Comme d’habitude, l’Onuci a tenu une conférence hebdomadaire à son siège à Sebroko, jeudi dernier. Ci-après , l’intervention de Guillaume NGefa, Directeur par intérim de la Division des Droits de l’Homme
Mesdames et Messieurs, bonjour ! Au cours de la semaine en revue, la Division des Droits de l’Homme (DDH) de l’ONUCI a conduit des missions d’observation et de surveillance de la situation des Droits de l’Homme, notamment, dans les localités de Bouna, Becouefin, Yakassé-Mé et Domolon, bien sûr, en plus de nos activités régulières de monitoring des violations des Droits de l’Homme à travers le pays. Dans le cadre de l’observation des enquêtes préliminaires en cours, entreprises par le Procureur Général, deux Experts des Droits de l’Homme se sont rendus à Bouna pour observer les processus d’audition de 7 collaborateurs ou partisans de l’ancien Président Laurent Gbagbo qui sont détenus à la prison civile de Bouna depuis le 26 avril 2011. La Division des Droits de l’Homme a noté avec satisfaction que les auditions se sont déroulées en présence de leurs avocats (sept avocats au total dont deux internationaux et deux nationaux). Cependant, l’ONUCI a déploré les conditions précaires de détention de ces personnes. Celles-ci sont sous la garde, non pas de l’ONUCI, mais des éléments des Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI). L’ONUCI, dans ce cadre là, continue de faciliter le transport aérien des magistrats du parquet général vers les lieux d’audition. La DDH est particulièrement préoccupée par la multiplication d’incidents violents et attaques conduites par des éléments des FRCI contre plusieurs villages, notamment à Dabouyo (localité située entre Sassandra et Gueyo), Yamanou (près de Daloa), Sériyo (entre Gagnoa et Gueyo), Bakayo, Becouefin (à 24 km d’Akoupé), Domolon et Yakassé-Mé. Les incidents les plus graves se sont déroulés à Becouefin, Yakassé-Mé (50 km d’Abidjan) et à Domolon (55 km d’Abidjan). A Becouefin, des éléments des FRCI venus d’Akoupé ont investi le village et ont fait usage de la force mortelle. Ils ont ensuite arrêté une vingtaine de jeunes et les ont détenus à l’Hôtel des hôtes, communément appelé Golf Hôtel. En cours de route, ils ont battu une personne qui est morte de suite de ses blessures. A Yakasse-Mé, un vieillard s’est écroulé lorsqu’il tentait de fuir en brousse par crainte d’être arrêté par des éléments des FRCI qui avaient lancé une opération de ratissage dans le village suite à un litige privé entre un jeune et un élément des FRCI. Ces incidents ont fait au moins 45 blessés, dont trois par balles. Des renforts des FRCI lourdement armées venues à bord de véhicules 4X4 d’Abidjan et d’Adzopé, ont pris d’assaut le village en tirant et en tabassant les jeunes. La population prise de panique, a dû quitter le village pour se refugier dans les forêts avoisinantes. L’ONUCI a facilité la réconciliation entre les jeunes et les FRCI de Yakassé-Mé au cours d’une réunion publique, présidée par le Sous-préfet de la localité. A Domolon, l’incursion des éléments des FRCI, officiellement à la recherche des caches d’armes, s’est soldée par une trentaine de blessés à coups de machettes et de crosses, une cinquantaine d’arrestations, y compris des enseignants des deux écoles du village. D’ailleurs, ces deux écoles demeurent fermées à la suite de ces incidents. On a aussi documenté des cas de pillages à grande échelle. Une grande partie de la population, y compris des femmes enceintes et des enfants, s’est réfugiée dans la forêt.
Mesdames et Messieurs, ces trois incidents ont révélé quelques constances :
* l’utilisation des armes lourdes dans les opérations de maintien de l’ordre dans les villages ;
* Les arrestations massives des jeunes ;
* Les pillages ;
* La fuite des populations dans les brousses.
Compte-tenu de ces constances, nous formulons les recommandations suivantes. Il est utile que, des enquêtes immédiates et impartiales sur le recours des éléments des FRCI à la force mortelle et disproportionnée lors des opérations de maintien de l’ordre, les présumés auteurs de ces violations graves doivent être identifiés, poursuivis et sanctionnés, conformément à la loi. Il est important que des enquêtes immédiates et impartiales soient menées sur les actes de violence, de pillage et de destruction perpétrés par les FRCI et aussi par les jeunes de ces villages. Il est important aussi d’équiper immédiatement les FRCI de moyens conventionnels suffisants et appropriés pour leur permettre de mener des opérations de maintien de l’ordre. Le gouvernement et les autorités des FRCI devraient initier des formations à l’intention des éléments des FRCI, notamment sur les droits de l’homme et sur les Principes de base régissant le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois. Bien sûr, des séances de sensibilisation devraient être organisées régulièrement afin d’exhorter les uns et les autres à vivre en harmonie, et renforcer la confiance et la cohésion sociale.
Les FRCI devraient faciliter le retour des villageois, y compris des enseignants et des éléments refugiés en brousse. Les FRCI devraient rendre tous les biens confisqués, en particulier les joyaux de la chefferie traditionnelle. Enfin, il devient plus qu’utile d’accroître des patrouilles dissuasives dans ces zones de localités où les populations civiles sont affectées par opérations. Merci !
Et si l’ONUCI était partiale?
A lire ou écouter les déclarations de l’ONUCI au sujet des supposés violations des Droits de l’Homme par les FRCI, l’on est tenté de se poser la question suivante à quel jeu joue le gendarme du monde ? Parce que l’impression qui se dégage des condamnations est que ce sont les tenants du pouvoir qui doivent être aveuglement acculés. Tout se passe comme si, dans le cas qui implique les Forces Républicaines, les ex miliciens et partisans pro-Gbagbo sont exempts de tout reproche. Et pourtant, dans un passé très proche, l’ONUCI sait puisqu’elle-même en a été victime, combien les patriotes et les miliciens ont traumatisé les partisans d’Alassane Ouattara. Les FRCI tabassent ou arrêtent les partisans du dictateur déchu, les FRCI font ceci ou cela. Hier, les forces pro-Gbagbo ont fait pires. Au nom de la réconciliation, les victimes d’hier veulent bien se surpasser pour s’ouvrir à leurs bourreaux. Les condamnations et autres récriminations de l’ONUCI, à notre sens, viennent annihiler ses efforts en faveur du retour de la paix en Côte d’Ivoire. Parce qu’elles sonnent comme une protection unilatérale. Cela fait douter les Ivoiriens de la sincérité de l’instance onusienne dans le traitement de la question des Droits de l’Homme. Ou alors, elle se laisse manipuler par des tueurs qui ont encore des armes et crient danger dès qu’une opération de sécurisation est lancée dans leurs zones par les FRCI. L’ONUCI doit s’éloigner des condamnations systématiques et de principe et faire comprendre à ceux qui se font passer pour des traqués, qu’ils doivent abandonner ce qui attire les Forces Républicaines c’est à dire la possession illégale d’armes, les comportements de défiance à l’encontre de celles-ci. C’est à ce prix que chacun saura véritablement les limites de ses droits.
MASS DOMI
Mesdames et Messieurs, bonjour ! Au cours de la semaine en revue, la Division des Droits de l’Homme (DDH) de l’ONUCI a conduit des missions d’observation et de surveillance de la situation des Droits de l’Homme, notamment, dans les localités de Bouna, Becouefin, Yakassé-Mé et Domolon, bien sûr, en plus de nos activités régulières de monitoring des violations des Droits de l’Homme à travers le pays. Dans le cadre de l’observation des enquêtes préliminaires en cours, entreprises par le Procureur Général, deux Experts des Droits de l’Homme se sont rendus à Bouna pour observer les processus d’audition de 7 collaborateurs ou partisans de l’ancien Président Laurent Gbagbo qui sont détenus à la prison civile de Bouna depuis le 26 avril 2011. La Division des Droits de l’Homme a noté avec satisfaction que les auditions se sont déroulées en présence de leurs avocats (sept avocats au total dont deux internationaux et deux nationaux). Cependant, l’ONUCI a déploré les conditions précaires de détention de ces personnes. Celles-ci sont sous la garde, non pas de l’ONUCI, mais des éléments des Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI). L’ONUCI, dans ce cadre là, continue de faciliter le transport aérien des magistrats du parquet général vers les lieux d’audition. La DDH est particulièrement préoccupée par la multiplication d’incidents violents et attaques conduites par des éléments des FRCI contre plusieurs villages, notamment à Dabouyo (localité située entre Sassandra et Gueyo), Yamanou (près de Daloa), Sériyo (entre Gagnoa et Gueyo), Bakayo, Becouefin (à 24 km d’Akoupé), Domolon et Yakassé-Mé. Les incidents les plus graves se sont déroulés à Becouefin, Yakassé-Mé (50 km d’Abidjan) et à Domolon (55 km d’Abidjan). A Becouefin, des éléments des FRCI venus d’Akoupé ont investi le village et ont fait usage de la force mortelle. Ils ont ensuite arrêté une vingtaine de jeunes et les ont détenus à l’Hôtel des hôtes, communément appelé Golf Hôtel. En cours de route, ils ont battu une personne qui est morte de suite de ses blessures. A Yakasse-Mé, un vieillard s’est écroulé lorsqu’il tentait de fuir en brousse par crainte d’être arrêté par des éléments des FRCI qui avaient lancé une opération de ratissage dans le village suite à un litige privé entre un jeune et un élément des FRCI. Ces incidents ont fait au moins 45 blessés, dont trois par balles. Des renforts des FRCI lourdement armées venues à bord de véhicules 4X4 d’Abidjan et d’Adzopé, ont pris d’assaut le village en tirant et en tabassant les jeunes. La population prise de panique, a dû quitter le village pour se refugier dans les forêts avoisinantes. L’ONUCI a facilité la réconciliation entre les jeunes et les FRCI de Yakassé-Mé au cours d’une réunion publique, présidée par le Sous-préfet de la localité. A Domolon, l’incursion des éléments des FRCI, officiellement à la recherche des caches d’armes, s’est soldée par une trentaine de blessés à coups de machettes et de crosses, une cinquantaine d’arrestations, y compris des enseignants des deux écoles du village. D’ailleurs, ces deux écoles demeurent fermées à la suite de ces incidents. On a aussi documenté des cas de pillages à grande échelle. Une grande partie de la population, y compris des femmes enceintes et des enfants, s’est réfugiée dans la forêt.
Mesdames et Messieurs, ces trois incidents ont révélé quelques constances :
* l’utilisation des armes lourdes dans les opérations de maintien de l’ordre dans les villages ;
* Les arrestations massives des jeunes ;
* Les pillages ;
* La fuite des populations dans les brousses.
Compte-tenu de ces constances, nous formulons les recommandations suivantes. Il est utile que, des enquêtes immédiates et impartiales sur le recours des éléments des FRCI à la force mortelle et disproportionnée lors des opérations de maintien de l’ordre, les présumés auteurs de ces violations graves doivent être identifiés, poursuivis et sanctionnés, conformément à la loi. Il est important que des enquêtes immédiates et impartiales soient menées sur les actes de violence, de pillage et de destruction perpétrés par les FRCI et aussi par les jeunes de ces villages. Il est important aussi d’équiper immédiatement les FRCI de moyens conventionnels suffisants et appropriés pour leur permettre de mener des opérations de maintien de l’ordre. Le gouvernement et les autorités des FRCI devraient initier des formations à l’intention des éléments des FRCI, notamment sur les droits de l’homme et sur les Principes de base régissant le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois. Bien sûr, des séances de sensibilisation devraient être organisées régulièrement afin d’exhorter les uns et les autres à vivre en harmonie, et renforcer la confiance et la cohésion sociale.
Les FRCI devraient faciliter le retour des villageois, y compris des enseignants et des éléments refugiés en brousse. Les FRCI devraient rendre tous les biens confisqués, en particulier les joyaux de la chefferie traditionnelle. Enfin, il devient plus qu’utile d’accroître des patrouilles dissuasives dans ces zones de localités où les populations civiles sont affectées par opérations. Merci !
Et si l’ONUCI était partiale?
A lire ou écouter les déclarations de l’ONUCI au sujet des supposés violations des Droits de l’Homme par les FRCI, l’on est tenté de se poser la question suivante à quel jeu joue le gendarme du monde ? Parce que l’impression qui se dégage des condamnations est que ce sont les tenants du pouvoir qui doivent être aveuglement acculés. Tout se passe comme si, dans le cas qui implique les Forces Républicaines, les ex miliciens et partisans pro-Gbagbo sont exempts de tout reproche. Et pourtant, dans un passé très proche, l’ONUCI sait puisqu’elle-même en a été victime, combien les patriotes et les miliciens ont traumatisé les partisans d’Alassane Ouattara. Les FRCI tabassent ou arrêtent les partisans du dictateur déchu, les FRCI font ceci ou cela. Hier, les forces pro-Gbagbo ont fait pires. Au nom de la réconciliation, les victimes d’hier veulent bien se surpasser pour s’ouvrir à leurs bourreaux. Les condamnations et autres récriminations de l’ONUCI, à notre sens, viennent annihiler ses efforts en faveur du retour de la paix en Côte d’Ivoire. Parce qu’elles sonnent comme une protection unilatérale. Cela fait douter les Ivoiriens de la sincérité de l’instance onusienne dans le traitement de la question des Droits de l’Homme. Ou alors, elle se laisse manipuler par des tueurs qui ont encore des armes et crient danger dès qu’une opération de sécurisation est lancée dans leurs zones par les FRCI. L’ONUCI doit s’éloigner des condamnations systématiques et de principe et faire comprendre à ceux qui se font passer pour des traqués, qu’ils doivent abandonner ce qui attire les Forces Républicaines c’est à dire la possession illégale d’armes, les comportements de défiance à l’encontre de celles-ci. C’est à ce prix que chacun saura véritablement les limites de ses droits.
MASS DOMI