Il dit ne "pas faire de politique", mais le rap d'Adjoguening, artiste très populaire en Guinée
équatoriale, lui a valu des menaces dans ce pays peu enclin à la liberté d'expression et il est persuadé de finir assassiné.
Ses disques artisanaux de rap en fang (la langue de l'ethnie majoritaire), qu'il distribue directement dans les boutiques de musique des deux principales villes Malabo et Bata, connaissent un énorme succès depuis quelques années.
Qu'il le veuille ou non, pour beaucoup d'Equato-guinéens, son nom est synonyme de critique du régime de Malabo, qui a été condamné par les organisations internationales de défense des droits de l'homme.
"A chaque album, les gens pensent qu'il va s'attirer des problèmes, et ce sont ces mêmes gens qui l'achètent", relève son producteur, un Camerounais qui se fait appeler M. Labbé.
Le sixième opus d'Adjoguening (un pseudonyme signifiant "guerrier sage" en fang), sorti en novembre 2011, a fait un tabac. Parce qu'il sent le soufre.
Dans sa maisonnette de Bata où il reçoit l'AFP, le chanteur âgé de 27 ans pèse ses mots. La liberté d'expression demeure très relative dans ce petit Etat où le président Teodoro Obiang gouverne sans partage depuis 1979. En interview comme dans les textes, le sous-entendu est donc de rigueur.
Le rappeur dément une rumeur persistante qui prétend qu'il a fait de la prison, mais confirme que son dernier album lui a valu des ennuis. "Il y a eu des rumeurs, des menaces. On me téléphonait pour me dire: +Mec, là tu vas trop loin+".
En cause notamment, la chanson "La vie est zéro". "Tout le monde finit à zéro, explique-t-il. Michael Jackson était la plus grande star, il est mort; Ben Laden était un terroriste et un croyant, et il est mort".
Entre les lignes, certains y ont vu un message aux "grands" de son pays qui se croiraient immortels.
Le chanteur jette des coups d'oeil nerveux vers la porte ouverte de sa demeure. "On peut payer un tueur à gage pour m'éliminer, c'est un risque", avance-t-il.
"Il y a deux artistes en Guinée équatoriale, Maele et moi. Maele ne chante plus, il fait du commerce. Il ne reste plus que moi", poursuit-il. Maele, rendu célèbre par ses chansons réalistes, a perdu une grande partie de son aura au début des années 2000 en devenant bienveillant à l'égard du régime.
Adjoguening ne prend pas cette voie et refuse de s'exiler. "L'exil, c'est le rêve, et celui qui rêve n'accepte pas la réalité, estime-t-il. Pour ouvrir le chemin, il faut faire des sacrifices".
Le chanteur se voit en alter ego équato-guinéen de Tupac Shakur, icône du gangsta rap. Difficile de démêler la posture fanfaronne d'une cruelle réalité. Tupac, le rappeur américain, est mort jeune (25 ans), assassiné à Las Vegas en 1996, lui fait-on remarquer. "Moi aussi ça va m'arriver, bien sûr, à cause de mes chansons, de mes thèmes".
Il se veut irrécupérable par le régime, et souligne d'ailleurs qu'il n'est "jamais apparu" lors des festivités de la Coupe d'Afrique des nations de football, co-organisée début 2012 en Guinée équatoriale et au Gabon.
"Je ne suis pas un politique, mais je parle de ce qui va mal, pour changer les mentalités".
"En Afrique, on dit que celui qui parle est dans l'opposition. Je ne fais pas un hip-hop d'opposition. Mais le hip-hop underground traite des sujets importants, graves. On dit que c'est révolutionnaire, mais ce n'est que la réalité".
Peut-il critiquer le président ou le gouvernement ? Un temps d'arrêt. Terrain glissant. "Oui, ça dépend, répond-il, le regard toujours aussi lourd de sous-entendus. Moi, je ne peux chanter que sur ce que j'ai vu".
Pour donner un aperçu de son art, il se lance dans une improvisation: "Dieu m'a puni / En m'envoyant dans un endroit où il y a toutes sortes de gens / Dieu m'a envoyé pour dire la vérité / Parce qu'il savait que tous m'écouteraient / Comme un chien qui aboie (...) Dieu m'a envoyé dans un pays où on ne jouit pas de son propre bien / Seulement du bien d'autrui".
Des ONG internationales accusent depuis des années le régime d'accaparer les revenus du pétrole, dont la Guinée équatoriale est le troisième producteur en Afrique. La Banque mondiale estime à 70% le taux de personnes y vivant sous le seuil de pauvreté.
équatoriale, lui a valu des menaces dans ce pays peu enclin à la liberté d'expression et il est persuadé de finir assassiné.
Ses disques artisanaux de rap en fang (la langue de l'ethnie majoritaire), qu'il distribue directement dans les boutiques de musique des deux principales villes Malabo et Bata, connaissent un énorme succès depuis quelques années.
Qu'il le veuille ou non, pour beaucoup d'Equato-guinéens, son nom est synonyme de critique du régime de Malabo, qui a été condamné par les organisations internationales de défense des droits de l'homme.
"A chaque album, les gens pensent qu'il va s'attirer des problèmes, et ce sont ces mêmes gens qui l'achètent", relève son producteur, un Camerounais qui se fait appeler M. Labbé.
Le sixième opus d'Adjoguening (un pseudonyme signifiant "guerrier sage" en fang), sorti en novembre 2011, a fait un tabac. Parce qu'il sent le soufre.
Dans sa maisonnette de Bata où il reçoit l'AFP, le chanteur âgé de 27 ans pèse ses mots. La liberté d'expression demeure très relative dans ce petit Etat où le président Teodoro Obiang gouverne sans partage depuis 1979. En interview comme dans les textes, le sous-entendu est donc de rigueur.
Le rappeur dément une rumeur persistante qui prétend qu'il a fait de la prison, mais confirme que son dernier album lui a valu des ennuis. "Il y a eu des rumeurs, des menaces. On me téléphonait pour me dire: +Mec, là tu vas trop loin+".
En cause notamment, la chanson "La vie est zéro". "Tout le monde finit à zéro, explique-t-il. Michael Jackson était la plus grande star, il est mort; Ben Laden était un terroriste et un croyant, et il est mort".
Entre les lignes, certains y ont vu un message aux "grands" de son pays qui se croiraient immortels.
Le chanteur jette des coups d'oeil nerveux vers la porte ouverte de sa demeure. "On peut payer un tueur à gage pour m'éliminer, c'est un risque", avance-t-il.
"Il y a deux artistes en Guinée équatoriale, Maele et moi. Maele ne chante plus, il fait du commerce. Il ne reste plus que moi", poursuit-il. Maele, rendu célèbre par ses chansons réalistes, a perdu une grande partie de son aura au début des années 2000 en devenant bienveillant à l'égard du régime.
Adjoguening ne prend pas cette voie et refuse de s'exiler. "L'exil, c'est le rêve, et celui qui rêve n'accepte pas la réalité, estime-t-il. Pour ouvrir le chemin, il faut faire des sacrifices".
Le chanteur se voit en alter ego équato-guinéen de Tupac Shakur, icône du gangsta rap. Difficile de démêler la posture fanfaronne d'une cruelle réalité. Tupac, le rappeur américain, est mort jeune (25 ans), assassiné à Las Vegas en 1996, lui fait-on remarquer. "Moi aussi ça va m'arriver, bien sûr, à cause de mes chansons, de mes thèmes".
Il se veut irrécupérable par le régime, et souligne d'ailleurs qu'il n'est "jamais apparu" lors des festivités de la Coupe d'Afrique des nations de football, co-organisée début 2012 en Guinée équatoriale et au Gabon.
"Je ne suis pas un politique, mais je parle de ce qui va mal, pour changer les mentalités".
"En Afrique, on dit que celui qui parle est dans l'opposition. Je ne fais pas un hip-hop d'opposition. Mais le hip-hop underground traite des sujets importants, graves. On dit que c'est révolutionnaire, mais ce n'est que la réalité".
Peut-il critiquer le président ou le gouvernement ? Un temps d'arrêt. Terrain glissant. "Oui, ça dépend, répond-il, le regard toujours aussi lourd de sous-entendus. Moi, je ne peux chanter que sur ce que j'ai vu".
Pour donner un aperçu de son art, il se lance dans une improvisation: "Dieu m'a puni / En m'envoyant dans un endroit où il y a toutes sortes de gens / Dieu m'a envoyé pour dire la vérité / Parce qu'il savait que tous m'écouteraient / Comme un chien qui aboie (...) Dieu m'a envoyé dans un pays où on ne jouit pas de son propre bien / Seulement du bien d'autrui".
Des ONG internationales accusent depuis des années le régime d'accaparer les revenus du pétrole, dont la Guinée équatoriale est le troisième producteur en Afrique. La Banque mondiale estime à 70% le taux de personnes y vivant sous le seuil de pauvreté.