La basilique Notre-Dame-de-la-Paix de Yamoussoukro haut lieu de spiritualité et fleuron du tourisme ivoirien est en train de tomber en ruine, faute d’entretien ! Non, il ne s’agit pas d’un gag. C’est la triste réalité que Le Nouveau Consommateur Hebdo a pu constater dans la capitale politique et administrative de notre pays, le 21 mai.
Consacrée, le 10 septembre 1990, par Sa Sainteté le pape Jean-Paul II, la basilique Notre-Dame-de-la-Paix de Yamoussoukro, le plus grand édifice religieux chrétien au monde d’après le livre Guinness des records, est aujourd’hui à l’abandon. Faute d’entretien, vingt-quatre ans après, l’édifice a commencé à se dégrader. Ce 21 mai, nous décidons de constater de visu, l’ampleur et la nature des dégradations en cours dans ce haut lieu de spiritualité et de pèlerinage.
Etat des lieux
En nous approchant de l’édifice, nous apercevons que la peinture de la clôture a été rafraîchie. Les jardins sont bien tenus. Ce qui donne envie de pousser plus loin la visite. Mais, dès que nous entrons à l’intérieur de la bâtisse, une première surprise nous attend. Entre les marches, une moisissure noire trône, sans inquiétude. Un coup d’œil sur le parvis, à l’entrée principale, et nous découvrons des traces d’eau de pluie qui ont terni par endroits la couleur du précieux marbre. À l’opposé, de l’autre côté de l’église, des flaques d’eau sont bien visibles. Des projecteurs installés aux pieds des colonnes tournés vers le ciel baignent dans de l’eau.
Les poignets des portes d’entrée sont l’objet d’une attaque systématique et en règle de la rouille. Devant ce spectacle affligeant, un soldat de l’opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire, de type européen lance, « toutes ces usures parce que c’est en Afrique. En Europe, on ne permettrait même pas un début d’abîme sur un tel trésor ». Nous poursuivons notre visite après avoir jeté, vers lui, un regard approbateur. Vus de l’extérieur, les vitraux (la basilique en possède la plus grande surface au monde, 7 363 m2) sont recouverts d’une épaisse couche de poussière ne laissant personne indifférent.
À l’intérieur, les dossiers de nombreux sièges ont pris un coup de vieillesse, sous les efforts conjugués de l’usure et de la pluie. Un agent, auprès de qui nous cherchons à savoir pourquoi à l’intérieur de la basilique la pluie laisse des traces, nous explique qu’il s’agit de fuites provoquées par la dégradation de membranes au niveau de la coupole. Elles (ces membranes) n’ont pas été remplacées depuis des années, contrairement à ce qui devait être fait. Il est bon de noter que la coupole fait de la basilique, la plus haute au monde avec 158 mètres. Elle cache un escalier vertigineux servant de passage aux agents de la maintenance en vue de son entretien.
Les haut-parleurs logés dans le baldaquin ne répondent plus convenablement, au point où actuellement ce sont des enceintes extérieures exposées sur les marches de l’hôtel qui sonorisent les célébrations, comme à un concert.
À l’extérieur, l’une des quatre chapelles (chacune représente les évangélistes : Paul, Jean, Mathieu et Pierre) s’est inclinée et menace dangereusement la sécurité des visiteurs. Pour prévenir le danger, un cordon de sécurité a été dressé tout autour.
« Le vrai problème, c’est la réduction du personnel »
Pour connaître les raisons de cet abandon de la basilique, nous nous adressons à un employé présent sur les lieux. Sans retenue, il vide son sac. « Le vrai problème, c’est la réduction du personnel technique de moitié. De 120 employés, nous ne sommes plus qu’une soixantaine après compression de la moitié. Ceux qui restent peuvent faire quoi quand leur tâche est doublée pour le même temps de travail ?» La conversation suscite la curiosité d’un autre employé qui se rapproche. « Je vous observe depuis un moment. Vous êtes journaliste ? » Pour éviter des ennuis, nous évitons de lui répondre. Mais tenace, le nouvel arrivant persiste, « si vous êtes journaliste, pardonnez, aidez-nous parce que nous souffrons. À part les vigiles, nous sommes tous employés du Vatican, mais payés au SMIG ivoirien. D’autres sont morts comme ça sans assurance. Comment peut-on vivre ainsi en travaillant dans une maison de Dieu? Pourtant on sait que le Vieux (Ndlr : Houphouet Boigny) a laissé de l’argent pour tout ça. En plus, les visites sont payantes. Où va tout cet argent pour qu’on soit autant maltraité ? Ce n’est pas du tout juste !» La majorité du personnel rencontré s’est dit soucieux de l’avenir. Nos investigations nous ont permis de découvrir que la gestion de la basilique a été cédée au Saint-Siège. Le Pape Jean Paul II l’a alors confiée aux Pères de la Société de l'Apostolat Catholique encore appelés « pères pallottins ».
« Envoyez-nous un questionnaire »
Le 28 mai, nous avons approché le rectorat de la basilique pour avoir sa réaction sur les interrogations soulevées. Inès Anoman, proche collaboratrice du recteur nous a indiqué que conformément à la procédure, nous devrions déposer un questionnaire au bureau du recteur et attendre la réponse par le Net. Ce à quoi nous nous sommes pliés.
Natacha Koné
Consacrée, le 10 septembre 1990, par Sa Sainteté le pape Jean-Paul II, la basilique Notre-Dame-de-la-Paix de Yamoussoukro, le plus grand édifice religieux chrétien au monde d’après le livre Guinness des records, est aujourd’hui à l’abandon. Faute d’entretien, vingt-quatre ans après, l’édifice a commencé à se dégrader. Ce 21 mai, nous décidons de constater de visu, l’ampleur et la nature des dégradations en cours dans ce haut lieu de spiritualité et de pèlerinage.
Etat des lieux
En nous approchant de l’édifice, nous apercevons que la peinture de la clôture a été rafraîchie. Les jardins sont bien tenus. Ce qui donne envie de pousser plus loin la visite. Mais, dès que nous entrons à l’intérieur de la bâtisse, une première surprise nous attend. Entre les marches, une moisissure noire trône, sans inquiétude. Un coup d’œil sur le parvis, à l’entrée principale, et nous découvrons des traces d’eau de pluie qui ont terni par endroits la couleur du précieux marbre. À l’opposé, de l’autre côté de l’église, des flaques d’eau sont bien visibles. Des projecteurs installés aux pieds des colonnes tournés vers le ciel baignent dans de l’eau.
Les poignets des portes d’entrée sont l’objet d’une attaque systématique et en règle de la rouille. Devant ce spectacle affligeant, un soldat de l’opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire, de type européen lance, « toutes ces usures parce que c’est en Afrique. En Europe, on ne permettrait même pas un début d’abîme sur un tel trésor ». Nous poursuivons notre visite après avoir jeté, vers lui, un regard approbateur. Vus de l’extérieur, les vitraux (la basilique en possède la plus grande surface au monde, 7 363 m2) sont recouverts d’une épaisse couche de poussière ne laissant personne indifférent.
À l’intérieur, les dossiers de nombreux sièges ont pris un coup de vieillesse, sous les efforts conjugués de l’usure et de la pluie. Un agent, auprès de qui nous cherchons à savoir pourquoi à l’intérieur de la basilique la pluie laisse des traces, nous explique qu’il s’agit de fuites provoquées par la dégradation de membranes au niveau de la coupole. Elles (ces membranes) n’ont pas été remplacées depuis des années, contrairement à ce qui devait être fait. Il est bon de noter que la coupole fait de la basilique, la plus haute au monde avec 158 mètres. Elle cache un escalier vertigineux servant de passage aux agents de la maintenance en vue de son entretien.
Les haut-parleurs logés dans le baldaquin ne répondent plus convenablement, au point où actuellement ce sont des enceintes extérieures exposées sur les marches de l’hôtel qui sonorisent les célébrations, comme à un concert.
À l’extérieur, l’une des quatre chapelles (chacune représente les évangélistes : Paul, Jean, Mathieu et Pierre) s’est inclinée et menace dangereusement la sécurité des visiteurs. Pour prévenir le danger, un cordon de sécurité a été dressé tout autour.
« Le vrai problème, c’est la réduction du personnel »
Pour connaître les raisons de cet abandon de la basilique, nous nous adressons à un employé présent sur les lieux. Sans retenue, il vide son sac. « Le vrai problème, c’est la réduction du personnel technique de moitié. De 120 employés, nous ne sommes plus qu’une soixantaine après compression de la moitié. Ceux qui restent peuvent faire quoi quand leur tâche est doublée pour le même temps de travail ?» La conversation suscite la curiosité d’un autre employé qui se rapproche. « Je vous observe depuis un moment. Vous êtes journaliste ? » Pour éviter des ennuis, nous évitons de lui répondre. Mais tenace, le nouvel arrivant persiste, « si vous êtes journaliste, pardonnez, aidez-nous parce que nous souffrons. À part les vigiles, nous sommes tous employés du Vatican, mais payés au SMIG ivoirien. D’autres sont morts comme ça sans assurance. Comment peut-on vivre ainsi en travaillant dans une maison de Dieu? Pourtant on sait que le Vieux (Ndlr : Houphouet Boigny) a laissé de l’argent pour tout ça. En plus, les visites sont payantes. Où va tout cet argent pour qu’on soit autant maltraité ? Ce n’est pas du tout juste !» La majorité du personnel rencontré s’est dit soucieux de l’avenir. Nos investigations nous ont permis de découvrir que la gestion de la basilique a été cédée au Saint-Siège. Le Pape Jean Paul II l’a alors confiée aux Pères de la Société de l'Apostolat Catholique encore appelés « pères pallottins ».
« Envoyez-nous un questionnaire »
Le 28 mai, nous avons approché le rectorat de la basilique pour avoir sa réaction sur les interrogations soulevées. Inès Anoman, proche collaboratrice du recteur nous a indiqué que conformément à la procédure, nous devrions déposer un questionnaire au bureau du recteur et attendre la réponse par le Net. Ce à quoi nous nous sommes pliés.
Natacha Koné