La Côte d’Ivoire a toujours mis l’accent sur l’agriculture, mais les moyens déployés pour développer la nécessaire mécanisation du secteur n’ont pas toujours suivi. Cette évolution est attendue par le plus grand nombre, et notamment par les jeunes, prêts à prendre la relève au sein d’un secteur clé de l’économie locale.
L’un des grands enjeux de l’émergence économique est de faire en sorte que la mécanisation de l’agriculture soit en réalité. C’est la condition sine qua non pour que tous les jeunes qui veulent retourner à la terre, ou qui y sont déjà, soient davantage motivés pour continuer à valoriser l’activité agricole. Et l’on ne peut parler de mécanisation en terre ivoirienne sans faire un détour dans le passé afin d’en tirer quelques leçons.
Dès l’Indépendance, les autorités publiques avaient impulsé un réel élan en faveur de la mécanisation de l’agriculture. Cette politique volontariste visait à créer de vastes plantations industrielles de coton, de canne à sucre, de banane et dessert, d’ananas, etc., et la mécanisation est venue accompagner le processus. L’Etat a même créé la Motoragri – structure spécialisée dans le processus de mécanisation de l’agriculture ivoirienne. Et des sociétés comme la Compagnie ivoirienne pour le développement des textiles (CIDT), la Cotonnière ivoirienne (Cotivo), la Société d’Etat pour le développement des plantations de canne à sucre (Sodesucre), la Société pour le développement du palmier à huile (Sodepalm), ou encore la Palmindustrie en ont profité. L’agriculture ivoirienne a ainsi connu un vrai boom qui continue de rejaillir sur toute l’économie nationale. Lorsque l’Etat a cédé la plupart de ses sociétés aux opérateurs privés, ces derniers ont continué à maintenir leurs productions par la mécanisation puisque leurs usines ne peuvent guère tourner sans la mécanisation de leurs processus de production agricole. C’est le cas aujourd’hui de sociétés comme Saph, Sucrivoire, Sucaf Côte d’Ivoire, etc.
L’accès des jeunes à la mécanisation
Hormis ces agro-industriels, le vrai problème se pose au niveau de toutes les autres composantes de la société. Ces hommes et ces femmes qui évoluent aussi dans l’agriculture, tant d’exportation que vivrière. Eux sont en manque criard de quelque équipement que ce soit. En cause le manque de moyens financiers pour s’équiper, de même que les coopératives agricoles qui en souffrent cruellement… Le taux de mécanisation reste faible et, depuis une cinquantaine d’années, les lignes ne semblent pas vraiment bouger. Des tracteurs, des défricheuses, des semeuses, des dispositifs d’arrosage automatisés, des sécheuses sont autant d’outils dont les jeunes d’aujourd’hui ont besoin pour travailler la terre. Cela revêt une importance capitale dans le sens où il ne s’agit plus maintenant de cultiver simplement des lopins de terre, mais plutôt d’exploiter de grandes surfaces pour valoriser le savoir-faire agricole et approvisionner toutes ces usines qui tournent à plein régime. Bon nombre d’entre elles sont obligées d’aller chercher de la matière première ailleurs, alors que nos terres peuvent produire tous ces produits agricoles…
La plupart des acteurs s’accordent à dire que l’Etat a une forte partition à jouer dans ce dossier. C’est lui qui doit créer les conditions idoines pour que ces agriculteurs aient la possibilité d’accéder à ces instruments modernes de travail. Même si le dispositif de mise à disposition de ces machines sera différent de ce qui s’est fait par le passé, la nécessité et l’urgence sont là. Un fonds spécifique pour accompagner la mécanisation de l’agriculture est de nos jours requis pour traiter la question de façon spécifique. Et l’on ne saurait booster le secteur agro-industriel, surtout du côté des petites et moyennes industries (PMI), sans une mécanisation aux mains de la jeunesse ivoirienne, dont un bon nombre d’entre elle dispose des qualifications requises, mais non exploitées. C’est un fait, le binôme agriculture de masse et industrie est inséparable.
L’Etat ivoirien, vivement interpellé
La Côte d’Ivoire n’a plus le choix. Si ce pays veut réellement se hisser au rang des pays émergents, le développement de sa mécanisation agricole est indispensable. L’heure n’est plus seulement aux commentaires et à la participation à de nombreux forums, colloques, séminaires, foires et expositions pour pointer cette nécessité. Les solutions sont déjà connues et consignées dans des documents aux mains des officiels ivoiriens. Il faut simplement un début d’application et de mise en œuvre de toutes ces recommandations issues de rapports d’experts, de consultants internationaux qui ont été payés cher pour réaliser ces travaux. Lesquels ne doivent plus servir d’archives mais plutôt de références pour joindre l’acte à la parole et aux écrits.
A maintes reprises, la Côte d’Ivoire a envoyé des délégations dans les salons internationaux de l’agriculture, à Paris et dans de nombreuses autres destinations en Europe, en Asie et en Amérique. Qu’est-ce que le ministère ivoirien de l’Agriculture en tire concrètement ? Le ministre Coulibaly Sangafowa est ainsi interpellé. S’il s’agit de moyens financiers, le pays a les ressources pour s’équiper de machines agricoles et autres outillages à mettre à la disposition de ces jeunes qui ne veulent que travailler, et dont bon nombre sont déjà regroupés en coopérative. C’est aussi le cas des femmes au sein des filières du vivrier, qui ne manquent pas de crier dans le désert pour accéder au minimum, notamment pour le transport de leurs marchandises du bord champ vers les marchés et usines de la place. Lesquels sont demandeurs, tandis de nombreuses denrées pourrissent dans les champs. La demande est présente, mais l’on peine à satisfaire l’offre faute de moyens de mécanisation.
Si des particuliers comme le groupe Agronomix, dirigé par l’Ivoirien Christophe Yapi, parvient avec des partenaires européens, notamment italiens et récemment allemands et hollandais, à s’équiper en matériels agricoles, on peut imaginer que l’Etat ivoirien puisse le faire également.
Le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, était d’ailleurs récemment en visite d’Etat en Algérie où il a visité une usine locale qui fabrique un grand nombre d’équipements agricoles. C’est aussi le cas du Brésil, de la Turquie, de la Chine, de l’Inde. La Côte d’Ivoire a déjà envoyé des émissaires dans toutes ces contrées du monde pour s’inspirer de ces modèles de réussite. Sur place, le Salon international de l’agriculture et des ressources animales (Sara) attire un public nombreux qui peut apprécier plusieurs dispositifs proposés au pays. Malgré cela, les méthodes culturales des jeunes d’aujourd’hui ne sont pas vraiment différentes de celles de nos parents il y a trente, voire cinquante ans en arrière. La question demeure. La Côte d’Ivoire peut-elle être émergente avec de jeunes agriculteurs archaïques ? En attendant 2020, le regard de la jeunesse reste tourné vers l’autorité publique, surtout au moment de prendre ce dernier virage censé conduire le pays vers cette émergence devenue un refrain quotidien.
J-J AMOND
L’un des grands enjeux de l’émergence économique est de faire en sorte que la mécanisation de l’agriculture soit en réalité. C’est la condition sine qua non pour que tous les jeunes qui veulent retourner à la terre, ou qui y sont déjà, soient davantage motivés pour continuer à valoriser l’activité agricole. Et l’on ne peut parler de mécanisation en terre ivoirienne sans faire un détour dans le passé afin d’en tirer quelques leçons.
Dès l’Indépendance, les autorités publiques avaient impulsé un réel élan en faveur de la mécanisation de l’agriculture. Cette politique volontariste visait à créer de vastes plantations industrielles de coton, de canne à sucre, de banane et dessert, d’ananas, etc., et la mécanisation est venue accompagner le processus. L’Etat a même créé la Motoragri – structure spécialisée dans le processus de mécanisation de l’agriculture ivoirienne. Et des sociétés comme la Compagnie ivoirienne pour le développement des textiles (CIDT), la Cotonnière ivoirienne (Cotivo), la Société d’Etat pour le développement des plantations de canne à sucre (Sodesucre), la Société pour le développement du palmier à huile (Sodepalm), ou encore la Palmindustrie en ont profité. L’agriculture ivoirienne a ainsi connu un vrai boom qui continue de rejaillir sur toute l’économie nationale. Lorsque l’Etat a cédé la plupart de ses sociétés aux opérateurs privés, ces derniers ont continué à maintenir leurs productions par la mécanisation puisque leurs usines ne peuvent guère tourner sans la mécanisation de leurs processus de production agricole. C’est le cas aujourd’hui de sociétés comme Saph, Sucrivoire, Sucaf Côte d’Ivoire, etc.
L’accès des jeunes à la mécanisation
Hormis ces agro-industriels, le vrai problème se pose au niveau de toutes les autres composantes de la société. Ces hommes et ces femmes qui évoluent aussi dans l’agriculture, tant d’exportation que vivrière. Eux sont en manque criard de quelque équipement que ce soit. En cause le manque de moyens financiers pour s’équiper, de même que les coopératives agricoles qui en souffrent cruellement… Le taux de mécanisation reste faible et, depuis une cinquantaine d’années, les lignes ne semblent pas vraiment bouger. Des tracteurs, des défricheuses, des semeuses, des dispositifs d’arrosage automatisés, des sécheuses sont autant d’outils dont les jeunes d’aujourd’hui ont besoin pour travailler la terre. Cela revêt une importance capitale dans le sens où il ne s’agit plus maintenant de cultiver simplement des lopins de terre, mais plutôt d’exploiter de grandes surfaces pour valoriser le savoir-faire agricole et approvisionner toutes ces usines qui tournent à plein régime. Bon nombre d’entre elles sont obligées d’aller chercher de la matière première ailleurs, alors que nos terres peuvent produire tous ces produits agricoles…
La plupart des acteurs s’accordent à dire que l’Etat a une forte partition à jouer dans ce dossier. C’est lui qui doit créer les conditions idoines pour que ces agriculteurs aient la possibilité d’accéder à ces instruments modernes de travail. Même si le dispositif de mise à disposition de ces machines sera différent de ce qui s’est fait par le passé, la nécessité et l’urgence sont là. Un fonds spécifique pour accompagner la mécanisation de l’agriculture est de nos jours requis pour traiter la question de façon spécifique. Et l’on ne saurait booster le secteur agro-industriel, surtout du côté des petites et moyennes industries (PMI), sans une mécanisation aux mains de la jeunesse ivoirienne, dont un bon nombre d’entre elle dispose des qualifications requises, mais non exploitées. C’est un fait, le binôme agriculture de masse et industrie est inséparable.
L’Etat ivoirien, vivement interpellé
La Côte d’Ivoire n’a plus le choix. Si ce pays veut réellement se hisser au rang des pays émergents, le développement de sa mécanisation agricole est indispensable. L’heure n’est plus seulement aux commentaires et à la participation à de nombreux forums, colloques, séminaires, foires et expositions pour pointer cette nécessité. Les solutions sont déjà connues et consignées dans des documents aux mains des officiels ivoiriens. Il faut simplement un début d’application et de mise en œuvre de toutes ces recommandations issues de rapports d’experts, de consultants internationaux qui ont été payés cher pour réaliser ces travaux. Lesquels ne doivent plus servir d’archives mais plutôt de références pour joindre l’acte à la parole et aux écrits.
A maintes reprises, la Côte d’Ivoire a envoyé des délégations dans les salons internationaux de l’agriculture, à Paris et dans de nombreuses autres destinations en Europe, en Asie et en Amérique. Qu’est-ce que le ministère ivoirien de l’Agriculture en tire concrètement ? Le ministre Coulibaly Sangafowa est ainsi interpellé. S’il s’agit de moyens financiers, le pays a les ressources pour s’équiper de machines agricoles et autres outillages à mettre à la disposition de ces jeunes qui ne veulent que travailler, et dont bon nombre sont déjà regroupés en coopérative. C’est aussi le cas des femmes au sein des filières du vivrier, qui ne manquent pas de crier dans le désert pour accéder au minimum, notamment pour le transport de leurs marchandises du bord champ vers les marchés et usines de la place. Lesquels sont demandeurs, tandis de nombreuses denrées pourrissent dans les champs. La demande est présente, mais l’on peine à satisfaire l’offre faute de moyens de mécanisation.
Si des particuliers comme le groupe Agronomix, dirigé par l’Ivoirien Christophe Yapi, parvient avec des partenaires européens, notamment italiens et récemment allemands et hollandais, à s’équiper en matériels agricoles, on peut imaginer que l’Etat ivoirien puisse le faire également.
Le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, était d’ailleurs récemment en visite d’Etat en Algérie où il a visité une usine locale qui fabrique un grand nombre d’équipements agricoles. C’est aussi le cas du Brésil, de la Turquie, de la Chine, de l’Inde. La Côte d’Ivoire a déjà envoyé des émissaires dans toutes ces contrées du monde pour s’inspirer de ces modèles de réussite. Sur place, le Salon international de l’agriculture et des ressources animales (Sara) attire un public nombreux qui peut apprécier plusieurs dispositifs proposés au pays. Malgré cela, les méthodes culturales des jeunes d’aujourd’hui ne sont pas vraiment différentes de celles de nos parents il y a trente, voire cinquante ans en arrière. La question demeure. La Côte d’Ivoire peut-elle être émergente avec de jeunes agriculteurs archaïques ? En attendant 2020, le regard de la jeunesse reste tourné vers l’autorité publique, surtout au moment de prendre ce dernier virage censé conduire le pays vers cette émergence devenue un refrain quotidien.
J-J AMOND