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Économie Publié le jeudi 14 juillet 2016 | L’intelligent d’Abidjan

Entretien / Hubert de Vauplane, avocat à propos de la création de la bourse des matières premières agricoles ivoirienne : Elle doit être dirigée par les agriculteurs et les acteurs privés

Hubert de Vauplane est avocat au barreau de Paris et membre du collège des experts en charge de la rédaction de l’étude de faisabilité de la création d’une bourse des matières premières agricoles en Côte d’Ivoire. Dans cet entretien qu’il nous a accordé, lors de son séjour en Côte d’Ivoire, dans le cadre du séminaire sur cette bourse, il donne les raisons de l’importance de cette bourse. Il recommande à l’Etat de confier sa gestion aux agriculteurs et acteurs privés pour éviter les échecs qu’ont connus certains pays africains dont la gestion de leur bourse agricole était du ressort de l’Etat.

Comment expliquez-vous que la Côte d’Ivoire dont le développement économique a reposé essentiellement sur l’agriculture, notamment le binôme café-cacao n’ai pas jusque la une bourse des matières premières agricoles ?
Il en existe déjà dans certains pays africains notamment les pays anglophones. C’est une curiosité de voir que les pays francophones de l’Ouest et du Centre n’ont pas de bourse à part le Cameroun qui vient de lancer une bourse. Pour la Côte d’Ivoire, Je pense que cela tient au fait que le marché est très fragmenté. Avec une division Nord-Sud importante aussi bien dans la partie agricole que l’entreposage, l’organisation de l’agriculture. Ce que je veux dire, c’est que le marché agricole ivoirien a cette caractéristique d’être le marché dominant dans l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest africaine). Il est très fragmenté, et très peu organisé de manière efficace. les filières existent, mais sont organisées d’abord pour le marché local et non pas national. Tout cela fait qu’on a des marchés d’approvisionnement qui fonctionnent en Côte d’Ivoire, mais le prix des matières premières est trop soumis à des situations liées au manque d’efficacité dans leur organisation. Pis, il y a le fait de l’inexistence de filières suffisamment intégrées pour avoir un prix qui soit le même à l’Est, à l’Ouest, au Sud et au Nord de la Côte d’Ivoire, nonobstant le cout du transport. Pourquoi il n’y a de bourse des matières premières en Cote d’Ivoire, alors qu’il y a une bourse des valeurs mobilières, c’est u paradoxe, c’est l’inverse qu’on aurait du constater. Je n’arrive pas à comprendre. Mais je crois que cela est liée à l’absence de l’organisation au niveau national et tourner vers l’export, à part quelques filières come le café, le cacao, l’anacarde qui sont les trois filières les plus organisées, les autres sont encore trop locales.

Quel intérêt pour la Côte d’Ivoire d’avoir une bourse des matières premières agricoles ?
Il faut dire que les banques n’arrivent toujours pas à bien financer les besoins des agriculteurs. Pour plusieurs raisons. Donc la bourse va venir en complément du financement des banques. Ce que je veux dire, c’est que l’un ne remplace l’autre. Mais les deux travaillent ensemble. Et d’ailleurs, dans les acteurs de la bourse, on devra avoir des banques comme acteurs qui vont jouer un rôle dans le financement en prenant des garanties sur les produits agricoles qui sont négociant en bourse. Ensuite, la Côte d’Ivoire gagne à avoir un prix pour les agriculteurs qui sera meilleur par rapport aux prix actuels puisque le marché n’est pas efficace. Cette situation fait perdre en effet des centaines de FCFA sur chaque kg de produits vendus. Les négociants quant a eux, auront une facilité de mieux revendre leurs produits sur le marché national, voire sur le marché international. Autre avantage, c’est que la Côte d’Ivoire peut devenir la référence de l’Afrique de l’Ouest tout au moins dans l’Uemoa sur le marché des prix agricoles.

Vous avez souligné l’inorganisation dans les autres spéculations exceptées le négoce café cacao et l’anacarde. Cela ne pourrait-il pas constituer un frein au bon fonctionnement de cette bourse agricole ?
C’est un défi dans tous les cas. La bourse ne pourra fonctionner que si ces filières s’organisent et sont convaincues de s’organiser dans le sens ce que la bourse apportera pour les agriculteurs une valeur ajoutée. Pour se faire, ces filières, avec l’aide du ministère de l’agriculture, du gouvernement et des chambres agricoles doivent s’organiser avec des intermédiaires pour un bon système d’entreposage. Il ne peut pas y avoir une bourse qui fonctionne correctement sans un système d’entreposage. Le problème, c’est que le marché agricole ivoirien est marché de production vivrière qui part définition est périssable. Donc entre le moment de la récolte et le moment de son écoulement sur le marché à Abidjan, il faut que la chaine de stockage et d’entreposage soir vraiment efficace. Si elle n’est pas efficace, cela pose un problème sur le prix. La bourse oblige d’avoir des systèmes d’entreposage standard au niveau international. Cela apporter une traçabilité et surtout une sécurité dans l’entreposage et dans la qualité d’entreposage qui n’est pas toujours existante.

L’Etat ivoirien veut créer une bourse des matières premières agricoles alors qu’il n’existe pas une base donnée des agriculteurs ivoiriens.
C’est clair qu’il faut identifier tous les acteurs en particulier les agriculteurs. C’est pour cela que le rôle des filières est très important. Une bourse ne peut pas fonctionner sans les filières. Donc les filières doivent connaitre exactement leurs membres. Il faut qu’ils soient convaincus de l’intérêt qu’il y a avoir une bourse par rapport au système actuel. Il n’y aura pas de bourse qui fonctionne si les acteurs, à commencer par les agriculteurs eux-mêmes ne sont pas convaincus que la bourse leur apporte quelque chose. Cela prend du temps. Il y a eu beaucoup d’expériences des bourses agricoles africaines, mais des mauvaises expériences parce qu’elles ont raté. Elles ont raté parce que la sensibilisation n’a pas été suffisante, parce que les bourses étaient également dirigées par l’Etat, ce qui n’est pas une bonne chose. Les bourses agricoles doivent être dirigées par le secteur privé avec les agriculteurs, les filières, les acteurs privés. L’Etat doit certes être présent, mais de façon minoritaire.

Réalisé par Ernest Famin
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