Depuis deux semaines, des soldats des Forces nouvelles sont en manœuvre à Bouaké. Les activités sportives et militaires, stoppées avec le début de la démobilisation, ont repris de plus belle. Ce 24 octobre, le temps est mauvais. La pluie commencée la veille continue de tomber. Encourageant à garder le lit. Mais, ce n’est pas le cas pour tout le monde. Au niveau du carrefour du boulevard «Reine Pokou » et la voie menant au « Camp commando », une vingtaine de soldats en colonne, est dirigée par un instructeur. On apprendra plus tard qu’il est issu de la compagnie « Guépard des bérets verts » du commandant Chérif Ousmane. Ce dernier ordonne aux éléments dont il a le commandement de se jeter à tour de rôle dans la flaque d’eau. Sans dire mot, les soldats pataugent dans l’eau boueuse qui stagne sur la piste. Le formateur les soumet à une série d’exercices qu’un civil peu habitué trouverait inhumains et dégradants. L’instructeur lui même n’échappe pas à la souffrance. Car il passe à l’action pour montrer à ses hommes ce qu’il attend d’eux. « Ils sont en train de les diéser (Ndlr : malmener). C’est la dernière formation que le com’zone a décidé de faire dans le cadre de la réorganisation de l’armée des Forces nouvelles au niveau de la zone 3 », nous explique de manière laconique un élément des «Bérets verts». Depuis un certain temps, les nombreux footings de militaires qui, par centaines, arpentent les artères de la ville commençaient à inquiéter les populations. La rumeur enfle et prend des proportions inquiétantes. « Il paraît que la guerre va reprendre ces jours-ci. Laurent Gbagbo refuse de signer les décrets relatifs aux grades des Forces nouvelles. Et puis cette histoire de cartes d’identité et d’électeurs, on dit qu’ils ont exclu beaucoup de personnes. Les Forces nouvelles ne sont donc pas contentes. Raisons pour lesquelles ses hommes s’entraînent pour reprendre les hostilités» raconte-t-on dans les rues, « grins » et autres points de rencontres de la ville. «Faux» réagit un proche du commandant de zone. «Il ne s’agit nullement de reprendre la guerre. Retenez que les formations auxquelles vous assistez dans les camps en ce moment s’inscrivent dans le cadre de la réorganisation de nos troupes. Il ne s’agit de rien d’autres que d’organiser les troupes pour aller à la paix. Certains de nos éléments étaient à un moment donné avec la démobilisation un peu livrés à eux-mêmes. Ce qui faisait qu’en cas de faute en ville on ne savait pas à qui s’adresser. L’Etat major a donc décidé de réorganiser en 4 bataillons la zone 3 que dirige le commandant Chérif Ousmane». A titre de rappel, dans l’armée, un bataillon comprend environ six cents soldats. Ce chiffre peut monter jusqu’à mille. De l’entretien avec cet officier des FaFn, il ressort qu’outre le bataillon des célèbres et respectés «Bérets verts», l’on verra en plus des «Bérets bleus», des «Bérets noirs» et des «Bérets rouges». Les Bérets rouges assumeront les missions traditionnelles dévolues à cette unité en Afrique. Il s’agit des « commando-parachutistes » aguerris aux combats. Ils évolueront aux côtés de leurs frères d’armes des Bérets verts pour la sécurisation des routes contre les coupeurs de routes. Les Bérets bleus pour leur part, sont des fantassins, c’est-à-dire qu’ils forment l’infanterie militaire. Au contraire, les Bérets noirs sont plus techniques. Ils sont spécialisés dans le Génie militaire. On les retrouvera au sein des unités du bataillon d’artillerie sol-sol (Bass), des unités du bataillon d’artillerie sol-air (Basa). Ils sont donc soit des mécaniciens, des menuisiers, des électriciens ou des maçons. Cette réorganisation permettra, dans le cadre de la mise sur pied de la nouvelle armée, d’orienter les soldats plus aisément. Il s’agit également « de mieux surveiller les éléments ». Avec les bérets et les treillis qui seront distincts d’un bataillon à un autre, l’on saura désormais qui fait quoi. «En les occupant par des formations, il sera difficile pour un élément d’aller commettre des gaffes en ville. Et s’il le fait, on saura dans quelle unité le rechercher» indique notre source. Les Bérets bleus et verts séjournent au « Camp Génie ». Quant aux autres, ils sont basés au 3ème bataillon.
Allah Kouamé à Bouaké
Allah Kouamé à Bouaké