Le président du Groupe écologique de Côte d’Ivoire s’élève contre les atermoiements du comité de pilotage mis sur pied en décembre 2013 dans la filière bois de vêne et dénonce les mauvaises pratiques qui ont cours dans ce domaine d’activité.
Le Groupe écologique de Côte d’Ivoire mène-t-il des activités qui ont un impact sur l’écosystème ivoirien ?
Le Groupe écologique est une Organisation non gouvernementale (Ong) qui lutte pour la préservation de la forêt, des côtes ivoiriennes, le patrimoine marin. Il œuvre également contre la pollution. En tant qu’Ong, nous ne pouvons que sensibiliser et interpeller. C’est ce que nous faisons depuis plusieurs années.
Que fait votre Ong contre l’insalubrité grandissante à Abidjan ?
En 2002, le Groupe écologique a présenté un projet contre l’insalubrité. Mais encore une fois, nos décideurs nous ont tourné le dos. Abidjan est sale par la seule faute de l’Etat. Les opérations coup de balai et autres ne porteront pas leurs fruits tant que l’Etat ne paie pas les entreprises qui ramassent les ordures ménagères. Il est inacceptable que ceux qui travaillent dans les ordures restent quatre, cinq voire six mois sans salaire. Conséquence, il n’y a aucune rigueur dans ce boulot. Les travailleurs démunis qui sont sans salaire ne peuvent pas ramasser convenablement les ordures. Il faut respecter ceux qui sont dans ce milieu. Le gouvernement doit s’atteler à mettre fin aux retards de salaire dans ce secteur. Ce qui n’est pas de nature à encourager des sociétés à y investir. Lorsqu’on aura trouvé une solution définitive à ce problème, on va faire les évaluations et passer à une autre étape afin d’avoir des villes propres, favorables au bien-être des populations. En attendant, les coups d’éclat menés çà et là ne peuvent rien changer à la situation. C’est la charrue avant les bœufs.
Comment se porte le secteur du bois en Côte d’Ivoire ?
Le secteur du bois en Côte d’Ivoire est sinistré tant au niveau du reboisement qu’au niveau des entreprises. C’est un constat clair fait par tous ceux qui y sont.
Concernant les entreprises, quelle est leur situation ?
Les entreprises se plaignent de la rareté de la matière première, notamment le bois. En outre, elles dénoncent l’attribution inéquitable des périmètres exploitables. Il n’y a que quatre à cinq entreprises qui concentrent à elles seules 80% des périmètres exploitables en Côte d’Ivoire. Certaines ont vingt périmètres, elles n’en font rien pendant qu’un nombre important d’opérateurs qui ont tous leurs documents n’a aucun périmètre. Cela n’est pas normal ; il faut rééquilibrer les choses.
Est-ce à dire qu’il y a la corruption dans l’attribution des périmètres ?
Je n’en sais rien. Je ne fais que décrire ce qui a cours sur le terrain.
La rareté du bois n’est-elle pas due à l’exploitation abusive des opérateurs ?
Il faut situer cette question dans son contexte. La Côte d’Ivoire est un pays agricole. Cela veut dire qu’il y a une forte pression des agriculteurs sur la forêt. Il faut reconnaître également que l’industrie du bois impacte négativement sur la forêt. Ce ne sont donc pas les seuls opérateurs qui détruisent la forêt.
Que font les opérateurs pour réduire la déforestation ?
Les opérateurs s’inscrivent dans le moule indiqué par l’Etat. Tous ceux qui exploitent le bois en Côte d’Ivoire paient des taxes de reboisement. Il faut donc un programme ambitieux de reboisement. Il importe de créer un office de reboisement. C’est donc à l’Etat de prendre ses responsabilités. En sus, il faut mettre fin au monopole dans le domaine du reboisement en ouvrant ce marché à la concurrence. La Société de développement des forêts (Sodefor), société d’économie mixte, devrait se désengager du reboisement et permettre à ce que des entreprises viables prennent le relais.
Avez-vous des statistiques fiables au niveau du reboisement et des forêts en Côte d’Ivoire ?
Il n’y a aucune statistique. Ce sont celles de la Fao qui continuent d’être brandies par nos autorités. C’est inconcevable et le Groupe écologique le déplore. Notre pays a les atouts pour pouvoir avoir elle-même ses statistiques. Il revient à notre ministère de tutelle de s’accorder avec l’Institut national de la statistique (Ins) pour atteindre cet objectif. Les moyens existent, il manque l’action.
Quelle est la situation du bois de vêne, près de neuf mois après la prise du décret d’interdiction ?
C’est le Groupe écologique, peu avant la crise, qui a attiré l’attention des autorités sur l’exploitation illégale et abusive du bois de vêne, dans le nord du pays. L’objectif était de sensibiliser les autorités forestières et les aider à mieux organiser cette filière. Nous avons demandé que des autorisations soient données aux opérateurs en dessous du huitième parallèle. C’est ce qui a été fait, car il s’agit de faire de l’écologie positive. On ne peut pas interdire systématiquement une exploitation. Mieux, les exploitants autorisés s’étaient engagés, en 2012, à faire du reboisement. Mais je ne sais pas pourquoi après des rencontres avec le ministère, l’opération de reboisement annoncée n’a pu se traduire en acte concret sur le terrain. C’est dans ce contexte qu’en voulant protéger la partie nord du pays qui est interdite à toute exploitation de bois, le chef de l’Etat a pris un décret d’interdiction générale qui pénalise les opérateurs légaux en dessous du huitième parallèle. Il faut souligner que malgré les effets douloureux de cette brusque mesure, les opérateurs n’ont fait aucune résistance.
Un comité de pilotage dirigé par un conseiller spécial du président de la République a été mis sur pied. Est-ce que cet organe a pu permettre à ce que les opérateurs évacuent leurs bois déjà coupés ?
Le comité a pour attribution essentielle le suivi-évaluation, c’est-à-dire l’encadrement. Mais, à la pratique, ce comité fait des contrôles sur des parcs. Il mène des enquêtes pour voir pourquoi tel ou tel bois n’est pas scié. Or, du fait de la spécificité du bois de vêne, les opérateurs économiques ont eu un modus vivendi avec le ministère en charge des Eaux et forêts pour que cette essence soit exportée sans être sciée. Ce comité qui ne maîtrise pas cette filière veut travailler seul. Je lui conseille de s’appuyer sur le syndicat des exploitants et exportateurs de bois de vêne afin d’aplanir toutes les divergences. Nous sommes dans une période d’exception et il permet aux acteurs qui ont assez souffert d’un décret pris sans préavis de faire évacuer leur bois. Même le bois saisi au-dessus du huitième, il faut une procédure d’adjudication pour ne pas qu’il pourrisse puisqu’il est déjà coupé.
Quel est le rêve du Groupe écologique pour la forêt ivoirienne ?
Je rêve d’une Côte d’Ivoire des années 1940 avec une forêt luxuriante, des essences rares en termes de faune et de flore, des cours d’eau propres, des lagunes moins toxiques. Je veux également un pays propre, débarrassé des ordures qui sont devenues un problème quasiment insoluble pour les dirigeants. C’est ce qui explique nos prises de position souvent perçues dures.
Réalisée par Ahua K.
Le Groupe écologique de Côte d’Ivoire mène-t-il des activités qui ont un impact sur l’écosystème ivoirien ?
Le Groupe écologique est une Organisation non gouvernementale (Ong) qui lutte pour la préservation de la forêt, des côtes ivoiriennes, le patrimoine marin. Il œuvre également contre la pollution. En tant qu’Ong, nous ne pouvons que sensibiliser et interpeller. C’est ce que nous faisons depuis plusieurs années.
Que fait votre Ong contre l’insalubrité grandissante à Abidjan ?
En 2002, le Groupe écologique a présenté un projet contre l’insalubrité. Mais encore une fois, nos décideurs nous ont tourné le dos. Abidjan est sale par la seule faute de l’Etat. Les opérations coup de balai et autres ne porteront pas leurs fruits tant que l’Etat ne paie pas les entreprises qui ramassent les ordures ménagères. Il est inacceptable que ceux qui travaillent dans les ordures restent quatre, cinq voire six mois sans salaire. Conséquence, il n’y a aucune rigueur dans ce boulot. Les travailleurs démunis qui sont sans salaire ne peuvent pas ramasser convenablement les ordures. Il faut respecter ceux qui sont dans ce milieu. Le gouvernement doit s’atteler à mettre fin aux retards de salaire dans ce secteur. Ce qui n’est pas de nature à encourager des sociétés à y investir. Lorsqu’on aura trouvé une solution définitive à ce problème, on va faire les évaluations et passer à une autre étape afin d’avoir des villes propres, favorables au bien-être des populations. En attendant, les coups d’éclat menés çà et là ne peuvent rien changer à la situation. C’est la charrue avant les bœufs.
Comment se porte le secteur du bois en Côte d’Ivoire ?
Le secteur du bois en Côte d’Ivoire est sinistré tant au niveau du reboisement qu’au niveau des entreprises. C’est un constat clair fait par tous ceux qui y sont.
Concernant les entreprises, quelle est leur situation ?
Les entreprises se plaignent de la rareté de la matière première, notamment le bois. En outre, elles dénoncent l’attribution inéquitable des périmètres exploitables. Il n’y a que quatre à cinq entreprises qui concentrent à elles seules 80% des périmètres exploitables en Côte d’Ivoire. Certaines ont vingt périmètres, elles n’en font rien pendant qu’un nombre important d’opérateurs qui ont tous leurs documents n’a aucun périmètre. Cela n’est pas normal ; il faut rééquilibrer les choses.
Est-ce à dire qu’il y a la corruption dans l’attribution des périmètres ?
Je n’en sais rien. Je ne fais que décrire ce qui a cours sur le terrain.
La rareté du bois n’est-elle pas due à l’exploitation abusive des opérateurs ?
Il faut situer cette question dans son contexte. La Côte d’Ivoire est un pays agricole. Cela veut dire qu’il y a une forte pression des agriculteurs sur la forêt. Il faut reconnaître également que l’industrie du bois impacte négativement sur la forêt. Ce ne sont donc pas les seuls opérateurs qui détruisent la forêt.
Que font les opérateurs pour réduire la déforestation ?
Les opérateurs s’inscrivent dans le moule indiqué par l’Etat. Tous ceux qui exploitent le bois en Côte d’Ivoire paient des taxes de reboisement. Il faut donc un programme ambitieux de reboisement. Il importe de créer un office de reboisement. C’est donc à l’Etat de prendre ses responsabilités. En sus, il faut mettre fin au monopole dans le domaine du reboisement en ouvrant ce marché à la concurrence. La Société de développement des forêts (Sodefor), société d’économie mixte, devrait se désengager du reboisement et permettre à ce que des entreprises viables prennent le relais.
Avez-vous des statistiques fiables au niveau du reboisement et des forêts en Côte d’Ivoire ?
Il n’y a aucune statistique. Ce sont celles de la Fao qui continuent d’être brandies par nos autorités. C’est inconcevable et le Groupe écologique le déplore. Notre pays a les atouts pour pouvoir avoir elle-même ses statistiques. Il revient à notre ministère de tutelle de s’accorder avec l’Institut national de la statistique (Ins) pour atteindre cet objectif. Les moyens existent, il manque l’action.
Quelle est la situation du bois de vêne, près de neuf mois après la prise du décret d’interdiction ?
C’est le Groupe écologique, peu avant la crise, qui a attiré l’attention des autorités sur l’exploitation illégale et abusive du bois de vêne, dans le nord du pays. L’objectif était de sensibiliser les autorités forestières et les aider à mieux organiser cette filière. Nous avons demandé que des autorisations soient données aux opérateurs en dessous du huitième parallèle. C’est ce qui a été fait, car il s’agit de faire de l’écologie positive. On ne peut pas interdire systématiquement une exploitation. Mieux, les exploitants autorisés s’étaient engagés, en 2012, à faire du reboisement. Mais je ne sais pas pourquoi après des rencontres avec le ministère, l’opération de reboisement annoncée n’a pu se traduire en acte concret sur le terrain. C’est dans ce contexte qu’en voulant protéger la partie nord du pays qui est interdite à toute exploitation de bois, le chef de l’Etat a pris un décret d’interdiction générale qui pénalise les opérateurs légaux en dessous du huitième parallèle. Il faut souligner que malgré les effets douloureux de cette brusque mesure, les opérateurs n’ont fait aucune résistance.
Un comité de pilotage dirigé par un conseiller spécial du président de la République a été mis sur pied. Est-ce que cet organe a pu permettre à ce que les opérateurs évacuent leurs bois déjà coupés ?
Le comité a pour attribution essentielle le suivi-évaluation, c’est-à-dire l’encadrement. Mais, à la pratique, ce comité fait des contrôles sur des parcs. Il mène des enquêtes pour voir pourquoi tel ou tel bois n’est pas scié. Or, du fait de la spécificité du bois de vêne, les opérateurs économiques ont eu un modus vivendi avec le ministère en charge des Eaux et forêts pour que cette essence soit exportée sans être sciée. Ce comité qui ne maîtrise pas cette filière veut travailler seul. Je lui conseille de s’appuyer sur le syndicat des exploitants et exportateurs de bois de vêne afin d’aplanir toutes les divergences. Nous sommes dans une période d’exception et il permet aux acteurs qui ont assez souffert d’un décret pris sans préavis de faire évacuer leur bois. Même le bois saisi au-dessus du huitième, il faut une procédure d’adjudication pour ne pas qu’il pourrisse puisqu’il est déjà coupé.
Quel est le rêve du Groupe écologique pour la forêt ivoirienne ?
Je rêve d’une Côte d’Ivoire des années 1940 avec une forêt luxuriante, des essences rares en termes de faune et de flore, des cours d’eau propres, des lagunes moins toxiques. Je veux également un pays propre, débarrassé des ordures qui sont devenues un problème quasiment insoluble pour les dirigeants. C’est ce qui explique nos prises de position souvent perçues dures.
Réalisée par Ahua K.