Encore un conflit meurtrier inter-communautaire sur le sol ivoirien. Au moment où les nouveaux dirigeants cherchent les voies et moyens pour ressouder le tissu social déchiré et réconcilier les peuples devenus plus que jamais antagonistes, le sang vient à nouveau de couler. Un affrontement interethnique dans la ville pourtant paisible d'Arrah. Grande bourgade où les populations ont appris à vivre en bonne intelligence, autochtones comme allogènes difficiles d'ailleurs à distinguer car cohabitant parfaitement jusque là. Hélas, les FRCI (Forces républicaines de Côte d'Ivoire), et encore les FRCI, ont réussi à diviser ces populations naguère paisibles et à les opposer, causant mort d'homme. Ce qui s'est passé à Arrah, à l'instar des soulèvements successifs qu'il y a eu à Ebilassokro, à Aniassué (dans l'Indénié), puis à Sikensi ou à Vavoua, doit interpeller plus d'un. Pour éviter leurs déviations, le chef de l'Etat avait pris des mesures visant, il y a quelques mois, le retrait des troupes des FRCI de l'ensemble du territoire national et à leur regroupement dans les casernes. Si cette mesure a vu la disparition des armes et des hommes en tenue, qui s'exhibaient autrefois dans les rues, par endroit, la situation n'est pas encore revenue à la normale. Des éléments des FRCI, considérés comme des corps étrangers et gênants, continuent de faire la loi dans des localités, où ils se pavanent encore avec leurs armes et leurs tenues, malgré le redéploiement des forces légales de la gendarmerie et de la police. Leurs pratiques n'étant pas celles de ces forces auxquelles les populations sont habituées, il se crée un sérieux problème de cohabitation avec ces hommes en tenue, qui foule au pied l'organisation sociale des peuples au milieu desquels ils se retrouvent et tentent d'imposer leur loi par la force. Malheureusement, ces militaires de la dernière heure, pour la plupart venus du Nord à la faveur de la crise post-électorale, ont la malice, dans chaque localité où ils se retrouvent, d'emballer les communautés nordistes des lieux et de les impliquer dans leurs actions. Conséquence, dès que survient un antécédent avec les tuteurs locaux, l'étincelle se propage très vite en flamme interethnique ou communautaire entre autochtones désabusés et une sorte d'alliance FRCI-ressortissants du nord. Le conflit se généralise et prend tout de suite des allures tribales. Les exemples se multiplient et l'on assiste à une sorte de repli identitaire dans certaines régions ou les autochtones deviennent subitement hostiles à leurs frères du Nord, avec lesquels ils ont de tout temps tout partagé. Ce phénomène gagne du terrain avec la sédentarisation, depuis les événements de 2011, d'éléments d'ex-combattants venus du Nord et reconvertis en FRCI, dont la présence irrite les populations si ce ne sont certains de leurs agissements qui suscitent colère et révolte de la part de leurs tuteurs. Dans un pays, où l'on peine à parvenir à la cohésion sociale, il faut se méfier de ce genre de phénomène qui tend à remettre de l'huile sur le feu et à causer des morts inutiles. A l'image de ces nouvelles pertes en vies humaines à Arrah, qu'on aurait pu économiser pour une Côte d'Ivoire qui a vu tant de sang couler ces dernières années. Attention à la dérive tribale, surtout à une montée de fièvre contre les populations du Nord dans des régions, par la faute des FRCI, dont les agissements mettent en péril la vie de ces communautés. Vivement, que les nouvelles autorités prennent le taureau par les cornes.
F.D.BONY
F.D.BONY