«L’ONG Côte d’Ivoire-Amérique condamne avec la dernière énergie, les attaques répétées contre les positions des FRCI ces dernières semaines, les attaques récentes contre le siège provisoire du Front populaire ivoirien (FPI) et les locaux abritant le siège du quotidien Le Temps, s’incline devant les morts, exprime sa solidarité et sa compassion aux blessés.
Alors même que le Gouvernement s’emploie, depuis la fin de la crise postélectorale, à combattre le grand banditisme qui a prospéré sur les cendres de la guerre, les derniers événements ; surtout l’attaque du camp d’Akouédo, sont venus montrer la fragilité et la perméabilité de notre système de défense et de sécurité. Cette attaque paraît audacieuse ; si l’on s’en tient aux circonstances dans lesquelles elle s’est déroulée, telles que décrites à la télévision nationale par le ministre de l’Intérieur Hamed Bakayoko. L’onde de choc déclenchée dans l’opinion par cette nouvelle escalade de la violence, nous semble-t-il, est à la mesure de l’audace de ce commando invisible. Pourquoi et comment des hommes en armes ont-ils pu frapper au cœur le camp militaire d’Akouédo, réputé pour être le plus grand du pays ? D’un côté, le ministre Hamed Bakayoko avait affirmé le lendemain de l’attaque face à la presse que cette opération meurtrière a été préparée et exécutée par des bandes armées liées à l’ancien régime de Laurent Gbagbo. Des noms sont même cités. D’un autre côté, certaines opinions n’ont pas hésité à mettre clairement en cause le désarmement non achevé pour expliquer l’action de ces hommes en armes. En l’absence de preuves corroborant ces deux thèses et en attendant les résultats des enquêtes en cours pour situer les responsabilités, l’ONG Côte d’Ivoire-Amérique appelle à la retenue.
Toutefois, rien qu’en établissant un lien étroit entre les affirmations du ministre de l’Intérieur et le culot de ces hommes, comment ne pas voir dans cette attaque d’Akouédo un désespoir existentiel qui trouve son fondement dans le fanatisme? En d’autres termes, ces hommes armés, qu’ils soient des pro-Gbagbo ou des mécontents des ex-Forces nouvelles, semblent dire au pouvoir ceci : «nous sommes aussi des Ivoiriens. Nous voulons qu’on nous écoute et qu’on prenne en compte ce que nous voulons». Au lieu donc de les considérer comme des aventuriers, dont l’action ne portera aucun fruit, ne serait-il pas bon déjà d’essayer de juguler ce fanatisme, cette barbarie qui parvient tout de même à trouver écho dans certaines populations?
D’ailleurs, l’histoire récente de notre pays est là pour rappeler à notre mémoire collective les fautes graves d’appréciation commises par l’ancien régime de Laurent Gbagbo, fautes qui ont pu contribuer à pourrir davantage le climat social. A partir de 2000, le régime FPI a eu à faire face régulièrement à des tentatives de prise du pouvoir d’état par les armes. C’est la dernière tentative déjouée dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002 qui s’est muée en une rébellion armée. Alors que la gestion du pouvoir devenait difficile pour lui dans un tel contexte, Laurent Gbagbo a cru pouvoir résoudre la question de la rébellion par les armes. On connait la suite. Le contexte n’est peut-être pas le même aujourd’hui. Mais les mêmes causes produisant les mêmes effets, le pouvoir actuel a tout intérêt à faire preuve de modestie, de clairvoyance et d’anticipation. Au lieu donc d’anathémiser à son tour ces bandes armées en brandissant un hégémonisme parfois arrogant, du genre : «ils ont perdu la guerre, ils ne peuvent plus rien faire…», le régime Ouattara ne devrait-il pas plutôt s’attacher à comprendre ce fanatisme qui hante ces hommes armés? Un fanatisme qui, de toute évidence, trouve son origine dans la situation socio-politique du pays. Après tout, au-delà de la perdition supposée ou réelle de ces bandes armées dans une déréliction sans lendemain, et dès lors que le ministre de l’Intérieur lui-même - qui sait beaucoup - les lie à Laurent Gbagbo, n’est-on pas conduit, dans ces conditions, à mettre simplement en évidence parmi les causes de leur révolte le sentiment exacerbé d’humiliation que ceux-ci continuent de ressentir après la défaite et l’arrestation de leur mentor?
Nécessité de repenser la réconciliation nationale
Plutôt que de se laisser entraîner dans le tourbillon d’une croisade militaire à l’issue incertaine, le pouvoir doit se mobiliser dans la direction d’un vrai dialogue politique avec son opposition.
En cela, nous félicitons et encourageons le Premier ministre Jeannot Ahoussou Kouadio pour sa clairvoyance, sa sagesse et son esprit du dialogue. Aussitôt nommé, l’actuel chef du Gouvernement a pris son bâton de pèlerin pour inviter l’opposition autour de la table de discussion. Son approche du dialogue républicain, visiblement inspirée par la philosophie politique de Félix Houphouët-Boigny, exprime un réel besoin de communication et de relations humaines. En l’absence du Chef de l’Etat, Jeannot Ahoussou Kouadio, vient de donner encore la preuve, à travers sa récente adresse à la Nation, que dans le dialogue et la tolérance, les Ivoiriennes et les Ivoiriens peuvent créer les conditions véritables d’une paix durable pour tous, socle d’un développement rapide, continu et profitable à tous.
Au chef de l’Etat, Alassane Ouattara, nous l’invitons, au regard du contexte, à envoyer des signaux forts à son opposition. Les projets herculéens qu’il a commencés ne pourront se poursuivre et s’achever que dans un climat apaisé. Il est vrai que la Côte d’Ivoire, sous sa houlette, a retrouvé du crédit et est en train de reprendre sa place en Afrique et dans le monde. Tout ceci ne peut durer que dans l’union retrouvée. Pour cette union, le Président de la République doit accepter tous les sacrifices, parmi lesquels la libération des cadres LMP emprisonnés dans le Nord du pays. Ce sera alors apprécié comme un acte politique fort qui va décrisper le climat social. Parce qu’en les maintenant longtemps encore en prison, le chef de l’Etat risque de créer une situation qui réunira toutes les conditions requises pour provoquer le désespoir puis l’action et la réaction chez une partie de son peuple, plus précisément les proches de ces femmes et hommes emprisonnés.
La Commission-Dialogue-Vérité-Réconciliation que dirige l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny éprouve, quant à elle, du mal à réconcilier les Ivoiriens. Pour la simple raison que, près de deux années après sa mise en place, les Ivoiriens ne perçoivent pas les résultats du travail de cette institution dans laquelle beaucoup, pourtant, avait placé un grand espoir. Dès sa nomination, Charles Konan Banny avait suscité légitimement cet espoir. Pour avoir été Premier ministre de la transition pendant plus d’une année, les Ivoiriens étaient en droit de penser que l’ancien Gouverneur de la BCEAO avait une bonne maîtrise et une connaissance intime des grands dossiers liés à la réconciliation. Et que, pour créer les conditions des retrouvailles rapides entre les Ivoiriens, il allait s’empresser d’inviter le pouvoir à traiter, avec diligence, les questions pertinentes comme le désarmement, le retour des exilés, le cas des prisonniers etc. Au lieu de prendre des initiatives de cette nature qui paraissent si simples et qui ne peuvent d’aucune façon empêcher la justice de faire son travail, le président de la CDVR s’est retranché derrière l’argument de manque de moyens. Ils sont d’ailleurs beaucoup parmi nos compatriotes qui affirment aujourd’hui ne pas saisir le mode opératoire de la CDVR, si tant est qu’il en existe un. Pour l’ONG Côte d’Ivoire-Amérique, il est clair que Charles Konan Banny n’a pas su adopter le savoir-agir qui résulte de la bonne mobilisation des moyens et la mise en place d’une stratégie faite de réalisme et de pragmatisme pour accomplir sa mission. Le patron de la CDVR devra reconnaître cela et changer son fusil d’épaule afin que la réconciliation nationale ne stagne pas longtemps encore dans l’immobilisme pour prolonger la souffrance des Ivoiriens.
Enfin à l’ONUCI, nous demandons de renforcer son dispositif militaire pour appuyer véritablement les forces régulières de Côte d’Ivoire dans leur mission de protection et de sécurisation des personnes et leurs biens.
Fait à Abidjan, le 22 août 2012
Le Président Adia YAPOBI
Alors même que le Gouvernement s’emploie, depuis la fin de la crise postélectorale, à combattre le grand banditisme qui a prospéré sur les cendres de la guerre, les derniers événements ; surtout l’attaque du camp d’Akouédo, sont venus montrer la fragilité et la perméabilité de notre système de défense et de sécurité. Cette attaque paraît audacieuse ; si l’on s’en tient aux circonstances dans lesquelles elle s’est déroulée, telles que décrites à la télévision nationale par le ministre de l’Intérieur Hamed Bakayoko. L’onde de choc déclenchée dans l’opinion par cette nouvelle escalade de la violence, nous semble-t-il, est à la mesure de l’audace de ce commando invisible. Pourquoi et comment des hommes en armes ont-ils pu frapper au cœur le camp militaire d’Akouédo, réputé pour être le plus grand du pays ? D’un côté, le ministre Hamed Bakayoko avait affirmé le lendemain de l’attaque face à la presse que cette opération meurtrière a été préparée et exécutée par des bandes armées liées à l’ancien régime de Laurent Gbagbo. Des noms sont même cités. D’un autre côté, certaines opinions n’ont pas hésité à mettre clairement en cause le désarmement non achevé pour expliquer l’action de ces hommes en armes. En l’absence de preuves corroborant ces deux thèses et en attendant les résultats des enquêtes en cours pour situer les responsabilités, l’ONG Côte d’Ivoire-Amérique appelle à la retenue.
Toutefois, rien qu’en établissant un lien étroit entre les affirmations du ministre de l’Intérieur et le culot de ces hommes, comment ne pas voir dans cette attaque d’Akouédo un désespoir existentiel qui trouve son fondement dans le fanatisme? En d’autres termes, ces hommes armés, qu’ils soient des pro-Gbagbo ou des mécontents des ex-Forces nouvelles, semblent dire au pouvoir ceci : «nous sommes aussi des Ivoiriens. Nous voulons qu’on nous écoute et qu’on prenne en compte ce que nous voulons». Au lieu donc de les considérer comme des aventuriers, dont l’action ne portera aucun fruit, ne serait-il pas bon déjà d’essayer de juguler ce fanatisme, cette barbarie qui parvient tout de même à trouver écho dans certaines populations?
D’ailleurs, l’histoire récente de notre pays est là pour rappeler à notre mémoire collective les fautes graves d’appréciation commises par l’ancien régime de Laurent Gbagbo, fautes qui ont pu contribuer à pourrir davantage le climat social. A partir de 2000, le régime FPI a eu à faire face régulièrement à des tentatives de prise du pouvoir d’état par les armes. C’est la dernière tentative déjouée dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002 qui s’est muée en une rébellion armée. Alors que la gestion du pouvoir devenait difficile pour lui dans un tel contexte, Laurent Gbagbo a cru pouvoir résoudre la question de la rébellion par les armes. On connait la suite. Le contexte n’est peut-être pas le même aujourd’hui. Mais les mêmes causes produisant les mêmes effets, le pouvoir actuel a tout intérêt à faire preuve de modestie, de clairvoyance et d’anticipation. Au lieu donc d’anathémiser à son tour ces bandes armées en brandissant un hégémonisme parfois arrogant, du genre : «ils ont perdu la guerre, ils ne peuvent plus rien faire…», le régime Ouattara ne devrait-il pas plutôt s’attacher à comprendre ce fanatisme qui hante ces hommes armés? Un fanatisme qui, de toute évidence, trouve son origine dans la situation socio-politique du pays. Après tout, au-delà de la perdition supposée ou réelle de ces bandes armées dans une déréliction sans lendemain, et dès lors que le ministre de l’Intérieur lui-même - qui sait beaucoup - les lie à Laurent Gbagbo, n’est-on pas conduit, dans ces conditions, à mettre simplement en évidence parmi les causes de leur révolte le sentiment exacerbé d’humiliation que ceux-ci continuent de ressentir après la défaite et l’arrestation de leur mentor?
Nécessité de repenser la réconciliation nationale
Plutôt que de se laisser entraîner dans le tourbillon d’une croisade militaire à l’issue incertaine, le pouvoir doit se mobiliser dans la direction d’un vrai dialogue politique avec son opposition.
En cela, nous félicitons et encourageons le Premier ministre Jeannot Ahoussou Kouadio pour sa clairvoyance, sa sagesse et son esprit du dialogue. Aussitôt nommé, l’actuel chef du Gouvernement a pris son bâton de pèlerin pour inviter l’opposition autour de la table de discussion. Son approche du dialogue républicain, visiblement inspirée par la philosophie politique de Félix Houphouët-Boigny, exprime un réel besoin de communication et de relations humaines. En l’absence du Chef de l’Etat, Jeannot Ahoussou Kouadio, vient de donner encore la preuve, à travers sa récente adresse à la Nation, que dans le dialogue et la tolérance, les Ivoiriennes et les Ivoiriens peuvent créer les conditions véritables d’une paix durable pour tous, socle d’un développement rapide, continu et profitable à tous.
Au chef de l’Etat, Alassane Ouattara, nous l’invitons, au regard du contexte, à envoyer des signaux forts à son opposition. Les projets herculéens qu’il a commencés ne pourront se poursuivre et s’achever que dans un climat apaisé. Il est vrai que la Côte d’Ivoire, sous sa houlette, a retrouvé du crédit et est en train de reprendre sa place en Afrique et dans le monde. Tout ceci ne peut durer que dans l’union retrouvée. Pour cette union, le Président de la République doit accepter tous les sacrifices, parmi lesquels la libération des cadres LMP emprisonnés dans le Nord du pays. Ce sera alors apprécié comme un acte politique fort qui va décrisper le climat social. Parce qu’en les maintenant longtemps encore en prison, le chef de l’Etat risque de créer une situation qui réunira toutes les conditions requises pour provoquer le désespoir puis l’action et la réaction chez une partie de son peuple, plus précisément les proches de ces femmes et hommes emprisonnés.
La Commission-Dialogue-Vérité-Réconciliation que dirige l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny éprouve, quant à elle, du mal à réconcilier les Ivoiriens. Pour la simple raison que, près de deux années après sa mise en place, les Ivoiriens ne perçoivent pas les résultats du travail de cette institution dans laquelle beaucoup, pourtant, avait placé un grand espoir. Dès sa nomination, Charles Konan Banny avait suscité légitimement cet espoir. Pour avoir été Premier ministre de la transition pendant plus d’une année, les Ivoiriens étaient en droit de penser que l’ancien Gouverneur de la BCEAO avait une bonne maîtrise et une connaissance intime des grands dossiers liés à la réconciliation. Et que, pour créer les conditions des retrouvailles rapides entre les Ivoiriens, il allait s’empresser d’inviter le pouvoir à traiter, avec diligence, les questions pertinentes comme le désarmement, le retour des exilés, le cas des prisonniers etc. Au lieu de prendre des initiatives de cette nature qui paraissent si simples et qui ne peuvent d’aucune façon empêcher la justice de faire son travail, le président de la CDVR s’est retranché derrière l’argument de manque de moyens. Ils sont d’ailleurs beaucoup parmi nos compatriotes qui affirment aujourd’hui ne pas saisir le mode opératoire de la CDVR, si tant est qu’il en existe un. Pour l’ONG Côte d’Ivoire-Amérique, il est clair que Charles Konan Banny n’a pas su adopter le savoir-agir qui résulte de la bonne mobilisation des moyens et la mise en place d’une stratégie faite de réalisme et de pragmatisme pour accomplir sa mission. Le patron de la CDVR devra reconnaître cela et changer son fusil d’épaule afin que la réconciliation nationale ne stagne pas longtemps encore dans l’immobilisme pour prolonger la souffrance des Ivoiriens.
Enfin à l’ONUCI, nous demandons de renforcer son dispositif militaire pour appuyer véritablement les forces régulières de Côte d’Ivoire dans leur mission de protection et de sécurisation des personnes et leurs biens.
Fait à Abidjan, le 22 août 2012
Le Président Adia YAPOBI