etat. Et gérer un Etat demande un autre apprentissage. Et là, Gbagbo et son équipe ont manqué de formation pratique pour la gestion des affaires de l’Etat.
Comment n’ont-ils pas appris à gérer un Etat ?
C’est ici que le problème se pose. Parce que, effectivement, le Président Laurent Gbagbo n’a pas appris à gérer l’Etat. Pour reprendre une certaine terminologie, il faut être chef de bureau, chef de service, sous-directeur, directeur, directeur central, directeur général, président de Conseil d’administration, ministre ainsi de suite pour arriver au sommet. Alors lorsqu’on admire ce parcours, on se rend compte que le président Laurent Gabgbo n’a pas franchi les étapes comme citées. Il est effectivement devenu président sans avoir été ministre par exemple. Et cela se ressent dans la façon de gérer l’Etat, dans la façon même d’appréhender l’Etat et d’appréhender les problèmes globaux de l’Etat. Ceci dit, il a les connaissances théoriques et il a une vision. Mais une fois à ce niveau, vous avez des collaborateurs pour vous aider dans le travail. Sinon Gbagbo sait, selon sa vision, où il va. Il faut aussi des femmes et des hommes qui soient comme vous. Lorsque vous n’avez pas ces hommes, vous avez des difficultés. Parce qu’à vous seul vous ne pouvez pas tout faire. Mais si les collaborateurs n’ont pas eux aussi appris à gérer les affaires de l’Etat, il est évident que ce sera difficile. Il va saisir les problèmes dans leur globalité, mais le ‘’comment les résoudre’’ va manquer. Je prends un exemple précis. Le chef de l’Etat a dit pendant sa campagne aux paysans « donnez moi le pouvoir, je vais vous le rendre ». C’est un slogan intéressant. Et qui procède d’une vision qu’il a du monde agricole. Mais lorsque nous observons ce qui se passe sur le terrain, en ce qui concerne la filière café-cacao par exemple, il y a problème. De la même manière, lorsqu’il y avait la crise à l’université, il nous a dit qu’avec ‘’10 milliards je règle tous les problèmes de l’université’’. Aujourd’hui, il est président de la République. Est-ce qu’on peut dire qu’il n’a pas eu 10 milliards ? Il a vu les problèmes de l’université, mais techniquement, il ne peut pas les résoudre. Parce que, il n’y a pas seulement que l’université. Car l’université, ce n’est pas seulement ce que nous voyons. Donc voilà les difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Un autre exemple, si vous observez depuis 10 ans, vous remarquerez qu’il y a une forte proportion d’enseignants. On peut penser que les enseignants étant au pouvoir, à commencer par le président lui-même, tous les problèmes de l’Ecole vont devenir des problèmes faciles à résoudre. Or ce n’est pas le cas. C’est pourquoi je dis qu’il faut avoir une vision et avoir, par la même occasion, les compétences techniques et pratiques pour réaliser la vision.
Est-ce à dire que les hommes du présidnet Gbagbo sont incompétents ?
Incompétents ? On peut le dire. Mais je veux dire qu’ils ne sont pas suffisamment armés puisque, eux-mêmes sont restés à l’extérieur. Ils ont critiqué. Et comme on le dit : « La critique est aisée, mais l’art est difficile ». Ils sont restés dans l’opposition. Ils ont critiqué. Aujourd’hui, il ne s’agit plus de critiquer, mais de mettre en mouvement ce que vous pensez être juste. Or là, cela dépend du terrain et des hommes. Ils ont pensé que tout était facile. Si le président Laurent Gbagbo avait été ministre de la République par exemple, je ne dis pas que tout aurait été rose, mais je veux dire qu’il y a des erreurs qu’il aurait pu éviter.
Voulez-vous dire que si le président Gbagbo avait participé aux différents gouvernements comme son homologue sénégalais Wade, cela lui aurait servi ?
Effectivement, le président Wade a été plusieurs fois ministre d’Etat, chargé de la planification écologique. Donc, cela veut dire que ça lui donne une vision globale sur les problèmes du pays. Il l’a fait deux fois. Devenu président, je ne dis pas que tous les problèmes sénégalais sont réglés, mais il les appréhende mieux et il sait comment aborder les choses. Et on sent même qu’il sait comment aborder les choses. Et on le sent même dans sa façon de conduire les affaires de lEtat, de conduire les débats, d’échanger avec ses homologues etc. On sent qu’il y a beaucoup de mesures. Parce qu’il connaît un peu le terrain, de l’intérieur. Or de notre côté, on connaît les problèmes, mais de l’extérieur. Je dis donc qu’il faut éviter la démagogie en politique. On ne peut pas résoudre les problèmes avec des ‘’y’a qu’à’’.
Alors comment allez-vous procéder pendant la campagne ?
Je voudrais féliciter le DNC du candidat Bédié, le professeur Alphonse Djédjé Mady, Secrétaire général du Pdci. Il a mis à notre disposition des documents. Et ces documents font effectivement le point de tout. Nous avons donc des arguments basés sur du réel. En plus de cela, le Secrétaire général du Fpi, le professeur Miaka Ouréto, a été très clair. Il a dit que la prochaine campagne électorale sera facile à faire. Ce sera le bilan du Pdci contre le bilan du Fpi. Donc poiur moi, je suis heureux. Par exemple, je prendrai le bilan du Pdci en matière d’éducation et celui du Fpi et je comparerai les réalisations et les perspectives de chaque parti, en matière d’infrastructures, en matière agricole etc. On n’a pas besoin de ‘’digba’’ (Ndlr : force physique), pour battre le Fpi aux élections.
Monsieur le ministre, nous aimerions avoir votre avis, en tant qu’homme de droit, sur l’affaire Koulibaly-Tagro, dans laquelle le président de l’Assemblée nationale qui a porté des accusations graves et qui finalement a été débouté par la justice ivoirienne ?
C’est vrai que c’est une affaire interne au Fpi. Mais je voudrais quand même faire une observation. Je pense qu’à travers ce cas précis que vous évoquez, le Fpi nous donne là une leçon. Une leçon de démocratie à l’intérieur du parti. Je voudrais le relever parce que ce n’est pas facile. Ce n’est pas facile pour le président Mamadou Koulibaly, le N°3 du Fpi, de dire un certain nombre de choses qu’il a dites et qu’il croit justes. Ceci dit, il faut connaître le président Mamadou Koulibaly lui-même. J’ai dit tout à l’heure que de mon point de vue, morale et politique doivent aller ensemble. Et je pense que le président Mamadou Koulibaly est un peu de cette école. Ce qui ne doit pas être moralement acceptable ne doit pas être politiquement acceptable. Ceci dit, qu’est-ce qu’il a noté en ce qui concerne le concours d’entrée à l’école de police ? Il a dit que le ministre Tagro fait entrer les jeunes de sa tribu à l’école de police. Le président de la République a diligenté une enquête pour savoir ce qui se passe. D’après ce que nous avons lu dans les journaux, il y a effectivement 67 jeunes de la tribu du ministre Tagro qui sont entrés à l’école de police. Je ne sais pas s’ils ont passé le concours ou pas. Mais les statistiques nous disent qu’il y a 67 jeunes de sa tribu à l’école de police. Cependant, la question est de savoir combien de tribus existent en Côte d’Ivoire. Si on devait multiplier 67 par le nombre de tribus qu’il y a en Côte d’Ivoire, est-ce qu’ils pourraient tous entrer à l’école de police ? En nombre de personnes, le chiffre 67 n’est-il pas excessif pour sa seule tribu ? Donc, est-ce qu’on peut dire que le président Mamadou Koulibaly a raconté des histores ? Au fond, quand il l’a dit, on a pensé qu’il exagérait un peu. Donc la position de Koulibaly est beacuoup plus morale. En plus, lorsqu’il a appris qu’il y avait des quotataires, il se serait sans doute senti frustré de ne pas avoir de quota parce qu’il serait dioula. Cependant il a été débouté. Mais est-ce que ce qu’il a dit est entièrement faux ? Là se trouve la question.
M. le ministre, en tant que délégué Pdci de Divo, quel message avez-vous pour les militants en cette période de précampagne ?
Merci. Pour moi, il n’y a pas un jour de campagne. C’est à tout moment qu’on fait la campagne. Tous mes déplacements à Divo, presque tous les week-ends, sont des moments de campagne. Je suis sur le terrain. Chez moi dans ma délégation, j’ai décentralisé le travail. Je suis en contact quotidien, je dis bien quotidien, avec le secrétaire permanent et les secrétaires de section. Et je suis facilement accessible aux présidents des comités de base. Donc tout le monde est au travail chaque jour. Mais nous ne faisons pas la campagne par des injures parce que nous avons des arguments. On n’a pas besoin d’injures pour faire partir le Fpi du pouvoir.
Interview réalisée par Ange Nicaelle Lyrane