Dans les rôles qu’ils se sont assignés, certains hommes se réclamant de Dieu causent des torts aux ‘’ brebis ‘’ qu’ils sont censés encadrer. Des torts qui, malheureusement, aboutissent dans certains cas, à la dislocation des cellules familiales. Notre enquête sur un sujet un peu tabou du fait de sa sensibilité. «(…) Car il s’élèvera de faux christs et de faux prophètes ; ils feront de grands prodiges et des miracles, au point de séduire, s’il était possible, même les élus » (Math : 24 :24). Ces propos de Jésus Christ de Nazareth dans la Bible sont aujourd’hui des réalités évidentes sur terre, tant les Eglises et autres édifices religieux pullulent. Avec, à leur tête, des guides qui ne manquent pas d’ingéniosité pour s’affubler de titres ronflants à la limite du délire, pour briser des foyers. Qu’ils ont en fait, selon les vrais termes de leur mission, le devoir de consolider. Dans le courant de l’année 2007, en début d’après-midi d’une journée ensoleillée, le quartier « Agnikro-Extension », à Abengourou, est secoué par une affaire embarrassante. Choquante même. Le Pasteur d’une église évangélique aurait été surpris en pleins ébats sexuels avec l’une de ses fidèles pourtant mariée. Et cela, par le conjoint de la femme en question. L’affaire fait grand bruit dans la capitale de l’Indénié et finit par atteindre les locaux du Tribunal de première instance d’Abengourou. En définitive, le mari cocu qui, , résidait loin de sa femme pour des raisons professionnelles, finit par se séparer de sa conjointe. L’odieux Pasteur, d’origine ghanéenne, qui apparemment n’en demandait pas mieux, engrossa sans autre forme de procès, la femme infidèle et finit lui-même par être écarté de son église. Des cas similaires où les guides religieux se retrouvent à la base de l’effondrement de foyers sont légion. Et cela, au sein de nombreuses religions révélées et connues. Sur la base de certains versets de la Bible ou du Coran, des responsables religieux manœuvrent, au nom de Dieu, pour séparer des couples. Le prétexte est tout net : éloigner ‘’leurs brebis’’ des hommes qui, à leurs yeux, ‘’sont dans le monde’’. Multipliant témoignages et autres arguments à travers leurs sermons, ces guides religieux s’échinent à faire croire à leurs fidèles que les membres des autres religions constituent des damnés avec qui il faut éviter de tisser un quelconque lien d’amour. Dans certains cas, ce sont des révélations dites inspirées de Dieu, qui sonnent le glas de l’existence de certains couples. Témoignages de victimes Le cas de N’guettia V, couturier âgé de 45 ans et installé auparavant à Abidjan, plus précisément à Abobo - Habitat, est révélateur. Dans le courant de l’année 1994, cet homme qui vivait en parfaite harmonie à Abobo avec Viviane sa fiancée, a perdu sa relation quand sa conjointe est tombée malade. « En plus des soins médicaux, l’une des amies de ma conjointe lui proposa d’aller dans son église afin que son pasteur prie pour elle. A la suite de plusieurs séances de prière, ma fiancée semblait recouvrer peu à peu la santé », confie M. N’guettia. « Curieusement, après un certain temps, elle ne venait plus à la maison. Elle dormait pratiquement sur le lieu du culte jusqu’au jour où le pasteur lui signifia que j’étais à la base de sa maladie et que Dieu exige qu’elle s’éloigne de moi. C’était le début de notre séparation. Aujourd’hui, elle vit avec ce pasteur », a poursuivi le tailleur qui, supportant difficilement la situation, a abandonné ses machines à coudre pour retourner à la terre dans le département de Koun-Fao. A Abengourou, nos investigations ont mis en exergue un cas similaire dans le foyer d’un ouvrier au quartier ‘’ Soungalobougou’’. De fait, dans une église évangélique située au quartier ‘’Agnikro’’, non loin de la rue du commerce, il a été révélé lors d’une séance de prière, que l’origine du mal dont souffrait une femme, se trouvait dans le domicile conjugal. « Elle a tellement été endoctrinée qu’elle est partie du foyer sans m’en informer » révèle A.A. son conjoint désemparé qui se retrouve avec 3 enfants sous les bras. Le divorce de E.L., la trentaine révolue, enseignant dans un établissement primaire dans le département d’Agnibilékrou est plutôt lié à une ‘’ incompatibilité ‘’ spirituelle. Etudiant de la Rose-Croix AMORC, il était membre de cet Ordre avant sa rencontre avec sa femme avec qui il a un enfant. « Au départ, ces études ésotériques ne nous posaient aucun problème. C’est par la suite dans une église évangélique qu’on a fait croire à ma femme qu’elle était mariée à ‘’un sorcier ‘’. Nos relations se sont brouillées et elle a exigé que j’abandonne l’Ordre auquel cas, elle me quitterait. En définitive, elle s’est retrouvée avec un autre homme de son église. La Rose-Croix n’est pas une religion et cette intolérance est bien dommage » raconte E.L. Ailleurs au quartier ‘’ Relais ‘’ à Abengourou, le mariage de A.O. musulman de 47 ans s’est brisé après 17 ans de vie commune, lorsque sa femme a intégré une église évangélique au quartier ‘’ Baoulékro ‘’. « Alors que je l’avais acceptée malgré ma religion musulmane, dans son église on a fait croire à ma femme que j’étais une âme perdue et qu’il fallait que je rejoigne cette église pour être sauvé. En définitive ma femme est partie face à mon refus de me reconvertir et malgré nos enfants » témoigne l’infortuné mari approché. A l’évidence, l’un des principaux facteurs de cette infortune ‘’ au nom de Dieu ‘’, reste, dans la plupart des cas, la ruée de la gent féminine vers les hommes religieux. Des guides considérés, à tort ou à raison, comme des garants de réconfort marqués du sceau de la confiance. Et pourtant, au-delà des tuniques religieuses dont ils sont revêtus, les hommes dits de Dieu sont avant tout des êtres humains ordinaires dotés dans la plupart des cas de toutes leurs facultés physiologiques. Cas d’adultères Dans la sous-préfecture de Grand-Lahou, des sources indiscrètes ont en effet évoqué le cas de D.A. enseignant de son état, la trentaine révolue, qui a choisi de se faire muter pour tenter d’oublier l’adultère entre sa conjointe et un responsable religieux bien connu et à qui l’encadrement spirituel de sa femme avait été confié. A Tiassalé, nos sources consultées lors de nos investigations ont également révélé le cas d’un responsable politique de premier rang proche de la municipalité de la ville (et dont nous taisons le nom), qui a demandé et obtenu le divorce d’avec sa femme après avoir réuni des preuves irréfutables de relations intimes entre son épouse et un guide religieux. Ce cas s’est répété dans la même ville de Tiassalé avec A.K. un responsable financier d’une structure qui, après 13 ans de vie commune avec son épouse a fini par se séparer d’elle. Et il s’en explique avec amertume. « A un moment de notre vie commune, nous avons connu des difficultés. Mon épouse a alors opté de se confier à un homme de Dieu pour bénéficier de ses conseils et de son encadrement. C’est donc régulièrement qu’elle allait le voir. En définitive, il s’est trouvé que tout l’entourage était informé des relations intimes entre cet homme de Dieu et ma femme. Sauf moi. Quand l’affaire a éclaté et que je l’ai sue, nous avons discuté et divorcé à l’amiable. Je pense qu’il faut permettre aux prêtres par exemple de se marier ». En général, sur ce genre d’adultère qui met en scène des hommes religieux et qui brise des foyers, nos investigations révèlent que le célibat imposé notamment par la religion catholique romaine à ses prêtres, est loin d’en être le facteur principal. Le cas récent , le plus patent est assurément celui du Pasteur Oulaï Gban Wison de l’église évangélique ‘’ Mission Enfants pour Christ ‘’. Cet homme religieux marié et dont l’église était basée à Abengourou au quartier ‘’ Plateau’’, a brisé son propre foyer en entretenant dans l’enceinte même de son église, des relations extraconjugales avec des jeunes filles à qui il promettait la délivrance. Mis aux arrêts et condamné à 5 années de prison pour attentat à la pudeur, son épouse et ses enfants qui ne se doutaient de rien, se retrouvent aujourd’hui livrés à eux mêmes. La fermeture de son église a été ordonnée par le tribunal de 1ère instance d’Abengourou. La question qui revient au vu de ces faits graves est quelle est cette propension de ces hommes dits de Dieu à céder à la tentation de la chair ? Des religieux expliquent A première vue, ces constats posent d’une part la problématique de la possibilité ou non du mariage entre des conjoints de différentes religions et d’autre part de la fiabilité des interprétations, des révélations et autres prophéties des guides religieux. Dans la religion chrétienne, si les difficultés liées aux mariages ‘’mixtes ‘’ ne se posent pas avec beaucoup d’acuité au sein de l’église catholique, elles sont cependant plus notables dans les églises évangéliques et dans la religion musulmane où les unions mixtes posent problème. Toutefois, le Pasteur Koné T. de l’église évangélique ‘’ Vie profonde ‘’ à Abengourou a tenu à apporter des précisions. « Nous nous insurgeons seulement contre les mariages entre les membres de notre église et les musulmans. L’union entre deux chrétiens est admise quelque soit l’église » dira-t-il. Expliquant la position de son église, l’homme de Dieu s’est inquiété de l’équilibre spirituel des enfants aux cas où les deux conjoints sont de religions opposées. « Si par exemple l’un des conjoints accepte Jésus comme son sauveur et que l’autre le rejette systématiquement, quel choix devra faire l’enfant qui naît d’un tel couple ? » s’est-il interrogé ? Selon des autorités musulmanes, aucun verset dans le Coran n’interdit à priori le mariage entre un musulman et un fidèle d’une autre religion. A les suivre, l’interdiction du temps du Prophète est liée à l’hostilité et la guerre existante alors entre musulmans, chrétiens et juifs. « De nos jours, tout dépend des familles musulmanes dont certaines préfèrent les mariages entre musulmans pour une meilleure harmonie du couple » ont-ils fait savoir. Toutefois, de nos investigations, il ressort que l’opinion majoritaire dans l’Islam permet à un musulman d’épouser une femme chrétienne ou juive selon les rituels de l’islam, mais refuse qu’une musulmane épouse un chrétien ou un juif. Le verset traditionnellement utilisé par les imans pour interdire les mariages inter-religieux est le verset 5 : 5 « Aujourd’hui, la jouissance de tout ce qui est bon vous a été permise… Vous sont permises, les femmes vertueuses d’entre les croyantes et les femmes vertueuses d’entres les gens qui ont reçu le Livre avant vous ». Les Imams traditionnels, prétendant qu’étant donné que seules les femmes ont été mentionnées dans ce passage, il faut déduire que le mariage entre femmes musulmanes et hommes non musulmans est interdit. La principale crainte serait que la religion du mari devienne dominante. Aussi, des musulmans plus rigoristes estiment purement et simplement qu’aucun musulman n’a le droit d’épouser un non musulman. De faux Guides Il ressort, de l’essentiel de nos investigations, que de nombreux hommes de Dieu préfèrent les mariages entres les fidèles d’une même communauté pour préserver l’harmonie du couple. Ce souci quoique noble, suffit-il à briser des foyers déjà constitués depuis de longues années et qui ont vu naitre des enfants ? « Non ! », tranche le Pasteur Anzouan Martin, pasteur principal de l’église évangélique des Assemblées de Dieu de Baoulékro (Abengourou). Ce guide spirituel trouve abominable de séparer un (e) fidèle de son conjoint (e) pour sa religion parce qu’aucun texte religieux ne le dit. «Nous reconnaissons que ces situations de rupture existent dans certaines églises, mais c’est le fait de nouveaux pasteurs zélés à la formation douteuse ». Cependant, le Pasteur Anzouan Martin note que « Pour un jeune chrétien de notre église qui cherche à se marier, nous lui recommandons fortement un conjoint de notre église. Mais s’il est déjà marié avant d’intégrer notre communauté, il n’y a aucune raison de briser son foyer sur la base de la religion ». Sur les nombreux cas d’adultères qui sont également à la base de certains cas d’effondrement de foyers, les hommes religieux que nous avons approchés ont, dans un même élan, reconnu que la communauté des hommes religieux est, aujourd’hui, infestée de guides peu recommandables. « Mais cet état des faits n’étonne guère les vrais hommes de Dieu avertis et devrait interpeler nos fidèles. Les prophéties avaient déjà annoncé l’avènement des faux hommes de Dieu », ont-ils soutenu. Dans tous les cas, les guides religieux ne doivent pas perdre de vue que leurs fidèles ont des droits légaux et que la liberté de se fixer à une religion fait partie de ces droits. Un mariage inter-religieux devrait donc avoir lieu sans que l’un des conjoints ait à adopter de force la religion de son partenaire. Au demeurant, ce ne sont pas des exemples de mariages ‘’ mixtes ‘’ qui manquent à travers le monde.
Dossier réalisé par Joseph Kissy
Dossier réalisé par Joseph Kissy
