Du pont Félix Houphouët Boigny à Anyama, la distance est de 24 km. Mais l’urbanisation aidant, il est aujourd’hui difficile de faire un distinguo apparent entre la commune d’Abobo et celle d’Anyama. C’est cette cité dont le nom se conjugue désormais avec la commercialisation du cola que nous avons parcourue de 10h à 15h.
Il est 9h45mn ce mardi 19 février quand nous prenons place à bord d’un minibus, communément appelé Gbaka pour la route d’Anyama. Le rond point de la mairie est bondé de monde. Quelques chargeurs surchauffés donnent de la voix pour la recherche de clients à destination de cette commune mitoyenne à Abobo. Quelquefois, ils testent leur vigueur en frappant de façon assourdissante sur toutes sortes d’automobiles à portée de main. Dans le minibus, la vétusté des fauteuils se disputent à l’accoutrement de l’équipage (le chauffeur et son apprenti), tout aussi déchiqueté. « Messieurs c’est 250FCFA », nous prévient l’apprenti. Trente minutes suffisent pour que nous mettions pied à terre, à la gare routière d’Anyama. Objectif, voir la gare ferroviaire et pointer du doigt le calvaire des usagers depuis que le train a cessé de stationner dans cette ville. Une fois à la gare, nous empruntons un taxi communal pour le carrefour ‘’Amidou Sylla’’. Ironie du sort, le premier taxi de marque Peugeot 205 tombe en panne. Une panne que nous jugeons symptomatique de l’état de voierie. Avec le second, nous avons plus de chance. Même si la carrosserie et l’état des fauteuils montrent bien qu’il s’agit d’un tacot, nous arrivons à bon port. Pour le reste, nos pieds sont mis à contribution. Nous empruntons la ruelle aux couleurs ocre, à notre gauche pour la RAN (Ndlr Nom donné à la gare ferroviaire). La majorité des magasins ici, ont des activités qui tournent autour de ce qui fait la célébrité de cette cité, c'est-à-dire la cola. Comme un travail à la chaine, pendant que certains magasins semblent s’être spécialisés dans le tri, d’autres ont choisi le travail d’emballage dans ‘’les feuilles d’attiéké’’ et les sacs de 50kg. Les autres activités connexes sont entre autres, la vente de maïs, de riz local, la gérance de moulins et de petites unités de broyage.
Cap sur la gare
de train
Construite en 1950, la gare se limite à un bâtiment presqu’en ruine, avec quelques morceaux de briques qui gisent ça et là. Le guichet de délivrance de billet est hermétiquement fermé. Silencieux et désert, les seules voix audibles sont celles de femmes venues attendre juste le passage de la locomotive. Tout en devisant, elles se rappellent les souvenirs joyeux des bonnes affaires qu’elles faisaient en ce lieu, il y a trois ans. L’une d’entre elles, Aminata accepte de nous entretenir. « Le train ne transite plus ici depuis 2010 mais il y a plutôt une gare à Azaguié », fait-elle- savoir. Une information que confirme par la suite, le gardien des lieux, M. Ibo Gaston avec plus de précision : « C’est en novembre 2010 que le train a mis fin à ses arrêts ici. Désormais, il stationne à Azaguié avant de poursuivre son chemin ». Mais quelles peuvent bien être les raisons qui ont motivé une pareille décision ? A ce sujet, M. Ibo Gaston évoque la question sécuritaire qui prévalait entre le premier et le second tour de l’élection présidentielle de 2010. En attendant une probable ouverture, certains commerçants qui exerçaient aux alentours, ont pratiquement mis la clé sous le paillasson.
Les surcoûts occasionnés par la fermeture
Selon des commerçants que nous avons rencontrés, depuis la fermeture, leurs activités tournent au ralenti. Pis pour que les marchandises soient convoyées à destination des pays de l’hinterland, il faut soit à Azaguié ou soit à la gare principale d’Adjamé. Toute chose qui occasionne des frais supplémentaires. Vendeurs de banane douce, d’ananas et de colas, M. Koné Ismaël est domicilié à Cechi. Il s’est donc accommodé tout jeune au train avant d’en faire le moyen de transport utilisé pour son commerce vers Bobo-Dioulasso au Burkina Faso. « C’est le train qui va facilement à Cechi et Rubino », lance-t-il. Poursuivant, il évoque l’augmentation des charges qu’occasionne la fermeture. « Aujourd’hui, je suis obligé d’emprunter d’abord un véhicule pour Agboville ou Azaguié avant de me rendre dans mon village. Pour ce qui est de mon activité, en plus des frais de transports, je paye des frais pour mes marchandises, au moins 500FCFA par carton. Ensuite, une fois à Agboville, je dois maintenant payer mon billet pour le Burkina-Faso et les frais de marchandises. Je me rends compte qu’à chaque voyage, je dois prévoir 10.000FCFA de plus or quand le train marquait l’arrêt ici, il y avait une sorte de marché à côté, les jeunes gens prenaient 100FCFA ou 200FCFA par carton des magasins à la gare ». Chez les vendeurs de colas, c’est la même rengaine. Dans leur entendement, tout porte à croire que la SICF (Société Ivoirienne de Chemin de Fer), société chargée de l’exploitation du réseau, les a abandonnés. « Plusieurs fois, nous nous sommes rendus à la direction pour plaider en faveur d’une ouverture de la gare. A chaque fois, la direction nous fait savoir que c’est pour bientôt. Nous attendons mais pour l’instant, nous utilisons les camions remorques pour desservir le Burkina Faso », confie Arouna D.
Les femmes réclament l’ouverture aussi
« Le jour où le train va s’arrêter encore ici, nous allons danser. Actuellement, c’est la souffrance que nous vivons. Il y a plusieurs femmes parmi nous qui vivaient de petits commerces sur la gare puisqu’elle était beaucoup fréquentée », nous lance Dame Aïcha D, restauratrice. Comme elle, plusieurs vendeuses pensent que la compagnie de chemin de fer leur arrache du pain à la bouche. « Pour moi, nous sommes abandonnées. Jusqu’ici c’est le statu quo. Les grands exportateurs de colas n’en souffrent pas trop. D’ailleurs, ce n’est que récemment qu’ils ont commencé à utiliser le train pour acheminer leurs marchandises vers le Burkina-Faso. Quand vous parcourez Anyama, vous voyez certains jeunes qui étaient des chargeurs ici. Ils avaient entre 2500 et 5000FCFA par jours en transportant les bagages pour la gare de train », a renchéri Dame Aïcha.
La version de la SITARAIL
A la direction de la société ferroviaire, les portes restent closes quand il s’agit d’évoquer les raisons de l’interruption de l’arrêt que marquait la mastodonte dans la cité de la cola. Le service communication selon des indiscrétions est au ‘’labo’’ pour une campagne publicitaire. Mais, des SGBI (Source Généralement Bien Introduite), auprès de cette société avancent un argument autre que la raison sécuritaire. « Un camion sans frein a démoli la gare. Le jour de cet incident, le camion a dévalé la pente et est rentré dans le bâtiment de la gare en cassant tout sans faire de blessés. Sitarail a dû fermer de facto, cette gare, pour des raisons évidentes de sécurité liées à l’exploitation, en attendant sa réhabilitation future », a souligné notre SGBI. Selon notre source, le budget de réhabilitation du bâtiment, vieux de 63 ans serait déjà bouclé.
K. Hyacinthe et FO
Il est 9h45mn ce mardi 19 février quand nous prenons place à bord d’un minibus, communément appelé Gbaka pour la route d’Anyama. Le rond point de la mairie est bondé de monde. Quelques chargeurs surchauffés donnent de la voix pour la recherche de clients à destination de cette commune mitoyenne à Abobo. Quelquefois, ils testent leur vigueur en frappant de façon assourdissante sur toutes sortes d’automobiles à portée de main. Dans le minibus, la vétusté des fauteuils se disputent à l’accoutrement de l’équipage (le chauffeur et son apprenti), tout aussi déchiqueté. « Messieurs c’est 250FCFA », nous prévient l’apprenti. Trente minutes suffisent pour que nous mettions pied à terre, à la gare routière d’Anyama. Objectif, voir la gare ferroviaire et pointer du doigt le calvaire des usagers depuis que le train a cessé de stationner dans cette ville. Une fois à la gare, nous empruntons un taxi communal pour le carrefour ‘’Amidou Sylla’’. Ironie du sort, le premier taxi de marque Peugeot 205 tombe en panne. Une panne que nous jugeons symptomatique de l’état de voierie. Avec le second, nous avons plus de chance. Même si la carrosserie et l’état des fauteuils montrent bien qu’il s’agit d’un tacot, nous arrivons à bon port. Pour le reste, nos pieds sont mis à contribution. Nous empruntons la ruelle aux couleurs ocre, à notre gauche pour la RAN (Ndlr Nom donné à la gare ferroviaire). La majorité des magasins ici, ont des activités qui tournent autour de ce qui fait la célébrité de cette cité, c'est-à-dire la cola. Comme un travail à la chaine, pendant que certains magasins semblent s’être spécialisés dans le tri, d’autres ont choisi le travail d’emballage dans ‘’les feuilles d’attiéké’’ et les sacs de 50kg. Les autres activités connexes sont entre autres, la vente de maïs, de riz local, la gérance de moulins et de petites unités de broyage.
Cap sur la gare
de train
Construite en 1950, la gare se limite à un bâtiment presqu’en ruine, avec quelques morceaux de briques qui gisent ça et là. Le guichet de délivrance de billet est hermétiquement fermé. Silencieux et désert, les seules voix audibles sont celles de femmes venues attendre juste le passage de la locomotive. Tout en devisant, elles se rappellent les souvenirs joyeux des bonnes affaires qu’elles faisaient en ce lieu, il y a trois ans. L’une d’entre elles, Aminata accepte de nous entretenir. « Le train ne transite plus ici depuis 2010 mais il y a plutôt une gare à Azaguié », fait-elle- savoir. Une information que confirme par la suite, le gardien des lieux, M. Ibo Gaston avec plus de précision : « C’est en novembre 2010 que le train a mis fin à ses arrêts ici. Désormais, il stationne à Azaguié avant de poursuivre son chemin ». Mais quelles peuvent bien être les raisons qui ont motivé une pareille décision ? A ce sujet, M. Ibo Gaston évoque la question sécuritaire qui prévalait entre le premier et le second tour de l’élection présidentielle de 2010. En attendant une probable ouverture, certains commerçants qui exerçaient aux alentours, ont pratiquement mis la clé sous le paillasson.
Les surcoûts occasionnés par la fermeture
Selon des commerçants que nous avons rencontrés, depuis la fermeture, leurs activités tournent au ralenti. Pis pour que les marchandises soient convoyées à destination des pays de l’hinterland, il faut soit à Azaguié ou soit à la gare principale d’Adjamé. Toute chose qui occasionne des frais supplémentaires. Vendeurs de banane douce, d’ananas et de colas, M. Koné Ismaël est domicilié à Cechi. Il s’est donc accommodé tout jeune au train avant d’en faire le moyen de transport utilisé pour son commerce vers Bobo-Dioulasso au Burkina Faso. « C’est le train qui va facilement à Cechi et Rubino », lance-t-il. Poursuivant, il évoque l’augmentation des charges qu’occasionne la fermeture. « Aujourd’hui, je suis obligé d’emprunter d’abord un véhicule pour Agboville ou Azaguié avant de me rendre dans mon village. Pour ce qui est de mon activité, en plus des frais de transports, je paye des frais pour mes marchandises, au moins 500FCFA par carton. Ensuite, une fois à Agboville, je dois maintenant payer mon billet pour le Burkina-Faso et les frais de marchandises. Je me rends compte qu’à chaque voyage, je dois prévoir 10.000FCFA de plus or quand le train marquait l’arrêt ici, il y avait une sorte de marché à côté, les jeunes gens prenaient 100FCFA ou 200FCFA par carton des magasins à la gare ». Chez les vendeurs de colas, c’est la même rengaine. Dans leur entendement, tout porte à croire que la SICF (Société Ivoirienne de Chemin de Fer), société chargée de l’exploitation du réseau, les a abandonnés. « Plusieurs fois, nous nous sommes rendus à la direction pour plaider en faveur d’une ouverture de la gare. A chaque fois, la direction nous fait savoir que c’est pour bientôt. Nous attendons mais pour l’instant, nous utilisons les camions remorques pour desservir le Burkina Faso », confie Arouna D.
Les femmes réclament l’ouverture aussi
« Le jour où le train va s’arrêter encore ici, nous allons danser. Actuellement, c’est la souffrance que nous vivons. Il y a plusieurs femmes parmi nous qui vivaient de petits commerces sur la gare puisqu’elle était beaucoup fréquentée », nous lance Dame Aïcha D, restauratrice. Comme elle, plusieurs vendeuses pensent que la compagnie de chemin de fer leur arrache du pain à la bouche. « Pour moi, nous sommes abandonnées. Jusqu’ici c’est le statu quo. Les grands exportateurs de colas n’en souffrent pas trop. D’ailleurs, ce n’est que récemment qu’ils ont commencé à utiliser le train pour acheminer leurs marchandises vers le Burkina-Faso. Quand vous parcourez Anyama, vous voyez certains jeunes qui étaient des chargeurs ici. Ils avaient entre 2500 et 5000FCFA par jours en transportant les bagages pour la gare de train », a renchéri Dame Aïcha.
La version de la SITARAIL
A la direction de la société ferroviaire, les portes restent closes quand il s’agit d’évoquer les raisons de l’interruption de l’arrêt que marquait la mastodonte dans la cité de la cola. Le service communication selon des indiscrétions est au ‘’labo’’ pour une campagne publicitaire. Mais, des SGBI (Source Généralement Bien Introduite), auprès de cette société avancent un argument autre que la raison sécuritaire. « Un camion sans frein a démoli la gare. Le jour de cet incident, le camion a dévalé la pente et est rentré dans le bâtiment de la gare en cassant tout sans faire de blessés. Sitarail a dû fermer de facto, cette gare, pour des raisons évidentes de sécurité liées à l’exploitation, en attendant sa réhabilitation future », a souligné notre SGBI. Selon notre source, le budget de réhabilitation du bâtiment, vieux de 63 ans serait déjà bouclé.
K. Hyacinthe et FO