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Économie Publié le samedi 14 juin 2014 | Diasporas-News

Pointe-Noire : 5ème édition du Forum International Green Business

© Diasporas-News Par dr
Pointe-Noire : 5ème édition du Forum International Green Business
Green business : véritable eldorado ou encore un néologisme inventé par les sorciers blancs en lieu et place du développement durable ? La prise de conscience du changement climatique oblige l’homo-œconomicus du 21ème siècle à modifier son comportement. Au travers de ce forum, organisé chaque année à Pointe-Noire, le Congo semble avoir pris la mesure du défi.

Du 20 au 24 mai 2014 s’était tenue à Pointe-Noire la 5ème édition du Forum International Green Business (FIGB). Comme tous les ans, à la même période, Pointe-Noire devient le rendez-vous des participants – institutions financières, entrepreneurs, politiques, société civile, journalistes – qui croient à une économie verte, vertueuse c’est-à-dire rentable tout en préservant l’environnement. « Produire, transformer, consommer local ou sous-régional » ; tel a été le thème de l’édition 2014. Placé sous l’égide de la Chambre de Commerce de la deuxième ville du Congo et son bras séculier la Conférence Permanente des Chambres Consulaires Africaines et Francophones (CPCCAF), le FIGB a désormais atteint sa vitesse de croisière ; il est par conséquent inscrit dans le paysage et l’agenda annuel des réunions internationales de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC).

Selon un ordonnancement protocolaire bien huilé, les discours d’ouverture donnent un aperçu des institutions ou organismes qui soutiennent ces assises : la CEEAC pour le cachet régional ; ensuite à l’international, l’Organisation de la Francophonie (OIF), la PNUE et la Chambre de Commerce de Paris. Dans ses propos liminaires, le ministre congolais de l’Economie forestière et du Développement durable Henri Djombo loue les potentialités du continent africain en ces termes : « nos ressources naturelles en biodiversité offre une opportunité pour le développement de l’économie verte… c’est-à-dire une transformation économique structurelle et une croissance inclusive ». En effet, dans ce domaine, le Congo Brazzaville est au cœur du « Bassin du Congo », considéré à juste titre comme le deuxième poumon de la planète derrière la forêt amazonienne. Avec 30% de couverture végétale du continent – 200 millions d’hectares – cette forêt se répartit entre la RDC, le Cameroun, le Gabon, la Guinée Equatoriale et le Congo. Or, tous ces pays disposent d’une énorme réserve d’hydrocarbures sur laquelle repose, pour l’essentiel, leur développement économique. Leur industrie extractive attire des capitaux étrangers mais ces investissements n’irriguent pas toutes les strates de leur économie nationale. Pire, plus de 80% des revenus générés par ce secteur remontent vers les actionnaires ; donc hors de notre continent. A l’échelle de nos pays, les royalties versées par les compagnies étrangères semblent assez conséquentes. Mais cette rente pétrolière suit des voies impénétrables ; si bien que le bon peuple n’en puisse même pas voir sa couleur.

En cela, le green business devient une alternative susceptible, à long terme, de prendre le relais de l’économie mondiale propulsée par le pétrole, depuis la fin du 19ème siècle. Le domaine de l’économie verte est tellement vaste qu’elle peut avoir des impacts dans tous les secteurs d’activité. Oui, mais la principale difficulté est d’éviter le piège de ce mot fourre-tout. Les préoccupations diffèrent selon les pays et les hémisphères. D’abord, pour les économies occidentales c’est-à-dire industrialisées, réduire les émissions de dioxyde de carbone causées par l’utilisation d’énergie fossile reste leur principal défi. Leur problématique tourne autour d’une transition énergétique qui passe par la substitution progressive du pétrole et ses dérivés grâce à l’exploitation des ressources renouvelables. Tandis que les caractéristiques de nos économies sont les suivantes : une démographie galopante associée à une technique traditionnelle à faible rendement - en matière agricole- ; ce cocktail provoque une déforestation dévastatrice incommensurable. De plus, les activités de l’industrie extractive des sociétés pétrolière et minière risquent encore d’aggraver cette dégradation. Donc notre principal challenge reste le suivant : comment concilier une gestion rationnelle de nos terres arables pour atteindre une autosuffisance alimentaire tout en préservant l’écosystème et l’intégralité de notre biodiversité ?

Le FIGB donne-t-il une réponse suffisante à cette problématique ?

La prise de conscience de cette opportunité d’investir dans l’économie verte est indéniable. Le Congo et ses voisins de la sous-région n’ont pas attendu la recommandation de l’ONU au moment de la déclaration de Rio+20 (en 2012) stipulant « un engagement des gouvernements à mettre en place le développement durable ». Cette orientation a encore été soulignée par les Systèmes des Nations-Unies dans le programme de développement post-2015 ; c’est-à-dire la suite des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) qui ont servi de cadre commun pour l’action et la coopération au niveau mondial sur le développement depuis qu’ils ont été adoptés en 2000.
Le curseur a déjà été mis sur le diagnostic sectoriel au moment de l’édition du FIGB 2013. Améliorer la législation, promouvoir l’entreprenariat à travers la création du Réseau des Entreprises d’Afrique Centrale pour l’Economie Verte (REACEV). Plusieurs secteurs prioritaires ont, d’ores et déjà, été identifiés. Citons entre autres : la valorisation de la biodiversité, les énergies renouvelables, l’agrotourisme, la gestion des déchets et l’éco-construction. En marge de cette édition 2014, quelques partenariats Nord-Sud se sont noués comme dans le domaine de l’énergie solaire. La société Solar 21 – société normande spécialisée dans les systèmes d’alimentation solaire - a en effet signé une joint-venture avec respectivement Africa solaire et GETAP.
Mais la concrétisation du Programme d’Appui au Développement de l’Economie Verte en Afrique Centrale (PADEVAC) a du retard à l’allumage. On ne peut indéfiniment « sensibiliser les entreprises aux opportunités de l’économie verte et renforcer la participation du secteur privé » si le nerf de la guerre n’est pas au rendez-vous ?

Comment financer l’économie verte ?

Le gouvernement et la CEEAC ont-ils engagé des budgets dédiés à la promotion de cette nouvelle orientation ? Pour mener la mission qui leur était confiée, les organismes publics chargés de suivi des différents projets, mais également les ONG qui travaillent dans le milieu de l’environnement sont potentiellement à même d’émarger sur un financement public. Quant aux projets privés, générateurs de revenus et créateurs d’emplois, par quels moyens devront-ils démarrer ? Des banques privées sont-elles intéressées pour accompagner les entrepreneurs privés qui souhaitent s’investir dans ce domaine. A ce stade, la rentabilité économique d’un projet est le seul critère pertinent ; même si en amont les gouvernements ou les instances régionales pourraient favoriser – subvention, incitation fiscale - un domaine d’activités qu’ils jugent prometteur.
Quant à la BAD, elle a plaidé pour la mise en place d’un Fonds Vert pour l’Afrique, lors de son Assemblée Annuelle qui s’était tenue à Lisbonne en 2011. Les prévisions de cette institution continentale démontrent une perte annuelle de 1,5 à 3% de PIB des pays d’Afrique – plus sensibles aux changements climatiques - à l’horizon 2030. Pionnier dans le domaine du green business, le gouvernement congolais espère que ledit Fonds Vert puisse alimenter rapidement le Fonds Forestier du Bassin du Congo (FFBC).
Autre piste, la couverture forestière est aujourd’hui un capital susceptible de générer du financement international. Et cela par le biais du mécanisme appelé : REDD (Réduction des Emissions de gaz à Effet de serre issus de la Déforestation et de la Dégradation des Forêts). Cet instrument a été conçu pour lutter contre le réchauffement climatique de la planète ; il est basé sur le principe du « pollueur-payeur ». L’industrie occidentale paye des redevances en fonction du CO² qu’elle rejette dans l’atmosphère. Tandis que les pays d’Afrique perçoivent des subventions, proportionnelles au volume de carbone piégé par leurs forêts. En 2008, par exemple, les forêts du Bassin du Congo ont capturé environ 500 millions de tonnes de CO². A ce titre, la Grande-Bretagne et la Norvège ont versé à la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC) la bagatelle de 118 millions €uros, dans le cadre du FFBC. Tout récemment, la CEEAC a encore reçu 30 millions € grâce au mécanisme REDD+. Cette manne n’est pas intarissable et les pays africains ne maîtrisent pas suffisamment la procédure pour l’éligibilité de ces subventions internationales ; contrairement aux pays d’Amérique latine et d’Asie qui sont plus au faîte des réglementions et des mécanismes d’octroi.
Outre le pétrole, la fée électricité restera, et pour longtemps, le moteur d’un développement économique. D’ailleurs, la plupart des pays d’Afrique fonctionne avec des centrales électriques à base de gasoil, plus ou moins vétustes et très onéreuses. Les recommandations du FIGB préconisent « la démocratisation de l’accès aux équipements solaires ou la construction de station thermo-solaire ». Militer et promouvoir des solutions énergétiques grâce aux ressources renouvelables, pourquoi pas ? Mais cette transition vers une économie « verte » c’est-à-dire moins polluante nécessite des coûts supplémentaires de l’ordre de 25 milliards $ par an pour le continent africain. Elle soulève une autre question : ce surcoût doit-il être supporté par les pays, la BAD ou d’autres institutions internationales.


Sylvestre Didier Mavuenzela, la cheville ouvrière du FIGB

La ville de Pointe-Noire est sans conteste le poumon économique du Congo. Ses matières premières, son accès maritime sont des facteurs favorables à l’implantation des sociétés étrangères dans la pétrochimie. Malgré tout, le tissu industriel peine à s’étoffer ; ce qui provoque un déséquilibre et l’hypertrophie du secteur informel. Car cette industrie ne peut absorber, à elle seule, une main d’œuvre pléthorique. Dans ce contexte, la Chambre de Commerce et de l’Industrie joue un rôle primordial. Elle doit servir d’interface entre tous les acteurs économiques par des actions telles que : la recherche de synergie entre les grandes entreprises et les PME/PMI ; le soutien aux initiatives privées. En d’autres termes, sortir le plus grand nombre hors du secteur informel en mettant en place un « système complet d’accompagnement et de financement des entrepreneurs ». Outre l’accès bancaire, il s’agit également de la formalisation de leur comptabilité, le respect des réglementations, la formation des jeunes.
Et depuis 1999, un homme est à la tête de ce chantier colossal : Sylvestre Didier Mavuenzela qui fut élu et réélu sans discontinuer à la tête de cette Chambre de Commerce ponténégrine. Il milite pour une croissance inclusive qui tend à effacer la dualité africaine des taux de croissance élevés avec un niveau de pauvreté alarmant. Il n’a de cesse d’explorer toutes les pistes. Et parmi elles, le Green Business qui, dit-il, est « un accélérateur - avec l’engagement de chacun à prendre une initiative - pour contribuer au développement des entreprises qui pourront ainsi partager les fruits de la croissance ». Le FIGB est son bébé qu’il voit fièrement grandir ; « un rêve qui, depuis cinq ans, se transforme chaque jour un peu plus en réalité… bien qu’il reconnait que le rythme de transformation mérite d’être accéléré ».


Alex ZAKA & Coura SENE
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