Le chiffre est ahurissant. Près de 5000 fonctionnaires ivoiriens vivent dans le dénuement le plus total. Ils sont pour la plupart des clochards errant dans les rues. La nuit tombée, ils se retrouvent dans les gares routières pour dormir. Ces fonctionnaires sont victimes des usuriers, qui leur prêtent de l’argent qu’ils ne finissent jamais de rembourser, en raison du taux d’intérêt astronomique. Le phénomène est plus connu sous le nom de « margouillat ». N’en pouvant plus de cette situation, les victimes des margouillats ont décidé de solliciter l’aide de l’Etat. Regroupés au sein de la coordination des fonctionnaires victimes des précomptes abusifs, ils ont été reçus hier par le ministre de la Solidarité, de la Famille, de la Femme et de l’Enfant, Anne Désirée Ouloto, en son cabinet, au Plateau. Présentant la situation, M. Sy Savané Moriféré, président de la coordination, a expliqué que les fonctionnaires sont victimes de leur vulnérabilité à un moment donné. « Ils se font appeler des maisons de crédit. Ils rodent aux alentours des maisons de commerce qui vendent à crédit les appareils aux fonctionnaires. Dès qu’ils voient un fonctionnaire, ils l’approchent, l’amènent dans une maison et lui demandent de combien il a besoin. Ainsi lorsqu’ils prêtent 20 000 FCFA, ils demandent au fonctionnaire de signer un document qui prouve qu’il a acheté à crédit un appareil de 700 000 FCFA », a relaté M. Sy Savané. Une fois donc le contrat établi, l’usurier, a-t-il poursuivi, passe derrière le fonctionnaire, va prendre une ordonnance au tribunal pour le déposer à la solde. Et Le fonctionnaire se retrouve en train de pays un crédit qui ne finit jamais. Cette pratique, à en croire le président de la coordination, a disloqué de nombreuses familles, fait des fonctionnaires des loques humaines errant dans la nature. « Par solidarité, nous souhaitons que l’Etat ivoirien nous aide », a plaidé humblement M. Sy Savané. «Je veux bien vous aider, mais quel est votre engagement à vous ? L’Etat doit protéger les familles, mais je veux votre engagement. Si vous ne dénoncez pas les usuriers, c’est que vous avez l’intention d’y demeurer », a répondu Mme Ouloto. Ensuite, elle a proposé à la coordination de faire des propositions au ministère dans le cadre de la sensibilisation contre ce fléau. Toutefois, elle a rassuré ses visiteurs que les usuriers seront traqués. «Je vais faire une communication en Conseil de gouvernement. Déjà, nous allons ouvrir une cellule d’écoute et d’assistance aux familles, avec une proposition de programme de prise en charge», a annoncé le ministre Ouloto. Le phénomène de margouillat avait été suspendu dans au début des années 90 par le Président de la République, Alassane Ouattara, alors Premier ministre. Mais, avec la longue crise, il a repris de plus belle.
Dao Maïmouna
Dao Maïmouna