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Politique Publié le vendredi 3 mai 2013 | Nord-Sud

Requête en annulation du scrutin du 21 avril - 115 plaintes sur la table de la Cour suprême

Il revient à présent à la Chambre administrative de la Cour suprême de se prononcer sur les allégations de fraudes et autres irrégularités présumées des candidats malheureux aux municipales et régionales.

De nombreux candidats malheureux sommés de revendiquer dûment ont effectivement saisi la Chambre administrative via la Cei. « Il y a longtemps qu’ils s’étaient préparés à cela. Ils ont envahi nos locaux, alors même que leurs partisans manifestaient. Tenez-vous bien, ils s’étaient organisés en fonction, puisqu’ils ont pour la plupart pris attache avec des avocats et des huissiers», a informé une source au sein de la Commission électorale indépendante (Cei). A l’en croire, pour les municipales, l’institution a enregistré une centaine de plaintes et une quinzaine d’autres, en ce qui concerne les régionales. Le service juridique de l’institution s’est chargé de la réception des plaintes, sous plis, puis le secrétariat général les a transmises à la Chambre administrative. En principe, il ne revient pas à la Commission de dépouiller les requêtes, à plus forte raison de les réceptionner. « C’est parce que les gens ne connaissent pas bien la procédure de réclamation qu’on leur a demandé de venir déposer leurs dossiers chez nous, de sorte que nous puissions les transmettre à la Chambre administrative », a-t-elle justifié l’implication de la ‘’maison des élections‘’ dans ce processus. La Chambre n’a pas trouvé à redire à cette ‘’intermédiation‘’, elle qui veut, dit-on, recevoir les documents en question en toute tranquillement, en vue de les éplucher. A la réalité, la Cei n’a aucun travail préliminaire à faire. Non seulement elle ne parcourt pas les dossiers, mais elle ne se prononce pas sur la nature et le contenu des plaintes.

Les partisans s’invitent…
En effet, passée la fièvre de la protestation sauvage déplorée et dénoncée par les autorités (le gouvernement, l’Assemblée nationale et la Cei elle-même), les candidats malheureux regardent du côté de la Chambre administrative. Les bureaux de ce démembrement de la Cour suprême sont installés aux dixième et quinzième étages de l’immeuble Bicici, au Plateau. En fin de matinée du mardi, huit femmes s’y invitent, demandant à être reçues par le président de la structure, Claver Pierre Kobo. Au vigile qui les aborde au seuil de la baie vitrée faisant écran à tout visiteur, elles ont expliqué qu’elles viennent déposer leurs requêtes pour « fraudes », lors du scrutin municipal à Yopougon. Sur leur insistance, ces femmes qui ne sont pas des candidates sont reçues par un greffier, membre du cabinet du président. L’interlocuteur les écoute avant de les renvoyer vers la Cei, a rapporté un fonctionnaire de ce service. Il revient à la Commission, les a-t-il renseignées, de transmettre leurs préoccupations à la Chambre. Comme pour leur dire que le dépôt direct des contestations n’est pas accepté. Les femmes acquiescent et rebroussent chemin, visiblement déçues. Elles nous expliqueront plus tard qu’elles ont été «mal informées». « Le vendredi, nous avons manifesté devant la Cour suprême à Cocody où on nous a dit de nous rendre ici, au Plateau», a informé l’une d’entre elles. Membres de la société civile, elles ont dit vouloir saisir «coûte que coûte» les autorités de leurs préoccupations. Electrices à Yopougon, elles ont «constaté beaucoup de fraudes» dont elles veulent informer qui de droit. Mais elles pèchent en se faisant passer pour «des citoyennes neutres», alors qu’une d’entre elles les présente maladroitement comme des « proches » du candidat malheureux aux municipales, Doukouré Moustapha». Ce rappel anecdotique est révélateur de l’intérêt de ces scrutins pour certains électeurs. Une indiscrétion recueillie auprès du personnel technique de la Chambre administrative révèle, par exemple : « les policiers nous ont dit de les informer si un groupe de femmes arrivait ici». Comme pour dire que c’est chaque jour que les policiers sont sur le qui-vive, soucieux de filtrer les visites et parer à toute éventualité autour des réclamations. Celles-ci doivent être faites dans un délai de cinq jours à compter du jour de la proclamation des résultats. Mais cela n’a pas été le cas.

Arrangement
A l’origine, le code électoral accorde ce délai, tenant compte de samedi et dimanche comme des jours francs. Mais les résultats ayant été donnés de façon discontinue, les deux institutions ont trouvé un arrangement. Elles ont décalé en quelque sorte le dead-line. Pour cause, les premiers jours de proclamation, la Cei a communiqué des estimations ou des tendances en lieu et place de chiffres définitifs. C’est d’ailleurs pour cette raison, a expliqué un fonctionnaire de la Commission, qu’elle est revenue sur des résultats déjà annoncés. « A supposé que dans une circonscription, nous ayons 50 bureaux de vote. Si nous recevons les résultats dans 47 bureaux, nous déduisons que les chiffres des 3 autres bureaux ne peuvent pas inverser la tendance », a-t-il justifié. Ainsi, les candidats dont les résultats de la circonscription électorale ont été annoncés le mardi 23 avril n’étaient pas tenus de saisir la Chambre administrative cinq jours après. Le compte à rebours a été déclenché, a-t-on appris de la même source, le vendredi 26 avril au soir, après la fin de la proclamation des résultats par le porte-parole de la Cei. Un changement est également intervenu dans le mode de transmission des requêtes. «Nous faisions un dépôt quotidien, mais nous nous sommes dit qu’il fallait harmoniser la réception des dossiers, avant de les transmettre à la Cour suprême.

Des surprises à l’horizon
La Chambre administrative, elle, se charge d’informer les candidats dont les victoires sont contestées afin qu’ils se défendent. Mais, finalement, nous avons dit à la Chambre que nous lui déposerons tous les dossiers une fois pour toutes», a argumenté un autre agent de la Cei. A l’en croire, l’institution a transmis toutes les plaintes qu’elle a reçues. Il reste à présent que les protagonistes soient convoqués.Ces derniers ne devraient pas se plaindre pour la forme. Les candidats malheureux devront apporter les preuves des « irrégularités » qu’ils disent avoir relevées. Ceux qui se contenteront d’écrire que des individus ont voté plusieurs fois, qu’ils ont insulté ou proféré des menaces, sans en présenter les preuves (audition enregistrée par un huissier, procès-verbal de police, enregistrement vidéo…) seront déboutés. Seront également refoulés, les perdants qui argueront qu’il y a eu « fraude » et « violence » sans en attester. Or, le procès-verbal (Pv) est le premier élément de preuve sur lequel s’appuieront les magistrats de la Chambre administrative. Le Pv est discutable. Chacun des candidats et leurs représentants respectifs reçoivent copie de ce document. « Si un staff constate une bonne marge de voix en faveur de son candidat, il se rend à la Cei pour le signaler. L’erreur étant humaine, nous reprenons la compilation. Si elle lui donne raison, alors nous reportons la différence de voix sur l’acquis du candidat », a illustré un technicien de la compilation. Des représentants du Barreau, de la Cour suprême, et du Conseil supérieur de la magistrature sont des commissaires de la Cei. Ils seront consultés par Claver P. Kobo et treize autres collègues en cas de besoin. Ce sera, en somme, la parole de ces magistrats rompus à la tâche contre celle des candidats qui ont engagé la polémique.

Bidi Ignace
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