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Politique Publié le jeudi 2 avril 2009 | Le Patriote

Invité par la Rédactions de Frat-Mat hier:suite - ADO

Paulin Zogbo : Se fondant sur les premiers résultats de l’identification qui étaient à l’époque à 4,5 millions de personnes identifiées, le Représentant du SG de l’Onu, M. Choi a indiqué que l’ivoirité était bel et bien fini en Côte d’Ivoire. Il a même demande dans la même période un chronogramme pour aller aux élections. Partagez-vous cette conclusion de M. Choi sur l’ivoirité ? Et avez-vous une proposition de chronogramme pour les prochaines élections ? Ensuite, il y a certains leaders politiques et de la société civile demandent l’élaboration d’une nouvelle constitution et l’organisation d’un cadre de concertation nationale avant les élections. Etes-vous d’avis avec eux ?
Pascal Soro : A l’issue de la dernière conférence des présidents du RHDP en fin d’année 2008, vous aviez mentionné dans le communiqué final que si le premier tour de la présidentielle n’avait pas lieu jusqu’à fin avril 2009, vous exigeriez une transition. Nous sommes en fin mars. Et il n’est pas possible que ces échéances aient lieu avant fin avril. Dans ces conditions, qu’allez-vous donc faire concrètement?

Marie Adèle Djidjé : Vous avez dit qu’on ne peut pas régler tous les problèmes avant d’aller aux élections. Mais certains disent qu’il faut forcement faire le désarmement avant. Qu’en pensez-vous ?

Ferro Bally : Vous avez dénoncé énergiquement le coup de force à Madagascar. Et en Côte d’Ivoire, un leader, Anaky Kobena appelle la population à suivre l’exemple malgache. Il a été à la Dst et à sa sortie, il a décidé de sortir son parti du gouvernement tout en vous invi tant, vous ses collègues du RHDP, à le suivre. Allez-vous le faire ? Et quel commentaire ?

Max Guédé (Rti-Première chaîne) : Certains continuent de dire que vous ne vous êtes pas encore fait enrôler. Est-ce vrai ?

ADO : Je pense que vous avez la réponse. Votre directeur général vous a donné la réponse. Vous regardez le quotidien « le Patriote » qui reprend assez souvent ma photo lors de mon enrôlement. Ma séance d’enrôlement a eu lieu au lycée Sainte Marie, à Cocody où j’ai toujours voté. Vous savez, l’intox a la peau dure.

Ivoirité
Choi dit que l’ivoirité est finie. Mais quelle était sa définition de l’ivoirité ? Je ne sais pas ce qu’il veut dire quand il déclare que l’ivoirité est finie. Sincèrement, je n’ai pas suivi cette déclaration. Est-ce parce qu’il estime que 4,5 millions d’Ivoiriens se sont fait enrôler qu’il fait une telle affirmation? Nous estimons qu’on peut arrêter, honnêtement, l’enrôlement à fin avril. Nous considérons que la reconstitution des registres d’état civil détruits ou perdus peut se terminer le 10 avril. Et en ce moment-là, les gens auront 15 jours après pour se faire enrôler. Je note que pour le moment, il y a moins de 100 mille personnes qui sont concernées par la reconstitution des registres d’état civil. Ce ne sont pas des chiffres impressionnants. Il ne faudrait donc pas qu’on s’accroche à des détails. Je suis d’accord que tout le monde doit pouvoir se faire enrôler. Un ami m’a dit que les registres ont été détruits chez lui, mais puisqu’il avait l’original de son extrait d’acte de naissance, il a pu se faire enrôler. On verra dans beaucoup d’endroits que bien que des registres aient été détruits, les gens se sont fait enrôler. Dans de nombreux endroits, il n’y a pas plus de 5 ou 10 personnes qui sont concernées par la reconstitution des registres d’état civil, pour l’enrôlement, je veux dire. Mais c’est important de reconstituer les registres d’état civil. Nous estimons donc que cela peut se régler d’ici à fin avril. Nous estimons, par ailleurs, qu’il y a des questions budgétaires et de trésorerie qui font qu’on n’a pas encore commencé l’enrôlement à l’étranger. Avec les décaissements du Fonds monétaire, on aura un peu d’argent ici et là. Si l’enrôlement commence, je pense, dès la semaine prochaine à l’étranger, si ce que nous devons à la Sagem est payé, je crois qu’en 10 jours ou dans deux semaines, l’essentiel pourra être fait, à l’étranger. Et le troisième volet sera de faire un grand ratissage, pour une dizaine de jours peut-être sur l’ensemble du territoire. Tout cela peut se faire d’ici à fin avril 2009. Si nous avons besoin de décaler ces délais d’une semaine ou deux, cela n’est pas grave. On me dit qu’une fois la liste provisoire sortie, et si nous sommes de bonne volonté, quatre mois plus tard, c’est-à-dire fin août, nous pouvons faire les élections. Même en y ajoutant un ou deux mois de plus. Nous devons pouvoir, à mon sens, faire les élections d’ici à fin octobre. Et il n’y aura pas de raison de ne pas faire ces élections avant fin octobre 2009. Parce que quatre mois après la liste provisoire, les élections doivent pouvoir se faire.

Transition politique
Moi, je ne suis pas de l’avis de ceux qui parlent de transition politique. Je préfère le dire franchement. Parce que nous avons fait une transition. L’Accord de Ouaga était pour 10 mois. Si nous faisons les élections en septembre- octobre, nous aurons fait 30 mois. Au lieu de 10 mois de transition, nous en avons fait 30. Voulez-vous qu’on ajoute encore 24 mois à cette période? Quand la transition va-t-elle finir ? La Côte d’Ivoire ne peut pas vivre de transition en transition. Il faut que le pays aille aux élections. Je dis souvent : comment les gens ont-ils pu aller aux élections en Afghanistan, en Irak et que nous ne puissions pas en faire autant? Ma réponse, je le répète: je ne pense pas qu’une autre transition politique soit nécessaire. Je suis contre tout autre transition politique. Allons aux élections cette année et si possible, en septembre- octobre.
Nous avions fait effectivement une réunion du Rhdp parce que nous étions exaspérés par le retard. Et nous avons dit que nous souhaitons que les élections aient lieu, mais nous sommes aussi pragmatiques. Les retards que nous avons constatés ne nous font pas plaisir. Mais ce n’est pas parce qu’au lieu d’avril on fera des élections en septembre que nous allons brûler la baraque. Non, il n’en est pas question. Si les élections peuvent se faire à fin septembre ou début octobre, cela nous convient parfaitement.

Désarmement
Le désarmement à faire avant les élections… La difficulté, c’est qu’on est passé d’un Accord à l’autre. Nous ne faisons pas partie de l’Accord complémentaire 4 de Ouaga, qui concerne les ex-belligérants. C’est le Président Gbagbo et le Premier ministre Soro qui l’ont signé. Ils se sont mis d’accord pour faire le cantonnement des troupes. C’est ce qu’ils appellent désarmement. Ce sont eux qui ont des armées. Nous voulons simplement qu’ils pacifient ce pays, qu’on aille aux élections et que le nouveau Président de la République constate qu’il n’y a plus d’obstacles, puisque la nouvelle armée sort automatiquement de l’Accord 4. Et qu’un mois après les élections, je crois le savoir, les 5.000 éléments des Forces nouvelles intégreront la nouvelle armée. Il y a des détails militaires que j’ai lus dans la presse. Je ne suis pas un militaire. Les ex-belligérants ont dit qu’il faut cantonner les soldats. Et qu’il faut déployer les policiers et les gendarmes, chacun donnant un quota, et que ceux-ci sécurisent les élections, via le Centre de commandement intégré (Cci). Nous ne voulons pas de gens en armes pendant que nous ferons notre campagne. C’est cela le point essentiel et nous souhaitons qu’ils mettent en application cet Accord qu’ils ont signé. Ils n’ont pas eu notre avis avant de le signer. Je considère que c’est une bonne chose. Non seulement que les armes se taisent, mais surtout que ceux qui les ont soient dans les casernes. Aussi bien au niveau des Forces de défense et de sécurité qu’au niveau des Forces nouvelles. Ceci est indispensable et j’espère qu’aujourd’hui (hier), la réunion que le Chef de l’Etat aura avec les Forces nouvelles permettra de dire qu’ils se sont mis d’accord et qu’ils vont régler ces problèmes militaires assez rapidement.

Retrait du
gouvernement
Je crois savoir que c’est un mercredi que le président Anaky est passé à la Télévision. Dans la déclaration du Rhdp, on me fait savoir qu’il a dit que chaque peuple prend son destin en main. Et certains me disent qu’il n’a pas fait, de manière explicite, référence à la situation de Madagascar pour appeler à l’insurrection. Quoi qu’il en soit, je vous ai dit que je ne suis pas pour l’insurrection, pour les coups d’Etat. J’estime que Madagascar est dans une impasse. Et d’ailleurs Marc Ravalomanana reprend du poil de la bête. Il va représenter le Madagascar (Ndlr: au sommet de la Sadec). L’autre, Rajoelina, est à Tananarive. L’armée le soutient. Dans quel pays sommes-nous? Une situation pareille n’est pas possible. Moi, je trouve qu’elle est condamnable. Je dis et je le dirai publiquement.
Pour ce qui est du gouvernement, il n’est pas question pour nous d’envisager un retrait. Nous n’avons pas été contactés par Anaky. Si nous décidons qu’il y a des raisons fondamentales de retirer nos ministres du gouvernement, bien entendu, les organes du parti en décideraient et nous nous concerterons avec nos collègues du Rhdp. Le président Anaky ne nous a pas consultés. Il a pris sa décision concernant son parti. Et par conséquent, nous ne sommes pas concernés par cette décision. Mais nous tenons beaucoup au Code de bonne conduite. Je crois que je fais tout pour me conformer à cela. Et je voudrais que les autres en fassent autant.


Nouvelle Constitution
En réalité, il y a déjà une modification de la Constitution qui a été votée par l’Assemblée nationale quand celle-ci était de plein exercice. Avec plus de 80% des députés. Modifiant notamment l’article 35. Normalement, une ordonnance aurait suffi pour mettre cette nouvelle Constitution en vigueur. Les juristes du Président lui disent que c’est mieux d’organiser un référendum. C’est leur position. Mais après tout, c’était possible de procéder à cette modification qui est déjà acquise de par le vote de l’Assemblée nationale. Est-ce qu’au-delà il faut une nouvelle Constitution? Le président Wodié pense qu’il en faut une nouvelle. C’est un éminent constitutionnaliste. Et je crois que nul ne peut rester sourd à ses propositions. C’est quelqu’un que je respecte particulièrement et qui, sans doute, devra jouer un rôle important dans l’avenir de la Constitution; peut-être de la troisième République, le moment venu.
Mais si tout le monde est d’accord que nous avons des problèmes à régler au-delà de l’article 35, alors pourquoi pas une nouvelle Constitution? Je ne suis pas fermé à une telle idée, je pense qu’il faut toujours améliorer les choses. La Constitution, c’est un texte tellement important qu’on ne peut pas rester dans un malaise et avoir une Constitution qui a été manipulée. C’est presque du faux qui a été proposé aux Ivoiriens. C’est quand même un peu honteux. On rédige un document, 48 h après, on le change, on prend les déclarations d’il y a une semaine des leaders politiques, on les sort juste avant le vote. Tout cela me fait honte; et plus encore la manière dont cette Constitution a été imposée aux Ivoiriens. On a voté sur la base d’une Constitution qui n’est pas celle qui est en vigueur. Ce n’est pas la Constitution qui a été approuvée qui est en vigueur. Je crois qu’il faut passer l’éponge et aller de l’avant. Il faut refaire notre pays à partir d’une Constitution qui lui donne la stabilité; et qui fasse que les citoyens se conformeraient à elle. C’est important. Parce que si les gens esti ment que c’est un document qui garantit leurs droits et devoirs, ils vont s’y soumettre. Mais s’ils ont le sentiment que c’est un faux qui a été manipulé, en ce moment-là, effectivement, cela peut conduire à des situations dramatiques telles que celles que nous vivons. La Côte d’Ivoire n’a plus besoin de cela.
Nous, nous voulons des élections pour septembre-octobre. Une Constitution ne s’improvise pas en quelques mois. Je pense que cela doit se faire, si nous sommes tous d’accord, après les élections. Si les élections n’étaient pas organisées dans six mois, je crois qu’on aurait pu envisager de le faire avant. Il me parait difficile d’envisager une nouvelle Constitution avant les élections.

Gooré Bi Hué : Le diagnostic est alarmant. Les statistiques indiquent que 48,94% de la population ivoirienne est pauvre. Mais depuis le 27 mars dernier, le FMI vient d’approuver l’aide de 535 millions de dollars à la Cote d’Ivoire. Et la Banque mondiale s’apprête à exécuter l’appui budgétaire à notre pays. Quel commentaire faites-vous de cette situation ?

David Ya : Concernant toujours l’initiative PPTE dont vient de bénéficier la Côte d’Ivoire, pouvez-vous nous dire, en tant qu’ancien DGA du FMI, quels sont les avantages et inconvénients d’une telle initiative ?

Alakagni Hala : Quelle est la conséquence de la crise financière internationale sur l’économie des pays africains, notamment la Côte d’Ivoire ?

Landry Kouhon : Dans un article publié récemment, il a été écrit qu’un chef dont les collaborateurs sont des voleurs est un voleur. Mais je vous informe aussi que l’auteur de l’article a été arrêté pour offense au chef de l’Etat. Est-ce votre avis ? Aussi, que pensez-vous de l’opération main propre initiée par le président Laurent Gbagbo ?
Coulibaly Daouda : Nous étions parmi les pays économiquement émergents. Mais avec l’initiative PPTE, nous sommes donc classés parmi les pays pauvres très endettés. Selon vous, cette initiative, était-ce le meilleur choix ?
ADO : La Côte d’Ivoire avait tout de même fait des progrès considérables. Elle avait une espérance de vie de plus de 55 ans, voire 58 ans. En 90, le chômage, c’est vrai, était important, mais il n’atteignait pas le niveau d’aujourd’hui. Beaucoup de jeunes étaient au chômage, mais pas autant qu’aujourd’hui, où le pourcentage de pauvres a atteint presque 50%. Il s’agi d’une détérioration considérable. Je crois que cette situation est préoccupante pour nous tous. Nous voyons au quotidien la pauvreté partout… les difficultés des ménages, la situation de survie pour beaucoup de gens. Vous les relatez chaque fois dans Fraternité Matin. C’est pénible. C’est pénible que le pays d’Houphouët-Boigny en arrive-là, et que nous soyons classés parmi les pays pauvres très endettés. Certes, nous étions très endettés, mais, nous n’étions pas pauvres à ce point. Nous nous sommes appauvris de notre fait. C’est un peu pour cela que je dénonce ce qui se passe ici et par rapport aux insurrections, aux coups d’Etat. Parce qu’en réalité, c’est le résultat de toutes ces crises successives. La Côte d’Ivoire avait à peu près bien réussi, la dévaluation avait été bien préparée. Des ressources considérables avaient été obtenues; jusqu’en 98, ce pays se portait très bien. Nous sommes entrés dans la tourmente politique qui a eu les conséquences que nous avons aujourd’hui.

Initiative Ppte
Le Ppte est un mécanisme que notre équipe a mis en place au Fmi en 1995-1996, avec Michel Camdessus, l’ex-Dg du Fmi. Nous avions constaté que les ressources normales du Fonds étaient trop chères pour les pays pauvres. Et il y avait ce qu’on appelait une « facilité concessionnelle » avec un taux d’intérêt faible. Mais les montants étaient très faibles. Très rapidement, nous avons estimé que même si ces pays recevaient des ressources du Fonds, le problème de la dette n’était pas réglé. C’est ainsi que nous avons imaginé ce mécanisme, cette facilité des pays pauvres très endettés, et je peux vous dire qu’au départ, certains pays comme la Côte d’Ivoire et le Cameroun n’étaient pas vraiment éligibles à cette initiative. Maintenant nous sommes éligibles et cela nous permet de nous débarrasser de ces dettes. Ce sont tout de même 14 milliards de dollars, c’est-à-dire 7 mille milliards de francs cfa au taux de change d’aujourd’hui. La Banque mondiale devrait adopter le programme de réduction de la pauvreté, le 31 mars (Ndlr : aujourd’hui), et les premiers décaissements vont intervenir. Je suis heureux que nous ayons cette facilité d’effacer notre dette. Mais ce n’est que le point d’entrée, le point de départ d’un processus. Il y aura des décaissements qui sont importants, mais qui ne règlent pas le problème. Ils permettront à la Côte d’Ivoire de renflouer les caisses, de se remettre un peu à flot, d’avoir les ressources que nous avons utilisées pour rembourser le Fonds, la Banque africaine de développement, la Banque mondiale. Ces ressources nous seront restituées en partie. Mais, je ne suis pas sûr que ce qu’on appelle le flux net, c’est-à-dire entre ce que l’on reçoit et ce qui sort, sera positif. Dans tous les cas, nous serons soulagés. Mais l’allègement de la dette n’interviendra, au mieux, que dans un an, peut-être même dans deux ou trois. Tout dépendra de la gestion qui sera faite au cours des prochaines années. Le plus difficile, en fait, commence. Je crois qu’on devrait essayer d’être très clair avec nos compatriotes; il ne faudrait pas que les gens pensent qu’il y aura de l’argent et qu’on pourra faire ce qu’on voudra, ce n’est pas le cas. Souvenez-vous que le 6 décembre 93, au soir, alors que nous préparions la dévaluation, j’avais été clair et honnête avec mes concitoyens. J’avais dit : écoutez, nous allons entrer dans les difficultés. Parce que la situation économique qui s’est améliorée n’est pas encore satisfaisante. Et j’avais même politiquement pris des contacts avec Laurent Gbagbo et d’autres membres de l’opposition pour qu’ils entrent au gouvernement avant le décès du Président Houphouët, parce que j’estimais, que c’était dans un cadre consensuel, qu’il fallait gérer la dévaluation et ses conséquences. Après, j’ai cru comprendre qu’on me disait que j’avais dit que l’Etat était en banqueroute. Je dis la même chose aujourd’hui. En fait, le Ppte qui sera approuvé demain (Ndlr: aujour-d’hui) par la Banque mondiale après l’accord du Fonds monétaire vendredi, va demander une rigueur importante dans la gestion des fonds publics: le budget, les ressources pétrolières, le cacao, le café, tout cela demandera beaucoup d’effort, de vigilance. L’allègement de la dette ne viendra qu’au bout de ce processus. Nous devons donc comprendre que ce n’est pas encore la fin. Et que nous devrions faire beaucoup d’efforts. Etait-ce le meilleur choix? On me demande quel est le revers de la médaille? Moi, je crois que c’était le meilleur choix. C’est pour cela que quand les gens me parlent de socialisme, de capitalisme… je dis que tout cela c’est du verbiage politique; parce qu’il n’y a plus vraiment de politique économique, socialiste, capitaliste; le programme du Fonds monétaire international est un programme libéro-social, ou socio-libéral. Il y a des engagements que nous avons pris par rapport à la fonction publique, par rapport au secteur minier, par rapport à l’agriculture, par rapport à la santé, c’est un programme qui sera exécuté par n’importe lequel des trois grands candidats. Si c’est Laurent Gbagbo qui est reconduit; il sera obligé d’appliquer ce programme. Si c’est Bédié ou moi, de toute façon, nous sommes de la tendance, libérale. Par conséquent, il n’y a pas de revers de la médaille, c’est tout simplement la rigueur. Et l’on n’aurait jamais dû quitter cette rigueur parce que c’est aussi cela la conséquence de ce que nous vivons actuellement.

Moralisation
de la vie publique
Souvenez-vous qu’en 1993, on l’avait fait et le Chef de l’Etat le sait. C’est une bonne chose. Je suis désolé pour ceux qui sont en prison. Est-ce que les procédures ont été suivies, est-ce qu’ils ont été entendus ? Mais, il faut assainir. L’allègement de la dette va tout de même nous donner près de 500 milliards par an. On en parlera tout à l’heure pour le financement de mon programme. Ce sont les impôts des pays amis. Ils ne vont pas nous donner leur argent pour qu’on puisse le détourner. Il faut donc de la rigueur dans la gestion. C’est important que des signaux forts soient donnés. Pas seulement dans le secteur de la filière café-cacao, mais également dans d’autres. Il faut arriver à un assainissement dans tous les secteurs d’activités. Il faut qu’on sache que le bien public est un bien sacré. Et qu’on ne peut pas piocher dans la caisse sans sanction. Ce n’est pas acceptable ! Quand j’étais Premier ministre, j’avais des procédures qui faisaient qu’il était impossible de piocher dans la caisse. Souvenez-vous de cette période; l’exemple doit être donné afin que les uns et les autres comprennent qu’il y a des périodes qui sont passées. La Côte d’Ivoire a besoin de toutes ses ressources, notamment ses ressources publiques. Nul n’a le droit de puiser dans la caisse de l’Etat, impunément.
Il faut la moralisation de la vie publique. Même si ce n’est pas une priorité économique, je considère que c’est un élément important. Que cette moralisation tienne compte de tous les aspects dont celui de la politique. Si le pays n’a pas de repère, si une partie de la population pense que les structures en place ne sont pas légitimes ou que le système judiciaire n’est pas équitable, les problèmes ne sont pas réglés. Les grands axes de la politique économique sont clairs. Elle nécessite des investissements importants. C’est un programme qui aura besoin de 10 mille milliards. D’ailleurs, quand j’ai annoncé cette somme, certaines personnes ont dit que ce sont des chiffres qui sont totalement aberrants. Où allait-il trouver cet argent, se demandaient-elles ?
Vous avez reçu le représentant de la Banque mondiale qui a indiqué que le programme 2009-2015 de cette banque était de 17 mille milliards 600 millions de Fcfa sur 7 ans. Si l’on ramène cela à 5 ans, on aura 12 mille milliards 500 millions. C’est dire que les 10 mille milliards que j’annonçais ne sont pas un chiffre farfelu. Nous n’avons certes pas assez de temps, mais j’ai un programme par secteur (éducation, santé, logements…). Ce sont des chiffres qui sont possibles avec l’allègement de la dette, les ressources budgétaires, les investissements que nous devons créer nous- mêmes par une meilleure gestion. Il nous faut créer des ressources à partir de l’épargne nationale. Il faut aussi avoir de l’aide publique, des capitaux publics. Prévoir des ressources additionnelles. Si tout cela n’est pas bien géré, nous resterons plus pauvres que nous ne l’avions été dans cinq ans.
Nous avons un programme quasiment finalisé, nous allons le publier quelques semaines avant l’élection. Nous tenons à ce que le débat porte sur le programme. Comment allons- nous l’exécuter ou le financer ?

La crise financière internationale
Je crois que vous avez déjà reçu les représentants de la Banque mondiale qui vous ont parlé longuement de ces questions. Je pense que les pays africains ont pris la mesure des difficultés à venir. C’est vrai que nous ne sommes pas les mieux intégrés dans la mondialisation, mais nous sommes très affectés par les conséquences de la mondialisation. Parce que les matières premières subissent une récession dans les pays occidentaux, les gens essayeront de faire des économies sur les dépenses des ménages. C’est-à-dire que les prix du café, du cacao et du textile vont baisser, de manière importante dans les six mois à venir. Les prix des capitaux, les investissements directs avec les difficultés des banques, les banques maisons mères vont peut-être peser sur les porte-feuilles et sur la situation de leurs filiales à l’étranger. Pour se renflouer. Ou même pour demander qu’il y ait des mesures de dégraissage. Pour que les bénéfices obtenus soient transféres à la maison mère. Les crédits à l’exportation seront contrôlés. La seule chance que nous avons, c’est que nous n’avons pas beaucoup d’Ivoiriens à l’étranger, et le transfert de ces Ivoiriens à l’étranger, ne va pas trop peser sur notre économie contrairement à des pays comme le Mali ou le Sénégal qui ont des millions de compatriotes à l’étranger. Nous avons besoin de cohésion nationale pour résister aux effets de la crise. Je n’insisterai pas là-dessus puisque les responsables de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international vous en ont parlé déjà.

Institutions financières
Le constat qui se dégage, s’agissant des institutions de Bretton Woods, c’est qu’il y a une meilleure compréhension du rôle de celles-ci. Cela fait 10 ans bientôt que j’ai quitté le Fonds monétaire international. Et je peux vous dire que dans certains pays comme le Zimbabwe ou même dans des pays proches que je ne citerai pas, lorsque je demandais à rencontrer les différents syndicats ou à aller à l’université, cela ne plaisait pas aux Présidents de ces Etats. Quelquefois, on annulait un déjeuner qu’on avait prévu de prendre avec moi parce qu’on estimait qu’ouvrir le Fonds à des structures de ce genre n’était pas une bonne chose. Mais petit à petit, cela est en train de se faire aujourd’hui. Je vois Strauss Kahn qui rencontre régulièrement la presse. Michel Camdessus et moi-même avions décidé d’ouvrir le Fonds monétaire international aux pays pauvres et d’aider également à avoir une meilleure connaissance de ce qu’on y fait. Le Fmi, permettez-moi l’expression, fait le sale boulot pour les Etats. Quand vous constatez dans un pays que les dépenses sont excessives, et que vous demandez de les réduire, que fait-on généralement ?
En général, il revient à chaque Etat de décider des secteurs où il doit réduire les dépenses. Si en Côte d’Ivoire, les salaires n’ont pas été diminués en 1990, quand je suis arrivé, c’est parce que, au lieu de diminution de salaires comme ce fut le cas dans certains pays de la sous-région, j’ai décidé de m’attaquer aux fonds de souveraineté. C’est comme cela que nous avons réussi à ne pas réduire les salaires. On a préféré diminuer les fonds de souveraineté pour sauvegarder le salaire des uns et des autres. Je suis donc surpris que certains accusent le Fmi d’être à l’origine de leurs difficultés.
Parlant de la sécheresse du budget de l’Etat dont j’avais parlé en 1993, il fallait faire cette gestion de rigueur pour que la dévaluation soit profitable au pays. C’est ce que nous avons fait, Kablan Duncan et moi, pendant trois ans. Nous nous sommes efforcés de tenir nos engagements, de sorte à éviter les dérapages budgétaires afin que les équilibres macro-économiques soient respectés. C’est cela qui a garanti le succès de la dévaluation. Tout le monde convient que la Côte d’Ivoire est le pays qui a le plus profité de cette dévaluation. Ce n’était nullement le fruit d’une improvisation. Si les résultats d’une dévaluation sont satisfaisants, comme vous le dites en parlant de pluie de milliards, c’est qu’elle a été bien préparée. C’étaient des moments vraiment exaltants. Nous avons été passionnés par le travail que nous avons fait. Amadou Gon (secrétaire général adjoint du Rdr, ndlr) était à la Primature avec moi. C’était formidable parce que nous travaillions 7 jours par semaine et 18 heures par jour. Nous sentions que nous faisions avancer le pays, que nous préparions la Côte d’Ivoire du futur. Nous avons donc laissé un bon pays entre les mains du successeur d’Houphouët-Boigny. pour ma part, j’en étais très fier.
Ajustement structurel
Des gens pensent que la crise financière qui secoue l’Occident est la première du genre. Ce n’est pas vrai. La première crise financière était la crise asiatique avec l’Indonésie, la Corée, les Philippines. Ces pays ont rencontré les difficultés que les pays occidentaux ont aujourd’hui. Il leur a fallu faire un nettoyage. Les Asiatiques ont fait le nettoyage nécessaire. Et c’est pour cela d’ailleurs qu’en Asie, la présente crise financière n’est pas beaucoup ressentie.
En Côte d’Ivoire également, hormis les nouvelles banques, on n’en parle pas au niveau des anciennes. Tout cela est le résultat d’un travail de longue haleine. C’est donc grâce au nettoyage que nous avons entrepris que, malgré la crise, malgré la rébellion qui a scindé la Côte d’Ivoire en deux, ce pays tient encore. C’est effectivement parce que les structures sont solides. Nous avons privatisé l’électricité. Au Togo, au Bénin, il n’y a pas eu de guerre, mais ils n’ont pas d’électricité une bonne partie de la journée. Idem pour le Ghana. Différentes structurations et restructurations doivent se faire pour solidifier et installer un Etat. Et la dette n’interviendra, au mieux, que dans un an, peut-être même dans deux ou trois. Tout dépendra de la gestion qui sera faite au cours des prochaines années. Le plus difficile, en fait, commence. Je crois qu’on devrait essayer d’être très clair avec nos compatriotes; il ne faudrait pas que les gens pensent qu’il y aura de l’argent et qu’on pourra faire ce qu’on voudra, ce n’est pas le cas. Souvenez-vous que le 6 décembre 93, au soir, alors que nous préparions la dévaluation, j’avais été clair et honnête avec mes concitoyens. J’avais dit : écoutez, nous allons entrer dans les difficultés. Parce que la situation économique qui s’est améliorée n’est pas encore satisfaisante. Et j’avais même politiquement pris des contacts avec Laurent Gbagbo et d’autres membres de l’opposition pour qu’ils entrent au gouvernement avant le décès du Président Houphouët, parce que j’estimais, que c’était dans un cadre consensuel, qu’il fallait gérer la dévaluation et ses conséquences. Après, j’ai cru comprendre qu’on me disait que j’avais dit que l’Etat était en banqueroute. Je dis la même chose aujourd’hui. En fait, le Ppte qui sera approuvé demain (Ndlr: aujour-d’hui) par la Banque mondiale après l’accord du Fonds monétaire vendredi, va demander une rigueur importante dans la gestion des fonds publics: le budget, les ressources pétrolières, le cacao, le café, tout cela demandera beaucoup d’effort, de vigilance. L’allègement de la dette ne viendra qu’au bout de ce processus.
Nous devons donc comprendre que ce n’est pas encore la fin. Et que nous devrions faire beaucoup d’efforts. Etait-ce le meilleur choix? On me demande quel est le revers de la médaille? Moi, je crois que c’était le meilleur choix. C’est pour cela que quand les gens me parlent de socialisme, de capitalisme… je dis que tout cela c’est du verbiage politique; parce qu’il n’y a plus vraiment de politique économique, socialiste, capitaliste; le programme du Fonds monétaire international est un programme libéro-social, ou socio-libéral. Il y a des engagements que nous avons pris par rapport à la fonction publique, par rapport au secteur minier, par rapport à l’agriculture, par rapport à la santé, c’est un programme qui sera exécuté par n’importe lequel des trois grands candidats. Si c’est Laurent Gbagbo qui est reconduit; il sera obligé d’appliquer ce programme. Si c’est Bédié ou moi, de toute façon, nous sommes de la tendance, libérale. Par conséquent, il n’y a pas de revers de la médaille, c’est tout simplement la rigueur. Et l’on n’aurait jamais dû quitter cette rigueur parce que c’est aussi cela la conséquence de ce que nous vivons actuellement.
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