Le road-map d’Aly Touré continue : le 15 avril à Londres et quatre jours plus tard à Abidjan. Vînt le tour de Paris, où réside une forte communauté ivoirienne, pour accueillir le co-fondateur de « Convergence 2020 » : une plate-forme de dialogues pour tous les ivoiriens dans toute leur diversité et leur sensibilité.
Le discours
C’était donc le 27 juin dernier au Press-Club de France, devant un parterre de personnalités de la société civile et face aux journalistes, que le porte-parole à l’étranger de ce nouveau mouvement a développé ses idées. La base de sa réflexion est la suivante : « quelle que soit la Nation qui a connu une guerre et secouée par une crise politique profonde, s’est imposée aux dirigeants une nécessité vitale de relance socioéconomique, dans la paix et la sécurité ». Or, la Côte d’Ivoire a été traversée par une décennie de crises politiques d’une violence inouïe : du coup d’Etat 1999 jusqu’à la contestation postélectorale de 2011 avec ses 3.000 morts ; sans oublier la mutinerie de l’armée en 2002 et la partition en deux du pays qui s’en suivît !
D’après Aly Touré, plus qu’une reconstruction, la Côte d’Ivoire a besoin d’un changement en profondeur ; donc d’une refondation. Et celle-ci passe par une convergence c’est-à-dire tendre vers un même but. De prime abord, l’idée paraît séduisante car la meilleure façon d’y parvenir serait d’accompagner le gouvernement actuel dans ce vaste chantier ; de telle sorte que la Côte d’Ivoire puisse intégrer le club des pays émergents d’ici 5 ans. Quel citoyen, de n’importe quelle sensibilité politique, n’adhérerait pas au développement de son pays ? Mais d’ici-là, il faudra tout de même lever l’hypothèque de la crise politique entre pro-Gbagbo et pro-Ouattara. D’autant que 2020 coïncidera avec la fin du second et dernier mandat du président Alassane Ouattara. Eviter une nouvelle crise politique majeure ; telle est la principale raison d’être de Convergence 2020. Quel sort sera réservé aux détenus de la Haye, les prisonniers politiques ? Aujourd’hui, personne n’est en mesure de prédire les conséquences des verdicts qu’auront à prononcer les juges de la Cour Pénale Internationale.
La méthode
Le lancement officiel de ce mouvement en août ou septembre prochain à Abidjan pourra donner davantage d’indication sur les réelles intentions des fondateurs de Convergence 2020. En effet, leurs stratégies semblent assez floues, pour l’instant. Rappelons que le même Aly Touré a déjà testé cette idée d’ouverture auprès de la diaspora, le 5 avril dernier à Neuilly-sur-Seine. Le Représentant permanent de la Côte d’Ivoire auprès des organisations internationales des produits de base à Londres avait alors coiffé sa casquette de Chargé des militants de la diaspora au sein de Rassemblent Des Républicains (RDR), l’écurie du Président Alassane Ouattara.
Lors du point de presse du mois de juin dernier, Abel Naki, Président-fondateur du CRI panafricain, se considérant comme un pro-Gbagbo non-négociable, a accepté – sous certaines conditions - la main tendue d’Aly Touré. Il a laissé entendre que des préalables doivent être satisfaits pour une convergence des deux camps adverses vers un pays émergent, au sens économique du terme. Tandis que Raymond Zap Krasso, Représentant France de COJEP, un pro-Blé Goudé pur sucre, a évoqué son amitié de longue date avec le fondateur de Convergence 2020, pour venir l’écouter. Dialoguer au sein d’une plateforme d’idées à 6.000 km de la Côte d’Ivoire reste un objectif raisonnable à très court terme. Quant à le transposer à l’échelle d’un pays ? Les rancœurs tenaces et les ressentiments, d’un côté comme de l’autre, rendront cette tâche plus ardue. Là où la Commission Dialogue Vérité et Réconciliation (CDVR), présidée par l’ancien premier ministre Charles Konan Banny a quasiment échoué - même si les centres d’écoutes seront encore prolongés d’une année - Convergence 2020 peut-elle réussir ? Sinon, sera-t-elle en mesure de se substituer ou au minimum compléter les actions du Programme National de Cohésion Sociale (PNCS) ? Lancé en mai 2013 avec un budget conséquent de 7 milliards FCFA (10,6 millions €uros environ), cette nouvelle institution est censée assurer le volet socioéconomique de la réconciliation. D’ailleurs, la BAD vient de signer récemment un engagement de 46 millions $ en faveur de la PNCS pour faciliter l’inclusion et de la cohésion sociale.
Le professeur Franklin Nyamsi, présent au moment de cette conférence de presse, invite chaque citoyen ou chaque entité à un travail d’introspection afin de tirer les leçons du passé. Il fait une analyse historique et structurelle de la crise. Selon lui, « la Côte d’Ivoire fut l’incarnation même de la convergence grâce à l’apport d’une douzaine de pays pour le développement de son économie au lendemain de son indépendance ». Cet élan de panafricanisme a été freiné par le ralentissement de l’économie mondiale des années 1990 qui n’a pas épargné le pays. Surgissent alors le début des problèmes fonciers et les questions de nationalité ou d’ivoirité. Aujourd’hui, dit-il, la Côte d’Ivoire doit s’entendre sur un « minimum nécessaire commun » c’est-à-dire l’emploi des jeunes, la sécurité, la justice. Après son exposé, en guise de conclusion, il a prononcé la phrase suivante : « laissons Aly touré lancer son mouvement ! »
Une fois lancée, quelle légitimité aura Convergence 2020 ? Elle sera jugée sur son bilan socioéconomique ou son nombre d’adhérents de tout bord politique ou encore sa contribution en tant que think-tank ? Se transformera-t-elle en parti politique pour enfin obtenir l’onction du peuple ? Tout dépend du véritable dessein de son fondateur voire de ceux qui tireraient les ficelles en coulisses.
Alex ZAKA
Le discours
C’était donc le 27 juin dernier au Press-Club de France, devant un parterre de personnalités de la société civile et face aux journalistes, que le porte-parole à l’étranger de ce nouveau mouvement a développé ses idées. La base de sa réflexion est la suivante : « quelle que soit la Nation qui a connu une guerre et secouée par une crise politique profonde, s’est imposée aux dirigeants une nécessité vitale de relance socioéconomique, dans la paix et la sécurité ». Or, la Côte d’Ivoire a été traversée par une décennie de crises politiques d’une violence inouïe : du coup d’Etat 1999 jusqu’à la contestation postélectorale de 2011 avec ses 3.000 morts ; sans oublier la mutinerie de l’armée en 2002 et la partition en deux du pays qui s’en suivît !
D’après Aly Touré, plus qu’une reconstruction, la Côte d’Ivoire a besoin d’un changement en profondeur ; donc d’une refondation. Et celle-ci passe par une convergence c’est-à-dire tendre vers un même but. De prime abord, l’idée paraît séduisante car la meilleure façon d’y parvenir serait d’accompagner le gouvernement actuel dans ce vaste chantier ; de telle sorte que la Côte d’Ivoire puisse intégrer le club des pays émergents d’ici 5 ans. Quel citoyen, de n’importe quelle sensibilité politique, n’adhérerait pas au développement de son pays ? Mais d’ici-là, il faudra tout de même lever l’hypothèque de la crise politique entre pro-Gbagbo et pro-Ouattara. D’autant que 2020 coïncidera avec la fin du second et dernier mandat du président Alassane Ouattara. Eviter une nouvelle crise politique majeure ; telle est la principale raison d’être de Convergence 2020. Quel sort sera réservé aux détenus de la Haye, les prisonniers politiques ? Aujourd’hui, personne n’est en mesure de prédire les conséquences des verdicts qu’auront à prononcer les juges de la Cour Pénale Internationale.
La méthode
Le lancement officiel de ce mouvement en août ou septembre prochain à Abidjan pourra donner davantage d’indication sur les réelles intentions des fondateurs de Convergence 2020. En effet, leurs stratégies semblent assez floues, pour l’instant. Rappelons que le même Aly Touré a déjà testé cette idée d’ouverture auprès de la diaspora, le 5 avril dernier à Neuilly-sur-Seine. Le Représentant permanent de la Côte d’Ivoire auprès des organisations internationales des produits de base à Londres avait alors coiffé sa casquette de Chargé des militants de la diaspora au sein de Rassemblent Des Républicains (RDR), l’écurie du Président Alassane Ouattara.
Lors du point de presse du mois de juin dernier, Abel Naki, Président-fondateur du CRI panafricain, se considérant comme un pro-Gbagbo non-négociable, a accepté – sous certaines conditions - la main tendue d’Aly Touré. Il a laissé entendre que des préalables doivent être satisfaits pour une convergence des deux camps adverses vers un pays émergent, au sens économique du terme. Tandis que Raymond Zap Krasso, Représentant France de COJEP, un pro-Blé Goudé pur sucre, a évoqué son amitié de longue date avec le fondateur de Convergence 2020, pour venir l’écouter. Dialoguer au sein d’une plateforme d’idées à 6.000 km de la Côte d’Ivoire reste un objectif raisonnable à très court terme. Quant à le transposer à l’échelle d’un pays ? Les rancœurs tenaces et les ressentiments, d’un côté comme de l’autre, rendront cette tâche plus ardue. Là où la Commission Dialogue Vérité et Réconciliation (CDVR), présidée par l’ancien premier ministre Charles Konan Banny a quasiment échoué - même si les centres d’écoutes seront encore prolongés d’une année - Convergence 2020 peut-elle réussir ? Sinon, sera-t-elle en mesure de se substituer ou au minimum compléter les actions du Programme National de Cohésion Sociale (PNCS) ? Lancé en mai 2013 avec un budget conséquent de 7 milliards FCFA (10,6 millions €uros environ), cette nouvelle institution est censée assurer le volet socioéconomique de la réconciliation. D’ailleurs, la BAD vient de signer récemment un engagement de 46 millions $ en faveur de la PNCS pour faciliter l’inclusion et de la cohésion sociale.
Le professeur Franklin Nyamsi, présent au moment de cette conférence de presse, invite chaque citoyen ou chaque entité à un travail d’introspection afin de tirer les leçons du passé. Il fait une analyse historique et structurelle de la crise. Selon lui, « la Côte d’Ivoire fut l’incarnation même de la convergence grâce à l’apport d’une douzaine de pays pour le développement de son économie au lendemain de son indépendance ». Cet élan de panafricanisme a été freiné par le ralentissement de l’économie mondiale des années 1990 qui n’a pas épargné le pays. Surgissent alors le début des problèmes fonciers et les questions de nationalité ou d’ivoirité. Aujourd’hui, dit-il, la Côte d’Ivoire doit s’entendre sur un « minimum nécessaire commun » c’est-à-dire l’emploi des jeunes, la sécurité, la justice. Après son exposé, en guise de conclusion, il a prononcé la phrase suivante : « laissons Aly touré lancer son mouvement ! »
Une fois lancée, quelle légitimité aura Convergence 2020 ? Elle sera jugée sur son bilan socioéconomique ou son nombre d’adhérents de tout bord politique ou encore sa contribution en tant que think-tank ? Se transformera-t-elle en parti politique pour enfin obtenir l’onction du peuple ? Tout dépend du véritable dessein de son fondateur voire de ceux qui tireraient les ficelles en coulisses.
Alex ZAKA