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Économie Publié le mardi 19 octobre 2010 | Nord-Sud

A moins de deux semaines de la présidentielle : La filière café-cacao a-t-elle choisi son candidat ?

Les producteurs de la filière café-cacao attendent beaucoup des candidats à la présidentielle prévue le 31 octobre.

A moins de deux semaines des élections présidentielles, ça bouillonne dans la filière café-cacao. Les producteurs ont visiblement décidé de choisir leur candidat. C’est-à-dire celui parmi les 14 prétendants au fauteuil présidentiel qui sera capable de sortir la filière de l’ornière et leur offrir un mieux-être. L’enjeu est de taille. D’autant que la population rurale dont fait partie les producteurs de café-cacao, représente 59% de la population totale, selon les chiffres du Document de stratégie de réduction de la pauvreté (Dsrp). La situation de ces ruraux n’est guère reluisante. Malgré sa forte contribution à l’économie nationale, la population rurale est de plus en plus pauvre avec un taux de pauvreté de 62,5% en 2008 contre 49% en 2002 et 1998.

La pauvreté aplatit les paysans

Cette tendance à la hausse de la misère en milieu rural est le résultat des mutations importantes qu’a connues l’agriculture ivoirienne, notamment avec la libéralisation des filières agricoles. Pourtant, ce secteur contribue pour 27% au Pib, emploie 2/3 de la population active et fournit avec celui de l’agroindustriel 40% des recettes d’exportation. En effet, les attentes des producteurs de café-cacao et de la masse paysanne sont nombreuses. Il s’agit, entre autres, de la revalorisation des prix bord champ, de l’accès aux soins de santé, à l’eau potable et à l’éducation, du mauvais état des pistes villageoises, de la question du financement de la filière. Pour eux, c’est seul le candidat ayant «le meil­leur profil» qui pourra mettre fin à leurs problèmes. A ce niveau, les avis divergent. Le président du Comité national des sages (Cns) de la filière café-cacao, Georges Bléhoué Aka, présente Laurent Gba­gbo, candidat du Front populaire ivoirien (Fpi) à la présidentielle, com­me étant la solution pour le monde paysan. Ce vieux producteur a eu une seconde jeunesse lorsque le prix bord champ du cacao a été fixé à 1.100 Fcfa le kilogramme pour la campagne 2010-2011, le 1er octo­bre à San-Pedro. Il connaît ainsi une hausse de 15% comparativement à celui de la campagne précédente qui était de 900 Fcfa le kilo. M. Bléhoué Aka estime que cette hausse du prix du cacao n’est rien d’autre que l’œuvre de l’actuel locataire du palais présidentiel. «Notre reconnaissance sera de lui donner toutes nos voix afin qu’il soit élu au premier tour de l’élection présidentielle», souligne-t-il. A l’en croire, Laurent Gbagbo est le prétendant qui a un programme «alléchant» pour les masses rurales. «Grâ­ce à Gbagbo, le prix d’achat bord champ du cacao est fixé aujourd’hui à 1.100 Fcfa le kilo, soit plus de 60% du prix Caf qui revient au planteur. Grâce à sa politique agricole, nous avons acquis des machines qui entretiennent nos pistes pour faciliter le transport de nos produits», se réjouit-il. Pour faire passer son message, il a sillonné plusieurs régions productrices de café-cacao et n’hésite pas à plastronner le poster du candidat Gba­gbo sur son véhicule. Con­vaincu qu’une frange importante des producteurs le suivra. Un leurre. D’autant que le choix du doyen Bléhoué ne fait pas l’unanimité dans la filière. Le vice-président du Forum des agriculteurs pour ADO (Alassane Dramane Ouattara, candidat du Rdr) soutient au con­traire que la situation «désastreuse» dans laquelle vivent les producteurs de café-cacao, est imputable au régime en place. Selon Tamini Jean-Marie, le successeur de Robert Guéi veut «endormir les paysans en fixant le prix bord champ du cacao à 1.100 Fcfa». «Sur le marché de Londres, quand on dit que le prix du cacao est à 1.000 F cfa, il y a le Droit unique de sortie (Dus) qu’on retient. Il fait 200 Fcfa et doit être reversé dans les caisses de l’Etat. Gbagbo a toujours pris son Dus. Tout comme l’Etat ghanéen le fait. Mais, en dehors de ça, les structures parallèles qu’il a créées, récupèrent encore la moitié du prix bord champ. Donc, le paysan ivoirien se retrouve à 400 Fcfa quand son homologue ghanéen est à 800 Fcfa», démontre-t-il (in le Patriote du vendredi 15 octobre).

Un choix difficile ?

Pour lui, c’est pour toutes ces raisons que l’on assiste à la fuite du cacao ivoirien vers le Ghana. A l’en croire, les différents prélèvements effectués sur le kilo de cacao devraient servir de mesure d’accompagnement pour les producteurs. Malheureusement, ils ont servi de «caisses noires au pouvoir en place». C’est le candidat du Rdr qui, à ses yeux, est capable de trouver des solutions idoines et intelligentes pour remettre la filière dans la bonne direction. «ADO a décidé de mettre à notre disposition 1.100 milliards Fcfa. Ce qui permettra de payer correctement les produits agricoles, de résoudre le problème d’eau potable au niveau du monde paysan. Hormis le Droit unique de sortie (Dus), il n’y aura pas d’autres structures qui vont prélever de taxes», tente-t-il de convaincre. D’autres sons discordants fusent. De l’avis de Bilé Bilé, président des agriculteurs de Côte d’Ivoire, l’économie de ce pays repose sur l’agriculture grâce à la politique mise en œuvre par son premier président Houphouet-Boigny. «Il a encouragé les Ivoiriens à faire l’agriculture en la diversifiant. A la faveur de cette politique, la Côte d’Ivoire est le 1er pays producteur de cacao. Pour nous, une personne qui a déjà fait le travail de la terre, sait mieux que quiconque la souffrance qu’endurent les paysans. Houphouet était planteur, son successeur Henri Konan Bédié est également planteur. Tous les producteurs doivent soutenir leur collègue», argumente-t-il. Avant de préciser que certains paysans comme Bléhoué Aka ont eu leur plantation grâce à la politique du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci) avec les «plantations clé en main.» Pour lui, Laurent Gbagbo avait promis d’augmenter le prix bord champ du cacao à 3.000 Fcfa le kilo. «Après 10 ans à la tête du pays, on n’a même pas touché la moitié de ce qu’il a promis. Pendant toutes ces années, la filière a perdu près de 7.600 milliards de Fcfa. Des dirigeants qui n’ont pas de plantation sont devenus milliardaires», critique le président des agriculteurs. A l’en croire, la libéralisation a été un échec patent comparativement à la stabilisation qui, selon lui, a permis une «égale» répartition des richesses. La bataille pour la présidentielle sera âpre jusqu’au bout. Et sur les 14 candidats, les producteurs pronostiquent sur les trois poids lourds.

Cissé Cheick Ely
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