L'université de Bouaké à Bouaké sera bientôt rouverte, à tous ses étudiants, dans le cadre de sa relocalisation sur ses sites d'avant la crise de 2002. En attendant, nous avons fait un tour aux campus 1 et 2. Notre reportage.
Assis devant une clôture défraîchie par le temps, au quartier Ahougnassou, à Bouaké, ce 26 décembre 2011, le jeune Hervé Touré, gère une cabine téléphonique de cellulaire sur le trottoir, malgré l’harmattan qui secoue toute la capitale de la région de Gbêkê. Son lieu d'exercice n’est autre que la devanture du temple du savoir, le campus1 de l’université nationale de Bouaké. «Je gère ma cabine depuis bientôt 2 ans. Vous savez que l’université de Bouaké, même si elle ne fonctionne pas en plein temps, fonctionne tout de même. Je fais un chiffre d’affaires acceptable. Je pense que les jours à venir, je vais plus sourire avec le retour de tous les étudiants de Bouaké dans leur base» souhaite le jeune Hervé. Plus loin, à une trentaine de mètres, sur le long de la même clôture, une odeur de peinture fraîche nous accueille. En fait, une bonne partie du mur a été déjà été repeinte. Derrière la clôture, à l’intérieur de l'université, les premiers bâtiments occupés à l’époque par la station régionale de la télévision (Rti-Bouaké), sont envahis par la broussaille et des moisissures de tous genres. Les dix années de crise en sont la cause. Des impacts de balles sont visibles sur des pans de mur. Cependant, l’air de jeu des étudiants, juste à côté est actif. Signe que les lieux ne sont pas déserts. A quelques pas de là, le restaurant, cette grande bâtisse vient de faire sa toilette. «Le restaurant fonctionne même s’il y a quelques imperfections au niveau du service que l’on pourra rattraper. Le ticket nous revient à 200 F Cfa et les plats sont acceptables. C’est un bon début. Avec le temps, nous savons que le Président de la République, Alassane Ouattara, sera regardant à notre égard», espère Koné Dramane, étudiant en Deug 2 de droit. Non loin du restaurant, à quelques pas, se dressent fièrement les locaux du centre régional des œuvres universitaires (Crou), réhabilités entièrement. «Tout le personnel du Crou est sur place. Seulement, c’est au niveau de l’administration que tout n’est pas encore réuni. Seul le personnel de la scolarité est en place », confie ce responsable du Crou que nous avons trouvé sur place. Au niveau des questions des infrastructures disponibles pour les cours magistraux et les Travaux dirigés (Td), de grands moyens ont été dégagés pour la réhabilitation de 2 amphithéâtres sur 5. Les 3 autres sont également en voie de réhabilitation. Aussi, sur les 28 salles disponibles pour les cours de Td, 11 sont opérationnelles. «Les 17 autres restantes le seront, sous peu », informe un responsable de l’administration. Par ailleurs, pour accueillir ces milliers d’étudiants, de nombreuses chambres estudiantines ont été réhabilitées« A dire vrai, les tarifs ont été étudiés. Vous avez pour une chambre double, 3000 F Cfa. Et pour la chambre individuelle, 3500 F Cfa. Nous trouvons cela abordable. C’est la comptabilité qui gère ce dossier et aucune structure estudiantine n’est impliquée », indique Franck K. étudiant en licence de sciences économiques. En tout cas, les années précédentes, on ne trouvait qu’un seul amphithéâtre disponible pour l’ensemble des étudiants. Cependant, si le campus 1 qui regroupe aujourd’hui l’ensemble des étudiants de Bouaké est fonctionnel et continue d’être réhabilité, ce n'est pas le cas au campus 2 appelé communément Cp2. Là-bas, c’est un véritable chantier qui attend les autorités compétentes.
Un serpent surgit
Situé à un peu plus de deux kilomètres du campus 1, après le camp pénal de Bouaké, le campus 2 n’existe que de nom. Tous les bâtiments (administration, amphithéâtres, salles de Td, restaurant, dortoirs, etc.) ont été pillés et saccagés. Pour avoir le cœur net sur le niveau des dégâts, nous osons nous aventurer dans cette broussaille qui sert désormais de dortoir aux reptiles de tous genres. Çà et là, à l’intérieur des amphithéâtres délabrés qui ont souffert des affres de la guerre, jonchent des excréments d’animaux, d’homme, des mégots de cigarettes et même des préservatifs utilisés et desséchés par une forte chaleur. Le doute n’est pas permis. Ces lieux qui ont servi jadis à former des cadres ivoiriens, sont utilisés par des scélérats pour faire leur besoin naturel et même s’adonner à la consommation de la drogue, loin des regards indiscrets. Les préservatifs utilisés trouvés également sur les lieux, indiquent clairement que des choses pas du tout catholiques s'y passent. En allant plus loin, un bruit nous attire. Un bouvier, assis à côté du mur d'un bâtiment, laisse son troupeau de bœufs brouter paisiblement les herbes. « Tous les jours, je conduis mes animaux ici pour les faire brouter de l’herbe. J’ai même failli me faire piquer un jour par un serpent. Au moment où mes animaux broutaient, j’ai piqué un petit sommeil. J’ai été réveillé en sursaut quand j’ai senti sur mon corps un objet lisse qui montait sur moi. J’ai été surpris de voir que c’était un serpent. Fort heureusement, Dieu ma sauvé, il n’a pas pu me piquer. D’un coup de mon bâton, je l’ai tué. Je sais que c’est le nid des serpents, mais je viens ici par ce que je sais que personne n’occupe, pour l’heure, cet endroit. C’est en quelque sorte un endroit paisible pour moi. Nous les bouviers, nous rencontrons trop de difficultés dans l’exercice de notre profession. Et comme il n’est pas facile de trouver un coin paisible comme celui-ci, alors je conduis toujours mon troupeau», soutient Mahamadou D., le bouvier. Comme lui, elles sont nombreuses les personnes qui vont pour différentes activités sur le site du campus 2 détruit par la guerre. Dame Aya Véronique, ménagère, habite le petit village en face dudit campus. Son bois de chauffe, c'est dans cette broussaille qu'elle se le procure. « Depuis que la crise a éclaté et que le campus 2 a été détruit, c’est là que je me ravitaille en bois de chauffe. Nous avons coupé les manguiers et autres arbres qui étaient là-bas. Des gens ont même osé cultiver du maïs et de l’igname sur le site. Aujourd’hui que la crise est finie, j’espère que les autorités mettront tout en œuvre pour réhabiliter les lieux afin de permettre aux étudiants d’occuper à nouveau les. Cela nous aidera beaucoup. Les bandits qui ont pris pour base cet endroit vont s’en aller », espère-t-elle.
Ladji Abou SANOGO
(Correspondant régional)
Assis devant une clôture défraîchie par le temps, au quartier Ahougnassou, à Bouaké, ce 26 décembre 2011, le jeune Hervé Touré, gère une cabine téléphonique de cellulaire sur le trottoir, malgré l’harmattan qui secoue toute la capitale de la région de Gbêkê. Son lieu d'exercice n’est autre que la devanture du temple du savoir, le campus1 de l’université nationale de Bouaké. «Je gère ma cabine depuis bientôt 2 ans. Vous savez que l’université de Bouaké, même si elle ne fonctionne pas en plein temps, fonctionne tout de même. Je fais un chiffre d’affaires acceptable. Je pense que les jours à venir, je vais plus sourire avec le retour de tous les étudiants de Bouaké dans leur base» souhaite le jeune Hervé. Plus loin, à une trentaine de mètres, sur le long de la même clôture, une odeur de peinture fraîche nous accueille. En fait, une bonne partie du mur a été déjà été repeinte. Derrière la clôture, à l’intérieur de l'université, les premiers bâtiments occupés à l’époque par la station régionale de la télévision (Rti-Bouaké), sont envahis par la broussaille et des moisissures de tous genres. Les dix années de crise en sont la cause. Des impacts de balles sont visibles sur des pans de mur. Cependant, l’air de jeu des étudiants, juste à côté est actif. Signe que les lieux ne sont pas déserts. A quelques pas de là, le restaurant, cette grande bâtisse vient de faire sa toilette. «Le restaurant fonctionne même s’il y a quelques imperfections au niveau du service que l’on pourra rattraper. Le ticket nous revient à 200 F Cfa et les plats sont acceptables. C’est un bon début. Avec le temps, nous savons que le Président de la République, Alassane Ouattara, sera regardant à notre égard», espère Koné Dramane, étudiant en Deug 2 de droit. Non loin du restaurant, à quelques pas, se dressent fièrement les locaux du centre régional des œuvres universitaires (Crou), réhabilités entièrement. «Tout le personnel du Crou est sur place. Seulement, c’est au niveau de l’administration que tout n’est pas encore réuni. Seul le personnel de la scolarité est en place », confie ce responsable du Crou que nous avons trouvé sur place. Au niveau des questions des infrastructures disponibles pour les cours magistraux et les Travaux dirigés (Td), de grands moyens ont été dégagés pour la réhabilitation de 2 amphithéâtres sur 5. Les 3 autres sont également en voie de réhabilitation. Aussi, sur les 28 salles disponibles pour les cours de Td, 11 sont opérationnelles. «Les 17 autres restantes le seront, sous peu », informe un responsable de l’administration. Par ailleurs, pour accueillir ces milliers d’étudiants, de nombreuses chambres estudiantines ont été réhabilitées« A dire vrai, les tarifs ont été étudiés. Vous avez pour une chambre double, 3000 F Cfa. Et pour la chambre individuelle, 3500 F Cfa. Nous trouvons cela abordable. C’est la comptabilité qui gère ce dossier et aucune structure estudiantine n’est impliquée », indique Franck K. étudiant en licence de sciences économiques. En tout cas, les années précédentes, on ne trouvait qu’un seul amphithéâtre disponible pour l’ensemble des étudiants. Cependant, si le campus 1 qui regroupe aujourd’hui l’ensemble des étudiants de Bouaké est fonctionnel et continue d’être réhabilité, ce n'est pas le cas au campus 2 appelé communément Cp2. Là-bas, c’est un véritable chantier qui attend les autorités compétentes.
Un serpent surgit
Situé à un peu plus de deux kilomètres du campus 1, après le camp pénal de Bouaké, le campus 2 n’existe que de nom. Tous les bâtiments (administration, amphithéâtres, salles de Td, restaurant, dortoirs, etc.) ont été pillés et saccagés. Pour avoir le cœur net sur le niveau des dégâts, nous osons nous aventurer dans cette broussaille qui sert désormais de dortoir aux reptiles de tous genres. Çà et là, à l’intérieur des amphithéâtres délabrés qui ont souffert des affres de la guerre, jonchent des excréments d’animaux, d’homme, des mégots de cigarettes et même des préservatifs utilisés et desséchés par une forte chaleur. Le doute n’est pas permis. Ces lieux qui ont servi jadis à former des cadres ivoiriens, sont utilisés par des scélérats pour faire leur besoin naturel et même s’adonner à la consommation de la drogue, loin des regards indiscrets. Les préservatifs utilisés trouvés également sur les lieux, indiquent clairement que des choses pas du tout catholiques s'y passent. En allant plus loin, un bruit nous attire. Un bouvier, assis à côté du mur d'un bâtiment, laisse son troupeau de bœufs brouter paisiblement les herbes. « Tous les jours, je conduis mes animaux ici pour les faire brouter de l’herbe. J’ai même failli me faire piquer un jour par un serpent. Au moment où mes animaux broutaient, j’ai piqué un petit sommeil. J’ai été réveillé en sursaut quand j’ai senti sur mon corps un objet lisse qui montait sur moi. J’ai été surpris de voir que c’était un serpent. Fort heureusement, Dieu ma sauvé, il n’a pas pu me piquer. D’un coup de mon bâton, je l’ai tué. Je sais que c’est le nid des serpents, mais je viens ici par ce que je sais que personne n’occupe, pour l’heure, cet endroit. C’est en quelque sorte un endroit paisible pour moi. Nous les bouviers, nous rencontrons trop de difficultés dans l’exercice de notre profession. Et comme il n’est pas facile de trouver un coin paisible comme celui-ci, alors je conduis toujours mon troupeau», soutient Mahamadou D., le bouvier. Comme lui, elles sont nombreuses les personnes qui vont pour différentes activités sur le site du campus 2 détruit par la guerre. Dame Aya Véronique, ménagère, habite le petit village en face dudit campus. Son bois de chauffe, c'est dans cette broussaille qu'elle se le procure. « Depuis que la crise a éclaté et que le campus 2 a été détruit, c’est là que je me ravitaille en bois de chauffe. Nous avons coupé les manguiers et autres arbres qui étaient là-bas. Des gens ont même osé cultiver du maïs et de l’igname sur le site. Aujourd’hui que la crise est finie, j’espère que les autorités mettront tout en œuvre pour réhabiliter les lieux afin de permettre aux étudiants d’occuper à nouveau les. Cela nous aidera beaucoup. Les bandits qui ont pris pour base cet endroit vont s’en aller », espère-t-elle.
Ladji Abou SANOGO
(Correspondant régional)