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Afrique Publié le samedi 22 août 2009 | Le Temps

Conakry : La nuit comme à la rue Princesse - Conakry, la capitale guinéenne est à l`image des autres capitales africaines. Malgré la crise et la pauvreté, elle vit.

Lorsque nous quittions l'aéroport d'Abidjan pour Conakry, la capitale guinéenne, ce jeudi 6 août 2009, il est 8 heures 22. Il aura fallu 1 heure 35 mn pour que le Boeing 737 de la compagnie Mauritus se pose sur le tarmac de l'aéroport international de Gbessia de Conakry. Les installations sont en pleine réhabilitation et rénovation par les nouvelles autorités guinéennes. Ce marché est confié à une entreprise chinoise. Après les formalités douanières, le groupe de journalistes ivoiriens invités à la couverture médiatique de la remise des oscars du Conseil international des managers africains (Cima) au capitaine Moussa Dadis Camara est conduit dans la salle d'honneur par le protocole d'Etat. Quelques minutes après, nous prenons place dans une demi-douzaine de véhicules de luxe de marque Xq 300, d'origine chinoise, avec des motards. Destination, l'hôtel la Riviera, situé dans les environs du palais du peuple de Conakry. Un vent frais et humide souffle sur les cinq communes que compose la capitale guinéenne. Nous déposons nos bagages, mais refusons de dormir dans cet hôtel. A cause du coût exorbitant de la chambre, 730000 Fng (la nuitée), soit 73000 Fcfa. Finalement, c'est à l'hôtel Le Central qui nous accueille. Cet hôtel d'une soixantaine de chambres est situé au cœur du quartier commerce, le centre des affaires de la capitale (le Plateau à Abidjan). Ici, le gérant, M. Kaba, après un entretien téléphonique avec son patron, un Libanais qui a fait ses premiers pas en Côte d'Ivoire nous laisse la chambre à 200000 Fng, soit 20000 Fcfa. Après une petite pause de quelques minutes, le petit groupe de journalistes décide de prendre le pool de la ville.

Honneurs et cortège diplomatique

Ce jour (6 août) marque la veille du 49e anniversaire de l'accession de la Côte d'Ivoire à la souveraineté nationale. Très rapidement, nous sommes accueillis par les responsables de l'Ambassade de la Côte d'Ivoire dans ce pays. Cette Ambassade est située dans la commune de Kaloum, en plein quartier commerce. Le terrain sur lequel est dressée fièrement la bâtisse, est une propriété de l'Etat ivoirien. Car, il a été acheté. C'est un imposant bâtiment construit au goût du premier Président du pays, feu-Félix Houphouët-Boigny. Sur l'imposante clôture de cette mission diplomatique, Sem Georges Gohoba a donné ordre aux agents de hisser le drapeau Orange, blanc et vert, le long de la clôture de l'ambassade. Non loin de là se trouve le Palais de la Présidence de la République, puis devant la Primature. Sur le grand portail est affichée la photo du capitaine Moussa Dadis Camara. Les grosses cylindrées s'adonnent aux rodéos dans les environs. Le palais est aussi en chantier comme l'aéroport de Conakry. Certainement pour que le nouvel homme fort du pays et ses amis du Cndd (Conseil national pour la démocratie et le développement) retrouvent ces locaux. Car, il faut le rappeler, après avoir "ramassé le pouvoir dans la rue", comme l'indique le Président Abdoulaye Wade, ceux-ci ont établi leur quartier général au camp militaire Alpha Yaya Diallo. Cette petite balade terminée, nous retournons à l'hôtel pour nous préparer à "attaquer" la nuit avec les noceurs de Conakry. 22 heures 30, M. Gondo, jeune imprimeur ivoirien, installé dans ce pays depuis 1999, qui fait partie des 2500 Ivoiriens vivant à Conakry décide de nous accompagner dans cette virée. Avec lui, trois autres frères. Des étudiants nous rejoignent quelques minutes plus tard. Cap est mis sur le Club Onu, un bar climatisé de la capitale. on y trouve des Libanais, Ghanéens, Nigériens, Camerounais, Sud-Africains et même des Asiatiques. Ne porte-t-il pas le nom de la prestigieuse organisation mondiale des Nations unies ? Il comporte deux compartiments. L’un au rez-de- chaussée et l'autre un peu au-dessus. Le Dj, un jeune Guinéen de l'ethnie peulh, lance les décibels des artistes du continent les plus en vogue du moment. Sans toutefois oublier la musique bien entendu de la Côte d'Ivoire. La piste de danse est pleine à craquer de monde. On y trouve les jeunes filles et jeunes garçons. Ils se trémoussent sans relâche. Sur les tables, des dizaines de bouteilles de vin et de bière de la brasserie guinéenne, attendent d'être ingurgitées par les noceurs. "Ici, il n'y a pas de différence des peuples. Nous constituons l'ensemble des continents", lance une jeune fille au visage splendide venue tout droit du pays peulh, l'une des régions de la Guinée. On dit de ces filles qu'elles sont les plus belles du pays de l'Almamy Samory Touré. Les Ivoiriens, connus pour leur sens de grands "Bluffeurs" sont vite reconnus par le Dj qui leur "envoie" des "attalaku", accompagnés des sonorités ivoiriennes, notamment la musique zouglou. Ces derniers n'ont pas le temps de se lever pour esquisser les pas de danse, qu'il y a coupure d'électricité.

Conakry, comme sur des chapeaux de roue…

Mais, le Dj descend et rassure les uns et les autres que cet incident sera vite réparé. Quelques deux minutes après, le courant est rétabli, à la grande joie des noceurs. Les uns et les autres se lèvent pour saluer ce geste. Tout le monde se trémousse. Les jeunes filles au rein de roseau se déhanchent sur la piste de danse devenue très exigüe. Chacun danse à son rythme. Mais, ils ne finiront pas leur démonstration musicale. L'électricité est interrompue à nouveau. Puis une troisième fois. Les esprits se chauffent. Les Guinéens qui connaissent leur système électrique calment les Ivoiriens. "Ce n'est pas de notre faute. Il n'y a pas de courant ici à Conakry depuis des décennies. C'est ça notre problème", lance Mohamed, un de nos voisins de table. Le propriétaire du bar et son Dj tentent de faire le nécessaire pour satisfaire les clients. Ils font recours à leur groupe électrogène. Cette fois-ci est la bonne. L'ambiance reprend son cours avec les hourras des clients. Sans oublier l'alcool qui coule à flots. Une heure du matin, nous prenons congé du propriétaire de ce bar et le monde. A quelques pas de là, nous atteignons la " Saison 3 ", un autre bar climatisé. Il y a un monde fou. Il n'y a pas de place assise pour les retardataires. La piste de danse est envahie par la foule. Dans ce bar, comme au " Club de l'Onu ", la joie se lit sur le visage des uns et des autres. " C'est comme cela tous les jours à Conakry. Les gens ne dorment pas ", fait remarquer Camara, un cadre de la santé, arrivé sur les lieux un peu plus de 23 heures en compagnie d'une jeune fille au teint noir d'ébène, rappelant la beauté naturelle africaine. Entre deux taffes de cigare, il indique que ce bar est l'un des endroits les plus prisés de la capitale. Les jeunes, selon lui, mais aussi des fonctionnaires et employés de certaines sociétés, la nuit tombée, quittent les différents quartiers pour venir s'amuser comme ils le peuvent. Conakry, dit-il, vit à " 100 à l'heure ". Ici, pas de militaires, malgré leur prise de pouvoir le 23 décembre dernier. "Ils ne sont pas présents comme certains le pensent. Ils sont dans les casernes et savent ce qu'ils doivent faire. Mais, il y a une sécurité qui est assurée dans tous les endroits chauds de la ville", fait t-il remarquer. Cette assurance reçue, nous nous lançons en plein cœur de la capitale à 3 heures du matin, à la recherche des sensations fortes de la nuit. Nous quittons ce lieu et nous embarquons à bord d'un taxi.

Cigarettes et alcool…

Direction, le Bar Balnéa, situé à quelques encablures des deux premiers. Ce bar ressemble étrangement à ceux installés à la rue princesse de Yopougon. La gérance est tenue par des ressortissants libanais installés dans ce pays depuis belle lurette. Sur la piste de danse, c'est le même constat. La musique bat son plein, l'alcool aussi. Les belles de nuit ne manquent pas aussi. "Depuis décembre 2008, on n'a pas de problème avec quelqu'un. On s'amuse comme on peut", lance Mlle Miriam, une Ivoirienne arrivée dans le Kankan, il y a de cela deux ans. Etudiante dans une grande école de la capitale, Miriam dit que les gens " vivent " 24 heures sur 24. Cinq heures du matin, le bar se vide, laissant un silence de cimetière dans ces endroits chauds. Nous faisons autant et rejoignons notre hôtel, laissant ainsi place, aux nombreux fonctionnaires et autres cadres de la capitale qui s'empressent de rejoindre leur lieu de travail. Ici, nous serons aussi confrontés au problème d'électricité. En moins de 30 minutes, le courant est interrompu huit (8) fois. Le propriétaire de l'hôtel fait alors tourner son groupe électrogène pour ne pas laisser un triste souvenir à ses clients. Nous en profitons pour nous reposer et attendre le coucher du soleil pour mettre le cap une seconde fois sur Conakry. Rendez-vous est pris cette fois-ci à 23 heures 30 au bar Mls, dans les environs du palais du peuple. Dans ce bar, la soirée est dédiée aux jeunes guinéens de la diaspora française. Habillées de pantalon Jean, ou des robes decoltées, coiffées de casquette, ces enfants du pays, venus à la source savourent ce grand retour. Ils sont sur la piste de danse. Ils se déhanchent comme ils peuvent au son de la kora des stars guinéennes les plus en vogue du moment. Ici, ils font le "travaillement", à la façon des "Parigots" d'Abidjan. Quelques minutes après, nous prenons congé des noctambules de cet endroit chaud pour être à la saison 3 et Club de l'Onu pour nous trémousser jusqu'au petit matin. Car, personne ne voulait rater cette soirée d'au revoir dans le pays du nouvel homme fort, le Capitaine Moussa Dadis Camara. Car, nous devrions embarquer à l'aérogare internationale de Gbessia de Conakry à 8 heures pour atterrir à Abidjan vers 13 heures, après une escale de 30 minutes à l'aéroport de Bamako.

Joseph Atoumgbré
attjoseph@yahoo.fr
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