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Editorial Publié le lundi 16 avril 2018 | L’intelligent d’Abidjan

La chronique du lundi : Le privé au secours du développement en Afrique/ Le rôle-clef de PROPARCO, la filiale de l’AFD qui vient au financement du privé

Une évolution qui a ses limites avec une forte croissance qui ne profite pas aux populations

La transformation de l’Afrique et son évolution peuvent se lire à travers deux titres d’un même journal qui fait autorité, The Economist : en 2000, The Economist titrait, à propos de l’Afrique : « The hopeless continent ». En 2013, le même journal titrait : « Africa rising: a hopeful continent ». D’une vision afro-pessimiste, qui décrit une Afrique en proie à la guerre, à la corruption, à la pauvreté, on est passé à un afro-optimisme qui fait de l’Afrique un Eldorado pour les investisseurs et le vecteur de la croissance mondiale. Des pays autrefois « faillis », comme la Sierra Leone, le Mozambique, le Zimbabwe, l'Éthiopie ou le Botswana, connaissent un redressement spectaculaire. En 2013, 15 pays africains font partie des 22 pays qui ont enregistré les meilleurs taux de croissance dans le monde. L’Afrique, qui est devenue l'une des régions les plus dynamiques du monde, connaît, après la première indépendance, l’indépendance politique des années 1960, sa deuxième indépendance, l’indépendance économique.
De façon évidente, une spirale vers l’indépendance économique est enclenchée, ce qui permet aux experts autoproclamés et aux « think tank » occidentaux de « vendre » la destination Afrique aux entreprises étrangères, ce qui est une bonne chose. D’ailleurs, à côté de l’Aide publique au Développement, constamment en baisse, la part des IDE (Investissements Directs Etrangers) augmente fortement et celle du financement interne par la mobilisation du potentiel fiscal africain, l’amélioration du climat des affaires afin de favoriser l’investissement privé endogène, la valorisation des transferts de fonds de la diaspora africaine et la lutte contre les flux financiers illicites (corruption, évasion de l’argent public vers des paradis fiscaux ou des comptes à l’étranger, fondations caritatives fictives). Or, l'Afrique peut financer son propre développement à travers des dynamiques structurelles internes alimentées par des ressources financières endogènes, publiques ou privées. Aujourd’hui, les gouvernements africains, lorsqu’ils acceptent l’amélioration de la gouvernance économique et la démocratisation des sociétés, voient s’accélérer le financement du développement des Etats par des ressources internes.

Toutes les sources de financement, publiques ou privées, externes ou internes, doivent alors être tournées vers la création d’entreprises (PME, PMI, ETI), afin d’industrialiser l’Afrique. L’industrialisation est le seul moyen de créer des richesses et de l’emploi. Jusqu’à présent, la croissance est venue non pas de la transformation industrielle, mais de la vente des matières premières brutes, du secteur des services financiers et des télécommunications. Or, ces secteurs sont détenus par des capitaux étrangers. L’impact sur l’amélioration des conditions de vie des populations reste très limité. J’ai donné, dans l’une de mes Chroniques, l’exemple du cacao. L’Afrique est le premier producteur mondial de fève de cacao (73 % de la production, dont 35 % pour la Côte d’Ivoire), mais le continent ne capte seulement qu’1 % des revenus issus de sa transformation, selon l’Organisation Internationale du Cacao. En 2015, Le Président ivoirien Alassane Ouattara a inauguré, la première usine de production de chocolat dans la capitale économique de la Côte d’Ivoire, Abidjan. Mais, c’est le chocolatier français Cémoi qui a financé la construction du site. Notons cependant qu’il s’agit d’un opérateur privé étranger, ce qui pose la question de la répartition de la plus-value. Point positif : Premier producteur mondial de cacao, la Côte d'Ivoire entend s'imposer dans des secteurs plus lucratifs de cette industrie, la transformation de fèves et la production industrielle de chocolat. Les investisseurs ivoiriens seront-ils au rendez-vous ?

Le privé au secours du développement en Afrique (1) : le rôle essentiel de PROPARCO

Dans ma dernière Chronique, j’écrivais : « Afin de faire face à l’immense défi de la création d’emplois en Afrique, il est urgent, selon les bailleurs de fonds, de faire la promotion de la création d’entreprises. » Je citais le directeur Afrique de l’Organisation internationale du travail (OIT), Aeneas Chuma, qui affirmait : « Au cours de la prochaine décennie, les principaux débouchés économiques viendront des Africains qui montent des entreprises, créent des emplois et de la richesse, et saisissent des opportunités de croissance ». Un chiffre publié par la BAD doit faire réfléchir : le taux de chômage en Côte d’Ivoire, si l’on inclut le travail précaire et l’économie informelle, oscille entre 70 et 90 %. Qui peut alors créer des emplois ? De toute évidence, le secteur privé.

L’AFD (Agence Française de Développement), dont le montant des engagements atteint les 10,4 milliards d’euros pour des financements publics, dispose d’un bras armé, PROPARCO, dédié au financement du secteur privé à hauteur de 1,4 milliards d’euros. PROPARCO souhaite, d’ici 2020, porter ses engagements à 2 milliards d’euros en misant davantage sur le « private equity ». Pour simplifier, le « private equity » se définit ainsi : opération par laquelle un investisseur achète des titres d'une société qui recherche des fonds propres, soit pour sa création, soit pour son développement. PROPARCO, qui participe ainsi au financement du secteur privé, n’a pas vocation à rester au capital de la société. Au Kenya, un marché phare en Afrique de l’Est, PROPARCO est venu au financement de la société Sanergy, une start-up qui a reçu plusieurs prix pour son impact social. Sanergy a créé, à Nairobi, une chaîne de recyclage des déchets, des excréments humains transformés en engrais naturels et en nourriture pour bétail. Les toilettes sèches installées par Sanergy sont exploitées et gérées par des habitants, des « franchisés » qui achètent, souvent à crédit, leur toilette sèche, un investissement rentabilisé au bout d’un an. Une mère de 3 enfants, qui a investi dans un « kit » de toilette sèche a doublé ses revenus. Le montage des « kits » fournit du travail localement. PROPARCO a financé une coopérative agricole, KTDA, devenu un modèle unique dans le monde. KTDA produit du thé et vise les marchés iranien et américain, Le directeur général de PROPARCO, Gregory Clemente, constate que les fonds de « private equity » sont très actifs dans les économies de culture anglo-saxonne.

L’Afrique francophone est-elle en retard dans le développement du secteur privé ?

La légende veut que le système éducatif en Afrique francophone a été conçu pour former des fonctionnaires, alors que celui de l’Afrique francophone, nourrit de l’esprit anglo-saxon, fabriquerait des « businessmen », ce qui séduit les investisseurs. N’est-ce pas le Kenya qui a inventé le « mobile banking » et le Nigeria qui a mis en place le visa électronique ? Les mentalités d’entrepreneur sont-elles vraiment développées du côté anglophone ? Le côté francophone est-il encore trop timide ? Les réalités sont plus complexes et tendent à évoluer. La Côte d’Ivoire est devenue l’un des pays les plus réformateurs au monde. Petit détail : il faut seulement deux jours pour monter sa société à Kigali, au Rwanda, soit le même délai qu’à New York.
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