Dans le hors série N°1 du magazine Am International du mois d’août 2010 – Les indépendances 50 ans déjà ! – le Togolais vivant en France Kossi Efoui, né à Anfouin en 1962, a porté un regard sur le cinquantenaire des pays africains. Quel bilan tire-t-il des indépendances africaines ? « Je retiens deux mots en guise de bilan personnel : mort et folie », a-t-il répondu et de déplorer que « les indépendances africaines auraient dû être l’occasion de l’unification. Mais, l’Organisation de l’unité africaine (OUA), admet-il, n’a pas « joué son rôle ». Mieux, souligne l’écrivain « elle s’est construite en désaccord avec l’idée des pères de l’indépendance ». Son successeur ne fera pas mieux, parce que, selon lui, « l’Union africaine se compose de rigolos ! Il suffit de prendre l’exemple de prendre l’exemple de Kadhafi, ce cabotin aux lunettes noires avec ses pom-pom girls…Les dirigeants africains de l’UA se réunissent pour boire du champagne, et c’est tout». Cependant, l’exilé en France depuis 1980 propose de réfléchir à construire de grandes entités communes, fortes, au-delà des frontières actuelles et constituer de « grands blocs, de vastes espaces » comme les royaumes Ashati et du Bénin. Partageant le rôle que devrait jouer l’artiste où l’intellectuel dans la construction de ces nouvelles alliances, Kossi dit travailler sur un « projet pour proposer la dissolution du Togo…Ce ne sera pas une pétition, ni un manifeste, mais une réflexion pour ramener la question au devant de la scène avec brutalité ». Poursuivant sa réflexion, le Prix littéraire des cinq continents de la Francophonie, fait partager sa conception de la nation. « Des concepts comme celui de l’ivoirité sont pour moi le signe de la folie. Et, après, on va parler de camerounité ? de togolité ? Ce sont de pures fictions ! Cela n’a pas des sens, nous croyons suffisamment au concept de la nation pour ne pas nous zigouiller entre nous pendant des matches de football », s’est-il indigné. Parce que si le Rwanda, se rappelle-t-il ses années collèges, a pu servir d’exemple au niveau de la construction de la nation, avec la cohabitation des ethnies, « cela ne l’a pas mis à l’abri d’un terrible génocide ». Pour lui, si l’on doit tirer un bilan des cinquante ans, « une bonne idée serait de reprendre le fameux ouvrage L’Afrique noire est mal partie, de Réné Dumont ». Avant, dit-il, de regarder point par point ce qui a été réalisé en Afrique. Partageant l’avis de l’historien camerounais Achille Mbmebe qui soutient que tout est à reprendre, le Togolais Kossi Efoui « ne croit pas qu’on ait fini avec le cycle de violence », car des conflits peuvent à tout moment « exploser ». Culturellement, Kossi se satisfait d’un « frémissement fait de désir dans le domaine des arts, du spectacle vivant ». Il salue, de ce fait, l’inventivité, l’imagination « de quelques individus qui ont la folie d’y croire ». Au classement des pays qui « s’en tirent mieux que d’autres », il ne conforte pas mieux le Togo «premier laboratoire de la Françafrique ». « Le Benin est en train de réussir à consolider une véritable démocratie. Le Mali également, mais dans une moindre mesure…Au Sénégal, Senghor avait réussit quelque chose de formidable. Mais, Abdoulaye Wade, lui, m’a énormément déçu. Il y a à regarder le monument de la Renaissance africaine, cette gigantesque horreur voulue par le président ! », commente Kossi Efoui. Pour Kossi Efoui qui s’est trouvé une vocation d’écriture alors qu’il « voulais faire un doctorat de philosophie », ne cache pas son esprit militant. « Si j’écris, c’est pour garder une méfiance radicale vis-à-vis des évidences proclamées », témoigne Kossi Efoui
Koné Saydoo
Koné Saydoo
