La Côte d’Ivoire va-t-elle cesser d’être «la terre bénie de Dieu»? La question mérite d’être posée au regard des informations alarmistes voire apocalyptiques qu’on nous sert depuis un bon moment. C’est d’abord un «prophète», Zakpa Dadié Etienne, qui a annoncé les couleurs. Le samedi dernier, à Yopougon, au cours d’une conférence de presse, cet homme illuminé ou halluciné, et se croyant investi d’une mission messianique a livré, sans gants, les résultats de sa vision. Pour lui, le sort en est jeté ! «La Côte d’Ivoire sera à feu et à sang dans 6 jours (jeudi dernier) et que cela relevait de la volonté divine. Il est même allé jusqu’à donner les noms de ceux qui mettraient la Côte d’Ivoire dans un tel état de chaos et d’enfer manifeste. Le «prophète» Zakpa n’a pas cherché loin, les boucs émissaires. Il a indiqué comme responsables de la situation à venir, les opposants Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié. Son argumentaire est à donner le tournis. Ado et Bédié sont indexés, parce que le premier a tenu le 9 mai dernier un grand meeting à Yopougon, place Ficgayo et le second vient d’achever une tournée dans l’Est du Pays. Comme pour donner définitivement dans le comique, voici le supplément d’information du «visionnaire» : «Si vous remarquez bien, tous les jeunes qui étaient à la grande gare d’Abobo ont disparu. Où sont-ils partis?» Le prophète des Aurores ne répond pas à la question. Toujours est-il que les 6 jours prévus par Zakpa Etienne pour que la Côte d’Ivoire entre en Enfer, sont passés et rien n’est arrivé. Comme pour noyer son désaveu, l’homme est revenu plus tard, pour corriger ses révélations : «la guerre va finir par la guerre. Le mois de mai ne passera pas, que la guerre va reprendre». De la «prophétie» de Zakpa Etienne, nous sommes vite tombés dans la réalité. Par l’entremise du journal officiel de la refondation, les Ivoiriens ont appris que «l’armée est en alerte maximale», parce que des «assaillants» venus de l’Est, auraient pour objectif d’attaquer Abidjan, notre capitale et de renverser les Institutions. Ici encore, on parle d’un candidat à l’élection présidentielle qui serait le commanditaire d’une telle opération. Et d’ameuter les Ivoiriens qui n’attendent que la date du dimanche 29 novembre 2009 fixée comme celle du premier tour de la présidentielle. En tout état de cause, on s’étonne que le «prophète» qui véhicule une telle information, de grande gravité, qui accuse sans preuve et expose des personnalités connues et reconnues, n’ait pas encore été mis aux arrêts. On reste dubitatif devant le silence des autorités militaires. Pourquoi la politique du «deux poids deux mesures»? Il n’y a pas longtemps encore, Béhanzin avait fait des révélations sur des personnalités religieuses. On l’a mis aux fers, ainsi que Soumah Yadi. De même, dans le cadre du «coup d’Etat céleste», on avait également arrêté le pasteur qui avait accusé l’assureur Togba Bonaventure. Il en a été de même avec Oré Gnézé Jacques, conseiller spécial du Chef de l’Etat, qui croupit injustement à la Maca. Sur la question, Laurent Gbagbo lui-même avait mis en doute les accusations des responsables de l’Agence Nationale de Stratégies et d’Intelligence (ANSI). Devant de tels aveux, on se demande encore pourquoi Jacques Oré Gnézé reste encore en détention? Dans toutes les affaires citées plus haut, les prévenus ont été libérés, preuve sans doute, de la vacuité des accusations. Plus cocasse, Guéi Paul, arrêté dans le cadre du «coup d’Etat céleste», vient de mettre sur pied un club de soutien à la gloire de Laurent Gbagbo. Avec les prophéties du pire de Zakpa Dadié Etienne, il faut bien se demander à quoi servent les renseignements généraux ivoiriens. Ce sont eux qui sont habilités à annoncer des atteintes à la sûreté de l’Etat et qui doivent parer au plus pressé pour éviter toute déconvenue à notre pays. Si, ce sont les curieuses révélations du diseur de mauvaise fortune qui guident «l’alerte maximale» de notre armée, il faut craindre que cette annonce de déstabilisation de la Côte d’Ivoire ne soit le prétexte recherché pour accuser les principaux leaders de l’opposition, pour mettre à mal le processus de paix mené avec brio par le Premier ministre Guillaume Soro et pour mettre en péril la présidentielle du 29 novembre prochain.
Bakary Nimaga
Bakary Nimaga
