Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique M. Yao Thomas N’Guessan retrace dans cette interview, les difficultés rencontrées par des enseignants dans le supérieur.
Il met cependant l’accent sur la qualité de leur formation qui reste l’une des meilleures sur le
continent africain.
M. le ministre, vous venez d’être fraichement nommé ministre de l’Enseignement supérieur et de
la Recherche scientifique. Quelles sont vos priorités ?
Mes priorités sont simples. Parce qu’on connaît les maux qui minent l’enseignement supérieur. Moi-
même, je suis dans le milieu, j’enseigne, je fais de la recherche. En ce qui concerne le maux qui
minent l’enseignement supérieur, il faut dans un premier temps, diagnostiquer avant d’essayer de
trouver une thérapie.
M. le ministre, puisque vous faites partie du corps enseignant, on considère que vous avez déjà
diagnostiqué les maux qui le minent.
L’Université a besoin d’être désengorgée. Parce qu’il y a trop de monde sur un petit espace alors cela pose problème. Puis, il n’y a pas assez d’enseignants pour encadrer. Il faut noter que le taux
d’encadrement est trop important. C'est-à-dire que, au lieu d’avoir un enseignant pour 25 étudiants,
nous avons un enseignant pour 50 étudiants ce qui n’est pas normal. Et puis, il n’y a pas assez
d’infrastructures. Il n’y a pas assez de salles de Travaux pratiques(Tp), il n’y a pas assez de salle de Travaux dirigés (Td). Même si vous construisez des amphithéâtres, tant que vous n’avez pas ces structures, qui sont appelées à faire des encadrements avec un effectif réduit pour améliorer la qualité de la formation, vous ne pouvez pas espérer avoir de bons produits. L’enseignement
supérieur, c’est d’autant plus important que, c’est là le creuset de l’élite intellectuelle future, l’élite
de demain. Et on ne peut pas se permettre de prendre des risques. Il faut viser juste et puis y aller
de manière beaucoup plus sûre pour ne pas faire de déperdition en cours de route. Donc, la
première chose à faire, c’est de désengorger notre enseignement supérieur. Les visions du président de la République à ce niveau il s’agit de la décentralisation en construisant dans chaque région une Université non seulement autonome, mais également aux prises avec les réalités économiques de la région. Parce que, c’est ce qui est important. Nous devons former des produits. Mais ceux-ci, doivent pouvoir trouver un emploi. Et vous avez des régions minières telles que les Régions des 18 Montagnes et d’autres Régions, et bien, il faut que notre Université soit basée un tout petit peu sur les mines de manière à ce que, les gens qui vont sortir soient capables de trouver des emplois sur place et favoriser l’exploitation minière. Dans d’autres Régions, c’est le café et le cacao, dans ces conditions, il faut mettre en place une Université qui soit capable de former des gens qui puissent faire la transformation de nos matières premières. Parce que, comme on vous l’a dit, notre avenir n’est plus de vendre nos matières premières de façon brute, mais de faire de la transformation.
Vous voyez, l’Université n’est donc pas seulement un endroit où on apprend et où on forme des
intellectuels pour les former. Nous formons certes des intellectuels mais, il faut aller plus loin afin de former aussi des techniciens hautement qualifiés. C’est ça l’objectif que nous devons suivre.
M. le ministre, comme vous le dites si bien, il nous semble que le président de la République et
le Premier ministre ont vu juste. Parce qu’on vous a confié cette tâche bien avant que vous ne
puissiez prendre ce département. N’est-il pas vrai cela ?
Oui, cela est vrai. De 1977 à 1984, j’ai occupé le poste de Directeur de l’enseignement supérieur. A
l’époque, c’était le ministère de l’Education nationale. Et on peut dire que cette Direction était en
quelque sorte un petit secrétariat d’Etat. Parce que, tout l’enseignement supérieur était concentré
là. Et on a eu effectivement à gérer l’enseignement supérieur. A l’époque, les problèmes que nous
avions ne sont pas les mêmes que ceux d’aujourd’hui. Parce qu’il y avait moins d’étudiants, tout le
monde avait une bourse, tout le monde était transporté, c’était quand même différent. Maintenant,
le nombre de boursiers proposés en termes de pourcentage est négligeable. Sur l’ensemble des
étudiants, le nombre de leurs prises en charge est très peu aussi, donc, les donnes ont changé. Les effectifs qui étaient de 20 à 25 mille étudiants sont passé de 100 à 120 mille étudiants. Cela n’a plus rien à voir avec ce que nous connaissions avant. Il y a donc de nouvelles donnes qui ne sont pas statiques, les choses évoluent. Dieu merci, étant moi-même dans le circuit, j’ai vu les choses évoluer.
Pparmi les universitaires et les enseignants, a son idée sur la manière d’aborder le problème. Mais je dirais que ce qui me conforte c’est que, le Premier ministre Affi N’Guessan en formant la commission des experts, nous a permis de réfléchir sur ce problème. Et, sous la houlette du Pr. Dédi Seri, on m’a confié la sous-commission chargée de l’enseignement supérieur. Cela m’a permis à ce niveau déjà de faire l’état des lieux, le bilan, de voir quelle est l’évolution et l’impact de la guerre sur l’évolution de notre système d’enseignement supérieur et surtout d’envisager des perspectives.
Au niveau de l’enseignement supérieur, on constate un trépied. Il y a des Universités, des
techniciens supérieurs et l’ingénierie. Généralement, l’on se focalise sur les Universités. Qu’en’est-
il des techniciens supérieurs et du cycle des ingénieurs ?
Je dirais que, ce sont des divisions artificielles. La preuve, aux Etats Unis vous n’avez pas ces divisions.
Tout le monde est formé dans le moule universitaire. On sort technicien, on sort ce qu’on appelle ici
ingénieur, c’est la même chose. Ce sont des divisions artificielles. Tout dépend du produit que vous voulez former. Pour former un produit, on met en place ce qu’il faut pour que ce produit soit bon.
Donc, qu’est-ce qu’il faut pour former un bon ingénieur, un bon technicien, un grand chercheur ?
C’est ça la question. En fonction de tout cela, on peut envisager toutes les stratégies pour arriver à former ses gens.
Alors M. le ministre, quelle stratégie allez-vous mettre en place pour permettre aux enseignants
d’être performants ?
Il y a quelque chose qu’on a négligé dans notre enseignement supérieur. Il s’agit de la formation des formateurs. Vous voyez ! On dit que l’Université est un système qui doit se reproduire. Cela veut dire que, l’Université forme ses propres formateurs. Il faut donc faire en sorte que, les enseignants qui seront issus de là, aient une qualité de formation qui n’a rien à envier à ce qui se passe à l’extérieur.
En ce moment, nous avons pas mal de boursiers à l’extérieur pour faire des doctorats. La question
est la suivante. Est-ce qu’on peut les former ici ? Je dis oui ! On peut les former sur place. N’est-ce
pas une fatalité que d’envoyer des gens pour être formé à l’extérieur pour l’obtention d’un doctorat.
Nous avons des gens qualifiés pour les former. Qu’est-ce qu’il faut pour qu’on les forme. Il faut qu’on mette en place les infrastructures, les moyens, les équipements nécessaires pour pouvoir les former.
C’est ce qu’il faut.
Interview réalisée par Jean-Baptiste Essis
Jejbessis8@gmail.com
Il met cependant l’accent sur la qualité de leur formation qui reste l’une des meilleures sur le
continent africain.
M. le ministre, vous venez d’être fraichement nommé ministre de l’Enseignement supérieur et de
la Recherche scientifique. Quelles sont vos priorités ?
Mes priorités sont simples. Parce qu’on connaît les maux qui minent l’enseignement supérieur. Moi-
même, je suis dans le milieu, j’enseigne, je fais de la recherche. En ce qui concerne le maux qui
minent l’enseignement supérieur, il faut dans un premier temps, diagnostiquer avant d’essayer de
trouver une thérapie.
M. le ministre, puisque vous faites partie du corps enseignant, on considère que vous avez déjà
diagnostiqué les maux qui le minent.
L’Université a besoin d’être désengorgée. Parce qu’il y a trop de monde sur un petit espace alors cela pose problème. Puis, il n’y a pas assez d’enseignants pour encadrer. Il faut noter que le taux
d’encadrement est trop important. C'est-à-dire que, au lieu d’avoir un enseignant pour 25 étudiants,
nous avons un enseignant pour 50 étudiants ce qui n’est pas normal. Et puis, il n’y a pas assez
d’infrastructures. Il n’y a pas assez de salles de Travaux pratiques(Tp), il n’y a pas assez de salle de Travaux dirigés (Td). Même si vous construisez des amphithéâtres, tant que vous n’avez pas ces structures, qui sont appelées à faire des encadrements avec un effectif réduit pour améliorer la qualité de la formation, vous ne pouvez pas espérer avoir de bons produits. L’enseignement
supérieur, c’est d’autant plus important que, c’est là le creuset de l’élite intellectuelle future, l’élite
de demain. Et on ne peut pas se permettre de prendre des risques. Il faut viser juste et puis y aller
de manière beaucoup plus sûre pour ne pas faire de déperdition en cours de route. Donc, la
première chose à faire, c’est de désengorger notre enseignement supérieur. Les visions du président de la République à ce niveau il s’agit de la décentralisation en construisant dans chaque région une Université non seulement autonome, mais également aux prises avec les réalités économiques de la région. Parce que, c’est ce qui est important. Nous devons former des produits. Mais ceux-ci, doivent pouvoir trouver un emploi. Et vous avez des régions minières telles que les Régions des 18 Montagnes et d’autres Régions, et bien, il faut que notre Université soit basée un tout petit peu sur les mines de manière à ce que, les gens qui vont sortir soient capables de trouver des emplois sur place et favoriser l’exploitation minière. Dans d’autres Régions, c’est le café et le cacao, dans ces conditions, il faut mettre en place une Université qui soit capable de former des gens qui puissent faire la transformation de nos matières premières. Parce que, comme on vous l’a dit, notre avenir n’est plus de vendre nos matières premières de façon brute, mais de faire de la transformation.
Vous voyez, l’Université n’est donc pas seulement un endroit où on apprend et où on forme des
intellectuels pour les former. Nous formons certes des intellectuels mais, il faut aller plus loin afin de former aussi des techniciens hautement qualifiés. C’est ça l’objectif que nous devons suivre.
M. le ministre, comme vous le dites si bien, il nous semble que le président de la République et
le Premier ministre ont vu juste. Parce qu’on vous a confié cette tâche bien avant que vous ne
puissiez prendre ce département. N’est-il pas vrai cela ?
Oui, cela est vrai. De 1977 à 1984, j’ai occupé le poste de Directeur de l’enseignement supérieur. A
l’époque, c’était le ministère de l’Education nationale. Et on peut dire que cette Direction était en
quelque sorte un petit secrétariat d’Etat. Parce que, tout l’enseignement supérieur était concentré
là. Et on a eu effectivement à gérer l’enseignement supérieur. A l’époque, les problèmes que nous
avions ne sont pas les mêmes que ceux d’aujourd’hui. Parce qu’il y avait moins d’étudiants, tout le
monde avait une bourse, tout le monde était transporté, c’était quand même différent. Maintenant,
le nombre de boursiers proposés en termes de pourcentage est négligeable. Sur l’ensemble des
étudiants, le nombre de leurs prises en charge est très peu aussi, donc, les donnes ont changé. Les effectifs qui étaient de 20 à 25 mille étudiants sont passé de 100 à 120 mille étudiants. Cela n’a plus rien à voir avec ce que nous connaissions avant. Il y a donc de nouvelles donnes qui ne sont pas statiques, les choses évoluent. Dieu merci, étant moi-même dans le circuit, j’ai vu les choses évoluer.
Pparmi les universitaires et les enseignants, a son idée sur la manière d’aborder le problème. Mais je dirais que ce qui me conforte c’est que, le Premier ministre Affi N’Guessan en formant la commission des experts, nous a permis de réfléchir sur ce problème. Et, sous la houlette du Pr. Dédi Seri, on m’a confié la sous-commission chargée de l’enseignement supérieur. Cela m’a permis à ce niveau déjà de faire l’état des lieux, le bilan, de voir quelle est l’évolution et l’impact de la guerre sur l’évolution de notre système d’enseignement supérieur et surtout d’envisager des perspectives.
Au niveau de l’enseignement supérieur, on constate un trépied. Il y a des Universités, des
techniciens supérieurs et l’ingénierie. Généralement, l’on se focalise sur les Universités. Qu’en’est-
il des techniciens supérieurs et du cycle des ingénieurs ?
Je dirais que, ce sont des divisions artificielles. La preuve, aux Etats Unis vous n’avez pas ces divisions.
Tout le monde est formé dans le moule universitaire. On sort technicien, on sort ce qu’on appelle ici
ingénieur, c’est la même chose. Ce sont des divisions artificielles. Tout dépend du produit que vous voulez former. Pour former un produit, on met en place ce qu’il faut pour que ce produit soit bon.
Donc, qu’est-ce qu’il faut pour former un bon ingénieur, un bon technicien, un grand chercheur ?
C’est ça la question. En fonction de tout cela, on peut envisager toutes les stratégies pour arriver à former ses gens.
Alors M. le ministre, quelle stratégie allez-vous mettre en place pour permettre aux enseignants
d’être performants ?
Il y a quelque chose qu’on a négligé dans notre enseignement supérieur. Il s’agit de la formation des formateurs. Vous voyez ! On dit que l’Université est un système qui doit se reproduire. Cela veut dire que, l’Université forme ses propres formateurs. Il faut donc faire en sorte que, les enseignants qui seront issus de là, aient une qualité de formation qui n’a rien à envier à ce qui se passe à l’extérieur.
En ce moment, nous avons pas mal de boursiers à l’extérieur pour faire des doctorats. La question
est la suivante. Est-ce qu’on peut les former ici ? Je dis oui ! On peut les former sur place. N’est-ce
pas une fatalité que d’envoyer des gens pour être formé à l’extérieur pour l’obtention d’un doctorat.
Nous avons des gens qualifiés pour les former. Qu’est-ce qu’il faut pour qu’on les forme. Il faut qu’on mette en place les infrastructures, les moyens, les équipements nécessaires pour pouvoir les former.
C’est ce qu’il faut.
Interview réalisée par Jean-Baptiste Essis
Jejbessis8@gmail.com