Déroutant ! Ainsi pourrait-on qualifier l’attitude de Me Emmanuel Altit et ses associés. Hier au moment où l’on s’attendait à un dossier en béton pour contrer les arguments de l’Accusation, la Défense s’est plutôt perdue dans un argumentaire assez aérien pour tenter de mener la Cour en bateau. La ligne de défense observée hier par le conseil de Laurent Gbagbo a laissé pantois plus d’un dans la Cour. Une défense qui n’a pas manqué de dérouter observateurs et partisans de Laurent Gbagbo qui s’attendaient des répliques bien ajustées de Me Altit face à la tonne de preuves que brandissait le représentant du procureur de la Cour pénale internationale au cours de cette première journée de l’audience de confirmation des charges contre Laurent Gbagbo. On l’a compris, Me Emmanuel Altit cherche à éviter à tout prix un procès, pourtant inévitable, à son client. Il est clair que pour y parvenir, il faut gagner du temps. Par un tour de passe-passe juridique, il tente de faire encore arrêter la procédure en cours à la CPI. Au pire des cas, retarder au maximum l’échéance. Cette fois-ci, ce n’est pas la compétence de la Cour pénale internationale qui est récusée par la défense. Mais l’irrecevabilité des poursuites contre l’ancien chef d’Etat devant la juridiction pénale internationale. Me Altit et associés ne contestent plus à la CPI sa légitimité de juger Laurent Gbagbo. Mais son aptitude à le faire. Car pour la défense, si Simone Gbagbo et Blé Goudé Charles contre qui la Cour pénale international a lancé des mandats d’arrêt internationaux font l’objet d’une procédure en Côte d’Ivoire, pourquoi pas Laurent Gbagbo. Pour l’avocat de l’ex-chef d’Etat, ces deux cas montrent clairement que la justice ivoirienne est en mesure de juger l’ancien président de la République. Et comme le préconise le Traité de Rome dans de tel cas, il appartient aux tribunaux nationaux de se saisir de l’affaire. La CPI n’intervenant qu’en cas de défaillance de leur part. Mais on l’a compris, Me Altit par cette nouvelle stratégie veut tout simplement contourner la décision prise par la Cour pénale internationale le 12 décembre 2012 dernier. En d’autres termes, le conseil de Gbagbo veut récupérer avec la main gauche ce qu’il n’a pas pu avoir avec la main droite. Mais cette stratégie connaitra-t-elle plus de succès que les précédentes ? Rien n’est moins sûr. Car comme l’a déjà signifié les juges de La Haye, les charges retenues contre l’ancien homme fort d’Abidjan sont d’une telle gravité qu’il serait beaucoup risqué de le laisser partir de la CPI.
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly