Le Kenya a enclenché un processus visant à se retirer du Statut de Rome et donc à ne plus reconnaître l’autorité de la Cour pénale internationale (CPI). La CPI a mauvaise presse au Kenya, où le président Kenyatta et le vice-président Ruto sont accusés de crimes contre l’humanité, mais, plus généralement aussi, sur tout le continent. Le risque est désormais de voir d’autres pays suivre la voie du Kenya, comme l’explique Phil Clark, spécialiste des questions de justice internationale à la School of Orientals and Africans studies de Londres.
RFI : Si le Kenya choisit de se retirer du Statut de Rome et de rejeter la Cour pénale internationale, cela changerait-il quelque chose pour Uhuru Kenyatta et William Ruto, dont les procès devant la CPI doivent s’ouvrir dans les semaines qui viennent ?
Phil Clark : Je ne pense pas que cette action du gouvernement kényan va changer quoi que ce soit. Il s’agit d’une tentative de protéger l’image politique de Ruto et de Kenyatta pendant le procès devant la Cour pénale internationale, mais cela n’affectera pas le procès qui va se poursuivre. Toutefois, cela pourrait affecter la propre action du gouvernement kényan pendant le procès.
Est-ce que cette volonté kényane de sortir du Traité de Rome, et donc de rejeter la CPI, ne va pas donner des idées à d’autres pays en Afrique et dans le monde ?
Il y a une chance que d’autres pays africains fassent quelque chose de similaire parce que le gouvernement kényan a véhiculé certaines idées qui sont très populaires dans le contexte politique un peu partout en l’Afrique. Il y a certaines critiques de la Cour pénale internationale que nous avons entendues de certains gouvernements africains, mais aussi de la population africaine. Ce sont des critiques qui disent que la Cour est une institution néo-colonialiste, qu’elle représente une ingérence dans les affaires internes en Afrique. Donc à cause de cela, c’est possible que d’autres pays cessent de coopérer avec la Cour.
On s’aperçoit aussi que beaucoup d’Etats africains s’arrangent avec la CPI, qu’ils ont une coopération sélective. Par exemple en Côte d’Ivoire, les autorités ont livré l’ancien président Laurent Gbagbo, mais pas Simone Gbagbo, son épouse ?
La coopération sélective de certains gouvernements africains envers la Cour pénale internationale, c’est le grand problème. Il y a la situation en Côte d’Ivoire, mais aussi en Ouganda et au Congo. Il y a trois gouvernements africains qui ont utilisé la Cour contre leur opposition. Est-ce possible que la Cour devienne un instrument politique utilisé par certains gouvernements en Afrique pour attaquer les opposants et protéger leurs officiers ? C’est une question importante.
La Cour pénale internationale porte-elle une part de responsabilité dans l’affaiblissement de son image sur le continent ?
Le problème en Côte d’Ivoire, en Ouganda et aussi au Congo, c’est que la CPI a considéré seulement les crimes commis par les rebelles contre les gouvernements. Et la Cour a complètement évité les crimes commis par les gouvernements. Pour la population, c’est un grand problème. Il y a certains gouvernements cyniques, en Afrique, qui voudraient détruire l’image de la CPI. Mais en même temps c’est un problème créé par la CPI elle-même.
Que devrait faire la CPI pour, justement, éviter ce type de problème et redorer son image auprès des opinions publiques africaines ?
C’est nécessaire d’avoir plus d’explication, plus de clarté, mais aussi d’établir des relations plus intelligentes avec les pouvoirs en place. La Cour pénale internationale était très naïve dans ses relations politiques en Afrique. Actuellement, la Cour pénale internationale n’a pas d’experts politiques spécialisés dans la politique africaine qui travaillent à La Haye, alors que toutes les investigations se passent en Afrique, tous les suspects viennent d’Afrique. Il y a une grande nécessité d’une certaine expertise pour assister la Cour dans les discussions avec les officiels africains et aussi pour adresser des messages à la population.
Quinze ans après sa création , alors que le Kenya s’apprête à enclencher un processus de retrait du Statut de Rome, pensez-vous que la CPI soit en danger de mort ?
Je ne pense pas que l’on puisse évoquer la mort de la Cour en Afrique, mais la CPI doit en retenir certaines leçons. Le problème, c’est que la Cour a fait les mêmes erreurs dans chaque pays. Elle a eu une certaine naïveté politique et la loi, c’est aussi quelque chose de politique. Donc la Cour, c’est une institution politique.
RFI : Si le Kenya choisit de se retirer du Statut de Rome et de rejeter la Cour pénale internationale, cela changerait-il quelque chose pour Uhuru Kenyatta et William Ruto, dont les procès devant la CPI doivent s’ouvrir dans les semaines qui viennent ?
Phil Clark : Je ne pense pas que cette action du gouvernement kényan va changer quoi que ce soit. Il s’agit d’une tentative de protéger l’image politique de Ruto et de Kenyatta pendant le procès devant la Cour pénale internationale, mais cela n’affectera pas le procès qui va se poursuivre. Toutefois, cela pourrait affecter la propre action du gouvernement kényan pendant le procès.
Est-ce que cette volonté kényane de sortir du Traité de Rome, et donc de rejeter la CPI, ne va pas donner des idées à d’autres pays en Afrique et dans le monde ?
Il y a une chance que d’autres pays africains fassent quelque chose de similaire parce que le gouvernement kényan a véhiculé certaines idées qui sont très populaires dans le contexte politique un peu partout en l’Afrique. Il y a certaines critiques de la Cour pénale internationale que nous avons entendues de certains gouvernements africains, mais aussi de la population africaine. Ce sont des critiques qui disent que la Cour est une institution néo-colonialiste, qu’elle représente une ingérence dans les affaires internes en Afrique. Donc à cause de cela, c’est possible que d’autres pays cessent de coopérer avec la Cour.
On s’aperçoit aussi que beaucoup d’Etats africains s’arrangent avec la CPI, qu’ils ont une coopération sélective. Par exemple en Côte d’Ivoire, les autorités ont livré l’ancien président Laurent Gbagbo, mais pas Simone Gbagbo, son épouse ?
La coopération sélective de certains gouvernements africains envers la Cour pénale internationale, c’est le grand problème. Il y a la situation en Côte d’Ivoire, mais aussi en Ouganda et au Congo. Il y a trois gouvernements africains qui ont utilisé la Cour contre leur opposition. Est-ce possible que la Cour devienne un instrument politique utilisé par certains gouvernements en Afrique pour attaquer les opposants et protéger leurs officiers ? C’est une question importante.
La Cour pénale internationale porte-elle une part de responsabilité dans l’affaiblissement de son image sur le continent ?
Le problème en Côte d’Ivoire, en Ouganda et aussi au Congo, c’est que la CPI a considéré seulement les crimes commis par les rebelles contre les gouvernements. Et la Cour a complètement évité les crimes commis par les gouvernements. Pour la population, c’est un grand problème. Il y a certains gouvernements cyniques, en Afrique, qui voudraient détruire l’image de la CPI. Mais en même temps c’est un problème créé par la CPI elle-même.
Que devrait faire la CPI pour, justement, éviter ce type de problème et redorer son image auprès des opinions publiques africaines ?
C’est nécessaire d’avoir plus d’explication, plus de clarté, mais aussi d’établir des relations plus intelligentes avec les pouvoirs en place. La Cour pénale internationale était très naïve dans ses relations politiques en Afrique. Actuellement, la Cour pénale internationale n’a pas d’experts politiques spécialisés dans la politique africaine qui travaillent à La Haye, alors que toutes les investigations se passent en Afrique, tous les suspects viennent d’Afrique. Il y a une grande nécessité d’une certaine expertise pour assister la Cour dans les discussions avec les officiels africains et aussi pour adresser des messages à la population.
Quinze ans après sa création , alors que le Kenya s’apprête à enclencher un processus de retrait du Statut de Rome, pensez-vous que la CPI soit en danger de mort ?
Je ne pense pas que l’on puisse évoquer la mort de la Cour en Afrique, mais la CPI doit en retenir certaines leçons. Le problème, c’est que la Cour a fait les mêmes erreurs dans chaque pays. Elle a eu une certaine naïveté politique et la loi, c’est aussi quelque chose de politique. Donc la Cour, c’est une institution politique.