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Société Publié le mercredi 21 janvier 2009 | Islam Info

Mariage mixte: Que dit vraiment le Coran ?

Dr Al 'Ajamî, théologien, de formation scientifique, spécialiste en sciences coraniques, auteur de « Que dit vraiment le Coran » aux éditions Srbs traite la question du mariage mixte. Nous présentons ici, une partie de son opinion sur la question.

Il considère qu'un musulman peut épouser une juive ou une chrétienne à condition qu'il soit sûr que ses enfants pourront être de religion musulmane. At-Tabarî émet un autre type de réserve, il considère qu'un musulman peut épouser une juive ou une chrétienne à condition qu'il soit sûr que ses enfants pourront être de religion musulmane. Ce verset, pas plus que les deux autres, ne mentionne cette condition, mais on la perçoit comme religieusement et socialement cohérente.
Par là même, At-Tabarî indique qu'il est préférable d'épouser ces femmes parmi les "dhimmî". En effet, si ce couple vit dans un environnement majoritairement musulman (les gens du Livre y sont alors dhimmî) il est aisé d'imaginer que leurs descendants seront musulmans. A l'inverse, s'il vit dans un milieu essentiellement judéo-chrétien (il n'y a donc plus de statut de dhimmî) cette possibilité est réduite. On comprend dès lors la portée de cette remarque à notre époque.
Au total : Dans leur ensemble les commentateurs sont restés fidèles au sens obvie, apparent, du Coran. Ils n'ont pas détecté en ces textes d'éléments en faveur d'une interdiction coranique du mariage des musulmanes avec les Gens du Livre. Conclusion logique au demeurant, ces versets n'offrant aucune possibilité d'interprétation rationnelle, objective et construite, qui permettrait d'aboutir à une telle affirmation.
Exception notable, nous l'avons cité, Ibn Kathîr fait état de cette interdiction faite aux musulmanes sans pouvoir naturellement s'appuyer sur le Coran mais sur un récit sans fondement aucun, malheureusement attribué au calife Umar. Toutefois, nous ne constaterons que cette intervention juridique impromptue a lieu uniquement en S2.V221. Ce verset est effectivement celui où est inscrit formellement pour les hommes comme pour les femmes l'égalité et la réciprocité de principe pour ce type de mariage, droits et limitations. On comprend dès lors le choix ayant présidé à cette tentative de détournement de sens.
Les commentateurs ne fournissent donc aucun matériau en faveur de la thèse juridique. Par contre, on perçoit nettement une volonté partagée de limiter, si ce n'est de réglementer, l'union des musulmans avec des non musulmanes. Ceci étant, la symétrique n'est jamais envisagée ni mentionnée. Il existe de facto un consensus juridique non-dit, justifiant qu'il n'ait pas été recherché d'indications textuelles indiquant que ce type de mariage est tout aussi permis aux musulmanes.

Nous vous concédons donc que de par le Coran, qu'il s'agisse de votre analyse ou des commentaires traditionnels, votre position reste parfaitement cohérente et argumentée. Mais, de ce qui précède, ne pressent-on pas que l'interdiction faite aux musulmanes de se marier avec des non musulmans découle de la Sunna ?

Effectivement, selon la méthodologie que nous suivons, après avoir analysé les versets coraniques et consulté les commentateurs, on se doit d'interroger les propos ou la pratique du Prophète (saw) en la matière. Ce chapitre sera bref : il n'existe aucun hadîth authentifié attestant que l'Envoyé de Dieu ait précisé ou spécifié ces références coraniques.

Aucun récit ne fait mention de musulmanes ayant épousé des juifs ou des chrétiens.

Ajoutons tout de même, qu'ont été conservées traces du fait que certains Compagnons répudièrent sine die leurs épouses polythéistes conformément à S60.V10. D'autre part, des sources plus imprécises indiquent qu'ils épousèrent des Dames parmi les Gens du Livre. Rien de plus, aucun récit ne fait mention de musulmanes ayant épousé des juifs ou des chrétiens.
On peut en conclure que ce cas ne se produisit pas, ce qui en soi n'a rien d'étonnant quand on sait le statut des femmes musulmanes en ces temps là ; autonomie et indépendance n'étaient réellement pas de mise, et ce type "d'échanges matrimoniaux interreligieux" se faisaient la plupart du temps à titre de butin de guerre ! Autre hypothèse, si le cas se produisit, il faudrait alors envisager qu'elles puissent avoir été sélectivement non transmises.
Ce silence est révélateur, la question ne fut jamais envisagée du temps du Prophète (saw). De plus, faut-il le rappeler, une interdiction ne peut procéder d'une absence de formulation ! Cette non-possibilité s'inscrit tout simplement dans le droit fil d'une réalité sociologique jamais démentie, bien au contraire, au point que l'on n'eut quasiment pas recours à la forgerie de "propos" de circonstances, ce que d'aucun qualifie de hadiths daïfs ou d'apocryphes. En la circonstance, le consensus implicite fut pleinement efficace.

Donc la Sunna ne se prononce pas sur la question.

Exactement, et j'ajouterais qu'a priori, ce qui n'est pas interdit par le Coran ou la Sunna est par essence licite ou permis.

Vous l'aviez stipulé en introduction, le Droit musulman, le fiqh, est quant à lui sans ambiguïté et énonce clairement qu'une musulmane ne peut épouser un non musulman, fut-il juif ou chrétien. Qu'en est-il donc exactement ?

C'est un fait indéniable, comme l'est axiomatiquement la validation tacite de ce que l'on considère comme étant la troisième référence du système de pensée spécifiquement islamique, le fiqh. Nous prendrons à titre d'exemple un auteur contemporain le Dr Al Qardâwî. Ses positions, en la matière, tout comme son argumentaire sont parfaitement représentatifs de ceux des juristes antérieurs, et c'est à ce seul titre que nous le citerons. On relève en sa présentation quatre axes de démonstration :

L'unanimité fait Loi !

1- Il postule en premier lieu qu'il est interdit à une musulmane d'épouser un non musulman que celui-ci soit polythéiste, juif ou chrétien.
2- Il affirme que cette interdiction résulte de la lecture des versets S : 60, V : 10 et S : 2, V : 221.
3- Il conclut que tel est le point de vue de l'unanimité des ulémas, al ijmâ'a.
4- Il étaye ses déclarations par une série d'arguments d'ordre sociologique.
1- Classiquement en "islam", on inverse la logique de démonstration, la conclusion figurant en prémisse ! Qu'en rhétorique cela se puisse admettre, passe, mais en Droit !
2- Nous avons suffisamment détaillé le sens des dits versets, tout comme rappelé les commentaires classiques, pour n'être ici qu'interloqué !
A quel sens est-il fait référence, mystère ? D'autant plus qu'à titre de justification de cette "interprétation" il assène que cette "vérité coranique" provient du fait que l'homme a autorité sur sa femme ! De plus, nous constatons qu'il est fait systématiquement l'impasse sur le troisième verset des trois, S5.V5, ce dernier contenant comme nous l'avons montré des indications quant à la possibilité de tels mariages pour les musulmanes. A ce stade on ne peut même plus considérer qu'il s'agisse là d'un biais méthodologique. Confirmation d'un aphorisme connu ; le texte coranique n'est plus ici que prétexte.
3- Au demeurant, peu importe la méthode, semble-t-il confirmer, puisque l'unanimité, l'ijmâ'a des savants, confirme ce point de vue. Je suppose en premier lieu qu'il faille exclure de la catégorie des doctes la totalité des d'interprètes du Coran, ces derniers n'ayant jamais produit de tels commentaires. Corollairement, il ne peut donc s'agir que des jurisconsultes, exclusivement. Nous avons ici un parfait exemple de l'utilité d'un concept tel que l'ijmâ'a : que vous ne disposiez d'aucun argument coranique, d'aucune indication de par la Sunna peu importe, l'unanimité fait Loi !
4- Signalons au préalable que notre auteur ne retient aucun propos censé avoir été prononcé par le Prophète saw ou ses Compagnons. Ce faisant, il infirme indirectement, et avec raison, les dires de Ibn Kathîr que nous avions ci dessus rapportés. Il préfère argumenter selon une ligne de conceptions classiques d'ordre "théologico-sociologique", dont l'origine même semble se perdre dans la nuit des temps. On relèvera les trois points suivants :
- Le "consensus" ou présentement un de ses synonymes, "l'islam", admet que l'homme est le maître de la maison et a autorité sur sa femme. Par conséquent, il peut épouser une juive et une chrétienne et imposer sa propre religion à ces enfants. En ce cas la femme est cantonnée au seul rôle de génitrice, elle n'est censée ne transmettre aucune culture, aucune éducation.
- Ce même "consensus" nous apprend que dans la religion chrétienne ou juive, il n'est pas octroyé à la femme de religion différente de liberté de conscience ou de religion, le mari imposerait donc à la musulmane sa propre religion. Il semble que l'on ait là retourné l'argument précédemment évoqué. Ce qui est mauvais pour l'autre serait donc bon pour nous.
- Il nous explique aussi que les juifs ou les chrétiens n'ayant aucun respect pour leur propre religion, ils ne sauraient respecter celle de leurs épouses musulmanes ! De même, il est affirmé que le non musulman ayant naturellement lui aussi autorité sur sa femme musulmane, il ne saurait respecter l'Islam, double fausse symétrie fallacieuse.

Vous semblez ne pas reconnaître la validité de l'ijmâ'a. Est-ce en ce cas précis ou de manière générale ?

Q'un ijmâ'a puisse s'opposer au Coran et la Sunna est en soi une aberration Que l'on allègue que l'ijmâ'a soit le troisième pilier des 'usul al fiqh, (fondement de la jurisprudence), j'en conviens, on ne saurait douter de son application redondante ni de sa simplicité d'emploi. Que l'on soutienne que cet ijmâ'a soit d'origine coranique ou s'appuie sur trois hadîths prétendument authentifiés du Prophète (saw) j'aurais, plaise à Dieu, l'occasion de démonter qu'il n'en est rien. Q'un ijmâ'a puisse s'opposer au Coran et la Sunna est en soi une aberration. Présentement, je rappellerais que, puisque selon le fondement même de l'ijmâ'a, la Communauté du Prophète ne pourrait être unanime sur une erreur, il serait donc impossible qu'un tel ijmâ'a se produise en opposition avec un énoncé coranique, sauf à qualifier le Coran d'erreur !!! Le seul ijmâ'a rationnellement loisible de retenir, serait l'unanimité quant à l'unanimité…sauf que ceci n'a jamais existé, ni en théorie ni dans les faits. Il conviendrait donc de parler plus justement de consensus des docteurs de la Loi, les jurisconsultes. Mais il faudrait alors accepter que ces derniers soient les seuls membres de la Communauté du Prophète.
Nonobstant ces remarques, qui n'ont pour elles que d'être logiques, nous conviendrons qu'en le cas que nous débattons, nous sommes effectivement en face d'un tel consensus.

Source: Oumma.com

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