Longtemps étiquetés sous le vocable de boys ou bonnes, les garçons, mais plus particulièrement les filles de ménage ont connu parfois des parcours jalonnés d’embûches. A la faveur d’une enquête menée dans quelques quartiers d’Abidjan, Nuit et Jour, vous propose de jeter un regard sur ce pan de la société qui mérite plus d’attention.
« Ma fille ne retournera plus jamais à Abidjan. Après 10 années passées chez sa tante, elle est retournée au village avec seulement trois complets de pagne de peu de valeur ». Les propos amers de dame N’Guessan Madeleine traduisent sa déception face à l’exploitation dont a été victime sa fille aînée. En effet, après le décès de son époux, et dans l’incapacité de s’occuper des 7 enfants issus de leur union, dame N’Guessan s’était vu obligée de laisser partir la plus âgée Lydie, avec la petite sœur de son époux. Mais des années après Lydie retourne au village, démunie comme si elle n’avait jamais travaillé à Abidjan. L’exemple de Lydie est celui de nombre de filles de ménage soumises à l’exploitation éhontée des prétendues tanties qui les ont convoyées à Abidjan.
Des naïves à la merci des loups
Contrairement aux garçons, les filles de ménage sont plus exposées à toute sorte d’exactions. Les patrons leur demandent souventefois à leurs employées d’exécuter des travaux pour lesquels elles n’ont pas été engagées. Et la plus part du temps pour des salaires de misère. Dans certains cas, les filles de ménage ne touchent pas directement leur salaire qui est obligatoirement soumis au droit de regard d’une intermédiaire, pour avoir négocié le contrat. Est-il besoin de rappeler que les filles de ménage sont convoyées depuis les villages soit par des parentes, soit par des amies ? Une fois arrivées à Abidjan, elles sont placées dans des foyers grâce aux soins de ceux qui les ont fait venir. Interrogée à ce sujet, mademoiselle Monique Kouma révèle : « je suis venue à Abidjan grâce à une amie qui était de passage à Sandégué. L’arrivée de cette amie avait aiguisé toute sorte d’appétit au sein des filles de la localité. Elle avait acquis des biens et habillait à la mode ». Ainsi, naïvement Monique a accepté que son titre de transport soit payé par cette amie jusqu’à Abidjan. Une fois à destination, l’amie met Monique devant le fait qui n’est autre que le métier de bonne, qu’elle exerçait depuis, et qui lui a permis de s’offrir tous les vêtements que les filles de Sandégué lui enviaient. Que faire donc pour rembourser le titre de transport payé par son amie ? Concée, Monique accepte la proposition de son amie de lui trouver un emploi de servante. Malheureusement pour l’aventurière, elle atterrit dans un foyer où elle connaîtra la grande désillusion. Dans ce foyer en effet, Monique sera la bonne à tout faire, à la fois pour la maîtresse de maison qui lui demandait plus qu’elle ne pouvait, mais aussi pour le maître de maison qui l’utilisait pour rendre ses nuits agréables en l’absence de son épouse. Et pendant ce temps, son salaire de misère était récupéré par son amie en guise de remboursement du titre de transport majoré d’intérêts interminables. Exaspérée, Monique rend le tablier pour se confier à une agence de placement de filles de ménage.
Quelle garantie offre les maisons de placement ?
Depuis un temps, des agences de placement de servantes ont vu le jour. A Cocody, II Plateaux, Angré et bien d’autres quartiers d’Abidjan, ces cabinets informels jouent le pont de ralliement entre les filles enquête de travail et les foyers qui en manifestent bien entendu le besoin. C’est donc à ces cabinets qu’il revient de négocier les salaires qui varient selon la tête du client. Mais là encore les filles de ménage ne sont pas toujours satisfaites. Des plaintes s’élèvent chez les servantes pour dénoncer certains comportements inacceptables. Ces filles se plaignent de ce qu’il n’existe pas dans la plupart des cas, des contrats écrits entre elles et leur employeur. Par ailleurs dans nombre des cas, les agences de placement ne leur inspirent pas confiance. Elles les soupçonnent en effet, de ne pas leur verser la totalité de leur salaire. A ce sujet, le récit d’Eulodie est plus qu’éloquent. « Avant d’être engagée au service d’un couple à Cocody Danga, l’agence m’a fait savoir qu’elle avait négocié le marché à 30.000 F CFA dont 5.000 pour sa commission. Mais lorsque la familiarité s’est établie entre mes patrons et moi, ceux-ci, au cours d’une causerie, ont révélé qu’ils versaient la somme de 50.000 francs au cabinet en question pour mon salaire mensuel ». Cette révélation met au grand jour la question de ces filles qui vivent des conditions difficiles. A qui donc se confier si aucune structure crédible ne peut s’occuper d’elles.
La responsabilité de l’Etat interpellée
Au-delà du fait que les servantes exercent leur métier dans un cadre typiquement informel, force est de reconnaître qu’elles ont réellement besoin d’un vecteur qui puisse les canaliser. Mieux, les organiser et rendre leur secteur plus rentable. D’autant plus que plusieurs d’entre elles ont pu, grâce à cette activité, épargner d’importantes sommes d’argent qui leur ont permis d’entreprendre un commerce, somme toute, florissant aujourd’hui. C’est dire que, si le secteur est bien organisé, il peut être générateur de devises et permettre à plusieurs filles de sortir de la pauvreté qui gagne du terrain, surtout au sein de la gente féminine. C’est donc le lieu d’interpeller les autorités étatiques, avec au premier plan le ministère des affaires sociales et de la promotion de la femme qui a le devoir de sortir les femmes de la pauvreté endémique qui les guette au quotidien.
Idrissa Konaté
« Ma fille ne retournera plus jamais à Abidjan. Après 10 années passées chez sa tante, elle est retournée au village avec seulement trois complets de pagne de peu de valeur ». Les propos amers de dame N’Guessan Madeleine traduisent sa déception face à l’exploitation dont a été victime sa fille aînée. En effet, après le décès de son époux, et dans l’incapacité de s’occuper des 7 enfants issus de leur union, dame N’Guessan s’était vu obligée de laisser partir la plus âgée Lydie, avec la petite sœur de son époux. Mais des années après Lydie retourne au village, démunie comme si elle n’avait jamais travaillé à Abidjan. L’exemple de Lydie est celui de nombre de filles de ménage soumises à l’exploitation éhontée des prétendues tanties qui les ont convoyées à Abidjan.
Des naïves à la merci des loups
Contrairement aux garçons, les filles de ménage sont plus exposées à toute sorte d’exactions. Les patrons leur demandent souventefois à leurs employées d’exécuter des travaux pour lesquels elles n’ont pas été engagées. Et la plus part du temps pour des salaires de misère. Dans certains cas, les filles de ménage ne touchent pas directement leur salaire qui est obligatoirement soumis au droit de regard d’une intermédiaire, pour avoir négocié le contrat. Est-il besoin de rappeler que les filles de ménage sont convoyées depuis les villages soit par des parentes, soit par des amies ? Une fois arrivées à Abidjan, elles sont placées dans des foyers grâce aux soins de ceux qui les ont fait venir. Interrogée à ce sujet, mademoiselle Monique Kouma révèle : « je suis venue à Abidjan grâce à une amie qui était de passage à Sandégué. L’arrivée de cette amie avait aiguisé toute sorte d’appétit au sein des filles de la localité. Elle avait acquis des biens et habillait à la mode ». Ainsi, naïvement Monique a accepté que son titre de transport soit payé par cette amie jusqu’à Abidjan. Une fois à destination, l’amie met Monique devant le fait qui n’est autre que le métier de bonne, qu’elle exerçait depuis, et qui lui a permis de s’offrir tous les vêtements que les filles de Sandégué lui enviaient. Que faire donc pour rembourser le titre de transport payé par son amie ? Concée, Monique accepte la proposition de son amie de lui trouver un emploi de servante. Malheureusement pour l’aventurière, elle atterrit dans un foyer où elle connaîtra la grande désillusion. Dans ce foyer en effet, Monique sera la bonne à tout faire, à la fois pour la maîtresse de maison qui lui demandait plus qu’elle ne pouvait, mais aussi pour le maître de maison qui l’utilisait pour rendre ses nuits agréables en l’absence de son épouse. Et pendant ce temps, son salaire de misère était récupéré par son amie en guise de remboursement du titre de transport majoré d’intérêts interminables. Exaspérée, Monique rend le tablier pour se confier à une agence de placement de filles de ménage.
Quelle garantie offre les maisons de placement ?
Depuis un temps, des agences de placement de servantes ont vu le jour. A Cocody, II Plateaux, Angré et bien d’autres quartiers d’Abidjan, ces cabinets informels jouent le pont de ralliement entre les filles enquête de travail et les foyers qui en manifestent bien entendu le besoin. C’est donc à ces cabinets qu’il revient de négocier les salaires qui varient selon la tête du client. Mais là encore les filles de ménage ne sont pas toujours satisfaites. Des plaintes s’élèvent chez les servantes pour dénoncer certains comportements inacceptables. Ces filles se plaignent de ce qu’il n’existe pas dans la plupart des cas, des contrats écrits entre elles et leur employeur. Par ailleurs dans nombre des cas, les agences de placement ne leur inspirent pas confiance. Elles les soupçonnent en effet, de ne pas leur verser la totalité de leur salaire. A ce sujet, le récit d’Eulodie est plus qu’éloquent. « Avant d’être engagée au service d’un couple à Cocody Danga, l’agence m’a fait savoir qu’elle avait négocié le marché à 30.000 F CFA dont 5.000 pour sa commission. Mais lorsque la familiarité s’est établie entre mes patrons et moi, ceux-ci, au cours d’une causerie, ont révélé qu’ils versaient la somme de 50.000 francs au cabinet en question pour mon salaire mensuel ». Cette révélation met au grand jour la question de ces filles qui vivent des conditions difficiles. A qui donc se confier si aucune structure crédible ne peut s’occuper d’elles.
La responsabilité de l’Etat interpellée
Au-delà du fait que les servantes exercent leur métier dans un cadre typiquement informel, force est de reconnaître qu’elles ont réellement besoin d’un vecteur qui puisse les canaliser. Mieux, les organiser et rendre leur secteur plus rentable. D’autant plus que plusieurs d’entre elles ont pu, grâce à cette activité, épargner d’importantes sommes d’argent qui leur ont permis d’entreprendre un commerce, somme toute, florissant aujourd’hui. C’est dire que, si le secteur est bien organisé, il peut être générateur de devises et permettre à plusieurs filles de sortir de la pauvreté qui gagne du terrain, surtout au sein de la gente féminine. C’est donc le lieu d’interpeller les autorités étatiques, avec au premier plan le ministère des affaires sociales et de la promotion de la femme qui a le devoir de sortir les femmes de la pauvreté endémique qui les guette au quotidien.
Idrissa Konaté