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Économie Publié le mercredi 13 mai 2009 | Le Nouveau Navire

L’exemple du Transport maritime chinois (suite et fin) : Enjeux sur le développement des systèmes intérieurs

En termes de transport et de logistique, l'enjeu majeur consiste dorénavant à combiner deux structurations spatiales distinctes et complémentaires de la Chine continentale avec :

- d'une part les systèmes de transport hyper concentrés sur la façade littorale destinés à écouler à l'international les produits "Made in China" ;

- d'autre part, les corridors intérieurs et les pénétrantes de transport au sein du pays afin d'atteindre les populations rurales majoritaires mais aussi et surtout soutenir la délocalisation d'unités de production chinoises au-delà des franges littorales saturées, dans une logique d'intégration logistique efficiente vers les interfaces portuaires littorales.


Les perspectives fluviales

Outre les infrastructures terrestres (routes et voies ferrées) qui demeurent au coeur des problématiques d'aménagement du territoire chinois, l'accent est mis sur les pénétrantes fluviales, faisant la passerelle naturelle entre la Chine littorale et la Chine intérieure. 31 000 quais fluviaux quadrillent 123 000 km de voies navigables mais seulement 225 infrastructures peuvent accueillir des navires de plus de 10 000 tjb, essentiellement sur les bassins versants du Yangtze et de l'ensemble débouchant sur la Rivière des Perles. Avant le neuvième plan quinquennal de 1996 à 2000, les réseaux fluviaux restaient intensément utilisés dans des logiques circulatoires locales et micro-régionales avec des gabarits souvent inférieurs à 500 tjb et permettant l'utilisation de flottes polyfonctionnelles.

La fameuse "Golden Waterway" du Yangtze disposera d'un chenal navigable à 10,5 m permettant ainsi la "remontée" de navires de tout type de 50 000 tpl jusqu'aux infrastructures de Nanjing situées à 430 km de la mer de Chine. Les porte-conteneurs de troisième et quatrième générations devraient, dès la fin de 2009 remonter sans délestage préalable sur les ports côtiers.
Afin de considérer l'importance de ces investissements dans le contexte de la croissance chinoise, il est bon de rappeler que le trafic total sur l'ensemble du Yangtze a dépassé le milliard de tonnes métriques en 2007, en faisant ainsi le système fluvial le plus achalandé du monde.


Les grands chantiers ferroviaires

Sur le plan ferroviaire, le gouvernement central chinois a encore beaucoup à faire avec seulement 75 000 kilomètres de voies ferrées disséminées sur l'ensemble des 9,6 M de Km2. La plupart des infrastructures reste dévolue au transport des passagers sur des corridors très concentrés dans l'ouest du pays. Aussi, les réseaux actuels ne correspondent pas vraiment aux nouveaux besoins issus de la croissance économique et de la logistique côtière.

Les premières initiatives ferroviaires dédiées au fret conteneurisé ont pris leur essor dans le courant des années 2000 avec notamment le premier lien Pekin / Shanghai à deux niveaux de chargement sur des convois de 160 EVP de capacité. China Shipping Container Lines a promu également en 2007 des services intermodaux au-delà de la frange littorale des 300 kilomètres, en collaboration avec la China Railway Container Transportation Company.

Fin 2006, la création de la compagnie China Railway United International Co Ltd marque un tournant historique avec un joint-venture qui ouvre le capital aux investisseurs étrangers. L'Israélien ZIM, le Français CMA CGM et la compagnie ferroviaire allemande Deutsche Bahn AG disposent ainsi chacun de 8% de cette nouvelle entité en charge d'investir 1,6 Mds USD.
L'objectif consiste à moderniser, pour ne pas dire reconstruire, 18 gares ferroviaires afin d'assurer le triage et la circulation de flux massifiés. Avec cette première ouverture au capital et aux savoir-faire privés se manifeste l'ambition logistique des autorités chinoises.

Le mode ferroviaire devrait à court terme permettre d'assurer des dessertes modales plus équilibrées sur les plus importantes interfaces portuaires. Ce premier investissement marque aussi un tournant dans l'histoire ferroviaire du pays avec la mise en place progressive de nouveaux sillons dédiés au fret et particulièrement aux activités conteneurisées. La gare de triage intermodale de Chengdu devrait être le plus grand centre intérieur conteneurisé d'Asie avec l'achèvement des travaux de 286 M d'USD lancés en mai 2008.

Le développement de 25 000 kilomètres de voies ferroviaires supplémentaires dans un horizon décennal soutient deux impératifs complémentaires :

1- l'accélération des circulations de fret entre grands corridors massifiés fluvio-maritimes, établissant un quadrillage plus efficace agencé autour de gares de triage servant de collecteurs/distributeurs sous-régionaux. Il faut comprendre que les grandes façades portuaires du Nord (Tianjin, Yantai, Qingdao, Rizhao), du centre (toute la zone de Shanghai à Ningbo jusqu'à Wenzhou) et du sud (de Fuzhou à Yantian en remontant jusqu'à Guangzhou) ne sont pas reliées les unes aux autres par voies ferroviaires. L'enjeu passe dorénavant dans une concentration des flux combinant des logiques circulatoires nationales et internationales Nord/Sud et Est/Ouest.

2- une pénétration logistique efficace en dehors des axes naturels fluviaux afin de desservir les régions intérieures de la Chine continentale par voies ferrées. Le maillage ainsi en construction permettra un développement économique intérieur de plus en plus ramifié et basé sur la disponibilité et la performance de réseaux de transport structurants.


Vers des ponts terrestres eurasiatiques

Dans un horizon temporel qui reste à définir, la construction de pénétrantes ferroviaires sur le continent chinois permettrait à terme d'alimenter des flux Est- Ouest et Ouest-Est sur des futurs train-blocs à deux niveaux de chargement conçus sur le modèle des ponts terrestres nord-américains. Cette évolution a été mise au grand jour avec une première expérience très médiatisée et largement soutenue par la Deutsche Bahn. Début 2008, un convoi ferroviaire de 100 conteneurs a relié en moins de trois semaines Pékin au port de Hambourg grâce, notamment, à la collaboration des douanes de tous les pays traversés (Chine, Russie, Mongolie, Biélorussie, Pologne et enfin Allemagne).

Outre les problématiques organisationnelles et opérationnelles, cette première initiative ferroviaire symbolise déjà les potentialités d'un rééquilibrage de l'agencement géoéconomique et logistique chinois. Les premières simulations de trafics ont permis de confirmer l'implantation du service hebdomadaire Trans Eurasia Express de 120 EVP de capacité par DB Schenker dès février 2009. Plusieurs options de tracés eurasiatiques restent à l'étude qui permettrait de surcroît des consolidations transcontinentales de flux chinois, russes et européens, tant dans le sens Eastbound que Westbound. Le temps de transit visé reste de 17/18 jours au départ de Xiangtang à 12 000 kilomètres d'Hambourg, soit près de la moitié du temps de transit de la plupart des rotations maritimes actuellement proposées entre la Chine, le Nord et le Centre de l'Europe. Une étude du Meedat publiait fin 2008 un rapport du Nestear qui illustrait clairement la compétitivité potentielle d'un tel réseau transcontinental ferroviaire avec des coûts par conteneur oscillant entre 1 500 et 2 000 € la boîte selon des scénarii de trafics projetés à l'horizon 2030.


Les conséquences de la crise financière

En guise de conclusion, force est de constater que le rattrapage chinois en matière d'investissements de transport semble rapidement se combler. Les jointventures facilitent l'investissement privé international et dorénavant, l'eldorado chinois ne se cantonne plus à la frange littorale. Bien au contraire, les grands travaux et les futurs défis colossaux de la Chine en matière d'infrastructures logistiques se situent loin de la Mer de Chine et plus proche des marchés intérieurs aux potentiels largement sous-exploités ! Reste à savoir comment le coup de frein dans la production et la consommation mondiales va impacter le rythme des investissements et ralentir la transformation du paysage logistique continental chinois !

Ben Cissé M
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