«Des individus qui n`ont rien à voir avec vous portent des vêtements miliaires et commettent toutes sortes d`exactions. Cela rejaillit négativement sur vous, et vous devez montrer votre capacité à assainir la corporation». Ces propos sont de Guillaume Soro, Premier ministre, ministre de la Défense, lors d’une rencontre avec la hiérarchie militaire. En application des décisions du président de la République relatives à la mise en place d’une police militaire et à la traque de tous les faux Frci qui pullulent les rues d’Abidjan et de l’intérieur du pays, le commandant Koné Zakaria a été nommé chef de cette unité spéciale qui fait la chasse actuellement aux éléments incontrôlés des Frci. Depuis quelques jours, ses hommes et lui sont en pleine exécution des instructions du chef de l’Etat. Est-ce la solution pour venir à bout à la situation sécuritaire créée par la rébellion de 2002 et la crise post électorale ? Le gouvernement, en agissant de la sorte, ne va-t-il pas créer d’autres «zinzin» et « bahéfoué » ? Depuis l’annonce de cette mesure, des jeunes gens qui ont volontairement pris des armes pour faire respecter le verdict des urnes sont devenus subitement des parias. Des personnes à traquer pour mettre de l’ordre dans les villes et villages du pays. Depuis le 19 septembre 2002, date de l’instauration de la rébellion en Côte d’Ivoire, il n’ ya pas eu de désarmement véritable. Or, à la faveur de la crise post électorale, des jeunes ont arraché des armes aux policiers, gendarmes et militaires pour combattre l’injustice, afin de sauver la démocratie. La procédure mise en place par le gouvernement ne peut pas permettre de réaliser un désarmement efficace. Puisque, depuis l’annonce de ces mesures draconiennes, plusieurs éléments en tenues « sont rentrés en brousse » avec leurs armes. Pendant le week-end de la nativité du Christ, un agent de police en poste dans un commissariat d’Abidjan nous a raconté la collaboration de son corps avec les Frci dans les commissariats. «Après la crise post électorale, les policiers n’ayant plus d’armes, ce sont les Frci qui étaient chargés d’assurer la sécurité des postes de police. En plus de procéder à des interpellations de bandits et autres. Depuis l’annonce de la mesure visant à traquer les faux Frci, ils ont tous disparu avec leurs armes. Nous ne savons pas où ils se trouvent. C’est un danger pour la Côte d’Ivoire. Parce que ce sont des milliers de jeunes qui avaient des armes de guerre. Nous proposons que le gouvernement fasse un véritable désarmement comparable, au modèle libérien, pour débarrasser la Côte d’Ivoire des armes. Sinon… », a prévenu l’agent de police. A l’analyse, le danger est réel. Guillaume Soro, secrétaire général des Forces nouvelles, n’a jamais milité pour un désarmement forcé de ses ex-combattants. Pourquoi, subitement, passe-t-on à un désarmement forcé qui ne dit pas son nom, sans prendre des mesures d’accompagnement en amont ? «Nous avons combattu pour sauver la démocratie en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, on nous traite de tous les péchés d’Israël », se lamente un Frci frustré qui a déposé son treillis défraichi, mais garde son arme chez lui à la maison. Ce jeune de 21 ans à peine veut être rassuré. Le ministre délégué à la Défense, Paul Koffi Koffi avait déclaré que ces faux Frci qui seront encasernés verront leur cas étudié. S’ils ont la capacité d’entrer dans l’armée, l’Etat prendra des mesures. Par contre, d’autres qui ne remplieront pas les conditions seront remerciées avec des mesures d’accompagnement. En tout état de cause, les mesures annoncées de traquer les faux Frci sont salutaires, mais sont lourdes de conséquences, parce qu’elles pourraient être source de banditisme et de nombreux braquages.
Patrick N’Guessan
Patrick N’Guessan