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Politique Publié le vendredi 13 février 2009 | Le Repère

Interview : Mme Henriette Dao Coulibaly (Présidente de l`UFPDCI)

Henriette Dao Coulibaly est présidente de l’Union des femmes du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (UFPDCI) et membre Bureau politique du PDCI. Dans cette interview, elle dresse le bilan succinct de son mandat et parle des difficultés qui sont les siennes. Elle fait également un large tour d’horizon de l’actualité politique en Côte d’Ivoire.

“Le travail est fait, Bédié gagnera”

Vous n'avez donc pas quadrillé le territoire…
Moi-même en tant que présidente, je n'ai pas pu aller partout. Cependant, j'ai nommé des responsables partout.


Pourquoi n'avez-vous pas pu vous rendre dans certaines régions ?

Vous savez qu'avec la crise, ce n'était pas facile d'aller dans les zones Centre-Nord-Ouest. Nous n'avons pas pu aller par exemple dans le Moyen-Cavally et dans l'Ouest montagneux. Mais nous, après la Flamme de la paix, lorsque l'accessibilité dans des zones Forces nouvelles a été plus facile, nous avons pu nous rendre au Nord. Nous avons fait les départements de Boundiali, de Tengréla, de Korhogo et nous devions continuer, mais nous avons été freinée par le manque de moyens. Depuis 2006, nous avons fait un programme d'activités, avec un budget, mais nous n'avons pas les moyens nécessaires pour pouvoir aller partout. Notre souhait est de nous rendre dans toutes les régions. A défaut, je puis vous assurer que les responsables que nous avons nommées nous rendent continuellement compte des activités qu'elles mènent.

"Manque de moyens", dites-vous. Cela engage directement la responsabilité de la direction de votre parti. Est-ce à dire que le PDCI s'est résolu à abandonner ses militants dans les zones FN ?
La direction du PDCI n'abandonne personne. Ni ses militants, ni ses responsables. Mais avec la crise, le parti a beaucoup de problèmes.


Quels types de problèmes ?

Vous savez que tous nos cadres n'ont pas de postes. Le PDCI a beau être un grand parti, les cotisations ne rentrent pas comme il se doit. Nous avons, en outre, de nombreux militants qui sont en zone rurale et qui n'ont aucun moyen financier. Tout repose pratiquement sur le Président du parti. C'est le Président qui dégage les moyens aussi bien pour le Secrétariat général, les jeunes, les femmes. Chacun aussi, à son niveau, met la main à la poche, mais ce n'est pas facile.


En toute bonne foi, pensez-vous avoir été à la hauteur de la mission à vous confiée par les femmes ? Etes-vous satisfaite de votre bilan ?

Je ne peux pas me juger. Je sais que je suis contente du travail que j'ai fait depuis 2003. J'ai des échos, je suis félicitée. Mais, je ne peux pas dire que je suis entièrement satisfaite parce que j'aurais aimé sillonner toute la Côte d'Ivoire comme les présidentes qui m'ont précédée l'ont fait. Mme Léopoldine Coffie, qui était avant moi, a sillonné toute la Côte d'Ivoire. Elle avait tous les moyens que moi je n'ai pas. Je me bats. Sachez que dans le parti, quand vous êtes responsable, vous devenez le médecin, l'assistante sociale, le maître d'école, parce qu'à la rentrée scolaire, il faut venir en aide aux militants qui croient que quand vous êtes élu, vous devez les aider dans tout ce dont ils ont besoin. Ce n'est pas facile d'être responsable. Moi, je suis sage-femme puéricultrice à la retraite. C'est vrai que la direction m'aide beaucoup, c'est vrai aussi que je me bats avec mes moyens. Vous savez que pour faire de la politique, surtout dans nos pays africains, il faut avoir un peu de moyens. Dans les pays européens, ce sont les militants qui cotisent pour la personne élue. Ici, c'est le contraire. Quand vous avez une responsabilité, il faut l'assumer jusqu'au bout.


Lors des élections qui vous ont portée à la tête de l'UFPDCI, vous étiez en compétition avec d'autres candidates. Certaines sont entrées dans votre bureau, d'autres non. Aujourd'hui, quel est l'état de vos rapports avec celles-ci ?

J'ai de bons rapports avec les autres candidates. Elles ont compris que dans une élection, tout le monde ne peut être élu. Il y a une seule qui est élue et les autres sont avec elles pour l'aider à travailler. Toutes les candidates ont un poste dans le bureau. Certaines sont conseillères, d'autres vice-présidentes régionales, membres d'honneur, etc. Elles me donnent des conseils.


Pourquoi n'avez-vous pas choisi de faire élire les présidentes départementales ?

Lorsque nous avons été élue, nous sommes partie rencontrer le président du parti, le Président Henri Konan Bédié pour lui présenter le bureau et lui dire ce que nous voulions faire. Le président nous a dit qu'il souhaiterait qu'il y ait des nominations parce que lorsqu'il y a des élections, il y a souvent des tensions et des divisions. Nous avons donc demandé aux délégués départementaux de nous donner le nom des femmes qui travaillent dans leur département, avec lesquelles ils s'entendent et qui sont dynamiques sur le terrain. C'est ainsi qu'ont été choisies les responsables départementales. Il y a eu, je l'avoue, quelques frustrations mais dans l'ensemble, j'estime que du beau travail a été fait.


Pourquoi n'arrivez-vous plus à rassembler les membres de votre bureau ?

La situation est très difficile. Chacune se bat comme elle peut. Celles qui sont disponibles viennent. Tout le monde n'est pas à Abidjan. On le voit même aux réunions de la direction du parti. Par ailleurs, sachez que personne ne peut faire l'unanimité autour de sa personne. Nous faisons ce que nous pouvons, ce que nous croyons pouvoir faire.


Très souvent, on entend dire que le PDCI est en panne de stratégies. Quelle est la stratégie particulière des femmes du PDCI pour amener le régime FPI à aller aux élections ?

Le PDCI seul ne peut pas avoir une stratégie pour amener des gens qui ne veulent pas aller aux élections d'y aller. Nous sommes plusieurs partis d'opposition. Dans tous les cas, nous ne saurions dévoiler nos stratégies sur la place publique. Tout ce que nous voulons, c'est que les élections aient lieu, que le pouvoir veuille organiser les élections. On a commencé l'enrôlement des populations. Il y a certes des problèmes, mais nous voulons les élections. C'est pourquoi, nous demandons à nos militants de se faire enrôler, d'être mobilisés et prêts dès qu'on donnera le signal.


Quelle sera votre position quand dans les faits, l'élection présidentielle, comme cela se dessine, n'aura pas lieu encore cette année ?

Attendons. Nous espérons tous que les élections se tiennent cette année. Chaque chose a son temps. Lorsqu'on constatera que les élections n'ont pas été organisées, on verra ce qu'il faut faire. Ce n'est pas toujours bien de dire " on va faire ceci ou cela ", puis ne pas le faire.


Croyez-vous que le pouvoir FPI a intérêt et veut que les élections se tiennent ?

Je ne vois pas pourquoi je douterais. Je pense qu'ils sont responsables et qu'au moment venu, ce sera fait.


Madame la présidente, ne voyez-vous pas que les reports successifs jouent en votre défaveur ?

Le candidat du PDCI aura le 5 mai prochain, 75 ans, l'âge limite constitutionnel pour être candidat.
Avez-vous entendu notre candidat ? Il a dit qu'il est toujours candidat à partir du moment où les élections ne sont pas organisées. Tant que les élections ne seront pas organisées, il sera toujours candidat. Là-dessus, c'est très clair. Au demeurant, ce sont les différents accords qui le disent.


Et s'il n'est pas retenu par le conseilonstitutionnel ?

Je vous dis que les accords là-dessus sont très clairs.


Madame la présidente, que devient le Rassemblement des femmes pour la démocratie et la paix, coalition des femmes de l'opposition que vous dirigiez ?

On a eu tellement de déboires que chacune s'est contentée de défendre son candidat, de mobiliser pour son candidat. Et comme l'a dit le Président Bédié, il est vrai que nous sommes dans le RHDP, mais chaque candidat, chaque responsable doit se présenter. Donc, avant de compter sur le grand groupe, il faut compter sur soi-même. Nous avons tenu des réunions, mais ça fait un moment que nous n'arrivons pas à nous retrouver parce qu'occupées par les activités de nos partis politiques respectifs. C'est pour ces raisons qu'on n'entend pas trop le RHDP féminin, mais il est vivant et quand nous le pouvons, nous nous retrouvons.


De quoi parlez-vous quand vous vous rencontrez ?

Quand il y a une action à mener, et que nous la trouvons commune, nous nous retrouverons pour en parler et harmoniser nos points de vue et stratégies afin de jouer pleinement notre rôle. Mais, nous sommes responsables de structures féminines de nos partis, nous avons été élues à la tête de ces organisations, il faut que nous nous battions pour qu'elles fonctionnent comme il se doit. Nous sommes donc occupées avec ces reports successifs et ce n'est pas facile de mener plusieurs batailles sur plusieurs fronts. Nous sommes, pour tout dire, toujours en contact.


Vous parliez tantôt de déboires que les femmes du RHDP féminin auraient eus. Peut-on en savoir davantage ?

Je ne voudrais peut-être pas parler de déboires, mais avec les reports successifs des élections, ce n'est vraiment pas facile. A chaque fois qu'on fixe une date, elle n'est pas respectée, mais il faut rester mobilisé. Cela demande du travail supplémentaire, parce que nous n'avons pas le droit de relâcher, mais plutôt de maintenir le rythme, le renforcer pour être prêtes à tout moment. C'est une mobilisation constante qui nous préoccupe, il faut avoir du répondant.


Bilan contre bilan, comme nous l'entendons souvent au PDCI-RDA, pendant les meetings. Quels sont les deux (2) bilans à comparer ici ? Quel bilan pouvez-vous établir de la gestion du PDCI et de celle du FPI ?

Je connais mon parti, je connais ce que le PDCI-RDA a fait. Pendant 40 ans, comme on le dit, il y avait la paix, le développement en Côte d'Ivoire. Le Président Félix Houphouët-Boigny a rassemblé toutes les forces vives autour de lui. Avec ses compagnons, ils ont construit ce pays ; ils ont construit cette Côte d'Ivoire moderne, modèle où chacun venait puiser à la source. Et Henri Konan Bédié, en 93, à la mort du Président Félix Houphouët-Boigny, a continué ce développement. Mais avec le FPI, que voyons-nous ? L'école ne marche pas ; les hôpitaux non plus ; il n'y a aucun développement. Qu'a-t-il construit depuis 10 ans ? Depuis 99 où il y a le coup d'Etat ? Qu'y a-t-il eu de nouveau ? Nous roulons sur les mêmes routes construites par le PDCI-RDA.


Il y a le transfert de la capitale…

Pensez-vous que cela soit une priorité ? Dans cette crise, je pense qu'il y avait d'autres choses plus importantes.


Pour le FPI, le transfert de la capitale est une action d'envergure…

C'est le FPI qui le dit, mais pour nous au PDCI, ce n'était pas une priorité de construire cette maison (l'hôtel des députés à Yamoussoukro : Ndlr) que je n'ai pas visitée, mais qu'on dit qu'elle tombe déjà en ruines. Alors, pourquoi construire cette maison ? Les réunions se tiennent à la Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix. Qui a construit cet édifice qui fait la fierté de tous les Ivoiriens y compris ceux du FPI ? Toutes les grandes réunions se tiennent à Yamoussoukro.


Le prolongement de l'autoroute du Nord est à l'actif du FPI !

Pour le moment, je n'ai rien vu. Je viens du Nord où j'ai assisté aux obsèques de Kassoum Couliblay (ex-vice-président du PDCI et transporteur de renom en Côte d'Ivoire : Ndlr).


Le 4e pont…

Parlons d'abord du 3e pont entièrement financé par le régime d'Henri Konan Bédié. Tout était fin prêt pour démarrer les travaux quand il y a eu le coup d'Etat. Alors, si le 3e pont n'est pas fait, comment peut-on parler du 4e pont ? Pour le 3e pont, tout était en place, les populations (Marcory, Biafra…) touchées par cette activité ont été totalement dédommagées. Trouvez-vous ça normal ?


On peut également évoquer l'extension du Port autonome d'Abidjan.

(Rires) Il y a beaucoup de choses dont on parle et que nous ne voyons. Avant le deuxième pas, il faut un premier. Ce premier n'est pas fait, il n'est pas normal de parler du deuxième. Alors, je pense qu'il fallait s'attaquer aux priorités dans cette situation de crise. Cela n'a pas été fait. Il faut qu'on arrête d'essayer de tromper le peuple ivoirien qui n'est vraiment pas dupe. Parce que nous ne voyons rien de plus que le pouvoir en place a fait que ce qui existait.


Si vous devez noter la gestion du FPI depuis 2000 ?

Catastrophique, sa gestion du pays !


Quelle est la note sur 20 que vous pouvez lui attribuer ?

Je ne sais pas, je ne sais pas. C'est vraiment la désolation !


Revenant à l'UFPDCI, vous avez été élue en août 2003. Cela fait cinq (5) ans que vous êtes à la tête de cette structure. Alors, votre mandat n'est-il pas terminé ? Pourquoi n'y a-t-il eu de nouvelles élections à la tête de l'UFPDCI ?

Un congrès se tient tous les cinq (5) ans. Normalement au bout de cinq (5) ans, on devait tenir un congrès de l'UFPDCI pour renouveler l'instance dirigeante. Mais dans cette crise, le Président Henri Konan Bédié préfère gérer les élections et après, il y aura le congrès. Même le Président Henri Konan Bédié doit organiser un congrès pour les mêmes raisons. C'est le cas également de la JPDCI. Toutefois, ayant été élue pour que nous fassions élire notre président à la Magistrature suprême et puisque les élections n'ont pas eu lieu, alors notre président nous a dit de continuer le travail et après nous irons au congrès.


Votre président a décidé de prioriser les élections nationales, mais qu'est-ce que cela vous inspire, personnellement, de continuer un mandat qui est arrivé à expiration ?

(Rires) L'objectif n'a pas été atteint. Je n'ai pas élu mon président à la Magistrature suprême. (Rires) Donc, je continue, ça ne me gêne nullement. Comme toutes les autres structures, mon président est en place, la JPDCI est en place, alors pourquoi dois-je me sentir gênée d'être à ma place ?


Vous êtes à l'image des dirigeants du pays dont les mandats respectifs ont expiré, mais qui sont toujours à leurs différents postes.

Pas du tout, mon cas est différent. Vous voyez, depuis 2005, le mandat du chef de l'Etat est fini, mais il est là ; il déclare aimer la légalité, mais il ne veut pas d'élections, il ne fait pas d'élections. Il se cache derrière la Constitution, pour dire que c'est à cause d'elle qu'il est en place. Il dit même être en place légalement parce que la Constitution le lui permet. Tant qu'il n'y a pas de paix, pas d'élections, selon lui.


Un message fort à l'endroit de vos militantes ?

Je demande à mes militantes de ne pas baisser les bras, de rester toujours mobilisées, d'être prêtes, de se faire identifier, enrôler, pour que dès que le signal sera donné, tout le monde, comme un seul homme, aille voter pour faire élire notre candidat, Henri Konan Bédié à la Présidence de la République au premier tour. Je dis bien, au premier tour. C'est cela notre objectif. C'est cela que les dirigeants veulent voir se réaliser. Nous sommes mobilisées. Et vous avez vu les grandes tournées entreprises par le Président Bédié. Des tournées de grand succès parce que nous ne transportons pas nos militants d'une ville à une autre. Ce sont des militants déterminés de chaque région qui sortent massivement pour venir écouter les messages forts de leur leader, Henri Konan Bédié. Dans ces messages, il invite les militants à se faire identifier, enrôler et que le jour des élections, que personne n'aille au champ, par exemple, et que tout le monde se mobilise pour l'élection du candidat du PDCI, qu'il est. Que toutes les voix se portent sur Bédié pour qu'il soit élu à 99% comme Président de la République de Côte d'Ivoire. Pour que la paix revienne, que le développement revienne, pour que la Côte d'Ivoire redevienne ce qu'elle était. Tous ont soif de revoir le pays tel que construit par le PDCI-RDA. La Côte d'Ivoire appartient au PDCI-RDA, ce grand fétiche que le Président Félix Houphouët-Boigny nous a légué. Et seuls le Président Henri Konan Bédié et le PDCI peuvent faire revenir la paix, le développement, cette belle image de la Côte d'Ivoire dans le monde entier.

Interview réalisée par Eddy Péhé
André Silver Konan et Parfait Tadjau
Photo : Olga Ottro
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