La fièvre Ebola qui a fait fait sa brusque apparition en Afrique de l'Ouest depuis bientôt trois mois, a déjà fait 729 victimes en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia. Il y a une dizaine de jours, la maladie est arrivée au Nigeria, le pays le plus peuplé du continent avec ses 160 millions d'âmes. Si la maladie s'installe durablement dans ce pays dont les habitants sont réputés grands migrants, c'est toute l'Afrique qui s'expose à l'épidémie. Il a suffi que le géant du continent soit touché par le fléau pour que la communauté internationale, murée jusque-là dans un surprenant attentisme, décide de mettre le holà. De Paris à Washington, de Londres à Berlin, c'est la phobie de la fièvre hémorragique. Dans ces grandes capitales occidentales, on déconseille aux voyageurs, les pays africains où sévit le terrible mal. Sur le continent même, des mesures draconiennes ont été prises. L'état d'urgence a été décrété pour 60 à 90 jours en Sierra Leone avec interdiction de toute réunion publique, tandis qu'au Liberia voisin, le personnel non essentiel du secteur public a été mis en congé forcé de 30 jours. Aux Seychelles, les autorités refusent même l'entrée sur leur territoire à l'équipe sierra léonaise de football. Des compagnies aériennes emportées par cette ''ébolaphobie'', ont suspendu la desserte des trois pays touchés. La volonté de lutter contre cette maladie pourrait peut-être justifier cette série de mesures radicales, mais faut-il céder pour autant à la panique, au point de mettre en quarantaine ces pays dont le seul tort est d'avoir eu le malheur d'être visité par le virus? Le Liberia, la Sierra Leone et la Guinée partagent pratiquement les mêmes infortunes: ils sortent tous péniblement d'une profonde crise. Les reléguer au rang de pestiférés, le temps de circonscrire une épidémie, pourrait les replonger dans l'abîme d'où ils tentent d'émerger. Pourtant, il n'y aurait pas tant péril à l'échelle mondiale, comme le soutient le Professeur belge Peter Piot. Le co-découvreur du virus Ebola écarte l'éventualité d'une épidémie majeure hors d'Afrique, même si une personne porteuse du virus voyageait jusqu'en Europe, aux Etats-Unis ou dans une autre partie de l'Afrique. Tout en sonnant le tocsin contre la fièvre hémorragique, le monde doit se montrer solidaire de ces pays et de leurs populations qui ne doivent en aucun cas faire l'objet de rejet.
Charles d'Almeida
Charles d'Almeida