Le verdict du procès contre les ex-dirigeants de la filière café cacao est tombé mercredi dernier. C’est presque l’épilogue d’un marathon judiciaire entamé en 2008. Ce verdict où des peines lourdes ont été prononcées sans emprisonnement immédiat suscite réactions et récriminations. Martial Joseph Ahipeaud, président de l’Union pour le développement et des libertés (Udl) est de ceux qui pensent que la fin du procès et les décisions méritent d’être saluées, même si selon lui, elles laissent en même temps un goût d’inachevé. C’est le principal axe de la conférence de presse qu’il a animée le jeudi 7 novembre 2013 aux Deux-Plateaux-Vallons. L’ancien dirigeant de la Fesci a analysé que dans ce procès, le juge a vraiment ciblé les premiers responsables. Cela est très important dit-il, parce qu’il s’agit des responsables directs et non des collaborateurs. ‘’La motivation était claire’’, ajoute-t-il avant de s’étonner d’une sentence sans mandat de dépôt. Avançant lui-même une première hypothèse en guise de réponse à son interrogation, Martial Ahipeaud se convainc que c’est certainement parce que l’Etat, partie civile au procès, voudrait récupérer près de 68 milliards de FCFA détournés à son détriment et à celui des producteurs. Cette analyse faite, il tire les conclusions et fait des commentaires: ‘’L’essentiel n’est ni d’accuser ni de condamner les gestionnaires. L’essentiel, c’est de mettre en place un arsenal pour que plus jamais, ces choses n’arrivent. C’est triste que des personnalités de ce rang après avoir exercé des responsabilités au niveau de l’Etat aient été condamnées. Techniquement, il faut que le Président de la République comprenne que si on demande une grande concertation sur les problèmes cruciaux du pays, ce n’est pas par rapport à sa personne, mais par rapport à l’intérêt du pays. Comment comprendre que les ministres qui ont géré la filière n’aient pas été condamnés alors qu’ils étaient ordonnateurs des crédits ? En ce moment-là, la justice n’est pas totale’’. Pour le président de l’Udl, ce procès marque à quel point la deuxième République est déliquescente. Une république qui fait la promotion des copains qui se donnent des immunités et déterminent qui doit rendre compte. Commentant l’organisation judiciaire en Côte d’Ivoire, Martial Ahipeaud en déduit que les gouvernants refusent d’appliquer le principe de l’indépendance de la justice au regard de l’immixtion du pouvoir exécutif dans le judiciaire. Poursuivant, le conférencier estime que ce procès est désormais derrière nous mais, commente-t-il ; dans la filière café-cacao, les mesures tendent toujours au contrôle de la manne financière et des paysans : ‘’L’opacité du temps de la Caistab revient. C’est la preuve que les pouvoirs passent mais la manière de gérer demeure’’. Une manière pour lui de prévenir que la Côte d’Ivoire n’est pas à l’abri d’autres détournements.
S.Debailly
S.Debailly