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Société Publié le jeudi 13 octobre 2022 | Life TV

Entretien/Production animale et sécurité alimentaire : Sidi Touré explique la politique du Gouvernement pour atteindre l’autosuffisance en protéines animales

© Life TV Par DR
Entretien/Production animale et sécurité alimentaire : Sidi Touré explique la politique du Gouvernement pour atteindre l’autosuffisance en protéines animales

Le ministre des Ressources Animales et Halieutiques était, la semaine dernière, l’invité d’une chaine de télévision ivoirienne. Il est revenu, dans un entretien, sur la politique de production animale déclinée par le Gouvernement. Sidi Touré a donné les grandes orientations de son département en vue de l’atteinte de l’autosuffisance en protéines animales pour garantir aux Ivoiriens une sécurité alimentaire.


A quel niveau se trouve la production animale en Côte d’Ivoire à ce jour ?


Il faut le dire, malheureusement, la crise de la covid-19 nous a fait découvrir notre trop grande dépendance de l’extérieur. Au niveau de la production animale, nous ne produisons qu’à peine 30% de ce que nous consommons, et l’essentiel venant de la sous-région, notamment le Mali, le Burkina, etc… Ainsi la forte résolution a été prise par le Premier ministre, sur les instructions du président de la République, pour que nous puissions sortir de cette trop grande dépendance, à l’effet de véritablement sécuriser l’alimentation des populations.


La situation de l’élevage en Côte d’Ivoire reste encore traditionnelle. Comment va-t-on vers un élevage de type moderne ?


On commence par sortir tout cela de l’informel, et à l’encadrer dans une prospective qui se décrit à travers une politique de mise en œuvre – la PONADEPA – qui a été adoptée par le Gouvernement, et que nous implémentons. Ce qui a pour objectif, à l’horizon 2026, d’atteindre 70% de l’autosuffisance sur toutes les productions animales et halieutiques.


Quelles solutions pour aller à une autosuffisance alimentaire en termes de production animale ?


Sur le plan national, il se trouve que les Ivoiriens n’ont pas une très grande culture de l’élevage. Ceux qui s’y mettent ont une culture de l’élevage traditionnel ou semi-moderne. Des trois types d’élevage, notamment traditionnel, semi-amélioré et moderne, les Ivoiriens sont portés sur le type semi-amélioré. Il est donc question de leur donner beaucoup plus d’outils et de méthodologie à l’effet de pouvoir agrandir leur pratique de l’élevage, pour atteindre le niveau moderne qui permettrait d’atteindre très vite des niveaux de rentabilité, pour eux, mais aussi pour permettre à la Côte d’Ivoire d’être autosuffisante.


C’est dans ce cadre que nous avons décidé de réveiller l’ensemble de notre dispositif, notre patrimoine qui existait par le passé. Nous avions des ranchs et des stations qui avaient pour vocation de produire des kits d’élevage, en les mettant à la disposition des éleveurs pour qu’ils puissent, à leur niveau, continuer le métier pour se nourrir et vendre la production. Nous avons aujourd’hui la station de Pania située à Odienné ; la Station de Nioronigué du côté de Ferkessédougou, qui une vocation de production de lait. Nous avons la station de Badikaha qui aura une vocation fourragère, sans oublier le ranch de la Marahoué qui sera un peu notre stock de sécurité nationale, pour nous permettre de faire face à toutes sortes de coups que nous pourrions avoir dans le cadre de la fourniture en production bovine et autres. Nous sommes très pratiques sur le sujet, parce que le réveil de ces différents ranchs nous amènera, certainement, à terme, à mettre à la disposition des personnes qui veulent se lancer dans l’élevage des kits d’élevage. Et nous allons les accompagner, d’un point de vue pratique, pour que ces personnes puissent atteindre le niveau de modernisation que nous voulons, et qui leur permette de vivre de ces différentes productions.


Comment peut-on impliquer véritablement les jeunes dans cette politique de production ?


Aux jeunes, on leur montre des modèles de réussite qui existent et qui fonctionnent. Mais pour pouvoir présenter les modèles, il faut installer un écosystème, et cet écosystème s’appuie sur des produits qu’on met à leur disposition. C’est d’ailleurs le cas pour le PSTACI, dont le mécanisme a consisté à mettre en place des stations d’alevinage pour produire des alevins, les mettre à la disposition d’un certain nombre de personnes qui veulent faire du grossissement ou du pré-grossissement, et aussi installer de toute la chaîne de valeur à partir de la production d’aliments. Etre un modèle et que les gens voient qu’on peut gagner de l’argent dans le secteur, et s’en inspirer pour s’installer par la suite. Donc nous créons les modèles, et nous invitons ceux qui veulent s’investir dans le secteur à y aller.


Quelle politique d’information mettez-vous en place afin d’exhorter les jeunes de toutes les régions du pays à s’y intéresser ? Et comment les prendre en ?


Pour être concret, nous avons aujourd’hui 400 milliards FCFA que nous distribuons dans l’importation des produits. Ce sont donc ces 400 milliards que les producteurs pourront avoir comme ressources pour eux. Voici ce que coûte un kit d’élevage pour un jeune qui veut s’investir dans le secteur. Pour commencer l’élevage de lapin par exemple, il faudra au jeune ivoirien la somme de 110 000 FCFA pour se lancer dans cette activité. Il lui faudra 10 femelles et un mâle, et cela, à terme, lui rapportera 110 000 FCFA/mois, après 04 mois d’activité. Dans le secteur du porc, il faut 260 000 FCFA pour s’investir dans cette initiative. Au bout d’une année, le gain commence à s’établir à 600 000 FCFA. Dans le secteur de l’agouti, avec 90 000 FCFA investis dans cet élevage, vous gagnez près de 600 000 FCFA par an au bout d’un moment. Donc la marge est là, l’intérêt est là. Nous avons l’enjeu de la communication : celui de vulgariser cette activité d’élevage. Nous avons prévu toute une organisation pour pouvoir capter le maximum de jeunes, surtout à s’y intéresser. Pour ce faire, notre département dispose de programmes pour encadrer et accompagner les jeunes dans leur investissement dans ce secteur. Parce qu’il s’agit de manipulation de produits vivants, et cela ne se fait pas du jour au lendemain. Il y a un minimum d’encadrement à faire pour ces jeunes qui s’y intéressent. Très souvent, les personnes qui s’y intéressent sont celles qui vivent dans le milieu rural. D’ailleurs, l’exécution de ce type d’exploitation se fait dans les zones péri-urbaines ou en milieu rural où se trouve le plus de fragilité. Et c’est là que nous devons adresser ces différentes exploitations où l’accompagnement des investissements de ces jeunes est très rentable, à court termes. Et la rentabilité s’établit généralement au bout de 45 jours jusqu’à une année, selon la spéculation. Le rythme est très accéléré pour rentrer dans ses fonds.


La cherté de l’aliment, source de difficultés pour un bon élevage. Quelle méthode à adopter pour une meilleure régulation des prix ?


L’Etat s’est déjà investi et continue de s’investir pour régler cette problématique. Parce que cette problématique est majeure et mondiale. Il y va d’un sujet qui porte sur le maïs, avec l’actuelle crise en Ukraine et l’envolée des cours mondiaux. D’ailleurs, l’Etat de Côte d’Ivoire a pris en charge plus de 40% des coûts d’investissement des privés dans le secteur de la production de maïs. Sans oublier l’accompagnement de près de 6 milliards FCFA pour ceux qui sont engagés dans la meulerie de farine de maïs. Donc autant d’éléments d’accompagnement qui visent à baisser le coût de la production. Etant entendu que l’alimentation constitue pour près de 60 à 70% du coût d’exploitation d’un élevage. Au-delà des mesures d’accompagnement et de défiscalisation qui sont mises en œuvre, il y a également la création d’un environnement pour faciliter l’exercice du métier. Et nous continuons d’y travailler. Mais il n’est pas du rôle de l’Etat de Côte d’Ivoire d’investir dans les aspects productifs des différentes chaînes de valeur. L’Etat, son rôle, c’est de créer les conditions pour faciliter l’exercice de chaque activité. Et c’est ce que nous faisons en y mettant, au besoin de la régulation, à travers des structures qui permettent d’encadrer les différents acteurs qui s’y intéressent.


Comment comprendre que nous soyons dépendants à ce jour de l’extérieur, en termes de viandes, et comment y mettre un terme ?


 C’est l’idée de réactiver nos différents ranchs et stations dont je viens de parler. Car réveiller nos différents ranchs vise à créer une économie locale à couverture ou à expansion pour le lait à Nironigué, à Pania dans la région d’Odienné pour la couverture nationale en viande, en ce qui concerne les bovins ; et une couverture nationale à partir de Béoumi pour les ovins, c’est-à-dire les moutons et les caprins. Cette stratégie au niveau national vise, pour l’essentiel, à créer l’environnement structurel qui accompagnerait ceux qui sont intéressés à s’investir dans le secteur. Mais ce n’est pas spontané, il faut bien mettre en place la structure qui fait la formation et l’application, et qui fait le déploiement au niveau national. C’est ainsi que nous réveillons nos différents ranchs et stations qui feront la formation, l’amélioration génétique et la distribution de ces produits génétiques.


Combien de temps faut-il pour mettre en place toute cette stratégie, le coût et le nombre de personnes à impacter ?


Nous avons déjà des résultats sur la viande de poulet qui est entrée dans le menu des Ivoiriens. Et cela est parti de quelque part. Il y a de cela 3 ou 4 ans, nous avons, mis du point de vue du Gouvernement, une initiative structurante qui nous a permis de partir d’à peine 20% de couverture de notre besoin de consommation nationale à aujourd’hui près de 96% de cette même couverture de consommation nationale. Sur les œufs, nous sommes à plus de 100%, c’est-à-dire 120% de production, et nous en exportons. C’est la même initiative que nous sommes en train de déployer à travers nos différents ranchs et stations. Nous venons récemment de l’Italie avec le président de la République, où nous avons eu des accords avec des hommes d’affaires italiens pour pouvoir nous aider à réformer et à relancer les différents ranchs et stations. C’est là l’initiative structurante. C’est tout comme un abattoir. Dans le système des valeurs de la distribution de la viande, l’abattoir est un élément structurant. Si vous n’avez pas d’abattoir, vous ne pouvez pas atteindre l’objectif que vous visez en matière de diffusion de la viande que vous produisez. Pour ce qui est du coût, il est question de mettre en œuvre un principe d’investissement qu’on appelle partenariat public-privé. L’Etat dispose du patrimoine, de la terre, de certaines infrastructures que le privé peut réhabiliter, rendre opérationnelles et se rembourser. Donc l’investissement pour l’Etat est moindre à ce niveau.


Quel est le lien avec nos voisins qui produisent de la viande ?


A titre d’exemple concret, à la faveur de la précédente Tabaski, nous avons eu des petites frayeurs mais que nous très vite surmontées, à travers des échanges et l’envoi de missions dans les différents pays producteurs de viande de bœuf. Que ce soit le Burkina Faso, le Niger et le Mali, pour pouvoir nous permettre de nous approvisionner. Ce qui a été un grand succès, et nous avons passé le cap de la crainte.


Est-ce à dire que toutes ces crises n’ont aucun incident ?


Le Gouvernement a anticipé. Il faut juste le relever, historiquement, la Côte d’Ivoire avait fait le choix de laisser l’élevage aux pays de l’hinterland, de sorte à pouvoir donner, dans le cadre d’une économie intégrée sous régionale, la chance à d’autres pays de pouvoir bénéficier des productions locales. Une sorte de solidarité sous régionale que les précédents dirigeants avaient pris comme option dans la gouvernance. Mais la réalité géopolitique d’aujourd’hui, sécuritaire et sanitaire nous oblige à reconsidérer cette approche, au niveau du Gouvernement, à viser véritablement l’autosuffisance alimentaire interne en production animale et même halieutique.


En matière de sécurité sanitaire, est-ce que notre système vétérinaire est assez robuste pour faire face à quelques maladies que ce soient ?


Les services vétérinaires font un travail extraordinaire sur ce point. Parce que tous produits ou denrées animales ou d’origine animale, avant de passer la frontière aérienne, terrestre ou maritime, pour rentrer en Côte d’Ivoire, font l’objet de vérification ou d’analyse. C’est un minimum. Même si ces productions entrent, dans leur parcours jusqu’à l’assiette du consommateur, il y a des points de vérification, et c’est un travail que nos services font pour garantir la sécurité à nos populations. L’Ivoirien peut dormir tranquille en ce qui concerne la garantie sur la sécurité des aliments qu’il consomme. Nous continuons sur cet engagement.


Qu’en est-il des variétés bovines, porcines et autres dans le processus de production ?


La station ou au ranch de Sipilou, dans la région de Man, aura cette vocation : celle de reconstituer notre stock de bovins identifié au niveau local. Nous avons une race spécifique dans notre pays qui est la N’Dama, et qui, malheureusement du fait de la crise, est en train de disparaître. Mais fort heureusement, dans le cadre d’un de nos programmes, nous avons pu constituer un petit stock de cette race que nous avons relocalisé dans la localité de Sipilou. Ce qui nous permettra d’agrandir le cheptel et pouvoir garantir l’alimentation de toute la chaîne de valeur.


 


Quant à la viande de porc, elle fait l’objet de publicité, mais c’est la 6ème production protéinée au niveau de la chaîne de valeur, et, spécifiquement nous avons quelques races de porc qui n’ont pas de très bonnes conformations au niveau de la carcasse. Nous sommes donc souvent amenés à faire l’amélioration à travers des croisements avec d’autres races à l’extérieur. Ce qui permettra d’atteindre un équilibre de conformation qui correspond à ce que nous attendons, parce que ce que nous avons ici comme races sont des races d’inde. On les appelle des porcs coureurs qui sont très petits et sont essentiellement dans le nord du pays. Il est question de les améliorer. En réalité, en matière animale, il y a la race locale qui ne possède pas toute la conformation, de sorte qu’on est toujours amené à la croiser, en termes d’amélioration génétique, avec d’autres races venant d’ailleurs qui possèdent des conformations différentes, à la lumière de ce que nous visons. Soit c’est la carcasse, auquel cas on fait le meilleur croisement. Soit c’est le lait, auquel cas on fait le meilleur croisement pour atteindre le meilleur équilibre. Nous avions plus ou moins approché cet équilibre à un moment, avant les différentes crises qu’on a connues. Mais ces crises nous ont fait perdre les résultats de nos recherches, et, nous sommes en train de les reconstituer pour nous permettre d’atteindre les objectifs que nous visons, en termes de traçabilité et de stabilité au niveau du lait et de la carcasse.

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