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Politique Publié le samedi 26 janvier 2013 | Le Patriote

Libération réclamée de Blé Goudé : Réconciliation d’accord, mais justice d’abord

© Le Patriote
Blé Goudé devant le juge de première instance
Lundi 21 janvier 2013. Inculpé pour crimes de guerre, assassinats, atteinte à la sûreté de l’Etat et vols de deniers publics en réunion, Blé Goudé présenté au tribunal.
Huit jours. Cela fait jour pour jour une semaine et un jour que le leader de la galaxie patriotique a été mis aux arrêts. Aussitôt arrêté à Accra, à son domicile, Charles Blé Goudé a été transféré en moins de douze heures en Côte d’Ivoire pour répondre de ses actes devant la justice de son pays. La nouvelle de son arrestation, aussi rocambolesque que brusque, a surpris beaucoup d’Ivoiriens. Au point que ses partisans n’y croyaient pas. Certains parlaient plutôt d’un montage du pouvoir. Tandis que d’autres évoquaient la thèse d’un enlèvement manqué du « général de la rue ». Aujourd’hui, avec les images de son arrestation diffusées sur le petit écran, même les irréductibles les plus sceptiques de la « cause patriotique » commencent à se résoudre à l’évidence. Charles Blé Goudé est bien dans les liens de la détention. Du coup, les premiers élans de solidarité à l’égard de l’ex-bras séculier de Gbagbo n’ont pas tardé à se manifester. Le Front populaire ivoirien, quarante-huit heures après son extradition, a pondu un communiqué pour dire qu’il condamnait cette arrestation, qui, selon ses dirigeants n’est pas fait pour favoriser la réconciliation nationale. Ses avocats pour leur part dénoncent plutôt un enlèvement et envisagent de porter plainte devant la Cour de la CEDEAO contre les autorités Ivoiriennes et ghanéennes pour obtenir sa libération. A Kpôbrobouo, son village natal et à Guibéroua, après les moments d’émotion passés, des voix commencent à se lever pour demander la libération de celui qui est devenu depuis la figure emblématique de la région. « Nous demandons vraiment pardon au président Ouattara pour qu’il ait pitié de son fils », plaident des parents de Charles Blé Goudé. « Que le chef de l’Etat pense à nous ses parents qui n’ont pas de moyens de nous rendre à La Haye en Hollande pour lui rendre visite », insistent d’autres. Pour tous ces défenseurs plus ou moins improvisés de président du COJEP, l’heure est à la réconciliation nationale. Et cela passe nécessairement, à leurs yeux, par un geste fort de la part du chef de l’Etat en faveur du leader des « jeunes patriotes ». Si ces complaintes sont légitimes, il n’en demeure pas moins que dans le contexte actuel une telle doléance aura du mal à trouver une suite favorable. Car, Charles Blé Goudé n’est pas n’importe qui. Il a été au c?ur du plan de confiscation du pouvoir machiavélique, qui a fait plus de 3000 morts lors de la crise postélectorale. Le sinistre slogan « on gagne ou on gagne » que les Ivoiriens prenaient au départ pour des élucubrations d’irréductibles qui refusaient de voir un autre destin que la défaite de Laurent Gbagbo, a dévoilé toute sa laideur au cours de la période qui a suivi l’élection présidentielle lors de la répression implacable qui s’est abattue sur les partisans supposés de l’opposition. « Y a rien en face », disait Blé Goudé de l’opposition pour galvaniser ses troupes. Et tout le monde a vu les conséquences néfastes de ce cri de ralliement qui visait à jeter en pâture les militants et sympathisants de l’opposition. Les inhumanités auxquelles l’on a assisté durant cette période sombre vient de cette chosification de l’adversaire politique. En lieu et place des hommes et des femmes, Charles Blé Goudé et ses hommes voyaient du « maïs » qu’il fallait écraser et moudre. Un autre discours, celui du 25 février 2011, a eu des conséquences dramatiques dans les rues d’Abidjan. Charles Blé Goudé avait alors demandé à ses partisans d’ouvrir les yeux et de mettre hors d’état de nuit tout « suspect » dans leurs quartiers. La suite, on la connait. De nombreuses personnes suppliciées à l’article 125 aux barrages anarchiques érigés par les « jeunes patriotes ». Des hommes exécutés froidement. Et de nombreuses femmes violées par ces jeunes dés?uvrés nourris par la haine et dans la violence, et que Charles Blé Goudé contrôlaient. Aujourd’hui, l’heure est venue pour le « général de la rue » de répondre de tous ces actes. Le président de la République a prévenu. L’ère de l’impunité est terminée. Et la réconciliation nationale ne saurait excuser ou absoudre tous ceux qui se sont rendus coupables de violations graves de droits de l’Homme au cours de la période la plus sombre de l’histoire de la Côte d’Ivoire. Ils doivent tous, y compris Blé Goudé, passer devant le juge. Car le droit des victimes ne sera pas sacrifié sur l’autel d’une réconciliation que l’on veut de façade. A tous ceux qui demandent la libération de Charles Blé Goudé, au nom de la réconciliation nationale, les Ivoiriens dans leur majorité répondent ceci : « Réconciliation d’accord, mais justice d’abord ».

Jean-Claude Coulibaly
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