Mille cent francs Cfa, c’est à ce prix que les planteurs devront négocier le kilogramme de cacao avec les acheteurs pour le trimestre à venir. De nombreux acteurs se montrent très réservés quant à l’application effective du nouvel indice.
1.100 Fcfa contre 900 Fcfa précédemment. Le prix du kilogramme bord champ du cacao enregistre une belle performance. Plusieurs observateurs n’hésitent pas à le classer dans le record Guinness des prix. «Un niveau historique», s’exclament-ils. Mais, contrairement à eux, les producteurs refusent de se laisser enivrer par l’euphorie ambiante. Ils trouvent ce prix «irréaliste» au regard de la pratique sur le terrain. «C’est utopique de croire que les 1.100 Fcfa peuvent être appliqués. Au port, le cacao se décharge chez les exportateurs, à 875 Fcfa le kilo.
L’application inquiète
Je ne vois pas comment le prix annoncé pour le bord champ peut aller au-delà de ce qui est pratiqué à la sortie», cogite Bilé Bilé, président des agriculteurs de Côte d’Ivoire. Il précise que, sur le marché mondial, le cacao est livré aujourd’hui à 1.487 Fcfa, prix CAF. Pourtant, c’est de ce montant qu’il faut déduire 50 Fcfa pour atteindre le prix FOB, soit 1.437 Fcfa. «C’est dans ce montant que l’Etat récupère le Droit unique de sortie (Dus, 210 Fcfa/kg) et la parafiscalité qui revient à 180 Fcfa. Finalement, si on fait la soustraction, le producteur ne se retrouve qu’avec 1047 Fcfa. Là encore, les 1.100 Fcfa ne sont pas applicables», analyse le paysan, convaincu que ce sont des «manœuvres politiques pour distraire les producteurs». Pour lui, tant que l’Etat ne baissera pas ses taxes, les prix ne seront pas véritablement satisfaisants pour les producteurs. De plus, il déplore l’immobilisme du Fonds de régulation et de contrôle (Frc) qui n’arrive plus à soutenir les prix. «Les réserves du Frc qui devraient servir à soutenir les prix, ont été dilapidées. Si ce mécanisme n’est pas mis en branle, nous ne pourrons jamais bénéficier de la vente du cacao. Il faut de vraies réformes dans notre filière», souligne Bilé Bilé. D’autres acteurs de la filière estiment que ce prix indicatif est bon à prendre s’il s’applique véritablement. «Si on respecte ce prix, les paysans pourront en tirer réellement profit», ajoute, Zahi Bonfils, président de la Coordination nationale des délégués départementaux (Cndd). Toutefois, il en appelle à la mesure d’autant que les prix peuvent s’effondrer après les élections, convaincu que cette hausse est le fait des exportateurs qui doivent respecter leurs engagements avec les gros transformateurs étrangers.
Le financement des coopératives
«Beaucoup de commandes ont été faites dans cette période. Mais, après les élections, les prix risquent de chuter encore. Nous avons connu un phénomène similaire en 2002, où la situation sociopolitique était préoccupante», avertit-il. Le président de la Cndd critique par ailleurs le manque de mécanisme d’accompagnement des coopératives. Ce qui provoque leur disparition. Du pain béni pour les multinationales qui font la loi au niveau de l’exportation. «Les producteurs représentent moins de 1% dans la commercialisation. Or, en soutenant financièrement les coopératives, les producteurs pourraient aller en nombre important à la commercialisation et s’opposer progressivement au diktat des multinationales», propose Zahi Bonfils. Oupo Koré, secrétaire général de la Société coopérative des agriculteurs de Dakua (Soubré) est dans le même tempo. «Certes, ce prix ne va changer grand-chose. Mais, nous estimons qu’il faut veiller à son application pour redonner espoir aux producteurs qui souffrent. Au cours de ces dernières années, les prix du cacao sont restés bas. Au même moment, les prix des intrants et des matériaux de construction n’ont pas cessé d’augmenter. Les paysans, dans leur majorité, se sont appauvris. Il faut inverser la tendance maintenant», argumente-t-il. La question du financement des coopératives, selon lui, peut trouver une solution définitive. Mais, il faut une volonté politique. «Les autorités doivent amener les coopératives à s’organiser dans les sous-préfectures pour réduire sensiblement leur nombre. Elles seront représentées au niveau départemental par une union. Avec cela, on peut avoir une bonne lisibilité et leur apporter un financement», renchérit Oupo Koré. Par ailleurs, tous les planteurs plaident en faveur d’un prix bloqué. Ils orientent leur prière vers un prix minimum garanti qui laisse peu de manœuvre aux acheteurs indélicats. Pour Christophe Gballou-Tié, président de la Coopérative Awalé de Gagnoa, cette disposition est une solution à la fuite du cacao ivoirien mais surtout à la consolidation de l’économie ivoirienne. L’autre problème est que les multinationales maîtrisent parfaitement les prévisions de récoltes en raison de leur présence au bord champ. Ce qui laisse peu de place à la spéculation sur la baisse de récolte.
Cissé Cheick Ely
1.100 Fcfa contre 900 Fcfa précédemment. Le prix du kilogramme bord champ du cacao enregistre une belle performance. Plusieurs observateurs n’hésitent pas à le classer dans le record Guinness des prix. «Un niveau historique», s’exclament-ils. Mais, contrairement à eux, les producteurs refusent de se laisser enivrer par l’euphorie ambiante. Ils trouvent ce prix «irréaliste» au regard de la pratique sur le terrain. «C’est utopique de croire que les 1.100 Fcfa peuvent être appliqués. Au port, le cacao se décharge chez les exportateurs, à 875 Fcfa le kilo.
L’application inquiète
Je ne vois pas comment le prix annoncé pour le bord champ peut aller au-delà de ce qui est pratiqué à la sortie», cogite Bilé Bilé, président des agriculteurs de Côte d’Ivoire. Il précise que, sur le marché mondial, le cacao est livré aujourd’hui à 1.487 Fcfa, prix CAF. Pourtant, c’est de ce montant qu’il faut déduire 50 Fcfa pour atteindre le prix FOB, soit 1.437 Fcfa. «C’est dans ce montant que l’Etat récupère le Droit unique de sortie (Dus, 210 Fcfa/kg) et la parafiscalité qui revient à 180 Fcfa. Finalement, si on fait la soustraction, le producteur ne se retrouve qu’avec 1047 Fcfa. Là encore, les 1.100 Fcfa ne sont pas applicables», analyse le paysan, convaincu que ce sont des «manœuvres politiques pour distraire les producteurs». Pour lui, tant que l’Etat ne baissera pas ses taxes, les prix ne seront pas véritablement satisfaisants pour les producteurs. De plus, il déplore l’immobilisme du Fonds de régulation et de contrôle (Frc) qui n’arrive plus à soutenir les prix. «Les réserves du Frc qui devraient servir à soutenir les prix, ont été dilapidées. Si ce mécanisme n’est pas mis en branle, nous ne pourrons jamais bénéficier de la vente du cacao. Il faut de vraies réformes dans notre filière», souligne Bilé Bilé. D’autres acteurs de la filière estiment que ce prix indicatif est bon à prendre s’il s’applique véritablement. «Si on respecte ce prix, les paysans pourront en tirer réellement profit», ajoute, Zahi Bonfils, président de la Coordination nationale des délégués départementaux (Cndd). Toutefois, il en appelle à la mesure d’autant que les prix peuvent s’effondrer après les élections, convaincu que cette hausse est le fait des exportateurs qui doivent respecter leurs engagements avec les gros transformateurs étrangers.
Le financement des coopératives
«Beaucoup de commandes ont été faites dans cette période. Mais, après les élections, les prix risquent de chuter encore. Nous avons connu un phénomène similaire en 2002, où la situation sociopolitique était préoccupante», avertit-il. Le président de la Cndd critique par ailleurs le manque de mécanisme d’accompagnement des coopératives. Ce qui provoque leur disparition. Du pain béni pour les multinationales qui font la loi au niveau de l’exportation. «Les producteurs représentent moins de 1% dans la commercialisation. Or, en soutenant financièrement les coopératives, les producteurs pourraient aller en nombre important à la commercialisation et s’opposer progressivement au diktat des multinationales», propose Zahi Bonfils. Oupo Koré, secrétaire général de la Société coopérative des agriculteurs de Dakua (Soubré) est dans le même tempo. «Certes, ce prix ne va changer grand-chose. Mais, nous estimons qu’il faut veiller à son application pour redonner espoir aux producteurs qui souffrent. Au cours de ces dernières années, les prix du cacao sont restés bas. Au même moment, les prix des intrants et des matériaux de construction n’ont pas cessé d’augmenter. Les paysans, dans leur majorité, se sont appauvris. Il faut inverser la tendance maintenant», argumente-t-il. La question du financement des coopératives, selon lui, peut trouver une solution définitive. Mais, il faut une volonté politique. «Les autorités doivent amener les coopératives à s’organiser dans les sous-préfectures pour réduire sensiblement leur nombre. Elles seront représentées au niveau départemental par une union. Avec cela, on peut avoir une bonne lisibilité et leur apporter un financement», renchérit Oupo Koré. Par ailleurs, tous les planteurs plaident en faveur d’un prix bloqué. Ils orientent leur prière vers un prix minimum garanti qui laisse peu de manœuvre aux acheteurs indélicats. Pour Christophe Gballou-Tié, président de la Coopérative Awalé de Gagnoa, cette disposition est une solution à la fuite du cacao ivoirien mais surtout à la consolidation de l’économie ivoirienne. L’autre problème est que les multinationales maîtrisent parfaitement les prévisions de récoltes en raison de leur présence au bord champ. Ce qui laisse peu de place à la spéculation sur la baisse de récolte.
Cissé Cheick Ely