Les ambitions d’Amadou Koné, ministre des transports
Les clefs du développement sont, sur le chemin de l’émergence : l’eau, l’énergie et les transports. Dans ces trois secteurs, la Côte d’Ivoire affiche un certain retard, malgré les efforts accomplis depuis l’indépendance et, plus récemment, depuis 2011. J’avais déjà signalé, dans une Chronique publiée par L’Intelligent d’Abidjan, l’urgence absolue qu’il y avait à mettre à niveau, en Afrique, routes, voies ferrées, ports et aéroports, afin de désenclaver l’Afrique, de l’ouvrir sur le monde avec une interconnexion entre les Etats. Ce qui est vrai à l’échelle du continent, l’est aussi à l’échelle du pays. J’avais écrit : « L’obstacle à lever, pour la modernisation des infrastructures de transport et leur mise aux normes internationales, est le coût des investissements nécessaires, ce qui nécessite l’intervention du secteur privé, des partenariats public-privé et des mises en concession. » Le danger est le recours, sans discernement, aux prêts, en particulier les prêts chinois ou qatari, et aux partenariats publics privés (PPP), un choix au départ indolore, mais qui est en train de plonger l’Afrique dans le piège de l’endettement. La Côte d’Ivoire, si elle veut consolider sa croissance, doit conduire une politique des transports des plus hardies. Chargé de mettre en œuvre cette politique, le ministre des Transports, Amadou Koné, s’est exprimé, le jeudi 13 septembre, lors des « Grandes Rencontres » du quotidien L’Expression, sur le thème suivant : « Secteur des transports en Côte d’Ivoire : perspectives de modernisation pour la période 2018-2020 ». L’enjeu, pour le gouvernement, est de taille, il est à la fois politique et économique.
Etat des lieux
Historiquement, les infrastructures de transports ont été plus largement développées en Côte d’Ivoire que dans les autres pays de l’Afrique de l’Ouest. Dès son accession à l'indépendance, les dirigeants mettent l'accent sur le développement et la modernisation des transports, aussi bien pour le déplacement des personnes que le transit des marchandises. Dans tous les secteurs, d’importantes infrastructures sont construites : routes, voies ferrées, infrastructures portuaires et pour le transport aérien.
Les routes
Aujourd’hui, le réseau routier ne cesse de se dégrader : plus de 80 % du réseau routier ivoirien est âgé de plus de 20 ans. La quasi-totalité des routes sont dégradées, y compris à Abidjan, Yamoussoukro, San Pedro. De Yamoussoukro à Daloa, la voie est impraticable, la nouvelle autoroute est un fiasco. La dégradation de nombreuses voies à travers le pays est due à l'ancienneté des constructions. Selon Pierre Dimba, directeur-général de l'Ageroute, l'Agence de gestion des routes : « La plupart des voies ont été construites au cours des années 90. Ces voies ont plus de 20, voire 30 ans de vie. Le trafic routier n'est pas le même aujourd'hui qu'il y a 20 ans ». Il faut ajouter des aspects négatifs qu’il est important de corriger : l’attribution des marchés publics, le sérieux et la qualité des travaux, les insuffisances de l’entretien.
Le transport ferroviaire
Le réseau ferroviaire, long de 1 260 km, relie la Côte d’Ivoire au Burkina Faso et au Niger. La ligne est vétuste. Les travaux de la réhabilitation de la ligne ont débuté le 15 septembre 2017. Le grand patron d’un groupe agro-alimentaire algérien insiste sur le point suivant : « Quand nous exportons aujourd’hui d’Algérie nos produits à Abidjan, en Côte d’Ivoire, on met un mois et demi à faire le trajet. En revanche, s’il y avait une ligne de chemin de fer reliant Béchar, Bamako et Abidjan, cela nous permettrait de le faire en 36 heures ». La Côte d’Ivoire
Les infrastructures portuaires
La Côte d’Ivoire possède deux ports : le port autonome d’Abidjan rt celui de San Pedro. Le port d’Abidjan est le premier port de l’Afrique de l’Ouest. Des projets d’extension et de modernisation de ces deux ports sont prévus. Le prochain maire de Youpougon aura à travailler sur l’extension du port d’Abidjan. Il s(agit, pour Abidjan et San Pedro d’affirmer, à travers les installations portuaires, leur vocation industrielle.
Le transport aérien
La Côte d’Ivoire possède trois aéroports internationaux (Abidjan, Yamoussoukro et Bouaké) et de nombreux aéroports régionaux. Des pays comme l’Angola ou le Nigéria construisent de vastes plateformes, afin d’accueillir de plus en plus de passagers (hommes d’affaires, touristes, etc.) L’une des ambitions du ministre des Transports ivoirien, Amadou Koné, est de faire de l’aéroport d’Abidjan un « hub » en Afrique de l’Ouest. Au programme : l’extension de l’aéroport, afin d’accueillir 8 millions de passagers contre 2 millions en 2017. Dans l’esprit d’Amadou Koné, cette « croissance aérienne » doit s’accompagner d’une croissance de tous les secteurs du transport, afin de répondre aux besoins de la croissance de l’économie, à l’urbanisation, au « boum » démographique et à l’égalité des territoires. Faut-il rappeler qu’en Afrique un tiers à peine des habitants des zones rurales vivent au contact de routes.
«Rendre le secteur des transports propre»
Les études des think tank occidentaux invitent les investisseurs à aller vers des secteurs qui donnent le sentiment que l’avenir de l’Afrique se joue là, et uniquement là, tout en accélérant son entrée dans le nouveau monde : l’énergie solaire, l’économie digitale, l’intelligence artificielle, la banque, l’assurance... Deux secteurs sont prioritaires : l’agriculture, afin d’assurer la sécurité alimentaire des populations et les infrastructures de transports. En Côte d’Ivoire, la croissance de son économie et les besoins de création d’emplois demandent de nouvelles infrastructures de transport et la modernisation des anciennes, afin d’exploiter au mieux son immense potentiel. La Côte d’Ivoire, comme toute l’Afrique, a besoin de routes, de voies ferrées, de ports et de hubs aériens, aux normes d’un pays et d’une économie modernes, aux normes internationales. L’urgence est de construite des routes : le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly a annoncé des investissements de l'ordre de 475 milliards de francs CFA, afin d’améliorer le réseau routier, sans oublier le coût croissant de l’entretien. Mais, le développement et l'amélioration des infrastructures de transport ne répondent pas uniquement à un besoin économique, c'est également un enjeu de développement social, de sécurité (les routes africaines sont « accidentogènes »), de santé publique et d'environnement.
L’ambition du ministre Amadou Koné est « de rendre le secteur des transports propre », Cette formule doit se comprendre de trois manières : 1) moderniser, afin d’accroître la compétitivité du secteur qui représente aujourd’hui 7% du PIB, 2) mettre de l’ordre à travers une autorité régulatrice, 3) limiter l’âge des véhicules d’occasion importés. Des investissements sont nécessaires, des réformes sont engagées comme la libéralisation du secteur (exemple : le transport lagunaire) ou la vidéo-verbalisation.
Pour Amadou Koné, la Côte d’Ivoire peut atteindre l’émergence, si elle se dote d’infrastructures de transport aux normes internationales. Pour le ministre, ce n’est plus un rêve : on parle de métro, de « hub » aérien, de voies ferrées (pourquoi pas un train à grande vitesse), de transport maritime. Rien n’est interdit à une Côte d’Ivoire qui saura mettre à portée de tous les Ivoiriens une route, une voie ferrée, un port, un aéroport, que ce soit pour le transport des marchandises ou la circulation des personnes.
Christian Gambotti
Agrégé de l’Université
Président du think tank
Afrique & Partage
Directeur de la Collection
L’Afrique en Marche
Les clefs du développement sont, sur le chemin de l’émergence : l’eau, l’énergie et les transports. Dans ces trois secteurs, la Côte d’Ivoire affiche un certain retard, malgré les efforts accomplis depuis l’indépendance et, plus récemment, depuis 2011. J’avais déjà signalé, dans une Chronique publiée par L’Intelligent d’Abidjan, l’urgence absolue qu’il y avait à mettre à niveau, en Afrique, routes, voies ferrées, ports et aéroports, afin de désenclaver l’Afrique, de l’ouvrir sur le monde avec une interconnexion entre les Etats. Ce qui est vrai à l’échelle du continent, l’est aussi à l’échelle du pays. J’avais écrit : « L’obstacle à lever, pour la modernisation des infrastructures de transport et leur mise aux normes internationales, est le coût des investissements nécessaires, ce qui nécessite l’intervention du secteur privé, des partenariats public-privé et des mises en concession. » Le danger est le recours, sans discernement, aux prêts, en particulier les prêts chinois ou qatari, et aux partenariats publics privés (PPP), un choix au départ indolore, mais qui est en train de plonger l’Afrique dans le piège de l’endettement. La Côte d’Ivoire, si elle veut consolider sa croissance, doit conduire une politique des transports des plus hardies. Chargé de mettre en œuvre cette politique, le ministre des Transports, Amadou Koné, s’est exprimé, le jeudi 13 septembre, lors des « Grandes Rencontres » du quotidien L’Expression, sur le thème suivant : « Secteur des transports en Côte d’Ivoire : perspectives de modernisation pour la période 2018-2020 ». L’enjeu, pour le gouvernement, est de taille, il est à la fois politique et économique.
Etat des lieux
Historiquement, les infrastructures de transports ont été plus largement développées en Côte d’Ivoire que dans les autres pays de l’Afrique de l’Ouest. Dès son accession à l'indépendance, les dirigeants mettent l'accent sur le développement et la modernisation des transports, aussi bien pour le déplacement des personnes que le transit des marchandises. Dans tous les secteurs, d’importantes infrastructures sont construites : routes, voies ferrées, infrastructures portuaires et pour le transport aérien.
Les routes
Aujourd’hui, le réseau routier ne cesse de se dégrader : plus de 80 % du réseau routier ivoirien est âgé de plus de 20 ans. La quasi-totalité des routes sont dégradées, y compris à Abidjan, Yamoussoukro, San Pedro. De Yamoussoukro à Daloa, la voie est impraticable, la nouvelle autoroute est un fiasco. La dégradation de nombreuses voies à travers le pays est due à l'ancienneté des constructions. Selon Pierre Dimba, directeur-général de l'Ageroute, l'Agence de gestion des routes : « La plupart des voies ont été construites au cours des années 90. Ces voies ont plus de 20, voire 30 ans de vie. Le trafic routier n'est pas le même aujourd'hui qu'il y a 20 ans ». Il faut ajouter des aspects négatifs qu’il est important de corriger : l’attribution des marchés publics, le sérieux et la qualité des travaux, les insuffisances de l’entretien.
Le transport ferroviaire
Le réseau ferroviaire, long de 1 260 km, relie la Côte d’Ivoire au Burkina Faso et au Niger. La ligne est vétuste. Les travaux de la réhabilitation de la ligne ont débuté le 15 septembre 2017. Le grand patron d’un groupe agro-alimentaire algérien insiste sur le point suivant : « Quand nous exportons aujourd’hui d’Algérie nos produits à Abidjan, en Côte d’Ivoire, on met un mois et demi à faire le trajet. En revanche, s’il y avait une ligne de chemin de fer reliant Béchar, Bamako et Abidjan, cela nous permettrait de le faire en 36 heures ». La Côte d’Ivoire
Les infrastructures portuaires
La Côte d’Ivoire possède deux ports : le port autonome d’Abidjan rt celui de San Pedro. Le port d’Abidjan est le premier port de l’Afrique de l’Ouest. Des projets d’extension et de modernisation de ces deux ports sont prévus. Le prochain maire de Youpougon aura à travailler sur l’extension du port d’Abidjan. Il s(agit, pour Abidjan et San Pedro d’affirmer, à travers les installations portuaires, leur vocation industrielle.
Le transport aérien
La Côte d’Ivoire possède trois aéroports internationaux (Abidjan, Yamoussoukro et Bouaké) et de nombreux aéroports régionaux. Des pays comme l’Angola ou le Nigéria construisent de vastes plateformes, afin d’accueillir de plus en plus de passagers (hommes d’affaires, touristes, etc.) L’une des ambitions du ministre des Transports ivoirien, Amadou Koné, est de faire de l’aéroport d’Abidjan un « hub » en Afrique de l’Ouest. Au programme : l’extension de l’aéroport, afin d’accueillir 8 millions de passagers contre 2 millions en 2017. Dans l’esprit d’Amadou Koné, cette « croissance aérienne » doit s’accompagner d’une croissance de tous les secteurs du transport, afin de répondre aux besoins de la croissance de l’économie, à l’urbanisation, au « boum » démographique et à l’égalité des territoires. Faut-il rappeler qu’en Afrique un tiers à peine des habitants des zones rurales vivent au contact de routes.
«Rendre le secteur des transports propre»
Les études des think tank occidentaux invitent les investisseurs à aller vers des secteurs qui donnent le sentiment que l’avenir de l’Afrique se joue là, et uniquement là, tout en accélérant son entrée dans le nouveau monde : l’énergie solaire, l’économie digitale, l’intelligence artificielle, la banque, l’assurance... Deux secteurs sont prioritaires : l’agriculture, afin d’assurer la sécurité alimentaire des populations et les infrastructures de transports. En Côte d’Ivoire, la croissance de son économie et les besoins de création d’emplois demandent de nouvelles infrastructures de transport et la modernisation des anciennes, afin d’exploiter au mieux son immense potentiel. La Côte d’Ivoire, comme toute l’Afrique, a besoin de routes, de voies ferrées, de ports et de hubs aériens, aux normes d’un pays et d’une économie modernes, aux normes internationales. L’urgence est de construite des routes : le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly a annoncé des investissements de l'ordre de 475 milliards de francs CFA, afin d’améliorer le réseau routier, sans oublier le coût croissant de l’entretien. Mais, le développement et l'amélioration des infrastructures de transport ne répondent pas uniquement à un besoin économique, c'est également un enjeu de développement social, de sécurité (les routes africaines sont « accidentogènes »), de santé publique et d'environnement.
L’ambition du ministre Amadou Koné est « de rendre le secteur des transports propre », Cette formule doit se comprendre de trois manières : 1) moderniser, afin d’accroître la compétitivité du secteur qui représente aujourd’hui 7% du PIB, 2) mettre de l’ordre à travers une autorité régulatrice, 3) limiter l’âge des véhicules d’occasion importés. Des investissements sont nécessaires, des réformes sont engagées comme la libéralisation du secteur (exemple : le transport lagunaire) ou la vidéo-verbalisation.
Pour Amadou Koné, la Côte d’Ivoire peut atteindre l’émergence, si elle se dote d’infrastructures de transport aux normes internationales. Pour le ministre, ce n’est plus un rêve : on parle de métro, de « hub » aérien, de voies ferrées (pourquoi pas un train à grande vitesse), de transport maritime. Rien n’est interdit à une Côte d’Ivoire qui saura mettre à portée de tous les Ivoiriens une route, une voie ferrée, un port, un aéroport, que ce soit pour le transport des marchandises ou la circulation des personnes.
Christian Gambotti
Agrégé de l’Université
Président du think tank
Afrique & Partage
Directeur de la Collection
L’Afrique en Marche