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Politique Publié le lundi 14 janvier 2013 | Le Patriote

Après la reconnaissance du merite de ses responsables : Le Patriote - Retour sur un parcours

Le jour de gloire est-il arrivé pour Le Patriote ? Enfin, le bout du tunnel et la fin de la marche tumultueuse et quasiment abyssale ? L’espoir a frémi et le ciel s’est illuminé le vendredi dernier, avec la décoration de ses trois premiers responsables. Charles Sanga, Emmanuel Koré et Bakary Nimaga ont été élevés au grade d’officiers du mérite ivoirien. Pour services rendus à la nation ! Une distinction méritée qui salue le combat d’un organe de presse qui s’est engagé pour l’avènement d’une société où la démocratie, la liberté, le respect des droits de l’homme et la justice sont les valeurs les mieux partagées. Les lauriers récoltés le vendredi dernier, devant la nation, sous les yeux bienveillants de la Grande Chancelière Henriette Dagri Diabaté, étaient d’autant plus doux que la lutte aura été âpre, parsemée d’embûches, de complots de toutes sortes. C’est en juillet 1999 que le journal qui paraissait de façon bi-hebdomadaire inaugure sa sortie quotidienne. Très vite, il devient le porte-voix principal des opprimés, des brimés et de tous ceux qui sont frappés d’exclusion et de marginalisation. Cette mission a un prix que Le Patriote paiera au plus fort, sous les régimes successifs à Félix Houphouët Boigny. Principalement sous la transition du Général Robert Guéi et sous la refondation de Laurent Gbagbo. Entre brimades, menaces de mort, clandestinité, incendies des locaux, traques des journalistes et travailleurs, Le Patriote a tout vu, dans ce combat pratiquement sacrificiel. Il fallait opérer sa mise à mort, le décapiter et l’étouffer totalement. Sous Guéi, pas un jour ne passait sans que le journal ne vive les menaces de la soldatesque à la solde du patron de la junte militaire du CNSP. C’est sous la refondation que Le Patriote a payé le lourd tribut de sa lutte contre la dictature. En 2001, des hommes du ministère de l’intérieur lancent des grenades dans les locaux du journal et tabassent des travailleurs. En septembre 2002 quand éclate la guerre, Le Patriote est pris à partie. Il est taxé d’avoir pris le parti de la rébellion et ses animateurs sont contraints d’entrer en clandestinité de longs mois durant. Contrairement aux journaux proches du FPI qui sont sous protection, on refuse cette possibilité au Patriote et aux autres journaux de l’opposition à l’époque. Le ministre de la défense d’alors, Lida Kouassi Moise, a été sans équivoque : « On ne peut rien faire pour vous. Vous avez choisi d’être les porte-voix de la rébellion ». Il n’empêche, Le Patriote, qui avait mis en garde contre la catégorisation des citoyens, continue sa marche douloureuse jusqu’en novembre 2004 où, à la faveur de l’opération dite « dignité » lancée contre les positions des Forces Nouvelles, son siège et son imprimerie sont incendiés par les jeunes patriotes. Qu’à cela ne tienne, Le Patriote continue de sortir pour véhiculer le message des tenants de la démocratie et des élections toujours annoncées mais qui ne venaient jamais. Notre conviction était établie : « pas un jour sans le Patriote ». Ni les suspensions, ni les brimades et les passages à tabac des journalistes ne sont parvenus à nous faire taire. Et dire que la nature ne nous pas souvent souri. Au plus fort de la lutte, nous avons perdu nombre de nos collaborateurs. Benjamin N’gbechi, Coulibaly Moussa, Kristian Kara, Kamsié, Kady Sidibé, pour ne citer que ceux-là. Même dans la douleur et le recueillement, il ne fallait pas fléchir. Pour la mémoire et le repos de l’âme de nos amis, nous n’avions pas le droit au découragement. Il fallait tenir la route. A la veille de la présidentielle, nous avons dû délocaliser de longs mois durant, après les menaces d’attaques proférées par les soldats et les jeunes patriotes. Il fallait maintenir le cap du combat. Même la crise postélectorale, particulièrement meurtrière n’est parvenue à nous attendrir. Entre procès à n’en point finir, arrestations et possibilité de mourir au coin de la rue, nous avons privilégié la lutte pour l’alternance et la démocratie. C’est pourquoi à l’issue de la crise postélectorale qui a entériné la victoire électorale du Président Alassane Ouattara, nous avons ressenti au plus profond de nous-mêmes les signes et signaux de l’aboutissement d’une lutte épique, titanesque, meurtrière et véritablement audacieuse. La décoration du vendredi dernier sonne à tout point de vue comme la fin d’un cycle de blessures, de meurtrissures et de douleurs sans nom. Pour sûr, la reconnaissance de la nation annonce que « Wagati sera », l’heure du triomphe se précise pour Le Patriote, le journal- martyre et martyrisé qui a résisté au sens noble du terme, avec de hauts faits d’armes, à plus d’une décennie de barbarie et de tentatives de musèlement. Merci à la République d’avoir immortalisé notre combat. Le meilleur est sans doute à venir !

Bakary Nimaga
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