Après 30 mois de détention injustifiée, les ex-dirigeants de la filière café-cacao ont recouvré provisoirement la liberté, hier à la grande satisfaction de leurs parents et amis. Mais contrairement à ce que beaucoup pourraient penser, cette libération provisoire qui intervient dans une situation de crise et de confusions politiques extrêmes et le résultat d`une forte pression exercée depuis près de 6 mois par les candidats à l`élection présidentielle Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié sur Laurent Gbagbo, l`ex-président ivoirien. On se souvient en effet que Bédié d`abord pendant toutes ses tournées politiques à travers le pays, n`a eu de cesse de dénoncer l`emprisonnement des ex-dirigeants. Ensuite, en octobre dernier, il avait déclaré que s`il était élu, il aurait pris des dispositions pour que les détenus de la filière café-cacao obtiennent la liberté provisoire, le temps d`essayer de comprendre ce qui s`est passé et le niveau d`implication du régime Gbagbo dans cet scandale financier. Détenant des informations précises sur des chèques qui ont pris la direction du palais présidentiel, Bédié était convaincu que le pouvoir maintenait les ex-barons en prison sans procès pour pouvoir les contrôler et éviter des surprises désagréables. C`est pour cela qu`il n`a eu de cesse de réclamer soit l`ouverture du procès soit la libération des détenus. Après le candidat Bédié, c`est le candidat Alassane Ouattara qui, recevant le monde judiciaire au Golf hôtel en octobre dernier, avait clairement déclaré que la plupart des ex-dirigeants emprisonnés étaient des innocents que le régime de Gbagbo a arrêtés. Les maintenant en prison sans jugement de peur que les Ivoiriens découvrent la vérité sur l`implication du régime dans ce scandale qu`il a qualifié de " honte pour la Côte d`Ivoire ". Il avait également promis, s`il était élu président, de les mettre en liberté, le temps de reprendre les audits pour situer les responsabilités, prenant comme exemple des documents comptables publiés dans la presse et qui établissaient sans aucun doute possible, l`implication directe de la présidence de la République ivoirienne, dans le scandale. On se souvient aussi que la présidence de la République n`a jamais contesté l`authenticité de ces documents. Dès cet instant, l`on avait tout compris. Et voilà que Alassane Ouattara est devenu président. En homme qui tient ses promesses, il ne pouvait qu`avoir sur son agenda, la gestion de ce dossier explosif pour Gbagbo qui, même s`il se donne l`illusion d`être encore président, ne pouvait se donner le luxe de quitter le pouvoir en laissant les ex-dirigeants dont la plupart sont ses proches, en prison. Cela pouvant se retourner contre lui. Il a donc manœuvré, avec ce qu`il a encore comme pouvoir à Abidjan, pour que les ex-dirigeants soient libérés, afin que Ouattara ne puisse pas mettre la main sur des dossiers compromettants que ces derniers pourraient lui remettre pour se venger contre lui. La pression de Bédié et d`Alassane a donc payé, puisque les ex-dirigeants ont été libérés hier, même si ce n`est que provisoirement. Laurent Gbagbo voulait donc avoir ses proches emprisonnés auprès de lui, pour ne pas qu`ils basculent dans le camp du Rhdp dont le candidat, devenu président, entend auditer tout ce qui s`est fait depuis que les refondateurs sévissent à la tête du pays. C`est ce qui explique cette libération provisoire qui serait déjà intervenue si Gbagbo n`avait pas créé cette crise. Les ex-dirigeants et leurs parents devraient donc remercier le président Bédié et le président Alassane pour cette libération. Et non pas Laurent Gbagbo qui les a maintenus en prison pendant plus de trente (30) mois sans jugement.
Daniel Sovy
Daniel Sovy
