« La défaite est orpheline, la victoire a plusieurs pères », dit si splendidement l’adage. Depuis la chute de Gbagbo Seplou, chacun crie sur tous les toits avoir pris une part active dans le dénouement de la crise. C’est pourquoi, depuis les premières nominations, des grincements de dents se font entendre. Bruyamment! De nombreux militants de la première heure, ceux qui depuis septembre 94, ont mené le combat pour la victoire du Président Alassane Ouattara pensent, légitimement du reste, qu’ils ont droit à une reconnaissance. Pour avoir donné le sacrifice de leur personne, dans le combat titanesque, ils restent persuadés qu’avec l’avènement du président Ouattara, leur heure de gloire a véritablement sonné. Ils craignent qu’après la distribution des «parties viandées», on ne vienne leur proposer que «les os et les nerfs». Ils sont d’autant plus amers que pour eux, l’on a rétribué ceux qui dans un passé encore récent, n’ont pas hésité à narguer leur président et à sauter, mains et pieds joints dans le navire ivre de la refondation. Pour eux, c’est un autre supplice qu’on leur fait vivre, avec la montée au pinacle de ceux qu’ils nomment si merveilleusement du reste, «les militants de la 25e heure». Surtout que ces derniers, qui veulent monter en première ligne, feignent de croire que les Ivoiriens ont oublié leurs agissements et louvoiements envers l’ancien régime. Ont-ils raison ou tout simplement ont-ils tort? Le temps n’est certainement pas au réquisitoire virulent et au procès d’intention. Il faut arrêter les ragots de bas étage et éviter d’ouvrir la chasse aux sorcières. Le débat n’est pas à ce niveau. Si ce n’est pas encore les mélancolies du changement dont parlait si fortement Anatole Mendes France, c’est tout comme du reste, pour certains. Sans doute, il est important que ceux qui sont oints de la légitimité historique des heures chaudes du combat ne soient pas oubliés et fassent partie du «cortège des vainqueurs». Cependant, il est de bon ton également pour les cadres du RDR de comprendre que Ouattara n’est plus leur propriété, depuis qu’il a accédé à la Magistrature Suprême du pays. Désormais, il est «le Président de tous les Ivoiriens», comme il n’a jamais cessé de le dire. C’est pourquoi, en tant que tel, il se doit de mettre tout le monde au travail. Sous le sceau du pardon et de la réconciliation nationale, Alassane Ouattara doit être au dessus des clivages politiques, pour le bonheur de tous les Ivoiriens sans exclusive. Dans le processus de reconstruction nationale, le nouveau gouvernement doit être en mesure de faire la jonction entre ces deux tendances. Concilier les divergences entre les positions militantes et les enjeux nationaux. Il appartient au Président de la République et à son Premier Ministre de mettre les hommes et femmes qu’il faut à la place idoine. Au regard de la compétence et des priorités qui engagent la renaissance de notre pays. Avec la gouvernance naissante, il faut éviter de faire prospérer les incompréhensions, rajoutant ainsi aux malheurs du peuple ivoirien qui espère beaucoup du nouveau régime.
Bakary Nimaga
Bakary Nimaga
