A son arrivée à Abidjan, il y a plusieurs semaines, Madame Helen Clark, l’administrateur du PNUD (Programme des Nations-Unies pour le Développement), a fait une demande singulière. Elle a manifesté son désir de connaître la Côte d’Ivoire des villages. Très souvent dans les visites officielles, sur tout le continent, on privilégie dans le programme, la visite des villes et des infrastructures. On oublie cette Afrique qui se meurt. On sait tous que nos villages sont à des années lumière de nos capitales et de nos grandes villes. Pour le moment, dans les projets de développement de la plupart des pays africains, le village n’a pas sa place. Le village nourrit la ville mais ce sont les citadins qui doivent tirer profit de la croissance. Presque tout manque dans les villages. Ces habitants sont des vrais déshérités. Le paradoxe réside dans le fait qu’on dépense plus pour ceux qui habitent dans les villes que ceux qui sont en ville. Or, ceux des villages sont les plus nombreux en termes de chiffres de la population. Mais cela fait bien de déverser la quasi-totalité des budgets sur les habitants de la ville. Malgré cela, ce sont les hommes et les femmes de la ville qui ne sont jamais satisfaits. Jamais contents et heureux. En ville on veut toujours plus. A force d’imiter le mode de vie de l’Occident, connu à travers le cinéma et la télévision, les habitants de la ville se chargent d’un lourd fardeau qui empêche tout véritable épanouissement humain. Plus question d’épargner. Le modèle de consommation exige des dépenses quotidiennes en superflu. L’orgueil et l’envie d’une population poussent à l’achat. Chaque jour on crée de nouveaux besoins pour ces martyrs de la consommation. Ne pas atteindre la satisfaction de ces désirs, chose impossible devant tant de déferlement de besoins, ne peut qu’engendrer colère, aigreur, manifestations de toutes sortes. Donner au village, c’est leur enlever du pain à la bouche. Félix Houphouët-Boigny a maintes fois raconté comment il est rentré dans le syndicalisme et la politique. Tout commence par le mépris d’un européen. Le colon perçoit plus d’argent que le colonisé pour la vente du même produit agricole. Pour le même kilogramme, le « toubab » encaisse plus d’argent que le « nègre ». Devant la plainte de celui qui va changer le destin de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique, le colon répliqua : « Nous ne pouvons pas bénéficier du même prix. Toi tu manges le foutou et moi la salade ». Souvent une seule phrase change le destin d’un individu et même d’une nation. Aujourd’hui, nous nous trouvons à cette croisée du chemin. La nourriture et les plaisirs des gens de la vie coûtent cher et on continue de tout faire pour leur faire plaisir au détriment de la grande masse laborieuse de nos villages. Leur salut ne viendra que par les micro-finances. De nombreux spécialistes, dans le domaine, ont insisté sur cet aspect à développer pour « sauver » nos villages. L’un des plus brillants cerveaux du monde était de passage à Abidjan, il y a quelques semaines, pour une réunion sur la micro-finance. On aurait dû le faire entendre beaucoup plus par la population. C’est vrai qu’il a été reçu par le Premier ministre mais je reste sur ma faim. Qui sait si le gouvernement lui a demandé un rapport sur le développement de nos villages à travers la micro-finance. Je suis un adepte inconditionnel de Jacques Attali mais je pense qu’on peut aussi venir au secours de nos populations des villages par des tontines. A la manière des Bamiléké du Cameroun. Chaque mois ,
des gens du même village cotisent une forte somme pour donner à une personne afin qu’elle s’attèle pour créer un commerce rentable. Même en ville les Bamiléké ont développé la tontine ave droiture et sincérité. Les résultats sont spectaculaires. De nombreux ouvrages ont été publiés sur ce système d’épargne, cette micro-finance Bamiléké. C’est au Canada que j’ai compris la réussite de la tontine Bamiléké avec tous les Camerounais de cette ethnie qui ont vraiment « percé » grâce aux fonds de leurs familles qui ont construit de vrais empires financiers à travers les tontines. Dans leur pays même ils ont « envahi » tous les secteurs de l’économie. J’ai essayé de comprendre pourquoi cette ethnie a ainsi réussi économiquement. Les réponses ne varient pas. Pas de politique mais de l’économie. Oui, les souffrances ou la persécution d’un peuple peuvent le stimuler vers plus de réussite dans la vie. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.
Par Isaïe Biton Koulibaly
des gens du même village cotisent une forte somme pour donner à une personne afin qu’elle s’attèle pour créer un commerce rentable. Même en ville les Bamiléké ont développé la tontine ave droiture et sincérité. Les résultats sont spectaculaires. De nombreux ouvrages ont été publiés sur ce système d’épargne, cette micro-finance Bamiléké. C’est au Canada que j’ai compris la réussite de la tontine Bamiléké avec tous les Camerounais de cette ethnie qui ont vraiment « percé » grâce aux fonds de leurs familles qui ont construit de vrais empires financiers à travers les tontines. Dans leur pays même ils ont « envahi » tous les secteurs de l’économie. J’ai essayé de comprendre pourquoi cette ethnie a ainsi réussi économiquement. Les réponses ne varient pas. Pas de politique mais de l’économie. Oui, les souffrances ou la persécution d’un peuple peuvent le stimuler vers plus de réussite dans la vie. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.
Par Isaïe Biton Koulibaly