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Politique Publié le vendredi 30 octobre 2009 | Nord-Sud

Affichage de deux listes électorales provisoires : L’Etat assume la catégorisation des citoyens

Pour les élections à venir, l’Etat et ses démembrements ont décidé que l’on afficherait deux listes électorales provisoires. Cette décision consacre l’inégalité des citoyens devant la Loi.

Une constante est en train de se dégager, par rapport à l’affichage de la liste électorale provisoire. Il semble désormais acquis que l’on procèdera à l’affichage de deux listes d’électeurs. Simone Ehivet-Gbagbo, la Première dame, spécialiste des scoops électoraux, l’a confirmé, le 22 octobre à Abobo, devant les membres de son fan club : « Les structures techniques, Ins et Sagem sécurité, qui ont fait l’enrôlement des populations et des électeurs sont en train de faire le tirage des listes provisoires. Mais, ils auront à afficher deux types de liste : la liste de ceux qui sont Ivoiriens et la liste de ceux qui sont certes Ivoiriens mais qui ont des problèmes sur leur identité. Sur le fichier qui vous concerne, restez vigilants et assurez-vous que vos noms, vos lieux et dates de naissance, que les noms, les lieux et dates de naissance de vos parents sont conformes avec les papiers qui ont servi pour votre enrôlement dans les centres d’enrôlement. Vérifiez aussi si des personnes que vous savez qui ne sont pas Ivoiriens ne figurent pas sur la liste des Ivoiriens». Deux listes, donc. L’une, à fond blanc, censée renfermer les noms des vrais électeurs, c’est-à-dire les Ivoiriens vrai-vrai. Et l’autre, à fond noir, hébergera les noms des Ivoiriens façon-façon. Avec une certaine élégance langagière, on parle de liste provisoire validée et de liste provisoire flottante. Bien sûr, une liste flottante sur une mer d’interrogations. En effet, cette décision, si elle venait à être appliquée, foulerait aux pieds un certain nombre de principes constitutionnels, dont celui, sacro-saint, de l’égalité des citoyens devant la Loi. Sur quelle base, va-t-on séparer les électeurs entre les bons et les mauvais ? N’oublions pas qu’à l’unanimité, l’ensemble de la classe politique a décidé de retenir comme élément justifiant la citoyenneté ivoirienne du requérant, son extrait d’acte de naissance ou le document qui lui a été remis lors des audiences foraines. Ceci, parce qu’il s’est avéré impossible de le faire sur la base du certificat de nationalité. Les tribunaux n’étaient pas repartis sur l’ensemble du territoire. Les coûts de déplacements seraient insupportables pour une population vivant déjà à la limité de la dignité. Et le Fpi avait refusé que l’on institue un mode opératoire d’identification, où les juges délivreraient sur place, au vu d’un certain nombre de documents, le certificat de nationalité à ceux qui viendraient se faire enrôler. Banny qui a tenté de faire passer ce mode opératoire a été emporté par la vague bleue. Tous ont opté pour l’extrait d’acte de naissance comme élément de validation. Mieux, pour se rassurer, le Fpi a exigé et obtenu que tous ceux qui viendraient se faire enrôler, viennent avec une copie de leur extrait d’acte de naissance. Ainsi, les frontistes pourraient aller vérifier leur authenticité dans les registres d’état civil. Si l’on décide d’établir une liste d’électeurs séparés des autres par la présomption, il s’ensuit une grave discrimination des citoyens. Les uns seraient Ivoiriens, rien que sur la base de leur extrait d’acte de naissance. Les autres ne deviendront Ivoiriens qu’en produisant une autre catégorie de documents, le certificat de nationalité ivoirienne, en l’occurrence. Ainsi, l’on revient à la case départ. Le certificat de nationalité qui avait été mis de côté par l’accord de Ouaga refait à nouveau son apparition. Cela consacre l’inégalité des citoyens devant la Loi. Cela jure avec la Constitution.
Ensuite, il y a dans cette option, une forme de déni de justice qui s’exerce contre le citoyen suspecté d’être un non-ivoirien. En effet, c’est à lui qu’il revient de prouver qu’il est Ivoirien et qu’il n’est pas un fraudeur. Or tout le monde le sait, en Droit, la charge de la preuve revient à l’accusation. En d’autres termes, si vous dites que quelqu’un a volé, il faudra dire ce qu’il a volé, quand il l’a volé et comment il l’a volé. Quand l’Etat de Côte d’Ivoire dit que quelqu’un est suspecté de n’être pas Ivoirien et lui demande d’aller apporter la preuve de sa citoyenneté, c’est une violation de la loi, notamment la Loi fondamentale. En effet, l’Etat a déclaré qu’à l’issue de l’enrôlement, 49.000 personnes sont étrangères. Il l’a dit avec des preuves en sa possession. Sur quelle base donc s’est-il appuyé pour retirer certains Ivoiriens de la liste des élus pour les mettre sur celle des bannis ? Certaines personnes n’ont pas été retrouvées sur le fichier des étrangers, mais on ne les a pas, pour autant, intégrés à la liste des Ivoiriens. Pourquoi ? Parce qu’on ne les a pas retrouvés sur les fichiers fusion ? C’est le gouvernement de Côte d’Ivoire qui a décidé, seul, quels seraient les fichiers historiques utilisés. Le gouvernement reconnaît aussi que ces fichiers-là ne sont pas exhaustifs. Si on utilise des fichiers non exhaustifs pour tracer un individu et qu’on ne le trouve pas, est-ce sa faute ?

Mieux, après recherches complémentaires, il a été prouvé que près de 900.000 Ivoiriens vrai-vrai ont été retrouvés sur la liste de ceux qui étaient supposés être des Ivoiriens façon-façon. Donc, le gouvernement et ses opérateurs techniques ont montré qu’ils sont faillibles. Pourquoi, au nom de la Constitution, ne pas faire une liste électorale provisoire unique, avec photo et données biométriques, de tous les électeurs potentiels ? La phase de contentieux qui s’ouvrira permettra ainsi à tous les citoyens d’exercer leur droit de vigilance en dénonçant, avec preuves, les fraudeurs. L’on éviterait ainsi cette autre forme de catégorisation des individus, de séparation des classes à la veille de cette élection plus que sensible.


Touré Moussa
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