A partir du 23 septembre, le candidat du RDR, le Dr Alassane Dramane Ouattara entame sa tournée dans la région des Savanes. La dernière des 19 régions du pays dans son calendrier de tournée de précampagne. Une présence sur plusieurs jours pour communier avec cette population qui lui est acquise. Et parce qu’elle lui est acquise, la région des Savanes n’a jamais quitté le viseur de la refondation, le pouvoir du chef de l’Etat Gbagbo qui use de tous les artifices pour affaiblir le RDR, le parti qui est aujourd’hui son principal obstacle pour se maintenir au pouvoir. Entre la région des Savanes et le pouvoir en place, c’est une histoire de relations d’autant plus complexes que déroutantes tant le type de rapports qui les unit est changeant et imprévisible.
L’époque des bannis
Dès son accession au pouvoir en 2000 par des élections qualifiées par lui-même de calamiteuses, le régime du président Gbagbo plonge plusieurs familles nordistes dans l’émoi et la douleur. On vient de découvrir le charnier de Yopougon. Les noms des victimes déclinent leurs identités nordistes. C’est le début d’un ensemble de rapports conflictuels qui s’engage entre les ressortissants de cette partie du pays et le régime des refondateurs. Des cartes nationales d’identité sont déchirées, les actes d’humiliation se multiplient et les obligés à l’exil ne se comptent plus. Et quand arrive la crise militaro civile du 19 septembre 2002, le président Gbagbo menace de raser le nord et d’en faire un champ de café et de cacao. C’est l’époque des nordistes bannis. En novembre 2004, les Sukkhoi font leur entrée sur scène. L’opération honteusement baptisée "opération dignité" va durer une semaine. Une semaine de privation d’eau et d’électricité, une semaine de psychose dans l’obscurité, sans eau potable, à la merci des avions des compatriotes ennemis. Pendant toute cette période, la route d’Abidjan est un voyage à hauts risques pour les voyageurs aux noms nordistes. Les listes de la mort sont sur la route. Les passagers sont débarqués des véhicules à Tiébissou, ensuite à Toumodi , après à Yamoussokro, à Zianoua , à Elibou et à l’entrée d’Abidjan, au corridor nord. Sur présentation de vos pièces d’identité, les noms sont comparés à une liste de nom établie sur simple dénonciation et même parfois sur la base de simples présomptions. Beaucoup de fils du nord, même ceux qui n’ont rien à se reprocher hésitent à aller dans le sud du pays. Une simple homonymie peut vous être préjudiciable. Les disparus dans ces conditions sont légion. La bataille du pouvoir en place consiste à plonger la zone dite à l’époque, zone rebelle, dans un isolement complet. Les fonctionnaires sont appelés à quitter la zone. Dans le milieu de la santé et de l’éducation, certains refusent d’obtempérer parmi ces autres "rebelles" de l’administration, certains vont payer leur audace d’une suspension temporaire de leur salaire. Toute possibilité de développement est étouffée. C’est ainsi que l’on va constater sans qu’aucune annonce officielle n’en soit faite, que les budgets des collectivités locales sont bloqués. Les conseils généraux et les mairies sont laissés pour compte. Même si les premiers cités connaissent un meilleur sort, leurs budgets réduits au cinquième des cagnottes prévues sont loin de permettre l’exécution des programmes d’activités arrêtés par les élus. Quant aux mairies et leurs employés, c’est la disette. Sur un autre tableau, les services hospitaliers n’ont plus leur raison d’être. Avant l’arrivée de l’ONG Médecins du Monde, les populations sont abandonnées à leur sort, entre les mains des volontaires de la croix rouge qui ne se trouvent que dans les grandes villes. De son coté, l’école est aux abois. Des personnes de bonne volonté s’organisent pour donner leur chance aux enfants qui n’ont pu quitter la zone. L’ONG Ecole pour Tous voit le jour pour pallier l’absence de l’administration. Mais que de difficultés de la part du pouvoir pour accepter de voir des examens organisés dans la zone. Les Forces Nouvelles qui n’ont jamais envisagé une sécession, mettent en place des structures qui vont tant bien que mal encadrer les populations qui se savent bannies par le pouvoir. Pire, les projets de développement en cours, même ceux qui peuvent se poursuivre malgré la crise connaissent un arrêt sans somation. Depuis le 19 septembre, le pouvoir en place a décidé d’arrêter toute activité de développement dans la zone qui deviendra la zone CNO (Centre NOrd Ouest). A Korhogo par exemple, les constructions des maternités et dispensaires des quartiers Sinistré et Haoussabougou que l’entrepreneur était prêt à engager parce que le marché acquis et le financement disponible ne connaîtront aucune suite. Une simple signature a volontairement manqué à l’appel pour permettre au projet de prendre forme. Malgré tout ce désamour montré sans gêne, quand arrive la période de l’accalmie, qui annonce la normalisation et surtout l’organisation des élections, les rapports du pouvoir FPI et la zone CNO vont virer à cent 80 degrés, notamment avec la région des Savanes. Les hommes des « deux doigts » et de la rose bleue se rappellent subitement que cette région du pays regorge de cadres importants et d’un électorat qui peut assurer une victoire dans le cadre des élections.
Le difficile retour
Le FPI, très calculateur engage une offensive de séduction du nord. Toute honte bue, Affi N’Guessan, président du FPI va squatter pendant près d’un mois et demi dans la région. La chasse aux cadres est ouverte pour recruter les pisteurs qui vont ouvrir la voie du retour au nord à Laurent Gbagbo. De nombreux cadres sont approchés avec des propositions alléchantes. Certains résisteront à la tentation. D’autres feront le bond de l’aventure, le bond qui conduit sur la voie de la perte de toute popularité et considération chez soi. Laurent Dona-Fologo, Malick Issa Coulibaly, Koné Dossongui, pour ne citer que ceux-là savent aujourd’hui, quel est le prix du flirt avec Laurent Gbagbo. En effet, désormais, pour tous ces nouveaux amis du président, pour organiser un simple meeting chez eux, il faut toute une gymnastique très coûteuse pour déplacer des danseurs qui en définitive se déplacent pour honorer une location gracieusement payée. Les populations ont malgré tout fini par comprendre le message de pardon longtemps transmis par certains de leurs fils comme le Premier ministre Guillaume Soro et Alassane Dramane Ouattara. «Les hommes du FPI sont nos frères. Nous partageons le même pays. Mais plus jamais, ils ne bénéficieront de nos suffrages » disait un jour Soro Ali, un enseignant venu à une rencontre organisée par le PDCI à Korhogo. La tache du retour s’annonce donc difficile, voire impossible pour les frontistes. Cette difficulté est d’autant plus grande que le FPI qui veut séduire ne se départit pas des pratiques qui lui valent le peu de confiance que les ivoiriens lui accordent aujourd’hui.
Quand les fausses
promesses
trahissent le FPI
Le président Gbagbo, tenu par la main par le Premier ministre en novembre 2007, pourrait-on écrire, fait une entrée populaire à Korhogo, à Boundiali, à Ferké, et à Tengréla. Même s’il est vrai qu’à l’occasion de ces visites d’Etat, de nombreuses personnes sont sorties pour, comme disent-elles « voir Gbagbo de visu », c’était tout de même un véritable plateau de réconciliation qui était dressé devant celui qui depuis l’opposition promettait de gouverner autrement le pays. A Korhogo, neuf kilomètres de bitume sont promis. Plus de deux ans après, les populations attendent encore le début des travaux pourtant annoncés à l’époque pour février 2009. Quelques mois après cette visite, le président Gbagbo revient pour inaugurer l’oléoduc qui assure la connexion entre Korhogo et le fleuve Bandama grâce aux lourds frais de quatre milliards de l’Union Européenne en vue de donner de l’eau aux populations qui souffrent de pénuries régulières. Le chef de la délégation de l’Union Européenne, Michel Arion annonce cependant aux autorités qu’il faut d’abord un investissement de cinq cent millions pour renouveler le matériel de la station de pompage de la SODECI qui va assurer la desserte de l’eau aux populations. Le nouveau matériel n’est jamais arrivé et plus de deux après les travaux de l’Union Européenne, les nouvelles installations ne servent toujours pas la population. De Boundiali à Tengréla, les populations ont enfin espérer avoir une voie bitumée tant les promesses de Gbagbo étaient fermes. Après la promesse, le premier coup de pioche est donné par le président lui-même, le ministre Patrick Achi reviendra plus tard lancer les travaux. Mais jamais, au grand jamais, les travaux de bitumage de ce fameux axe Boundiali - Tengrela ne commenceront. Les exemples dans ce registre sont nombreux au point d’avoir suscité chez les populations de la région un manque de confiance total vis-à-vis de l’administration étatique. A ce triste tableau s’ajoute le chômage, les concours aux résultats tripatouillés dont la jeunesse du nord paye un lourd tribut. D’un autre coté, les victimes de la mauvaise gestion de la filière coton qui pointent un doigt accusateur vers des membres de la mouvance présidentielle, en l’occurrence, Soro Seydou, le chargé de la gestion des finances de la campagne présidentielle conduite par Malick Coulibaly. En effet, c’est sous l’administration de Soro Seydou que la grande URECOSCI, la plus grande faîtière de la filière coton a plié l’échine. Les paysans ont demandé son départ. Mais la faîtière n’est pas encore sortie des égouts de la mauvaise gestion. De même, au sujet du directeur de campagne de Gbagbo, les Korhogolais ne cachent plus leur étonnement par rapport à deux faits. D’abord l’information donnée par le DNC lui-même au sujet du reprofilage des voies de la ville. En effet, les hommes au pied du Mont Korhogo ont du mal à digérer que le DNC de Gbagbo dise que ces travaux ont concerné 400 kilomètres (une telle distance dans la voirie de Korhogo est inimaginable) et coûté un milliard pour des travaux qui n’ont pu résisté aux deux premières pluies. Ensuite, depuis quelques temps, le DNC de Gbagbo ne vient à Korhogo qu’en hélico. Tant de dépenses pour se déplacer quand les populations attendent un investissement de cinq cent millions pour avoir de l’eau potable. Ces deux notes relatives au DNC ont édifié les populations sur les pratiques qui ont cours dans le carré des hommes du pouvoir. Une opulence inouïe à coté des nombreux besoins de la population. La cerise sur le gâteau, les tentatives de radiation d’environ dix mille personnes de la liste électorale dans la région. Le fait qu’on ait voulu rendre ces personnes apatrides pour une simple question d’élection en a rajouté à la douleur et aux difficultés qui tenaillent les populations. Tout un ensemble de douleur et de difficultés qui font de la population du nord et de la région des Savanes un peuple démuni, meurtri, affligé et en quête d’un salut. Ce sont les hommes et femmes qui constituent ce peuple que le Dr Alassane Dramane Ouattara rencontre à partir du 23 septembre.
ADO l’espoir du redressement
Nul doute que le mentor des Républicains sur les épaules de qui reposent aujourd’hui tous les espoirs de ces populations est très attendu pour deux principales raisons. Si les populations ont soif de le rencontrer à nouveau et de communier avec lui, elles attendent d’entendre ses solutions dans les domaines de la santé, de l’éducation et du développement. En effet, en dehors des activités du conseil général aux très maigres moyens, aucun centre de santé de la région n’a bénéficié du moindre appui. En sus, les populations appauvries n’ont même pas les moyens de faire face aux frais médicaux qui sont de plus en plus élevés. Le centre hospitalier régional de Korhogo, le plus grand de la région n’a plus une seule couveuse en bon état. Pendant la période de délestage, l’absence d’un groupe électrogène s’est fait sentir avec acuité. Si le plus grand hôpital de la région est autant démuni, on devine aisément ce qui prévaut ailleurs. Dans le monde paysan, les producteurs de coton et d’anacarde désespèrent de vivre du fruit de leur labeur acheté à des prix dérisoires. D’ailleurs, les quelques voies de communication qui sont encore praticables pour transporter les produits ne tiennent que grâce aux actions des sociétés cotonnières et du conseil général. La pénurie d’eau potable frappe toute la région au point d’être une des principales causes de malnutrition qui compte de nombreux et impensables foyers dans ce pays. Les frais d’écolage, frappés des cotisations des COGES font de l’école où l’on trouve des classes de plus de cent élèves parfois, une structure qui n’est plus à la portée de tous. Au delà de toutes ces difficultés, La parenthèse de la question identitaire dont souffre le nord et que certains avaient cru fermée est encore bien ouverte et attend qu’on la ferme bien et pour de bon. Au moment où les populations de la région des Savanes diront «fotamana» (Bienvenue en sénoufo) au ‘’bravetchè’’, nul doute qu’elles lui demanderont «Que nous proposes-tu pour juguler ces difficultés?»
Mack Dakota, Correspondant
L’époque des bannis
Dès son accession au pouvoir en 2000 par des élections qualifiées par lui-même de calamiteuses, le régime du président Gbagbo plonge plusieurs familles nordistes dans l’émoi et la douleur. On vient de découvrir le charnier de Yopougon. Les noms des victimes déclinent leurs identités nordistes. C’est le début d’un ensemble de rapports conflictuels qui s’engage entre les ressortissants de cette partie du pays et le régime des refondateurs. Des cartes nationales d’identité sont déchirées, les actes d’humiliation se multiplient et les obligés à l’exil ne se comptent plus. Et quand arrive la crise militaro civile du 19 septembre 2002, le président Gbagbo menace de raser le nord et d’en faire un champ de café et de cacao. C’est l’époque des nordistes bannis. En novembre 2004, les Sukkhoi font leur entrée sur scène. L’opération honteusement baptisée "opération dignité" va durer une semaine. Une semaine de privation d’eau et d’électricité, une semaine de psychose dans l’obscurité, sans eau potable, à la merci des avions des compatriotes ennemis. Pendant toute cette période, la route d’Abidjan est un voyage à hauts risques pour les voyageurs aux noms nordistes. Les listes de la mort sont sur la route. Les passagers sont débarqués des véhicules à Tiébissou, ensuite à Toumodi , après à Yamoussokro, à Zianoua , à Elibou et à l’entrée d’Abidjan, au corridor nord. Sur présentation de vos pièces d’identité, les noms sont comparés à une liste de nom établie sur simple dénonciation et même parfois sur la base de simples présomptions. Beaucoup de fils du nord, même ceux qui n’ont rien à se reprocher hésitent à aller dans le sud du pays. Une simple homonymie peut vous être préjudiciable. Les disparus dans ces conditions sont légion. La bataille du pouvoir en place consiste à plonger la zone dite à l’époque, zone rebelle, dans un isolement complet. Les fonctionnaires sont appelés à quitter la zone. Dans le milieu de la santé et de l’éducation, certains refusent d’obtempérer parmi ces autres "rebelles" de l’administration, certains vont payer leur audace d’une suspension temporaire de leur salaire. Toute possibilité de développement est étouffée. C’est ainsi que l’on va constater sans qu’aucune annonce officielle n’en soit faite, que les budgets des collectivités locales sont bloqués. Les conseils généraux et les mairies sont laissés pour compte. Même si les premiers cités connaissent un meilleur sort, leurs budgets réduits au cinquième des cagnottes prévues sont loin de permettre l’exécution des programmes d’activités arrêtés par les élus. Quant aux mairies et leurs employés, c’est la disette. Sur un autre tableau, les services hospitaliers n’ont plus leur raison d’être. Avant l’arrivée de l’ONG Médecins du Monde, les populations sont abandonnées à leur sort, entre les mains des volontaires de la croix rouge qui ne se trouvent que dans les grandes villes. De son coté, l’école est aux abois. Des personnes de bonne volonté s’organisent pour donner leur chance aux enfants qui n’ont pu quitter la zone. L’ONG Ecole pour Tous voit le jour pour pallier l’absence de l’administration. Mais que de difficultés de la part du pouvoir pour accepter de voir des examens organisés dans la zone. Les Forces Nouvelles qui n’ont jamais envisagé une sécession, mettent en place des structures qui vont tant bien que mal encadrer les populations qui se savent bannies par le pouvoir. Pire, les projets de développement en cours, même ceux qui peuvent se poursuivre malgré la crise connaissent un arrêt sans somation. Depuis le 19 septembre, le pouvoir en place a décidé d’arrêter toute activité de développement dans la zone qui deviendra la zone CNO (Centre NOrd Ouest). A Korhogo par exemple, les constructions des maternités et dispensaires des quartiers Sinistré et Haoussabougou que l’entrepreneur était prêt à engager parce que le marché acquis et le financement disponible ne connaîtront aucune suite. Une simple signature a volontairement manqué à l’appel pour permettre au projet de prendre forme. Malgré tout ce désamour montré sans gêne, quand arrive la période de l’accalmie, qui annonce la normalisation et surtout l’organisation des élections, les rapports du pouvoir FPI et la zone CNO vont virer à cent 80 degrés, notamment avec la région des Savanes. Les hommes des « deux doigts » et de la rose bleue se rappellent subitement que cette région du pays regorge de cadres importants et d’un électorat qui peut assurer une victoire dans le cadre des élections.
Le difficile retour
Le FPI, très calculateur engage une offensive de séduction du nord. Toute honte bue, Affi N’Guessan, président du FPI va squatter pendant près d’un mois et demi dans la région. La chasse aux cadres est ouverte pour recruter les pisteurs qui vont ouvrir la voie du retour au nord à Laurent Gbagbo. De nombreux cadres sont approchés avec des propositions alléchantes. Certains résisteront à la tentation. D’autres feront le bond de l’aventure, le bond qui conduit sur la voie de la perte de toute popularité et considération chez soi. Laurent Dona-Fologo, Malick Issa Coulibaly, Koné Dossongui, pour ne citer que ceux-là savent aujourd’hui, quel est le prix du flirt avec Laurent Gbagbo. En effet, désormais, pour tous ces nouveaux amis du président, pour organiser un simple meeting chez eux, il faut toute une gymnastique très coûteuse pour déplacer des danseurs qui en définitive se déplacent pour honorer une location gracieusement payée. Les populations ont malgré tout fini par comprendre le message de pardon longtemps transmis par certains de leurs fils comme le Premier ministre Guillaume Soro et Alassane Dramane Ouattara. «Les hommes du FPI sont nos frères. Nous partageons le même pays. Mais plus jamais, ils ne bénéficieront de nos suffrages » disait un jour Soro Ali, un enseignant venu à une rencontre organisée par le PDCI à Korhogo. La tache du retour s’annonce donc difficile, voire impossible pour les frontistes. Cette difficulté est d’autant plus grande que le FPI qui veut séduire ne se départit pas des pratiques qui lui valent le peu de confiance que les ivoiriens lui accordent aujourd’hui.
Quand les fausses
promesses
trahissent le FPI
Le président Gbagbo, tenu par la main par le Premier ministre en novembre 2007, pourrait-on écrire, fait une entrée populaire à Korhogo, à Boundiali, à Ferké, et à Tengréla. Même s’il est vrai qu’à l’occasion de ces visites d’Etat, de nombreuses personnes sont sorties pour, comme disent-elles « voir Gbagbo de visu », c’était tout de même un véritable plateau de réconciliation qui était dressé devant celui qui depuis l’opposition promettait de gouverner autrement le pays. A Korhogo, neuf kilomètres de bitume sont promis. Plus de deux ans après, les populations attendent encore le début des travaux pourtant annoncés à l’époque pour février 2009. Quelques mois après cette visite, le président Gbagbo revient pour inaugurer l’oléoduc qui assure la connexion entre Korhogo et le fleuve Bandama grâce aux lourds frais de quatre milliards de l’Union Européenne en vue de donner de l’eau aux populations qui souffrent de pénuries régulières. Le chef de la délégation de l’Union Européenne, Michel Arion annonce cependant aux autorités qu’il faut d’abord un investissement de cinq cent millions pour renouveler le matériel de la station de pompage de la SODECI qui va assurer la desserte de l’eau aux populations. Le nouveau matériel n’est jamais arrivé et plus de deux après les travaux de l’Union Européenne, les nouvelles installations ne servent toujours pas la population. De Boundiali à Tengréla, les populations ont enfin espérer avoir une voie bitumée tant les promesses de Gbagbo étaient fermes. Après la promesse, le premier coup de pioche est donné par le président lui-même, le ministre Patrick Achi reviendra plus tard lancer les travaux. Mais jamais, au grand jamais, les travaux de bitumage de ce fameux axe Boundiali - Tengrela ne commenceront. Les exemples dans ce registre sont nombreux au point d’avoir suscité chez les populations de la région un manque de confiance total vis-à-vis de l’administration étatique. A ce triste tableau s’ajoute le chômage, les concours aux résultats tripatouillés dont la jeunesse du nord paye un lourd tribut. D’un autre coté, les victimes de la mauvaise gestion de la filière coton qui pointent un doigt accusateur vers des membres de la mouvance présidentielle, en l’occurrence, Soro Seydou, le chargé de la gestion des finances de la campagne présidentielle conduite par Malick Coulibaly. En effet, c’est sous l’administration de Soro Seydou que la grande URECOSCI, la plus grande faîtière de la filière coton a plié l’échine. Les paysans ont demandé son départ. Mais la faîtière n’est pas encore sortie des égouts de la mauvaise gestion. De même, au sujet du directeur de campagne de Gbagbo, les Korhogolais ne cachent plus leur étonnement par rapport à deux faits. D’abord l’information donnée par le DNC lui-même au sujet du reprofilage des voies de la ville. En effet, les hommes au pied du Mont Korhogo ont du mal à digérer que le DNC de Gbagbo dise que ces travaux ont concerné 400 kilomètres (une telle distance dans la voirie de Korhogo est inimaginable) et coûté un milliard pour des travaux qui n’ont pu résisté aux deux premières pluies. Ensuite, depuis quelques temps, le DNC de Gbagbo ne vient à Korhogo qu’en hélico. Tant de dépenses pour se déplacer quand les populations attendent un investissement de cinq cent millions pour avoir de l’eau potable. Ces deux notes relatives au DNC ont édifié les populations sur les pratiques qui ont cours dans le carré des hommes du pouvoir. Une opulence inouïe à coté des nombreux besoins de la population. La cerise sur le gâteau, les tentatives de radiation d’environ dix mille personnes de la liste électorale dans la région. Le fait qu’on ait voulu rendre ces personnes apatrides pour une simple question d’élection en a rajouté à la douleur et aux difficultés qui tenaillent les populations. Tout un ensemble de douleur et de difficultés qui font de la population du nord et de la région des Savanes un peuple démuni, meurtri, affligé et en quête d’un salut. Ce sont les hommes et femmes qui constituent ce peuple que le Dr Alassane Dramane Ouattara rencontre à partir du 23 septembre.
ADO l’espoir du redressement
Nul doute que le mentor des Républicains sur les épaules de qui reposent aujourd’hui tous les espoirs de ces populations est très attendu pour deux principales raisons. Si les populations ont soif de le rencontrer à nouveau et de communier avec lui, elles attendent d’entendre ses solutions dans les domaines de la santé, de l’éducation et du développement. En effet, en dehors des activités du conseil général aux très maigres moyens, aucun centre de santé de la région n’a bénéficié du moindre appui. En sus, les populations appauvries n’ont même pas les moyens de faire face aux frais médicaux qui sont de plus en plus élevés. Le centre hospitalier régional de Korhogo, le plus grand de la région n’a plus une seule couveuse en bon état. Pendant la période de délestage, l’absence d’un groupe électrogène s’est fait sentir avec acuité. Si le plus grand hôpital de la région est autant démuni, on devine aisément ce qui prévaut ailleurs. Dans le monde paysan, les producteurs de coton et d’anacarde désespèrent de vivre du fruit de leur labeur acheté à des prix dérisoires. D’ailleurs, les quelques voies de communication qui sont encore praticables pour transporter les produits ne tiennent que grâce aux actions des sociétés cotonnières et du conseil général. La pénurie d’eau potable frappe toute la région au point d’être une des principales causes de malnutrition qui compte de nombreux et impensables foyers dans ce pays. Les frais d’écolage, frappés des cotisations des COGES font de l’école où l’on trouve des classes de plus de cent élèves parfois, une structure qui n’est plus à la portée de tous. Au delà de toutes ces difficultés, La parenthèse de la question identitaire dont souffre le nord et que certains avaient cru fermée est encore bien ouverte et attend qu’on la ferme bien et pour de bon. Au moment où les populations de la région des Savanes diront «fotamana» (Bienvenue en sénoufo) au ‘’bravetchè’’, nul doute qu’elles lui demanderont «Que nous proposes-tu pour juguler ces difficultés?»
Mack Dakota, Correspondant