L’ex-Chef de l’Etat ivoirien vient d’être rattrapé par ses crimes économiques. Même si l’on ne déflore pas véritablement toutes les causes économiques du côté de la Justice, nul n’est censé ignorer les actes de prédation orchestrés sous le régime Gbagbo. De 2000 à 2011, les Refondateurs se sont comportés comme de vrais prédateurs de l’économie ivoirienne. Avec à la clé, l’enrichissement illicite de bon nombre d’entre eux surtout à partir de 2002. En effet, la Refondation a commencé à jouir de la guerre qui a débuté en septembre, à travers les différentes commissions exorbitantes perçues sur les achats d'armes de guerre et qui se chiffreraient à plusieurs dizaines de milliards de Fcfa. A cela s’ajoute l'achat de l'usine de Fulton, basée aux Etats Unis. Ce deal qui a été conclu dans la période 2003-2004, a coûté 100 milliards de Fcfa au contribuable ivoirien alors que cette usine désuète, surannée et aux antipodes du modernisme, n'était même plus fonctionnelle. Elle avait été abandonnée non seulement pour son obsolescence mais surtout pour son inutilité. Usant d’acrobaties économiques et de certains mécanismes, le régime Fpi pompait à satiété les caisses de l’Etat ivoirien. Une étude faite par les bailleurs de fonds, a révélé que 242 millions de Fcfa étaient débloqués mensuellement pour payer les travailleurs de cette usine fictive. Cette affaire est même l'un des éléments déclencheurs de l'enquête dans la filière café-cacao. En 2005, toujours dans le domaine de cette filière, un document a révélé un détournement de plus de 600 milliards de Fcfa des planteurs. Selon une mission conjointe du Fmi et de la Banque mondiale en septembre 2005, sur environ 125 milliards de Fcfa prélevés sur le dos des producteurs entre 2002 et 2004, seulement 40 milliards de Fcfa étaient régulièrement dépensés au bénéfice de ladite filière. Une bonne partie de l'argent a servi, selon plusieurs sources, à l'achat d'armes au plus fort de la crise militaro-politique. Dans la nuit du 19 au 20 août 2006, la Côte d'Ivoire a enregistré le déversement des déchets toxiques. La société Trafigura, sommée de payer quelques indemnités, a reversé la somme de 100 milliards de Fcfa à l'Etat de Côte d'Ivoire après un marchandage du camp présidentiel. Cela devait servir, avait-on dit, au dédommagement des victimes de ces déchets toxiques. Finalement, l'Etat s'est taillé la part du lion avec 50 milliards de Fcfa, le reste du pactole devait servir à construire des hôpitaux, des centres de santé, acheter des équipements médicaux pour les populations. Mais là encore, la moisson n'a pas tenu la promesse des fleurs. Aucune de ces infrastructures ne sera réalisée. La manne pétrolière n'a pas été épargnée non plus par les refondateurs. De 2002 à 2007, une gestion opaque de ce secteur a été maintes fois décriée par le Fmi et la Banque mondiale. Les chiffres du pétrole ont été tenus secrets par la Présidence et le ministère des Mines et de l'Energie. Des centaines de milliards de francs Cfa ont pris d'autres destinations. Surtout qu'ils n'ont jamais figuré véritablement dans le budget de 2002 à 2007. Un autre scandale, celui du blanchiment de faux billets. C'était en octobre 2007. Les Ivoiriens ont assisté à la découverte de faux billets de dollars non loin du domicile d'un ponte de la refondation. Une affaire que le président de la République d’alors avait minimisée. En 2009, c'est la secrétaire de Gbagbo, épouse d'un de ses conseillers, qui s'est rendue coupable d'une escroquerie de plus de 65 millions de FCFA au détriment de la société de télécommunication Mtn. En 2010, l’on a assisté au pillage des ressources au niveau de plusieurs entreprises. Les sommes faramineuses engrangées ont constitué des butins pour la campagne présidentielle de Gbagbo. Petroci, Port autonome d’Abidjan, Sotra et autres ont toutes contribué. Les nombreux véhicules constituant le staff de campagne du président Gbagbo ont été parfois achetés grâce à ces ressources. On n’oublie pas non plus les sommes faramineuses englouties dans l’achat d’armes pour un pays qui était sous embargo Le Procureur de la République, Simplice Koffi, dans le cadre des crimes économiques, a évoqué le cas de vols aggravés perpétrés sous Gbagbo en 2011. Notamment les pillages des agences Bceao (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest). Si aucun montant n’a été avancé par le Procureur, l’on se rappelle que le président Abdoulaye Wade avait fait cas d’au moins 500 milliards de Fcfa. Au chapitre de l’atteinte à l’économie nationale, l’on peut évoquer les études et la volonté d’intention de création d’une monnaie ivoirienne alors que la Côte d’Ivoire se trouve dans l’espace Uemoa (Union économique et monétaire ouest africaine). Ce qui a beaucoup perturbé la communauté internationale. Ces crimes économiques ont également trait à la nationalisation des banques, Sgbci et Bicici, avec le lourd préjudice subi au niveau du dérèglement du système bancaire de la zone Uemoa, les problèmes de compenses devenues manuelles, l’absence parfois de liquidités dans certaines banques, etc. Le Procureur a aussi mentionné les détournements de deniers publics, de concussions (il s'agit d'une malversation dans l'exercice d'une fonction publique), particulièrement dans le maniement des deniers publics. Course effrénée au gain facile, à l'enrichissement illicite qui avaient même été décriée par le Président de l'Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, un des hauts responsables du FPI. L’ex-Chef de l’Etat a fini par être rattrapé par ses crimes économiques.
Jean Eric ADINGRA
Jean Eric ADINGRA