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Politique Publié le samedi 19 novembre 2011 | Le Temps

Le lieutenant Danon Kroko, enlevé : La réaction de Bertin Kadet

© Le Temps Par Nathan Koné
Cinquantenaire / colloque international pluridisciplinaire : la cérémonie de clôture
Jeudi 5 août 2010. Yamoussoukro, Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix. Photo: l`ancien ministre Bertin Kadet
J’ai appris que le lieutenant Danon Kroko Théophile a été convoqué le jeudi 17 novembre 2012 à 9 heures, au Commandement Supérieur de la gendarmerie nationale, par le Colonel Vako Bamba, adjoint au Commandant Supérieur. Après avoir été entendu de 9 h à 16 h, il a été conduit à son propre domicile qui a été perquisitionné sur instruction de ladite hiérarchie. Après la fouille de son domicile, il a été incarcéré dans une cellule où il a passé la nuit. Selon ce qui m’a été rapporté, le crime du lieutenant Danon Kroko est qu’il m’ait expédié de l’argent à Accra, afin que je règle mes frais médicaux et la scolarité de mes enfants, motifs de son inculpation pour atteinte à la sûreté de l’Etat.
Depuis les évènements du 11 avril 2011, je me suis imposé le silence parce que des personnes qui me sont chères, à commencer par le Président Laurent Gbagbo et son épouse sont en déportation, certains sont morts de manière atroce et plusieurs autres souffrent encore de traumatismes divers. Selon la culture à laquelle j’ai été élevé, de telles situations constituent des moments de deuil et de recueillement, en se privant de parole en public. Toutefois, j’ai accordé une interview à l’Intelligent d’Abidjan le 25 avril dernier, pour répondre aux propagandes fantaisistes, relatives à la préparation de coup d’Etat, diffusées par certains journaux en mission de la place d’Abidjan. Je me permets de prendre la parole ce jour pour dénoncer ce que je considère comme une dérive mafieuse dont se rend coupable la gendarmerie nationale de Côte d’Ivoire, dernier rempart crédible des institutions sécuritaires du pays. Ce mode opératoire utilisé pour extirper de ses rangs, de jeunes officiers soucieux de servir dans la discipline, avec l’espoir de progresser honnêtement dans l’échelle de la hiérarchie de leur métier, est grotesque et ne correspond pas à l’image que les Ivoiriens ont et veulent garder de cette arme d’élite.
Ma rencontre avec le jeune officier Danon Kroko remonte au mois d’octobre 2002, lorsque j’ai été nommé Ministre délégué à la défense. Dès ma nomination, l’Etat Major des Fanci et le Commandement Supérieur de la gendarmerie, comme cela est de coutume, m’ont affecté une équipe de sécurité composée de gendarmes et de militaires. Je ne connaissais aucun des éléments mis à mon service puisque ce n’était pas mon travail de participer au choix des éléments, cela relève directement de leur supérieur hiérarchique direct. Le Général Touvoly Bi Zobo, Commandant Supérieur à cette période, m’a simplement dit que les gendarmes commis pour ma sécurité sont des commandos, ce qui me suffisait comme réponse.
Au cabinet du Ministre, une partie des hommes de l’équipe monte la garde devant le bureau et c’est là que l’agent Danon (à l’époque Maréchal des Logis) était posté. Alors qu’il était habitué à m’appeler Monsieur le Ministre, j’ai constaté qu’il m’a dit un jour « tonton ». C’est ainsi que je l’ai convoqué à mon bureau pour lui demander ce qu’il voulait exprimer par cette appellation plus intime. C’est là que j’apprends qu’il est le fils de ma cousine feue Léhiri Sidonie. J’étais agréablement surpris car, à cet instant précis, je suis souvenu que lorsque j’étais jeune, feue Zokouali Djiméné, la mère de cette cousine, s’était souvent occupé de moi en soignant mes plaies. C’était donc une heureuse coïncidence que Dieu ait mis « mon fils » à mon service, à un moment extrêmement difficile pour la Côte d’Ivoire où le Président de la République me confiait une si haute et délicate responsabilité.
Tout le temps que Danon Kroko est resté avec moi, je lui ai prodigué des conseils de travail, de courage et d’honnêteté, en lui demandant d’éviter les travers du gain facile. Il m’a suivi et en 2007 ou 2008, il a passé avec succès, le concours très sélectif de l’Ecole des Officiers. Parti de mon équipe de sécurité depuis cette date pour suivre une formation d’officiers, Danon Kroko est devenu plus tard officier et travaille désormais à la gendarmerie du port d’Abidjan. De temps en temps, il passe saluer la famille et c’est avec une immense satisfaction que je le vois grandir dans le métier qu’il a choisi.
Evidemment lorsque surviennent les évènements douloureux du 11 avril 2012, il est malheureux de voir son ancien patron et oncle partir en exil devant la hargne destructrice des frci, avec l’humérus et une côte brisés à la suite d’un grave accident de la circulation. Le lieutenant Danon Kroko fait ce qu’il peut pour aider ma famille au village, qui est aussi le village de sa défunte mère, à supporter moralement mon absence. S’il m’envoie de l’argent, c’est cela qui est normal dans la culture que nous partageons ensemble. Il est loin d’être un activiste au point d’attenter à la sûreté d’un Etat.
Aujourd’hui, la situation sécuritaire de la Côte d’Ivoire ressemble à celle de 1963 où, à la suite des nombreuses arrestations liées aux évènements de cette période, des pères de familles innocents furent arrêtés et torturés inutilement en prison. A l’ère des frci, des gens n’hésitent pas à régler des comptes à leurs amis d’hier, des femmes dénoncent les maîtresses de leur mari pour se venger et vice versa, des locataires appellent les frci au secours pour ne pas payer les loyers aux propriétaires, etc. Notre gendarmerie ne doit pas tomber dans cette bassesse.
Je voudrais donc appeler l’attention du Commandant Supérieur de la gendarmerie nationale sur les agissements de son adjoint le colonel Vako Bamba. Selon les textes de cette institution que nous connaissons ensemble, l’adjoint au commandant supérieur n’a de pouvoir que celui que le Commandant Supérieur lui donne. En conséquence, le COSUPGEND doit prendre dès à présent ses responsabilités afin d’éviter que cette Arme d’honneur que constitue la gendarmerie ne soit pas ternie par de tels actes d’épuration injustifiée. J’invite le Commandant Supérieur de la gendarmerie à rendre à ce jeune officier, sa liberté et son travail.
Bertin Kadet
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