Le Patriote : Aujourd’hui votre parti est dans une phase de restructuration. Un nouveau parti s’annonce. Comment vous voyez ce parti qui arrive ?
Pierre Bitty Kokora : Je pense que jusque-là nous avons fonctionné dans le provisoire. Puisque lorsque que le RHDP a été mis en place, il y avait des préoccupations immédiates telles que les élections à la fois présidentielles et législatives. On ne pouvait donc pas au milieu de tout cela restructurer le parti. Il y a maintenant un petit répit que le président du parti a jugé utile d’exploiter pour organiser le parti. Le RHDP est un parti national implanté sur toute l’étendue du territoire. Nous attendons donc un parti fort avec des sections territoriales, des Comités de Base qui fonctionnent partout en Côte d’Ivoire. Bien attendu, nous attendons que le président fasse ce qu’il faut au niveau de la vie quotidienne de cette organisation pour que le parti fonctionne bien et demeure la première force politique du pays. Il est indéniable que nous sommes le parti qui s’impose en Côte d’Ivoire. En témoigne nos résultats lors des élections passées, notamment les présidentielles de 2015, de 2020, les élections législatives ; depuis 2011 où nous raflons toujours la majorité au parlement. Nous sommes la grande majorité. Nous garderons ce momentum.
LP : En face de cette grande majorité se dessine une alliance entre les partis des ex-présidents, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié. Est-ce que cette alliance entre le PPA-CI et le PDCI vous fait peur ?
PBK : Peur ? Ce mot ne sied pas du tout à la situation politique actuelle. D’ailleurs, je remarque dans les faits le grand silence de cette alliance qui n’arrive pas à se constituer réellement. Il y a une grande hypocrisie qui ne dit pas son nom dans cette alliance. C’est le ‘’je t’aime, moi non plus’’. Nous, nous les regardons. Mais de toutes les façons, toute élection à venir sera le reflet des élections que nous avons eues avec une vaste majorité du RHDP. Nous ne pouvons donc pas avoir peur, de personne ni d’aucune alliance. Au contraire, plus le temps passe plus nous gagnons du terrain grâce notamment au travail immense du gouvernemen.
LP: Pourtant, certains ivoiriens pensent qu’il suffit d’une alliance entre deux des trois grands leaders politique du pays, notamment, le président de la République, Alassane Ouattara, le président du PPA-CI, l’ex-président Laurent Gbagbo et le président du PDCI, l’ex-président, Henri Konan Bédié pour faire plier le troisième
PBK : Si cette réalité était valable hier aujourd’hui elle est dépassée. Car, comme je vous l’ai dit, aujourd’hui, le RHDP est implanté sur toute l’étendue du territoire national. Nous ne sommes plus dans le cadre d’un parti qui tire sa force uniquement d’une partie du pays. Nous avons aujourd’hui un parti national implanté et surtout efficace dans toutes les zones du pays. Le RHDP a en quelque sorte mangé une grande partie des autres partis politiques pour être aujourd’hui la plus grande force politique de la Côte d’Ivoire. Advienne que pourra. Vous verrez bien qu’ADO sera le grand vainqueur quasiment dans toutes les régions.
LP : Est-ce que pour vous, le chef de l’Etat doit être candidat à l’élection présidentielle de 2025 comme le souhaitent déjà certains cadres de votre parti ?
PBK : Il lui revient de décider. Mais, je souhaite ardemment qu’il continue à nous diriger d’une façon ou d’une autre et à quelque niveau de responsabilité que ce soit. Sa candidature à l’élection présidentielle de 2025 est une question personnelle. Cette question sera aussi soumise au parti.
LP : Le Président de la République dans un souci de décrispation du climat politique échange avec ses prédécesseurs, Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié. Quel regard portez-vous sur les rencontres qu’il a eues avec ces deux personnalités ?
PBK : Le Président de la République, Alassane Ouattara, est un homme qui aime son pays et qui travaille pour que son pays reste en paix et dans le développement. Tout ce qui doit être fait pour que le pays retrouve la paix il le fait. C’est dans ce cadre certainement qu’il a rencontré ces personnalités. Il est important qu’il échange avec les partis les plus importants de la place. C’est une nécessité, il est bon que le Président de la République échange avec eux pour qu’il n’y ait pas de dérive dans la vie politique en Côte d’Ivoire. Pour nous, ces rencontres permettent aussi d’avancer dans la paix, la modernité et le développement.
LP : Dans la même veine, le dialogue politique qui a permis à tous les partis politique de prendre part aux élections législatives passées a repris. Que pensez-vous de cette reprise ?
PBK : Il ne faut pas s’attendre à un grand miracle. Comme je le dis, il est toujours bon d’échanger. Mais, il ne faut pas s’attendre à un résultat particulier. Tout cela participe de l’apaisement du climat politique. La reprise du dialogue est une bonne chose que nous soutenons mais, je suis persuadé qu’il ne faut s’attendre à un miracle.
LP : Dans ce dialogue la question de la libération des militaires condamnés par la justice pour des crimes commis pendant la crise postélectorale de 2010-2011 est soulevée par une partie de l’opposition. Qu’est-ce que cela vous fait que des politiciens réclament la libération de militaires ?
PBK : Chacun à sa conception de la justice. Vous avez parlé de crimes. Pour moi, un citoyen qui a été condamné à l’issue d’un jugement doit absolument être jugé et exécuter sa peine. Personne ne doit échapper à la justice. Soyons sérieux. La loi c’est la loi. La justice a établi la responsabilité des accusés dans la commission des faits poursuivis. Par conséquent, ils ont été condamnés. Maintenant, si on attend du président de la République une décision de mansuétude ou d’élargissement, c’est une autre question. Mais, on ne peut pas lui exiger cela.
LP : Des personnes estiment que ce dialogue doit être ouvert à tous, notamment à l’ex-président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro et aussi Charles Blé Goudé, tous deux hors du pays. Votre réaction ?
PBK : Mais, le dialogue politique est ouvert à tous les partis significatifs du pays. Quand on est parti politique on cherche à avoir des représentants à l’Assemblée nationale. Je dirai aux uns et autres de faire en sorte que leur parti soit des formations politiques significative. A partir de là, le dialogue s’ouvrira à eux. Sinon on ne peut pas non plus réunir autour de table tous les partis même ceux qui sont incapables de remplir une cabine téléphonique. Il s’agit de dialogue politique et non d’une conférence nationale. C’est clair, tout le monde doit participer. Quand on dit tout le monde, c’est tous les partis significatifs. C’est dommage, mais c’est ce sont règles.
LP : Le 2 février dernier, les corps constitués lors de la présentation de vœux au chef de l’Etat ont salué son leadership. Vous, l’ingénieur quel regard portez-vous sur son action à la tête du pays ?
PBK : Je suis impressionné par cette action. Parce que, c’est le seul le président, après Félix Houphouët-Boigny, qui peut se targuer d’avoir fait autant sinon mieux pour la Côte d’Ivoire. En 10 ans d’action, le changement est tellement visible. Aujourd’hui, les chantiers sont tellement nombreux que la circulation dans la capitale et partout dans le pays devient difficile. C’est le reflet du travail d’Alassane Ouattara. Je suis tout simplement impressionné.
LP : Cependant, certains ivoiriens disent que rien n’est fait ? Que répondez-vous donc ?
PBK : Vous savez, nous sommes dans un pays où il y a des opposants. Ces opposants diront toujours que rien n’est fait. C’est normal. L’opposition s’oppose et la majorité gouverne. Mais, on ne gouverne pas dans l’émotion avec l’opinion des réseaux sociaux souvent remplis de « fake news ».
LP : Ces derniers temps, on a assisté à des coups d’Etat au Mali, en Guinée et au Burkina-Faso. Face à la situation des ivoiriens craignent. Il y a-t-il des raisons de craindre ?
PBK : Absolument pas mais continuons d’être prudent et prévoyant. La Côte d’Ivoire n’est pas encore guérie des affres entrainées par Décembre 1999. Ce que je sais, Le pays est géré et se développe. Dans cette dynamique un coup d’Etat va certainement déclencher la colère du peuple. Des gens sont contents avec ce qui se passe dans ces pays voisins. Mais, je trouve qu’il est aberrant que des ivoiriens appellent à l’avènement d’un coup de force dans leur pays. C’est être cynique. Mais, la Côte d’Ivoire avance
LP : Parlons du mot d’ordre de la désobéissance civile lancé par l’opposition à l’occasion de l’élection présidentielle de 2020. Il a couté la vie à 85 personnes et causé d’énormes dégâts matériels. Suite à une enquête le procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan-Plateau a indiqué que tous les commanditaires et les exécutants payeront pour les actes. Cependant, des personnes estiment qu’il est manipulé par le pouvoir. Qu’en dite vous ?
PBK : Dans quel pays sommes-nous ? Des gens ont lancé un mot d’ordre qui a causé des pertes en vies humaines et des dégâts matériels importants. La justice est en train de faire son travail. Qu’est-ce que l’exécutif vient faire cette affaire ? Les pouvoirs sont séparés. Chacun fait son travail. Le procureur de la République fait son travail et le jour où le dossier arrivera sur la table du pouvoir exécutif, il avisera. Mais, on ne peut pas parler de manipulation de la justice qui fait son travail. Ceux qui parlent de paix doivent savoir que la paix intervient après la justice pas avant. Il faut laisser la justice agir pour faire toute la lumière et que les ivoiriens sachent ce qui s’est réellement passé. Si, à la suite on décide de laisser tout tomber, c’est autre chose. Mais on peut dire il faut laisser tomber l’enquête par ce qu’il se peut que tel ou tel soit condamné avec fort risque de trouble.
LP : Comment voyez-vous le processus de réconciliation nationale ?
PBK : Je pense que la population elle-même est sur le chemin de la réconciliation. Elle est même réconciliée en grande partie. Nous devons continuer sur ce chemin. Nous devons prendre notre pays en main. Les ivoiriens doivent être les plus grands travailleurs dans ce pays. Il faut que les jeunes en prennent conscience pour sortir de la manipulation politicienne en vue de s’inscrire résolument dans la dynamique du travail impulsée par le Chef de l’Etat, Alassane Ouattara, depuis son avènement au pouvoir. Comme on peut le constater, la Côte d’ivoire est chantier. Il faut saisir les nombreuses opportunités offertes. En tous cas, je pense que si les jeunes travaillent, ils échappent à la manipulation des hommes politiques qui ne jouent pas forcément la carte de la bonne foi dans ce processus de réconciliation nationale.
Réalisé par Lacina Ouattara