Le report inopiné du verdict de la Cpi dans l’affaire Laurent Gbagbo continue de faire des vagues des plus houleuses. Les révélations et réactions continuent, suite à la décision de la Cour d’ajourner ses conclusions à donner au dossier. En enjoignant parallèlement, le lundi 3 juin 2013 dernier, la Procureure Bensouda de fournir des preuves autres que celles consignées dans le Document de confirmation des charges (Dcc) remis aux juges de la Chambre préliminaire I de la Cpi, à l’audience de février 2013. Un renvoi à copie, à en croire les juges, qui s’explique par le fait qu’il demeure de nombreuses zones d’ombre dans les charges portées contre Laurent Gbagbo. Et qui ne pourrait aucunement être retenues comme preuves probantes d’inculpation. Autant de failles de l’Accusation que n’a pas hésitées à exploiter l’hebdomadaire international Jeune Afrique dans sa parution de cette semaine, par la voix de sa rédactrice en chef, Anne Capelle Grange. A la question de savoir si la décision de renvoyer le bureau du procureur à ses notes pour preuves non convaincantes, est une victoire pour Laurent Gbagbo, la réponse de la rédactrice est sans appel. «De manière ponctuelle oui, c’est une victoire de Laurent Gbagbo. Puisque le travail du bureau du procureur est directement remis en cause. Vous savez, la Chambre préliminaire fulmine que des accusations reposaient trop souvent sur des appels anonymes, sur des rapports d’Ong, sur des articles de presse. Les juges ont donc demandé au procureur de revoir sa copie. Les juges lui ont demandé de fournir des preuves probantes de l’implication de Laurent Gbagbo dans la chaîne de commandement qui a amené à la perpétration de certains crimes. Et donc, un revers pour Fatou Bensouda et évidemment les Avocats de Laurent Gbagbo peuvent s’en réjouir», a-t-elle tranché, au cours d’un entretien accordé à Rfi hier dimanche 9 juin 2013. Avant de révéler que Maître Altit et ses collègues sont sur le point de demander la liberté provisoire de leur client et que la Procureure Bensouda veut faire appel de la décision de la Cpi. Non sans indiquer que ce rebondissement offre du terreau aux détracteurs de la Cpi. Notamment l’Union africaine qui va en profiter pour, dit-elle, «brûler» la Cpi et faire entendre sa voix. Et dont les dirigeants n’ont pas hésité à qualifier de pratiques racistes de la part de la Cpi, le fait que ce soit uniquement des Africains qui fassent l’objet de poursuite judicaire. Au chapitre des réactions, il faut aussi noter celle de Maître Alidou Ouédraogo, corédacteur du Statut de Rome, et président d'honneur de l'Union interafricaine des Droits de l'Homme. «On lui attribue la situation en Côte d'Ivoire. Mais avec l'évolution, vous voyez quand même que l'affaire Gbagbo seul devant la Cpi n’était pas très claire. Maintenant, moi je pense qu'il est bon que le parquet apporte ses éléments de compléments d'informations. Si ce n'est pas convaincant, qu’on libère tout simplement l'intéressé», a-t-il déclaré à la Bbc le samedi 8 juin 2013 dans le cadre de l’émission «Afrique hebdo». Des propos qui rejoignent pour ainsi dire, l’avalanche de réactions et de leçons qu’a suscitée ce report de la Chambre préliminaire. A l’instar de celles de la Défense Gbagbo qui ne s’est pas fait prier pour signifier sans retenue à la Procureure «qu’il n’y a plus de preuves à exhiber». En qualifiant cette décision, par la voix de Maître Emmanuel Altit, de «victoire pour le Président Gbagbo et une victoire pour la Côte d’Ivoire».
Marcel Dezogno
Marcel Dezogno