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Politique Publié le vendredi 1 février 2013 | Le Temps

Ghana : Ce qui se passe dans les camps de réfugiés ivoiriens

A la faveur de la crise post-électorale, des milliers d’Ivoiriens se sont retrouvés hors du pays pour fuir la persécution et les exactions perpétrées par les mercenaires, des dozos et autres ex-rebelles. Au Ghana, par exemple, des sites ont été aménagés par les autorités de ce pays afin d’accueillir les milliers de refugiés ivoiriens avec l’aide du Hcr. Village d’Ayensudu, au cœur de Takoradi. Sous des tentes où la canicule prend pied 24 heures sur 24, des bouches affamées y ont trouvé refuge. Il s’agit des Ivoiriens du «Refugee camp d’Egyikrom». Au nombre d’environ 2000 personnes, Hommes, Femmes, Enfants qui ont fui la mort en Côte d’Ivoire, leur pays d’origine en proie à une sale guerre consécutive à une crise post-électorale. Ces survivants qui pour la plupart ont tout perdu, ont donc trouvé refuge au Ghana, à Elmina notamment. Les adultes regroupés dans ce camp peuvent dormir avec leurs progénitures (pour ceux qui en ont) à l’abri de la pluie, du froid et autres intempéries, sous des tentes surchauffées, n’offrant aucune autre commodité. Au point où dès les premiers chants du coq, ses abris de fortune vomissent à l’extérieur du beau monde ; des désœuvrés pour la plupart. C’est donc cet univers qu’a découvert récemment un petit bout de femme : Martine KéiI Vao Présidente des Ressortissants de Duékoué en France et en Europe «ARDEFE", déléguée par ses confrères afin d’apporter soutien moral et matériel à ses compatriotes frappés par le malheur. Ainsi, en collaboration avec une organisation religieuse de la place, elle y a organisé un réveillon pour les tout- petits. Moment de gaité et de joie. Puisque ces enfants ont reçu du «Père Noël» de circonstance, beaucoup de cadeaux. Le lendemain, le bon samaritain du jour a récidivé en élargissant l’assiette des dons aux adultes et jeunes gens, et ce, en marge de la messe à laquelle ils ont pris part à cet effet dans le camp.
L’exil dans la dignité
Soutenir les nécessiteux, les consoler, être attentif à leurs attentes. Tel est le message livré par la Présidente de l’Ardefe, venue spécialement de la France pour rencontrer ces frères et sœurs en situation difficile au GHANA. Cette autre Mère Téresa que découvraient avec bonheur les résidents du camp d’Elmina et leurs frères des autres camps du Ghana, a été très émue de constater que la situation d’indigence des résidents des camps n’a pas dissolu en eux, leur dignité. Même si, le quotidien difficile pour chacun d’eux, pousse certains au découragement et à quelques facilités... Selon des témoignages, «lorsque tu arrives, le Hcr te donne un kit comprenant un drap, une natte ainsi que du savon. Pour ce qui concerne les vivres, juste quelques kilos de graines de haricot pour deux semaines seulement. C’est très peu comme ration alimentaire», s’indigne un déplacé. Que faire alors pour que l’assistance ne soit pas une prise en charge sur le long terme ? Déjà, les femmes responsables d’Associations créées dans les trois camps Ghanéens ont, sur proposition de Martine KEI VAO, décidé de créer une coordination afin d’harmoniser leurs besoins et leurs actions. Madame Baya originaire de Kouibly, Madame Lia, de Soubré et Madame Bohui de Ouragahio s’activent donc à donner naissance à cette structure de femmes, d’autant que les problèmes que les réfugiés Ivoiriens rencontrent sont identiques partout dans les camps. Que ce soit à Ampain, l`un des plus grands camps de réfugiés du pays, après celui de Budumbura (à 44 km d’Accra) qui accueille 11.000 réfugiés libériens, situé dans le district de Gomoa où environ 7000 personnes venues de la Côte d`Ivoire y sont installées. Celui de Fetentaa (I700 refugiées). Plusieurs types de réfugiés Ivoiriens y vivent. La première catégorie est constituée de réfugiés qui sont dans la détresse totale. Des personnes du 3ème âge, des retraités qui ont tout perdu. La deuxième catégorie est composée en majorité de jeunes gens. Bon nombre d’entre eux sont titulaires d’un diplôme ou sont des étudiants ayant fuient les cités universitaires qui ont été attaquées par les forces armées pro-Ouattara. Accusés à tort d’être des miliciens à la solde de Gbagbo. Une anecdote circule abondamment dans les camps des réfugiés où, quelqu’un vous racontera que, lors d’une séance de travail avec un responsable du Hcr, qui tentait de persuader les réfugiés à rentrer en Côte d’Ivoire, un pensionnaire du camp lui aurait dit ceci : «Attendez que la situation évolue positivement au pays et que tout revienne à la normale. Si l’information nous parvient le matin et que vous arrivez dans le camp l’après- midi, vous le trouverez vide .On n’aura pas besoin de vos cargos pour rentrer car s’il y a un peuple qui aime vivre chez lui, c’est bien le peuple Ivoirien».
Les martyrs du génocide Wè
La troisième catégorie de réfugiés vient en grande partie de l’Ouest de la Côte d’ivoire. Lieu où les martyrs du génocide Wè sont reconnaissables. C’est notamment le cas à Elmina (80% de l’Ouest : Guiglo, Man, Duékoué, Bangolo, Kouibly, Facbly, etc et 20% pour les autres régions de la Côte d’Ivoire). Il est à signaler que des rescapés des derniers massacres de Nahibly le 20 juillet 2012 ont trouvé réfuge dans ce camp. L’afflu massif et continuel de refugiés ivoiriens en direction des camps ghanéens amène à s’interroger: Les autorités ivoiriennes sont-elles vraiment prêtes à la réconciliation tant espérée en Eburnie ?M.Konan Banny, Président de la CDVR est-il réduit au statut de simple observateur, spectateur impuissant ? Pour subsister, beaucoup de ces réfugiés s’adonnent à la culture vivrière. Mme Baya explique qu’il leur faut débourser la somme de 150 Ghana cedi (environ 45 mille cfa , soit 70€) afin d’acquérir une plantation de manioc. Une fois fait, le manioc sera transformé en Attiéké puis vendu en ville afin de sortir de la misère et soutenir par- là la famille, notamment les jeunes filles qui au début de leur séjour au Ghana, se livraient pour certaines à la prostitution (1 Cedi=300 fcfa) pour pouvoir manger. Aujourd’hui, ces femmes souhaiteraient acquérir pour chaque camp, une broyeuse de manioc afin de fabriquer aisément de l’attiéké. Il faut dire selon Mme Bah, qu’une broyeuse coûte environ 250 cedi (1 cedi=350 fcfa, soit 110€). Doléance enregistrée par la présidente de L’ARDEFE, Martine KEI VAO, Qui espère qu’au-delà de son Association qui œuvre dans l’humanitaire, la diaspora donnera un écho favorable aux doléances des réfugiés ivoiriens, toutes ethnies ou religions confondues vivant au Ghana. Par ailleurs, il se pose un gros problème aux enfants et enseignants bénévoles des camps de réfugiés.
Le sort des enfants
Les enseignants qui font de la formation professionnelle (artisanat, maçonnerie, etc) manquent de matériels didactiques pour former les pensionnaires encore en âge d’être éduqués, formés à de petits métiers. Les nombreux enfants du secondaire (3è et Terminale) sont contraints à rester à la maison c’est-à-dire sous des tentes « enfiévrées », parce que leurs parents n’ont pas les moyens de leur assurer le droit d’examen que réclament les écoles Togolaises où ont cours des enseignements conformes au système francophone. Un droit d’examen qui s’élève par candidat à la somme de 80 cedi, (35€). Rien que pour cette modique somme, l’Unesco, la francophonie et bien d’organismes regardent mourir d’illettrisme des enfants (avenir des nations). Madame KEI VAO a promis se battre afin que des familles en occident, puissent parrainer chaque enfant candidat à un examen (du primaire au secondaire) en leur assurant ce minimum vital au savoir. A ce jour, 200 enfants sont dans l’attente de cette somme et ce, d’ici fin Février afin de déposer leurs candidatures aux examens de Juin 2013. L’Association «ARDEFE» n’est pas dans le domaine humanitaire à sa première expérience. En août 2003, Cri de cœur, devenu «ARDEF-E» a distribué des colis alimentaires, des vêtements et des médicaments aux populations de toutes les régions assiégées de l’Ouest. Un an après, au mois de Février 2004, ayant évalué sur le terrain les besoins de première nécessité, l’Association a affrété pour l’Hôpital de Duékoué, un container de 40 pieds rempli de matériel médical (lits, matelas, fauteuils roulants, fauteuils roulants pour handicapés, tables d’opération et d’accouchements et autres) de médicaments, vêtements et draps de lits et doté l’hôpital d’une ambulance médicalisée en 2007. Nul doute que si les réfugiés des camps du Ghana, se donnent les moyens de s’organiser afin de réduire la misère qui les environne, ils pourront tirer partie des actions humanitaires que des bénévoles de l’Association ARDEFE tels que Martine KEI VAO, Docteur Corentin DJITE, Mesdames Rachel Castellano, Julienne PREIRA, Sieurs Paul ZIONDIN, Robert TOHE, Pierre YOLE, Hubert DEPOHI et bien d’autres entreprennent à leur profit. Tout simplement.
Francesca Adeva, francescaudrey@yahoo.fr
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