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Politique Publié le jeudi 23 avril 2009 | Notre Voie

J’ose dire: Libertinage

La liberté d’aller et de venir, la liberté d’expression… sont, entre autres, des droits reconnus aux citoyens par les lois fondamentales à travers le monde. En Côte d’Ivoire, ces libertés, surtout la liberté d’expression, ont atteint des paroxismes sous l’actuel chef d’Etat, si bien que les Ivoiriens, longtemps baillonnés par les anciens régimes, n’hésitent pas à dire haut et fort que le président Gbagbo a libéré la parole.

En fait de parole libérée, ce sont toutes les libertés qui ont été libérées et l’Ivoirien a vite fait d’en abuser. On voit donc, quotidiennement, par-ci et par-là, des abus de toutes sortes, ahurissants, choquants, qu’on se demande, très souvent, si la libération totale des libertés est vraiment une bonne chose dans ce pays où l’on ignore royalement les limites de la liberté, vite transformée en libertinage.

Les exemples abondent. Mais commençons d’abord par nous autres journalistes, avant de jeter la pierre aux autres. Le cas le plus connu, le plus condamnable, est celui de ce journal qui, sans hésitation aucune, a divisé la Côte d’Ivoire en deux pays distincts et s’est fait le complice, sinon le détonateur d’une rébellion qui a déchiré le pays et dont les plaies tardent à cicatriser. Les journalistes de ce quotidien l’ont fait impunément aucune voix officielle ne l’a déploré, à défaut de le sanctionner.

Tout récemment, un journaliste de la télévision Première Chaîne, alors que ce média est regardé dans le monde entier, ne s’est pas gêné pour dire haut et fort qu’en Côte d’Ivoire, aucune enquête n’aboutissait, que tout était rangé au placard comme si de rien n’était. Au moment où le pays se cherche et cherche à se réhabiliter aux yeux du monde, avouez que de telles assertions ne sont pas faites pour arranger les choses et sont même propices au départ des investisseurs et autres opérateurs économiques, qui, depuis très longtemps, se sont toujours plaints de la justice ivoirienne et de ses décisions bizarres. A la télévision, aucun émoi, aucun rappel à l’ordre. Rien, rien, comme si de rien n’était. Et le jeune Ivoirien d’origine béninoise a continué de présenter la Météo.

Les cas de libertinage des journalistes sont légion. Faisons seulement mention des insultes graves et des accusations diffamatoires à l’encontre de la plus haute instance du pays.
Les artistes ne sont pas en reste. Le chanteur de Wassakara, lui, n’est pas passé par quatre chemins pour insulter tout le monde, y compris le président de la République. Il y a eu des ministres pour le défendre. Le ministre de la Culture, interrogé sur la question, n’a pas réagi. Il a même dit ne pas être intéressé par l’affaire. Il aurait pu condamner cette manière de faire, dire au moins quelque chose allant dans le sens du respect des institutions de la République. Parce qu’être artiste ne signifie pas être au-dessus des lois, de l’éthique et du savoir-vivre. Il n’y a pas longtemps, le chanteur de reggae Tiken Jah, arborant un teeshirt, celui-là même que portaient les assaillants, a fustigé la République et applaudi les rebelles sur le plateau de la Première Chaîne de la télévision ivoirienne. Cet homme dont on connaît l’amour pour la rébellion et qui en pleine crise, depuis le Mali ou le Burkina Faso, a systématiquement pris position pour la partition du pays n’a eu aucun regret, aucune compassion pour les milliers de morts, aucun mea-culpa. Il est revenu après avoir nourri la rébellion de ses thèmes guerriers, séparatistes et, fièrement, alors que tout le pays cherche la réconciliation, il remue le couteau dans la plaie, de manière si sordide que le moins patriote des patriotes s’en est trouvé vexé.

Pouvez-vous imaginer un journaliste ou un artiste américain faire les éloges de Ben Laden lors de la destruction des tours jumelles de New York sur le plateau d’une télévision américaine ?

Les politiciens sont, eux, les champions du libertinage ambiant. Les Anaky sont nombreux. Ils critiquent, s’insurgent contre l’orde établi, appellent à l’insurrection, applaudissent ceux qui ont attaqué la Côte d’Ivoire ou annoncent des cataclysmes. On se souvient du fameux “Je mélangerai ce pays” de Dramane Ouattara, un jour de mai 2002. La catastrophe est arrivée et l’homme est toujours-là, annonçant d’autres drames, sans que quelqu’un s’en émeuve. C’est ça la Côte d’Ivoire, un pays où le libertinage est érigé en règle de conduite.


par Franck Dally
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