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Société Publié le mardi 17 mars 2009 | Nord-Sud

Dégradation avancée de l`immeuble La Pyramide ; La réalité du danger de mort

Bâtis à coût de milliards, les édifices de l'Etat s'écroulent par le manque d'entretien. Ainsi, ils deviennent des sources d'insécurité. C'est le cas de l'immeuble « La pyramide », situé en plein cœur du Plateau.

A l'entrée principale de l'imposant immeuble, sur la gauche, le sommeil continue pour le vigile posté à cet endroit. Peu avant 11 heures, ce vendredi, assis sur une chaise, la tête contre la table, il dort profondément. Ni les cris des vendeuses d'oranges ni le trafic incessant des marchands d'échanges de billets de banque ne le perturbent. Au rez-de-chaussée, des box disposés de part et d'autre occupés par des commerçants. Des bureaux vitrés recouverts de poussière. Le tapis qui recouvre les marches de l'escalier qui conduit au premier étage est déchiré par endroits. Il dégage une odeur de moisissure et de poussière. Avant d'emprunter l'escalier, nous rencontrons un vieil homme canne à la main. Nostalgique de la belle époque, Gérard Akoun, archiviste à la retraite, a travaillé durant une dizaine d'année au Centre national de documentation juridique (Cndj). Il regrette le délabrement avancé de l'immeuble qui a abrité le siège du Cndj avant d'être délocalisé à Cocody les II-Plateaux à proximité du restaurant Planète Bmw.
Tout peut s'écrouler, mais…

« C'était une fierté d'avoir son bureau au sein de cet immeuble. Il y avait toutes les commodités avec des salles climatisées. La sécurité était de mise car il n'était pas donné à n'importe qui d'accéder au rez-de-chaussée à fortiori d'arpenter les couloirs des bureaux à l'étage. Un service d'entretien et de nettoyage s'occupait de la propreté des lieux », se souvient-il. Venu pour des courses, L'ex-agent du Cndj estime que les données ont changé. «Il est difficile de reconnaître cet immeuble. On a l'impression d'être dans une porcherie. Partout, il y a de la mauvaise odeur à cause du manque d'entretien. Les façades ont perdu leurs éclats d'antan, les couches de revêtement ne sont plus entretenues. Il y a un véritable danger au niveau de l'immeuble. C'est dommage que l'Etat n'assume plus son rôle », fait-il remarquer. Sur les marches en bois de l'escalier qui mène au premier étage. Le tapis recouvert de sable et déchiré par endroits repousse par son odeur. En forme circulaire, se tiennent côte à côte des bureaux occupés par des Petites et moyennes entreprises (Pme), des cabinets d'avocats ou d'huissiers et un établissement d'enseignement professionnel : l'Ecole française des attachés de presse (Efap). Un employé de la direction de cette école décrie la dégradation avancée de l'immeuble. « Le système de la climatisation est défaillant depuis longtemps. Il est difficile de travailler dans un environnement aussi désagréable. A cause des odeurs suffocantes par-ci la poussière par-là et aussi de la chaleur on laisse les fenêtres ouvertes. C'est une fournaise ici !», s'exclame-t-il. Le salarié met en avance l'environnement d'insécurité permanente dans lequel il évolue. « C'est une honte de dire à une personne qu'on travaille à l'immeuble La Pyramide. Car cet édifice a perdu son lustre d'antan. Ce qui est plus grave, c'est l'insécurité totale. Les principales entrées de l'immeuble sont très peu surveillées. La sécurité n'est pas garantie puisque les vigiles ne sont pas motivés. Donc, nous sommes conscients de la vétusté du bâtiment. Il y a de réels dangers auxquels nous sommes exposés », regrette-t-il. Selon lui, la décision de quitter l'immeuble relève de la compétence du conseil d'administration de l'Efap dont un membre préside le conseil de gestion de l'immeuble La Pyramide. Konan Armand, Directeur général de l'Efap, ne cache pas son amertume. « Nous occupons cet espace en accord avec la Sogepie (Société de gestion du patrimoine immobilier de l'Etat, Ndlr). On lui paie chaque mois le loyer cela fait 19 ans. Il est indéniable que cette bâtisse a perdu son éclat d'alors. Et elle ne cesse de se dégrader au fil du temps. Des gens ont reçu de l'argent pour s'occuper de son entretien. C'est malheureux que rien ne soit fait pour maintenir en état l'immeuble », déplore-t-il avant de donner une réponse évasive concernant la délocalisation de l'établissement. « C'est une décision qui est du ressort des responsables de l'école. Nous sommes une structure de formation à caractère privé qui obéit à certain schémas de prise de décision », dit-il. Dans l'ascendeur emprunté au niveau du second étage règne une grande chaleur. Nous croisons M. Z en jogging avec une casquette sur la tête. Il est sergent de l'armée nationale et habite au dixième étage depuis 13 ans avec sa famille composée de cinq personnes. A la sortie de l'ascendeur un vent frais nous accueille. Il nous conduit volontiers dans son appartement. Une cloison en contre plaqué sépare la chambre à coucher et le salon. La cuisine se trouve à l'entrée à gauche.


...les squatters refusent de partir

Des assiettes posées pêle-mêle, trois grosses cuvettes remplies d'eau. M. Z affirme que l'immeuble ne présente aucun danger. « Nous sommes au nombre de huit corps habillés avec nos familles qui habitons l'immeuble précisément le dixième et le onzième étage. Tout militaire a droit à une maison baillée. J'exploite donc mon bail en habitant ici. La vétusté de l'immeuble n'est pas un problème. C'est plutôt l'étanchéité qui posait des soucis. Mais nous avons réglé cette question pour nous qui habitons ici, il n'y a aucun danger », se persuade-t-il. Selon lui, les autres habitants de l'immeuble participent à l'entretien et au nettoyage. « On organise des coups de balai pour assainir les couloirs. En plus, je règle la facture d'eau et du courant. Nous sommes donc autorisés à occuper l'immeuble qui appartient à l'Etat », précise-t-il. C'est une farce, répond Arthur qui réside au onzième étage chez son oncle, capitaine des eaux et forêts. « Ni le loyer ni l'électricité encore moins l'eau ne sont payés. On consomme gratuitement. C'est d'ailleurs les avantages que nous tirons en habitant ici. Nous sommes conscients de la dangerosité de l'immeuble au niveau sécuritaire », soutient-il. Interrogé sur les conditions d'occupation et la gestion quotidienne de La Pyramide, N'Goran, président du comité de gestion, est resté muet. Les riverains de l'immeuble sont conscients du danger qui les guette au quotidien. Tiama Piba Marie, est technicienne de surface au Centre culturel français (CCF), situé à côté de cet immeuble. La jeune dame exprime son angoisse. « Le manque d'entretien de cet immeuble a entraîné la dégradation des couches de revêtement. Ce qui est plus grave c'est qu'il y a des problèmes d'étanchéité. Quand il pleut, l'eau coule de travers. Ce qui favorise l'érosion des matériaux de revêtement. On vit la peur au ventre puis qu'aucune mesure n'a été prise pour soit entretenir l'existence soit entreprendre des travaux de rénovation du bâtiment », déplore-t-elle. En 2008, une mission ministérielle, conduite par Marcel Amon Tanoh, ministre de la Construction et de L'urbanisme, a ordonné l'évacuation puis la fermeture de l'immeuble. Selon le ministre, cette mesure obéit aux normes sécuritaires. Le général Kili Fiacre, Directeur général de l'Office national de la protection civile(Onpc), indique dans l'interview accordée à Nord-Sud Quotidien dans l'édition n° 1137 du lundi 2 mars : « On a visité La Pyramide et nous attirons l'attention de l'autorité qui doit prendre la décision. Nous avons écrit noir sur blanc que cet immeuble ne doit pas être ouvert au public. Il y a de réels dangers pour les usagers. Ce n'est pas nous qui prenons la décision mais nous attirons l'attention des pouvoirs publics », confie-t-il. Selon lui, le ministre en charge de la gestion du patrimoine de l'Etat est face à ses responsabilités. « Chacun joue sa partition dans la sécurisation de nos immeubles », tranche le patron de l'Onpc. En dépit du danger signalé, les squatters de l'immeuble La Pyramide et tous ceux qui y tiennent des activités continuent d'occuper les lieux.

OM
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